L’Exorciste Dévotion : la critique du film (2023)

Epouvante, Horreur | 1h51min
Note de la rédaction :
2/10
2
Affiche de L'Exorciste Dévotion (2023)

  • Réalisateur : David Gordon Green
  • Acteurs : Linda Blair, Ann Dowd, Ellen Burstyn, Norbert Leo Butz, Leslie Odom Jr., Jennifer Nettles, Lidya Jewett
  • Date de sortie: 11 Oct 2023
  • Année de production : 2023
  • Nationalité : Américan
  • Titre original : The Exorcist: Believer
  • Titres alternatifs : Der Exorzist - Bekenntnis (allemand), El exorcista: Creyentes (Amérique latine), L'esorcista - Il credente (Italie), El exorcista: Creyente (Espagne), Exorcistul: Cel Care Crede (Roumanie), O Exorcista: O Devoto (Brésil)
  • Autres acteurs : Olivia O'Neill, Raphael Sbarge, Okwui Okpokwasili, E. J. Bonilla,Tracey Graves
  • Scénaristes : Peter Sattler, David Gordon Green (& histoire), Danny McBride (histoire), Scott Teems (histoire)
  • D'après des personnages crées par : William Peter Blatty
  • Monteur : Timothy Alverson
  • Directeur de la photographie : Michael Simmonds
  • Compositeur : Amman Abbasi, David Wingo
  • Chef Maquilleur :
  • Chef décorateur :
  • Directeur artistique :
  • Producteurs : Jason Blum, David Robinson, James G. Robinson, en coproduction avec Jennifer Scudder Trent
  • Producteurs exécutifs : Stephanie Allain, David Gordon Green, Couper Samuelson, Ryan Turek, Christopher H. Warner, Atilla Salih Yücer
  • Sociétés de production : Universal Pictures, Blumhouse Productions, Morgan Creek Entertainment, en association avec Rough House Pictures
  • Distributeur : Universal Pictures
  • Editeur vidéo : Universal Vidéo
  • Date de sortie vidéo :
  • Budget : 30 000 000$
  • Box-office France / Paris-Périphérie :
  • Box-office nord-américain / monde : 45 836 850 $ en 11 jours / 86 133 850 $ en 11 jours
  • Classification : Interdit aux moins de 12 ans : "compte tenu des scènes gores et de transes mettant en scène deux très jeunes filles, est susceptible d’impressionner un jeune public." (CNC) / R (Etats-Unis)
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleur (DCP) / Dolby Digital, Dolby Atmos, DTS: X
  • Festivals : -
  • Nominations : -
  • Récompenses : -
  • Illustrateur/Création graphique : © LA. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © 2023 Universal Studios. All Rights Reserved
  • Attachés de presse : Etienne Lerbret, Stéphane Ribola (Agence Cynapse)
  • Franchise : 5e segment de la franchise L'Exorciste (1973)
  • Tagline : Le prochain visage du Mal pourrait être le vôtre / Body and the Blood (USA)
Note des spectateurs :

L’Exorciste Dévotion est le 5e épisode de la franchise L’Exorciste, phénomène de société né en 1973. Le fiasco opportuniste à l’immaturité crasse est une insulte à la saveur maléfique du film de William Friedkin qui, lui, n’était pas pour les enfants.

Synopsis : Victor Fielding, a perdu sa femme encore enceinte lors d’un tremblement de terre en Haiti 12 ans plus tôt. Depuis, il élève seul leur fille Angela qui a vu le jour malgré cette terrible catastrophe. Mais quand Angela et son amie Katherine, disparaissent dans les bois, pour n’en revenir que trois jours plus tard totalement amnésiques, une série d’évènements plus atroces les uns que les autres va confronter Victor à la quintessence du mal. Totalement désemparé il va essayer de retrouver la seule personne encore en vie qui ait assisté à ce genre d’atrocités : Chris MacNeil.

L’Exorciste : l’un des dix plus gros succès de tous les temps

Critique : Véritable œuvre fondatrice, L’Exorciste, d’après le roman de William Peter Blatty, a littéralement révolutionné le cinéma d’épouvante dans les années 70. Si l’on ajuste les recettes de 1973 au cours du dollar en 2023, le film fait partie des 10 plus gros succès de l’histoire américaine derrière Autant en emporte le vent, La guerre des Etoiles, La mélodie du bonheur, E.T., Titanic, Les dix commandements, Les Dents de la mer et Docteur Jivago.

L'Exorciste, affiche

© Warner Bros, Inc.

Aux USA, cette production méphistophélique a engendré plus d’un milliard de recettes localement, loin devant n’importe quelle production super héroïque contemporaine.

William Friedkin, cinéaste de son temps, qui réalisait des films pour une audience adulte, ne transigeait pas avec ses intentions, tout en posant les codes d’un genre qui allait devenir suites, ersatz et arnaques pendant des décennies.

L’Exorciste II : une hérésie

L’affiche historique de L’Exorciste posait déjà les jalons de l’angoisse, le mystère, la terreur et invitait le spectateur à se placer face à une incarnation du Mal par l’imagination ; elle suscitait une trouille primale.

Après l’Exorciste II  – l’hérétique (1978), suite de John Boorman, estimée comme calamiteuse par le studio et le public, car totalement ahurissante dans ses intentions de film d’auteur déconnecté des contingences commerciales, Warner tournera la page. Morgan Creek Productions et Twentieth Century Fox prolongeront la franchise en 1990 avec L’Exorciste – la suite, réalisé par l’auteur même du best-seller initial, William Peter Blatty. L’époque n’est plus au cinéma de possession, totalement passé de mode, et le résultat n’attire plus les adultes. Quant aux jeunes, ils estimeront les personnages trop âgés pour avoir la moindre attirance pour cette tentative de résurrection du Mal par la pellicule.

L'Exorciste II, affiche du film de John Boorman

© Warner Bros, Inc.

Le remake impossible de L’Exorciste accouche d’un Director’s cut triomphal

Dans les années 2000, le cinéma d’horreur a le vent en poupe et la décennie sera celle des remakes des classiques de l’épouvante des années 70-80. Mais personne ne touchera à L’Exorciste, dont l’idée d’un remake est insupportable, tant le chef d’œuvre est considéré comme une diablerie au plus près de la perfection. Par contre, il demeure perfectible aux yeux de son réalisateur. Aussi, en réponse à cela, Warner ressort L’Exorciste dans un nouveau montage, baptisé Director’s Cut. Le contexte du passage à l’an 2000 qui a entretenu la peur de l’apocalypse au cinéma, y est aussi pour beaucoup. La réédition s’orchestre également dans la mouvance des productions de studios reprenant la thématique religieuse surnaturelle que L’Exorciste inaugura et que La malédiction (premier grand succès post-Exorciste dans les années 70) alimentera. C’est l’époque peu réjouissante de StigmataLa fin des temps, Les âmes perdues, ou L’élue.

L'Exorciste - version intégralen affiche

© Warner Bros, Inc.

L’aura méphistophélique autour de l’œuvre d’origine n’a pas cessé. Le blasphème cinématographique réduit à une interdiction aux moins de 12 ans (l’époque a changé, le classique de Friedkin a même été diffusé en prime sur FR3, plus de dix ans auparavant), réalise 1 301 872 entrées. Un score inimaginable pour une reprise dans les années 2000 quand les supports physiques comme la VHS et le DVD ont balayé l’intérêt commercial des ressorties en salle à une telle échelle.

Au commencement était le fric : L’Exorciste IV

Cet engouement incite la major à produire un 4e épisode, ou plutôt le prequel de la saga. L’engagement d’un auteur, un vrai, qui est le fruit des années 70, Paul Schrader, est une formidable idée sur le papier, mais comme toujours avec ce caractère fort, l’entreprise tourne à l’accident industriel. Le montage est écarté et le studio déploie les talents commerciaux et surtout donc pompiers de Renny Harlin, pape du divertissement factice, mais efficace, afin de tourner une fiction plus séduisante pour la jeunesse, devenue première consommatrice de produits horrifiques.

Le résultat, L’Exorciste : au commencement est une déception commerciale au vu du budget mirobolant, devenu hors de contrôle, avec le tournage de deux films distincts. Le prequel est insipide et totalement générique. Reste encore l’empreinte du malin qui plane sur cet épisode qui se rattache effectivement dans son atmosphère et vaguement dans son ADN à la légendaire franchise, tout en étant le premier pur produit indolore de cette engeance du diable. Mais que l’on se rassure, le montage de Schrader, libéré par la suite, à l’appel des cinéphiles sur la toile, était différent dans son approche du cinéma, mais guère mieux. Intitulé Dominion, l’appropriation de L’exorciste par Schrader était surtout bancale.

L'Exorciste au commencement, affiche

© Warner Bros, Inc.

Années 2000 – 2020 : l’industrialisation du cinéma diabolique

Le pire est toutefois sur le point de se produire. L’explosion des ventes de DVD qui dépassent parfois les recettes cinéma, engendre des tonnes de direct-to-vidéo, et des ersatz en pagaille. Les remakes triomphent en salle et même La Malédiction et Amityville, la maison du diable qui surfaient sur des idées inhérentes à L’Exorciste, connaissent leur relecture officielle.

L’engouement pour ce genre jusqu’à présent déconsidéré réoriente définitivement tous les studios américains vers des séries B qu’ils avaient délaissées dans les années 90, avant le revival du slasher par Wes Craven (Scream). Le cinéma d’épouvante devient la quasi garantie de succès costauds à plus de 50m$ : Massacre à la tronçonneuse, L’Armée des morts, Saw, Paranormal activity, qui reprenait les ingrédients du Projet Blair Witch, l’autre phénomène de société du box-office, en 1999. Le cinéma d’épouvante est dans la place et compte bien y rester.

Des navets en pagaille par opportunisme

Les majors se compromettent dans les lectures bibliques (Les âmes perdues, Le purificateur avec Heath Ledger, Les châtiments de Stephen Hopkins, Le rite avec Anthony Hopkins) ; les micro budgets dont Jason Blum devient le chantre et le found-footage sont légion. La multiplication des chaînes, supports audiovisuels, l’avènement du numérique qui permet à n’importe quel indépendant de produire du surnaturel bon marché, permettent aux produits de terreur d’envahir le marché dans ses formes les plus répétitives, celles de l’exploitation, rarement avec talent (Conjuring, les dossiers Warren, de James Wan sera l’exception).

Olivia O'Neill dans L'Exorciste : Dévotion

Olivia O’Neill dans L’Exorciste : Dévotion © 2023 Universal Studios. All Rights Reserved.

L’obsession pour le diable, la possession, est probablement ce qui frappe le plus. Dans un nouveau millénaire de l’image et de la falsification de celle-ci grâce aux outils numériques, mais aussi des réseaux sociaux, à une époque de regain des croyances, les exorcismes en VOD, SVOD, ou au cinéma (outre Le rite, on peut évoquer notamment The Last Exorcist produit par Eli Roth) inondent le marché, tuant la notion même d’originalité dans l’œuf. Les produits à la chaîne (The Hauting of…) abusent des mêmes ressorts et relèvent tous du plagiat assumé sous forme de formules qui dissimulent mal une sinistre réalité,  l’opportunisme.

Quand L’Exorciste devient un élément de langage

En 2023, alors que l’on vient de subir, L’Exorciste du Vatican (à ne pas confondre avec Les dossiers secrets du Vatican, 2015), Blumhouse et Universal ont récupéré les droits pour sortir de nouveaux épisodes officiels de L’Exorcisme. La transaction a été coûteuse et c’est sans nul doute pour Jason Blum le plus grand pari de sa carrière remarquable. On parle désormais d'”univers”, mais au vu de la constellation passée de purges possédées par le néant artistique, on évitera cet élément de langage marketing.

Pour célébrer donc les 50 ans du film monstre L’Exorciste, voici donc The Exorcist: Believer, donc le Croyant, en VF québécoise, ou Dévotion dans nos salles françaises.

Exit le crucifix masturbateur

Jason est enthousiaste. Il a relancé la franchise Halloween et compte faire mieux avec l’hérétique des années 70, et pour cela, il gonfle les ambitions. Narrativement, il double le nombre de gamines possédées par rapport au film original où Linda Blair avait le crucifix masturbateur et la bouche d’égout vociférant des insultes porno.

Le producteur triple également le budget canonique d’une Blumhouse Productions. Il faut désormais compter sur 30 millions de dollars pour raviver l’esprit du Malin. Enorme, en soi, quand la plupart des exorcismes de DTV (que l’on compte par vingtaines, voire centaines)  ne coûtent pas plus de 5 M$.

Lidya Jewett dans L'Exorciste : Dévotion

Lidya Jewett dans
L’Exorciste : Dévotion © 2023 Universal Studios. All Rights Reserved.

Raviver l’envie d’un Dieu souillé

Le marketing essaie de nous prendre par les grosses ficelles de la nostalgie : un écho à l’effroyable musique de Mike Oldfield (Tubular Bells), la promesse du retour de la mère de la possédée avec la présence au casting d’Ellen Burstyn, et même de Linda Blair lors d’un rebondissement, affirment une filiation exclusive avec le classique de Friedkin. L’Exorciste Dévotion se veut de sang pur et racé. Au prix du rachat des droits, c’est un peu une nécessité de consanguinité.

Bref, pour le spectateur de tout âge, ce 5e opus se doit d’être de la trempe de la terreur originelle et d’effacer à lui seul deux décennies d’adolescents fébriles se contorsionnant sur fond de formules affabulatrices  (“tiré d’une histoire vraie”, vous remettez?).

L’Exorciste Dévotion : le vilain petit canard de la franchise

Pas de chance, parfois dans une famille, il existe des rejetons tellement abominables qu’il vaudrait mieux les cacher dans le placard de la “VODerie”.  Evidemment, dans un sous-genre horrifique pour lequel le mot “originalité” est devenu une abomination, L’Exorciste Dévotion commet l’irréparable, celui de la soumission au marché. Dans un box-office habité par des succès de produits médiocres (Annabelle, Insidious...), les scénaristes de L’Exorciste Dévotion n’ont pas été chercher très loin le pitch aberrant de cette renaissance du diablotin qui, jadis, possédait l’ado joufflue jouée par Linda Blair. Non seulement le scénario de Scott Teems et de David Gordon Green (ancien auteur de films indépendants devenu rebooteur en série) ne présente aucune originalité, mais il est surtout totalement inepte.

Le diable au cinéma

En évoquant la disparition de deux jeunes ados pendant trois jours, le script surfe sans trop se l’avouer sur la paranoïa favorite des réseaux sociaux, celle de la pédophilie. Fausse piste? A moitié, les filles sont effectivement pénétrées par le malin, en tout cas, sous son emprise. David Gordon Green ne fait rien de tout cela et se complaît surtout dans l’anecdotique. En guise d’illustration, la scène représentée sur l’affiche française est magistrale. Ce moment de révélation diabolique au sein d’une église, lors d’une cérémonie religieuse destinée à louer Dieu pour avoir permis de retrouver les deux jeunes filles saines et sauves, ne construit aucun suspense, ne nourrit aucun enjeu, et ne sert en rien de climax, puisque de victimes dans ce lieu saint, il n’y en aura pas. L’Exorciste Dévotion n’est pas un profanateur de sépulture. Non, cette scène présentée comme un basculement se résume ni plus ni moins qu’ à une petite crise d’hystérie qui conduit la jeune fille à l’hôpital. Tout ça pour ça.

The Exorcist Believer de David Gordon Green (2023)

L’Exorciste : Dévotion © 2023 Universal Studios. All Rights Reserved.

Le casting sans cachet de L’Exorciste Dévotion

L’entièreté du scénario est de ce niveau. Le film de David Gordon Green souille tout ce que représentait L’Exorciste dans sa subversion. Les deux adolescentes possédées seront réduites à des petites préoccupations de production blumesque ou netflixienne et semblent surtout être au centre d’un remake de Ouija : elles essaient d’entrer en contact avec la maman morte de l’une d’entre elles, alors que cette dernière donnait naissance à son enfant, dans un contexte de catastrophe naturelle. Cette idée niaise et bêta est à l’image du casting : un acteur de musicals (Leslie Odom Jr.), une chanteuse de country (Jennifer Nettles) et une ado dirigée depuis le plus jeune âge dans des productions Netflix des plus abrutissantes de bienveillance (Lidya Jewett).

Oui, le casting est à l’avenant du script, fade, sans étoffe, superficiel.

Leçon en wokisme du Malin qui se marre bien

Dans un film binaire où le diable promet de rétablir la situation en incitant les deux familles à choisir quelle enfant doit être sauvée (la jeune orpheline noire ou la jeune fille blanche, issue d’une famille qui biberonne à la religion), le rebondissement étourdissant de naïveté dans une Amérique irréconciliable, obsédée par l’ethnicité, nous apparaît d’une bêtise crasse et clivante. Au nom de la paresse artistique, on ne pouvait pas faire pire que cet Exorcisme de pacotille qui n’est ni plus ni moins qu’un énième produit pour ado, sans victimes et sans audace . En un mot, nul !

Frédéric Mignard

Les sorties de la semaine du 11 octobre 2023

Affiche de L'Exorciste Dévotion (2023)

© Universal Studios. All Rights Reserved.

Biographies +

David Gordon Green, Linda Blair, Ann Dowd, Ellen Burstyn, Norbert Leo Butz, Leslie Odom Jr., Jennifer Nettles, Lidya Jewett

Tags :

Le diable au cinéma, La religion au cinéma, La franchise ConjuringFilm de possession démoniaque, Franchise : L’exorciste 

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