Toujours plus sombres, les aventures de Harry Potter demeurent d’une exceptionnelle qualité grâce à une histoire d’une diabolique efficacité, une réalisation inspirée et un trio d’acteurs toujours aussi attachant. Harry Potter et les Reliques de la mort partie 1 est une réussite patente.
Synopsis : Décidé à détruire Voldemort et perdu sans Albus Dumbledore, Harry Potter ne retourne pas à Poudlard pour sa septième et dernière année. Accompagné de ses deux meilleurs amis Ron et Hermione, le jeune sorcier va devoir parcourir le monde à la recherche des sept précieux Horcruxes qui permettront de réunir l’âme damnée de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom pour la détruire à jamais. Ce n’est pas sans compter sur les Mangemorts, infâmes sbires du Seigneur des Ténèbres, toujours à leurs trousses. D’autant que le pouvoir de celui-ci est grandissant lorsqu’il met la main sur le Ministère de la Magie…
Critique : Événement de cette fin d’année 2010, l’adaptation du dernier volet des aventures de l’apprenti sorcier le plus célèbre de la planète est attendue par des millions de fidèles de par le monde. Pour mémoire, la saga de Harry Potter représente à chaque nouvel épisode près de 300 millions de dollars de recettes rien qu’aux Etats-Unis et pas loin du milliard sur l’ensemble de la planète. Cette fidélité tient non seulement à la popularité phénoménale des romans de J.K. Rowling, mais également à la qualité réelle des différentes adaptations cinéma. Celles-ci n’ont eu de cesse de progresser qualitativement depuis le séminal troisième épisode qui faisait montre d’une ambition esthétique démesurée et d’une maturité dans le traitement des personnages qui dépassait le cadre simpliste du film pour gamins. Les épisodes suivants ont confirmé cette tendance vers toujours plus de noirceur ; ils sont parvenus à construire l’une des sagas les plus cohérentes et adulées du septième art.
Harry Potter et les Reliques de la mort partie 1 : gagnant sur tous les tableaux
Avec cette adaptation du dernier roman de la franchise, plusieurs impératifs se présentaient au scénariste Steve Kloves et au réalisateur David Yates. Tout d’abord, il fallait parvenir à restituer la noirceur de l’ultime best-seller, ainsi que ses nombreux enjeux narratifs et psychologiques sans pour autant oublier de divertir le grand public, toujours avide d’aventures trépidantes et de créatures fantaisistes. Ensuite, il fallait arriver à faire de cette première partie un tout cohérent qui ne laisse pas sur sa faim les spectateurs à l’issue de la projection. Autant le dire immédiatement, David Yates est gagnant sur quasiment tous les tableaux.
Effectivement, dès l’apparition du logo Warner, le ton est donné. Sur une musique menaçante, le traditionnel sigle du studio apparaît au milieu de nuages noirs que semble traverser la caméra. Plongeant aussitôt dans les ténèbres de son sujet, le cinéaste nous présente le monde des magiciens entièrement dominé par les forces du Mal, tandis que le monde des Moldus (les humains, pour les non initiés, s’il en reste) vit sous la menace permanente des démons mus par Voldemort. En privilégiant une esthétique sombre (les couleurs froides dominent), une musique sinistre et une ambiance à la lisière du conte horrifique, les auteurs de ce septième volet ont clairement voulu retrouver le côté obscur du troisième volet signé Alfonso Cuarón – pour mémoire le meilleur épisode de la saga à ce jour. Si les enjeux narratifs tournent cette fois-ci autour du mystérieux testament légué par Dumbledore, les amateurs de la série seront surtout intéressés par l’évolution psychologique des personnages principaux, confrontés non seulement à leurs peurs les plus primales, mais aussi à leurs doutes d’adolescents torturés. Alors qu’ils sont traqués, jetés en pâture à leurs ennemis hors du cocon protecteur de Poudlard – que l’on ne voit d’ailleurs jamais dans cette première partie – nos trois héros préférés sont confrontés à des choix importants qui viennent parfaire leur initiation vers l’âge adulte. Entre Harry Potter qui n’a jamais autant douté de sa mission, Hermione qui est tiraillée par son hésitation entre l’amour et l’amitié et surtout Ron Whistley torturé par la jalousie, ce septième volet ne donne guère l’occasion aux jeunes sorciers de papillonner.
Des héros au fond du gouffre dans un épisode froid
Si quelques scènes humoristiques viennent de temps à autre détendre l’atmosphère (l’intrusion des héros dans le ministère de la magie est traité sur un ton primesautier, non exempt de gags), la tendance d’ensemble est tout de même au renforcement des tensions qui devront trouver leur résolution dans la deuxième partie de cet ultime volet. N’hésitant pas à précipiter nos héros au fond du gouffre, cet avant-dernier épisode donne encore lieu à la disparition tragique de quelques personnages importants de la saga, tandis que les forces du Mal ne cessent de progresser jusqu’au final qui semble annoncer des heures encore plus sombres, à découvrir en juillet prochain.
Un bémol toutefois. Ceux qui reprochaient au sixième segment son manque d’action risquent fort de réitérer leur critique envers celui-ci. Si les séquences sont d’une beauté esthétique non négligeable, la plupart des événements contés ne donnent pas dans l’action d’anthologie (comme la brève mais impressionnante destruction du Millenium Bridge lors de l’ouverture du précédent volet). Le cinéaste préfère visiblement se concentrer sur l’histoire et l’ambiance plutôt que de sacrifier à la mode de l’esbroufe hollywoodienne.
Encore une fois d’excellente facture grâce à une interprétation de premier ordre – les jeunes acteurs ont grandi et progressé en même temps que leurs personnages – , mais également grâce à une réalisation qui ose bousculer les habitudes d’une saga pourtant bien rodée (on adore notamment l’insert à mi-parcours d’un splendide dessin animé qui conte la légende des trois frères, ou encore l’utilisation d’une caméra à l’épaule lors de certaines séquences de poursuite dans la forêt), ce septième numéro ne dépareille aucunement dans une saga dont la constante qualité étonne à chaque fois. On en ressort ébahi et désireux de retourner au plus vite dans l’univers si ensorcelant de ce cher Harry.