L’alliance invisible – Toutes les couleurs du vice : critique du film et test blu-ray (1974)

Giallo, Thriller | 1h34min
Note de la rédaction :
6,5/10
6,5
Toutes les couleurs du vice, l'affiche

  • Réalisateur : Sergio Martino
  • Acteurs : Nieves Navarro, George Hilton, Luciano Pigozzi, Dominique Boschero, Ivan Rassimov, Georges Rigaud, Marina Malfatti, Edwige Fenech, Sara Sperati, Julián Ugarte
  • Date de sortie: 03 Jan 1974
  • Année de production : 1972
  • Nationalité : Italien, Espagnol, Britannique
  • Titre original : Tutti i colori del buio
  • Titres alternatifs : They're Coming to Get You! (USA) / All the Colors of the Dark (UK) / Todos los colores de la oscuridad (Espagne) / Todas as Cores da Escuridão (Portugal) / Wszystkie kolory ciemności (Pologne) / Die Farben der Nacht (Allemagne) / Todas as Cores do Medo (Brésil)
  • Autres acteurs : Tom Felleghy, Renato Chiantoni
  • Scénaristes : Ernesto Gastaldi, Sauro Scavolini, Santiago Moncada
  • Monteur : Eugenio Alabiso
  • Directeurs de la photographie : Giancarlo Ferrando, Miguel Fernández Mila
  • Compositeur : Bruno Nicolai
  • Chef Maquilleur : Giuseppe Ferranti
  • Chef décorateur : -
  • Directeurs artistiques : José Luis Galicia, Jaime Pérez Cubero
  • Producteurs : Mino Loy, Luciano Martino
  • Producteur exécutif : Ricardo Sanz
  • Sociétés de production : Lea Film, National Cinematografica, Astro C.C.
  • Distributeur : Les Films Marbeuf
  • Distributeur reprise : -
  • Date de sortie reprise : -
  • Editeurs vidéo : Neo Publishing (DVD, 2010) / Artus Films (coffret DVD-blu-ray, 2024)
  • Dates de sortie vidéo : 5 janvier 2010 (DVD) / 4 juin 2024 (en coffret DVD-blu-ray)
  • Budget : -
  • Box-office Paris-Périphérie : 1 567 entrées (1 salle, sous le titre de L'Alliance invisible)
  • Box-office nord-américain / monde : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Interdiction aux -12 ans
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals : -
  • Nominations : -
  • Récompenses : -
  • Illustrateur/Création graphique : © Benjamin Mazure (jaquette blu-ray). Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Artus Films. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Attachés de presse :
  • Franchise : 2ème film de la Trilogie du vice de Sergio Martino
Note des spectateurs :

Largement inspiré par le cinéma de Polanski, L’alliance invisible – Toutes les couleurs du vice est un giallo à l’atmosphère angoissante et envoutante. Dommage que l’intrigue ne soit pas mieux fagotée.

Synopsis : Traumatisée par le meurtre de sa mère, sauvagement assassinée sous ses yeux lorsqu’elle avait 5 ans, et sa fausse couche à la suite d’un accident de voiture, Jane Harrison, jeune Londonienne, se sent seule, déprimée et pense qu’elle est folle. Elle est hantée par de terrifiants cauchemars où elle se fait persécuter par un homme au yeux bleus perçants.

Sergio Martino fait son Rosemary’s Baby

Critique : Après avoir triomphé avec L’étrange vice de Madame Wardh (1971) où il réunissait pour la première fois le couple de cinéma Edwige FenechGeorge Hilton, le réalisateur Sergio Martino a dû se passer de l’actrice enceinte pour La queue du scorpion (1971) qui a confirmé le talent du cinéaste dans le genre du giallo. Il était donc logique de retrouver Edwige Fenech au centre de ce troisième opus qui est désormais considéré comme le deuxième volet de l’informelle Trilogie du Vice.

Tandis que les deux précédents longs métrages faisaient appel à des mécaniques narratives brillantes mises en place par Ernesto Gastaldi pour imiter Les diaboliques (Henri-Georges Clouzot, 1955) et tous les thrillers à machination italiens des années 60 signés Umberto Lenzi et consorts, L’alliance invisible – Toutes les couleurs du vice (1972) est clairement un démarquage de Rosemary’s Baby (Roman Polanski, 1968). Non seulement le scénario semble s’abreuver à cette source, mais le réalisateur cite à l’envi l’œuvre du réalisateur polonais qui était alors une référence incontournable. Certains passages s’apparentent notamment à Répulsion (1965) lorsque l’héroïne s’enferme dans son appartement afin de ne pas être assaillie par un agresseur venu de l’extérieur.

L'alliance invisible - Toutes les couleurs du vice

Les visuels étrangers de Toutes les couleurs du vice. © 1972 VIP Media – Dania Films. Tous droits réservés.

Les années 70 où l’obsession des sectes sataniques

Toutefois, c’est bien vers le fantastique de Rosemary’s Baby que les auteurs lorgnent en situant tout d’abord le long métrage à Londres dans des grands ensembles d’immeubles inquiétants. Le cinéaste suit les pas d’une femme déstabilisée à la fois par le décès récent de son bébé à la suite d’un accident de voiture, mais aussi par des visions échappées de son enfance. A moins que cela soit un don de divination lui permettant de prévoir un avenir morbide ? Afin de plonger le spectateur dans le même état d’incertitude que son héroïne, le réalisateur multiplie les scènes cauchemardesques à grand coup de montage psychédélique et s’affranchissant souvent de toute logique narrative.

Ici, l’on retrouve une caractéristique typique du giallo à la façon de Dario Argento où l’atmosphère prime sur la logique. Dans ce déferlement de séquences plus ou moins oniriques, on peut aussi citer comme référence Le venin de la peur (Lucio Fulci, 1971). Tout est fait pour que le spectateur doute de la santé mentale de l’héroïne, tandis que le long métrage développe une intrigue liée à une secte satanique. Ici encore on retrouve une référence à Roman Polanski, mais cette fois-ci dans son versant privé, puisque la secte évoque inévitablement celle de Charles Manson, assassin de Sharon Tate, alors enceinte du réalisateur polonais. D’ailleurs, on peut aisément penser que l’acteur espagnol Julián Ugarte a été choisi pour sa ressemblance avec le célèbre serial killer.

Toutes les couleurs du vice en DVD chez Néo Publishing

Toutes les couleurs du vice en DVD chez Néo Publishing © 1972 VIP Media – Dania Films. Tous droits réservés.

Un script rafistolé à la dernière minute

Pourtant, à force de multiplier les séquences absurdes, Sergio Martino prend ici le risque de perdre totalement son spectateur. Certes, son talent formel lui permet de maintenir un intérêt pour son film, notamment grâce à son usage du grand angle qui donne un aspect majestueux à sa réalisation, mais l’ensemble paraît parfois en roue libre. Avec L’alliance invisible – Toutes les couleurs du vice, on a tout de même la forte impression que le scénario a été finalisé lors du montage et que certaines béances ont été comblées au dernier moment.

De même, on peut trouver faiblardes les séquences mettant en scène les fameuses messes noires, avec un usage très kitsch de tout un décorum satanique de bazar. Cela ne sert pas forcément le film, d’autant que la résolution très terre-à-terre de l’intrigue vient contredire bon nombre d’incertitudes. L’explication finale semble plaquée de manière totalement artificielle pour tenter de donner une vague cohérence à tout ce qui précède. Cela fait donc de Toutes les couleurs du vice le segment le plus faible de la trilogie en matière de giallo pur.

Quand Sergio Martino devient un expérimentateur de formes

Toutefois, cela n’en fait pas pour autant un mauvais film, loin de là. Tout d’abord parce que l’interprétation d’Edwige Fenech est tout à fait à la hauteur des enjeux et qu’elle irradie de sa présence magnétique l’ensemble des scènes. Ensuite, Sergio Martino confirme qu’il est aussi un habile créateur d’atmosphères, capable d’outrances maîtrisées lors des séquences de rêves, mais aussi de trouvailles ingénieuses comme ce formidable générique de début en plan fixe dépourvu de musique.

Ce premier plan peut ainsi être vu comme programmatique puisqu’il annonce déjà le fait que le spectateur ne trouvera pas nécessairement dans le film ce qu’il est venu chercher. Martino envisage donc son long métrage comme un formidable laboratoire où il pourrait mener à bien ses propres expériences formelles. Il est soutenu par l’excellente partition musicale de Bruno Nicolai et par la photographie parfois très colorée de Giancarlo Ferrando qui évoque dans certains plans les expérimentations de Mario Bava.

En France, deux titres cinéma alternatifs

Ces différents éléments font donc de Toutes les couleurs du vice un giallo de bonne facture, mais qui souffre assurément d’un script à la ramasse. Le film sort à Paris lors d’une petite semaine unique, celle du 3 janvier 1974, dans une seule salle, à savoir Le Styx, cinéma de quartier du Ve arrondissement, où il grapille1 567 tickets, sous le titre assez étrange de L’alliance invisible. Le distributeur Marbeuf, grand pourvoyeur de films improbables (Les Minettes en folie, V’là que les nonnes dansent le tango, Plaisirs et dangers du sexe rien que pour ce début d’année 1974), a également exploité ce giallo sous le titre Toutes les couleurs du vice comme l’attestent les affiches de l’époque. Ce second titre se rapprochant davantage de l’italien, il a été privilégié lors de la sortie DVD chez le défunt éditeur Neo Publishing. Désormais, le métrage a été publié au sein du magnifique coffret Artus Films contenant les trois films de la Trilogie du vice.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 2 janvier 1974

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Toutes les couleurs du vice, l'affiche

© 1972 VIP Media – Dania Films. Tous droits réservés.

Biographies +

Sergio Martino, Nieves Navarro, George Hilton, Luciano Pigozzi, Dominique Boschero, Ivan Rassimov, Georges Rigaud, Marina Malfatti, Edwige Fenech, Sara Sperati, Julián Ugarte

Mots clés

Cinéma bis italienGialloPsycho-killer, Les sectes au cinéma, La psychanalyse au cinéma, La folie au cinéma

Le test blu-ray

Artus Films a mis les petits plats dans les grands en proposant à la vente un magnifique coffret intitulé La trilogie du vice, comprenant L’étrange vice de Madame Wardh (1971), Toutes les couleurs du vice (1972) et Ton vice est une chambre close dont moi seul ai la clé (1972). Des classiques du genre qu’il est impossible de rater.

Packaging & Compléments : 5 / 5

Tout d’abord, il faut évoquer la beauté du coffret concerné qui contient un livre de 96 pages intitulé Les vices cachés de Sergio Martino, rédigé par Emmanuel Le Gagne, Sébastien Gayraud et David Perrault. Les trois complices évoquent d’abord l’intégralité de la carrière du cinéaste, avant de se concentrer sur des analyses des trois œuvres proposées dans le coffret, puis terminent sur d’autres gialli réalisés par Martino. L’ensemble est tout bonnement passionnant et richement illustré par des affiches et des photographies en couleurs qui agrémentent la lecture. Là encore, indispensable pour mieux appréhender l’œuvre de cet artisan du cinéma bis.

Outre ce beau livre, le coffret contient un digipack qui se déploie en quatre volets agrémentés d’affiches étrangères des films concernés. A l’intérieur, les six galettes (un DVD et un blu-ray pour chaque film) sont superposées par un système d’attache que nous n’apprécions guère car un peu fragile. Il faut donc faire attention à ce point.

La trilogie du vice, détails du coffret

© Artus Films ; design : Benjamin Mazure. Tous droits réservés.

En ce qui concerne les suppléments vidéo, Toutes les couleurs du vice est encore très bien doté. Cela commence avec une introduction de 25min par Emmanuel Le Gagne accompagné de Sébastien Gayraud qui reviennent en détail sur la création quelque peu chaotique du film, ainsi que sur l’influence majeure du cinéma de Polanski. Bien entendu, cela est confirmé par l’entretien de 40 min avec Sergio Martino, toujours aussi bavard et passionnant. Il livre un nombre impressionnant de détails et d’anecdotes sur le tournage qu’on vous laisse découvrir.

Le scénariste Ernesto Gastaldi évoque pendant 18min sa relation avec les frères Martino. Il insiste sur sa brouille avec Luciano pour des histoires de gros sous, mais confirme son amitié envers Sergio. L’homme est toujours aussi passionnant à écouter car sans filtre.

Enfin, George Hilton se livre dans un long entretien de 31min, entrecoupé de quelques interventions de clarification par Antonio Tentori. Le comédien évoque ses plus grands films et regrette toutefois de n’avoir jamais été sollicité par les grands artistes de l’époque (Monicelli, Scola, Fellini), malgré son bagage théâtral acquis en Amérique du Sud.

Enfin, la section bonus se ferme sur l’inévitable diaporama et la bande-annonce.

L’image de Toutes les couleurs du vice : 3,5 / 5

Malgré la restauration, le long métrage souffre ici d’un léger problème de netteté de la copie. Ainsi, on recherche en vain des plans franchement bien définis, tandis que la photographie à la lumière diffuse tend à mettre en évidence un grain trop prononcé. En fait, ce sont finalement les séquences de rêve, avec leurs décors minimalistes, qui s’en sortent le mieux dans un ensemble qui paraît un peu terne pour de la HD. Le rendu ressemble surtout à celui d’un DVD.

Le son de Toutes les couleurs du vice : 4 / 5

Deux pistes sonores sont disponibles, toutes en mono. Bien entendu la version italienne est assurément la plus réussie avec des voix naturelles et des bruits d’ambiance respectés. La musique ne sature à aucun moment. Pour la version française, les voix sont à nouveau de qualité, mais ce sont les ambiances qui sont moins immersives.

Test du blu-ray de Virgile Dumez

La trilogie du vice, coffret Artus

© Artus Films ; design : Benjamin Mazure. Tous droits réservés.

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Toutes les couleurs du vice, l'affiche

Bande-annonce de L'alliance invisible - Toutes les couleurs du vice (VO)

Giallo, Thriller

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