Amityville, la maison du diable : la critique du film (1980)

Epouvante horreur, Fantastique | 1h57min
Note de la rédaction :
6/10
6
Affiche de Landi pour Amityville, la maison du diable

Note des spectateurs :

Sans doute un peu trop lent et manquant d’audace, Amityville, tout en exploitant les recettes de L’exorciste, séduit par son approche psychologique de la terreur et par son ambiance tendue. Le résultat est intéressant et captivant, à défaut d’être mémorable.

Synopsis : Amityville, 13 novembre 1974. Dans une maison bourgeoise, un jeune homme, dans un accès de démence, massacre ses parents, ses frères et ses sœurs. Quelque temps plus tard, cette maison est mise en vente à un prix défiant toute concurrence. La famille Lutz l’achète sans connaître la tragédie qui s’y est déroulée.

Amityville, la construction d’un nouveau mythe du cinéma horrifique

La critique : Au début des années 70, L’Exorciste (Friedkin, 1973) bouleverse définitivement le cinéma horrifique mondial en proposant de traiter l’épouvante de la manière la plus réaliste possible, l’insérant notamment dans le quotidien banal de gens respectables. Ringardisant du jour au lendemain le bric à brac gothique déployé durant les années 60, le film a également affolé le box-office international. Dès lors, les copies plus ou moins inspirées ont fleuri un peu partout. La plus célèbre déclinaison fut celle de La Malédiction (Richard Donner, 1976) qui donna lieu à plusieurs suites. Au milieu de cette production assez pléthorique surgit Amityville, la maison du diable (1979) qui s’inspire d’un double fait divers survenu dans une localité proche de New York. En 1974 eu lieu un massacre dans cette maison qui a ensuite été occupée par la famille Lutz un an plus tard. Si le film insère bien le massacre initial lors d’un début assez impressionnant, il se concentre davantage sur les événements surnaturels survenus par la suite, selon les dires de la famille Lutz. Comme le film s’inspire du livre de Jay Anson, il ne cherche aucunement à remettre en cause les affirmations de ces gens dont on saura par la suite qu’ils ont largement exagéré les circonstances de leur départ précipité afin de se faire de l’argent facile.

 

Artwork : Jérémy Pailler – Graphisme John Capone

Rosenberg soigne l’ambiance et non le rythme

Mais peu importe finalement puisque le réalisateur Stuart Rosenberg a eu l’intelligence de se pencher essentiellement sur l’aspect délétère d’une famille recomposée dont on peut aisément penser

Amityville la maison de l'horreur, DVD format simple

Copyrights : MGM – Bach Films

qu’elle fut avant tout dysfonctionnelle. Du moins est-ce son point de vue lors des trois quarts du film, avant qu’il ne succombe aux sirènes du grand spectacle lors d’un final où les manifestations démoniaques sont explicitées afin de satisfaire le grand public venu frissonner. On peut bien évidemment lui reprocher cette facilité, mais autrement le long-métrage aurait été bien ennuyeux puisque dépourvu de climax. Déjà, il est important de signaler que le film dure deux heures et qu’il ne s’y passe pas grand-chose. Cela est largement compensé par la création d’une ambiance tendue, portée par une musique inquiétante de Lalo Schifrin et par le décor particulièrement magnétique de la maison, reproduite à l’identique en studio. Le cinéaste parvient donc à exploiter judicieusement un budget qui fut étriqué – le film étant produit par la firme indépendante AIP (American International Pictures) pour moins de 5 millions de billets verts – en s’appuyant sur son décorateur, ainsi que sur des acteurs plutôt investis. Ainsi, James Brolin (père de Josh) fait-il un pater familias borderline assez impressionnant, tandis que Rod Steiger continue à cabotiner comme à son habitude, mais cette fois-ci au profit du film. Un peu plus en retrait, Margot Kidder manque peut-être de personnalité pour incarner cette mère de famille dépassée par les événements, même si elle reste agréable à regarder.

Cinéaste davantage habitué au polar et au thriller (on lui doit notamment Luke la main froide en 1967 ou encore La toile d’araignée en 1976, tous deux avec Paul Newman, puis plus tard le Brubaker avec Robert Redford), Stuart Rosenberg n’est sans doute pas le meilleur réalisateur du monde, mais il s’agit toutefois d’un technicien compétent qui met ici son savoir-faire au service d’une histoire forte. On peut d’ailleurs rapprocher ce long-métrage du Shining de Stanley Kubrick, tourné à peu près en même temps. On ne peut accuser aucun des deux de plagiat, mais il est étonnant de constater à quel point les deux œuvres engagent un dialogue à distance. Le brio du film de Kubrick fait sans aucun doute de l’ombre à celui de Rosenberg, mais on y retrouve des thèmes communs, de la dégradation complète de la cellule familiale jusqu’à la menace représentée par le paternel, en passant par les flots de sang déversés dans une maison que l’on peut qualifier d’entité vivante. Comme quoi ces thèmes étaient dans l’air du temps !

Énorme succès pour une petite production indépendante, Amityville a rapporté plus de 85 millions de dollars rien qu’aux Etats-Unis, et même en France où le cartésianisme est moins favorable à ces œuvres axées sur le satanisme, le film dépassa le million d’entrées. Ce magnifique succès engendra la création de deux suites cinématographiques, avant que la télévision et la vidéo ne s’emparent du phénomène pour cinq occurrences supplémentaires, sans compter les nombreux dérivés qui ne font qu’exploiter le nom de la franchise sans y être vraiment reliés.

Virgile Dumez

La franchise Amityville

Illustration : Landi

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