L’exorciste la suite (L’exorciste 3) : la critique du film et du blu-ray (1991)

Épouvante, horreur, Fantastique | 1h56min (version cinéma) , 1h44min (version director's cut)
Note de la rédaction :
7/10
7
affiche de l'Exorciste 3 la suite

Note des spectateurs :

Échec à sa sortie, L’Exorciste 3 mérite d’être réévalué ; l’édition proposée par ESC le permet dans les meilleures conditions.

Synopsis : Près de vingt ans se sont écoulés depuis les tragiques événements qui ont failli coûter la vie à la jeune Regan possédée par Satan. Le lieutenant Kinderman, témoin privilégié de cette affaire terrifiante, est depuis toujours resté en éveil non sans raison car le mal rôde toujours. Après une enquête serrée et quelques morts, Kinderman s’aperçoit que les nouveaux meurtres sont l’exacte réplique de ceux commis par un tueur fou mort douze ans plus tôt.

La critique : Déçu par le film de Boorman, L’exorciste 2, l’hérétique, William Peter Blatty, auteur du roman original, en écrivit la « vraie » suite et entreprit de réaliser lui-même cet Exorciste 3, qui, malgré son échec en salles, garde un certain nombre d’admirateurs. Pour les amateurs de gore et d’effets choc, ce sera pourtant une déception : hormis la séquence d’exorcisme, ajoutée pour faire vendre et sans doute pas la meilleure partie du métrage, le film distille davantage qu’il n’assène, cherche le malaise plutôt que le choc et n’en est, à notre sens, que plus terrifiant. Blatty privilégie en effet le motif et le récit, refuse quasiment la monstration, d’où un certain goût pour les longs dialogues et, surtout, les images énigmatiques, qui tissent un réseau serré de significations complexes. La fleur, la porte qui s’ouvre, les vitraux, les statues, les zooms, les références et citations, les papiers qui s’envolent, la pendule qui s’arrête, tout cela ouvre sur un monde traversé par le Mal et la perte de sens. Non sans habileté, Platty choisit de préserver une certaine incohérence pour mieux déstabiliser son spectateur et le plonger, à mi-chemin entre le cauchemar (le quai des anges, étonnante séquence sacrément culottée) et le réel, les deux s’interpénétrant perpétuellement, dans un no man’s land où les frontières basculent.

Copyrights : ESC Editions

De quoi parle L’exorciste 3 ? Sûrement pas d’exorcisme… En suivant l’itinéraire physique et spirituel du lieutenant Kinderman, le scénario s’attache à enregistrer l’intrusion dans des cadres aseptisés (l’église, l’hôpital) d’un Mal contagieux et protéiforme. Insidieux parfois, quand des fous communiquent avec les morts, violent souvent (les meurtres dont certains sont tout bonnement terrifiants, d’autant plus qu’ils sont hors-champ), il s’incarne principalement dans un tueur possédé mais trouve aussi des hôtes divers (un médecin, une infirmière, une vieille patiente) qui n’en sont au fond que des variantes. Fini les certitudes rassurantes, Kinderman en se confrontant à lui, en l’écoutant, se fait croyant : l’assassin qu’il a envoyé à la chaise électrique n’est pas mort, parce qu’il n’était qu’une des incarnations de ce Mal intrusif à l’œuvre dans la société. Comme il s’y réfère parfois, on peut considérer que  L’exorciste 3 est l’inverse de La vie est belle de Capra : pas d’ange gardien ici, pas de cohérence classique, mais un univers désorganisé rétif à la logique et abscons.

Le fait que Kinderman conduise son enquête quasiment seul, ses hommes semblant stupides et détachés de lui, et le fait que la plupart des séquences fantastiques n’aient que lui pour témoin incite à penser  soit qu’il est la victime d’un cauchemar ou d’une folie, soit que le Mal s’est attaqué à lui, ou plutôt qu’il a trouvé « son » Mal, celui qui lui était destiné. Seule incartade, la séquence hallucinante dans laquelle une patiente marche au plafond, que personne ne voit et qui agit comme un signe de dérèglement plutôt que comme agent narratif.

La quête métaphysique de Kinderman, et par conséquent, comme il l’avoue lui-même dans un bonus, de Blatty, bien que passionnante, se heurte néanmoins à quelques faiblesses ; outre la scène d’exorcisme déjà mentionnée, les longs tunnels dialogués ne sont pas filmés d’une manière très inventive ; quant à la tentative sur la fille du lieutenant, elle est bien préparée mais ratée dans son exécution. Le cinéaste réussit en revanche brillamment deux meurtres : celui du confessionnal, impeccable de tension, et celui de l’infirmière vu presque exclusivement depuis un couloir. Et comme il s’appuie sur une interprétation de haut vol, comme il sait instaurer un puissant malaise, on ne saurait trop inciter à voir ou revoir ce film original et ambitieux et à se laisser fasciner par son atmosphère délétère.

Disponible en édition collector, sur deux disques en France, l’éditeur propose la version « director’s cut », constituée d’emprunts à diverses sources. Outre des variations de points de vue et des explicitations, elle a le mérite de présenter une fin différente, sobre, sans le grand-guignol de l’exorcisme.

Critique de François Bonini

Affiche française originale – Distributeur original : Twentieth Century Fox – Copyrights : 1990 Morgan Creek Productions Inc

 

Les compléments & packaging : 4,5/5

Sur le Blu-ray de la « version cinéma », c’est d’abord un entretien avec le toujours réjouissant Christophe Lemaire (25mn) qui revient sur la genèse du film ; son érudition sans prétention permet de tout savoir sur Blatty et son métrage (la production, le tournage et ses problèmes, les interprètes principaux, etc.). Bref, indispensable, autant pour des informations capitales que pour d’amusants clins d’œil (Samuel L. Jackson, Chucky), malgré de petits défauts de micro.  Les sept minutes de « reportage d’époque » sont plus conventionnelles ; on apprécie en revanche la première scène coupée en noir et blanc, après l’exécution du tueur, glaçante (3mn). Les suivantes apportent beaucoup moins, et le bêtisier moins encore (6mn). Un cran au-dessus, les interviews d’époque (39mn) donnent quelques clés, en particulier celle de Blatty lui-même. À quoi s’ajoutent trailers et spot télé.

Sur le second disque, encore deux bonus : un documentaire qui a le mérite de multiplier les intervenants dont de nombreux témoins, mais qui se complaît dans le compliment perpétuel (24mn), et  un entretien avec Brad Dourif, plus intéressant mais anecdotique (18mn).

Le packaging digipack est des plus soignés avec fourreau et affiche française bonus, conçue spécialement pour cette édition.

 

L’image : 4/5

Malgré un grain parfois visible, la copie bénéficie d’un piqué et d’une colorimétrie plutôt remarquables. Aucun parasite, aucune imperfection patente, bref, les conditions idéales pour retrouver ce film somme toute méconnu. Il en va évidemment tout autrement de la version « director’cut », les ajouts provenant de sources de qualité médiocre.

 

Le son : 3,5/5

Les trois versions (VO 5.1 et 2.0, VF 2.0) sont débarrassées d’éventuelles scories et de saturations. La moindre nuance des voix, les brusques éclats musicaux, tout concourt à une belle réussite. Evidemment, il n’existe pas de VF pour le « director’s cut ».

Test blu-ray de François Bonini

Copyrights : ESC Editions 2018

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