Nanar à 65 millions d’euros, Astérix & Obélix : L’Empire du Milieu est un pur naufrage artistique qui ne fera rire personne, ou comment enterrer une franchise en 110 minutes.
Synopsis : Nous sommes en 50 avant J.C. L’Impératrice de Chine est emprisonnée suite à un coup d’état fomenté par Deng Tsin Quin, un prince félon. Aidée par Graindemaïs, le marchand phénicien, et par sa fidèle guerrière Tat Han, la princesse Fu Yi, fille unique de l’impératrice, s’enfuit en Gaule pour demander de l’aide aux deux valeureux guerriers Astérix et Obélix, dotés d’une force surhumaine grâce à leur potion magique. Nos deux inséparables Gaulois acceptent bien sûr de venir en aide à la Princesse pour sauver sa mère et libérer son pays.
Comme une erreur d’aiguillage…
Critique : Après deux films jugés à juste titre médiocres par les fans du petit gaulois Astérix, à savoir Astérix aux Jeux olympiques (2008) et Astérix et Obélix : Au service de Sa Majesté (2012), la famille de René Goscinny décide de rebooter une nouvelle fois la franchise très lucrative en laissant de nouveaux artistes aux commandes. Soutenu par la maison Pathé, c’est l’acteur-réalisateur Guillaume Canet qui se porte volontaire pour transposer à l’écran des aventures inédites du gaulois. Celui-ci convoque son pote Gilles Lellouche pour incarner Obélix à l’écran, succédant ainsi au monstre sacré Gérard Depardieu, pourtant indissociable du personnage dans l’imaginaire collectif.
Si le projet est initié vers 2019, celui-ci est bousculé dans son planning par la crise sanitaire de la Covid-19. Ainsi, le tournage prévu initialement en Chine est annulé pour se concentrer sur la France et Guillaume Canet voit le projet sans cesse repoussé. Cela lui a permis d’écrire et réaliser entre-temps un autre projet, tout aussi raté par ailleurs, puisqu’il s’agit de Lui (2021). Finalement, Astérix & Obélix : L’Empire du Milieu (2023) peut enfin être mis en boite en 17 semaines durant l’année 2021. Le tout coûte la somme rondelette de 60 à 65 millions d’euros en fonction des sources. Avec de tels enjeux économiques à la clé, la société de distribution Pathé préfère attendre patiemment le retour des spectateurs dans les salles afin de sortir le long-métrage en février 2023 avec une publicité monstrueuse.
Un gros budget pour un script minimal
Pour mémoire, en septembre 2022, le magazine professionnel Le Film Français a publié une Une qui a fait réagir car les personnalités mises en avant sur la couverture n’étaient que des hommes blancs, dont une partie de l’équipe de cet Astérix & Obélix : L’Empire du Milieu. Il faut dire que le cinéma français a connu une très mauvaise passe au dernier semestre 2022 avec des résultats au box-office particulièrement inquiétants. Lorsque le film familial sort donc en février 2023, beaucoup veulent en faire un test pour savoir si le public français est encore capable de se mobiliser pour profiter d’un grand spectacle populaire. Au vu des résultats, on peut apparemment répondre par l’affirmative.
Mais il aurait fallu pour cela livrer un film à la hauteur, ce que n’est clairement pas Astérix & Obélix : L’Empire du Milieu, gros nanar de près de 65 millions d’euros. Dès les premières scènes, rien ne fonctionne dans ce cinquième opus qui ne nous arrachera aucun sourire durant l’intégralité d’une projection proche du calvaire. Malgré un temps de production incroyablement long à cause de la Covid, les auteurs (que l’on préfère ne pas nommer) n’ont visiblement pas pris le temps de retravailler les dialogues, déplorables, ou d’embaucher des gagmen comme savent si bien le faire parfois les Américains.
Des acteurs tous plus déplorables les uns que les autres
En visionnant cet épisode, on se demande si quelqu’un a prévenu Guillaume Canet et Gilles Lellouche quant au fait qu’ils ne sont absolument pas crédibles en Astérix et Obélix et que leur amitié en dehors des plateaux ne suffit pas à faire de leur duo un sommet de connivence. Canet ne semble guère y croire et livre une des pires prestations de sa carrière, tandis que Gilles Lellouche n’a tout simplement pas le physique du rôle. Pourtant, ils sont loin d’être les pires dans ce brouet infame.
Ainsi, on taira les prestations embarrassantes de Jérôme Commandeur – toujours pas drôle – de Philippe Katerine, de Pierre Richard ou encore de José Garcia. Et que dire du duo féminin central (Julie Chen et Leanna Chea, en recherche de charisme) qui n’est jamais mis en valeur. De cet ensemble fort médiocre, on sauvera tout juste du naufrage Jonathan Cohen, Ramzy Bedia, Vincent Cassel et Manu Payet qui font leur job, sans briller pour autant.
Réalisé à coups d’effets spéciaux numériques d’une laideur à faire peur, Astérix & Obélix : L’Empire du Milieu est donc une coûteuse mauvaise blague qui ne fera rire personne et qui enterre de lui-même la franchise. Le long-métrage n’est pas loin d’égaler le troisième volet qui était déjà un sacré nanar. En fait, les différents intervenants confondent ici spectacle populaire et bouillie populiste. Ainsi, les notations féministes ou encore écologistes viennent simplement caresser le public dans le sens du poil, tandis que les présences de Bigflo et Oli, ainsi que de MacFly et Carlito ou encore Angèle ne se justifient que pour attirer les gamins. La démarche n’est pas nouvelle, mais elle irrite d’autant plus lorsque le scénario échoue à justifier leur présence à l’écran.
Astérix & Obélix : L’Empire du Milieu a réussi sa sortie
Sorti avec une promotion dantesque relayée par la presse et la télévision, Astérix & Obélix : L’Empire du Milieu a démarré à Paris 14h de manière correcte, même s’il s’agissait de la pire entame pour un épisode de la franchise gauloise. Avec 3 204 entrées sur la séance de 14h, le film réalise en tout cas un début de carrière satisfaisant au vu du contexte compliqué post-Covid. Pour sa première journée française, le nanar bat même des records de fréquentation en étant exposé dans 772 salles et en cumulant 466 703 entrées (en comptant les nombreuses avant-premières), soit le meilleur démarrage pour un film français depuis 2008. Au bout de cinq jours d’exploitation, le 5ème opus génère même 1 637 948 tickets.
Pour sa deuxième semaine d’exploitation, le bousin doit affronter la concurrence d’Alibi .com 2 (Philippe Lacheau) qui, lui, est vraiment hilarant. Le grand public, alerté par les critiques négatives et les avis de spectateurs sur internet se détournent du gaulois à la gueule de bois et partent rire en compagnie de la bande à Fifi. Le blockbuster perd donc 53 % de ses entrées en deuxième semaine, mais dépasse toutefois les 2,6 millions de tickets déchirés. Si les vacances scolaires de février lui ont permis de se maintenir, le bouche à oreille assassin est venu rapidement à bout du film qui a terminé sa carrière française à 4 598 637 entrées, ce qui en fait une déception par rapport à son budget.
Un bouche à oreille désastreux a enterré les espoirs placés dans cet épisode
A l’étranger, le film a certes dépassé le score déplorable du précédent volet, mais ses 2,6 millions d’entrées supplémentaires dans le reste de l’Europe demeurent insuffisants pour rembourser son budget stratosphérique. C’est en Pologne où cette mésaventure marchera le mieux (3 852 000$), puis l’Allemagne (1 807 000). L’échec italien est cruel, avec des recettes sous la barre du million (990 000$). L’Espagne est aussi à distance (727 000$).
Depuis, les droits de diffusion ont été vendus à Netflix pour la plupart des pays mondiaux. Le montant de la transaction n’est pas connu, mais on imagine que cela a permis de limiter la casse.
Dans tous les cas, si l’on évacue les enjeux économiques, Astérix & Obélix : L’Empire du Milieu reste ce qu’il est, à savoir un pur naufrage artistique.
Critique de Virgile Dumez
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Guillaume Canet, Marion Cotillard, Gilles Lellouche, José Garcia, Tatiana Gousseff, Manu Payet, Vincent Cassel, Ramzy Bedia, Philippe Katerine, Thomas Vandenberghe, Issa Doumbia, Gérard Darmon, Audrey Lamy, Pierre Richard, Jérôme Commandeur, Vincent Desagnat, Jonathan Cohen, Franck Gastambide, Angèle, Tien Shue, Linh-Dan Pham, Marc Fraize, Yann Papin