Réalisateur et scénariste italien, Mario Monicelli est né en 1915 dans le quartier Campo Marzio à Rome (et non à Viareggio, comme souvent évoqué). Son père était un journaliste et dramaturge, tandis que le reste de ses frères furent des écrivains et artistes. Il a effectué ses études supérieures d’abord à Pise, puis à Milan. Là, il fait la connaissance de Riccardo Freda et d’Alberto Lattuada avec lesquels il fonde un journal consacré au cinéma qui ne dure pas longtemps.
Un précieux assistant-réalisateur
Après avoir poursuivi ses études en littérature, il revient rapidement vers le cinéma qui le passionne toujours. En 1934, il se lance pour la première fois dans la réalisation d’un court-métrage. Il complète cette expérience enrichissante par une deuxième réalisation en 1935. A partir de 1936, il entame une nouvelle phase de sa vie en devenant un assistant-réalisateur pour Augusto Genina (L’escadron blanc en 1936), Mario Bonnard (Le chevalier noir en 1941), Pietro Germi (Le témoin en 1946) et Giorgio Ferroni (Marechiaro en 1949).
On notera que durant cette période d’intense activité, Mario Monicelli a aussi collaboré à de très nombreux scripts dans tous les genres possibles, avec toutefois une prédilection pour la comédie.
L’époque du duo formé avec Steno
L’homme à tout faire de l’industrie italienne parvient enfin à accéder à la réalisation en 1949 avec son ami Steno pour la comédie Au diable la célébrité (1949). Associés sur près d’une dizaine de films, Steno et Monicelli ont tourné plusieurs gros succès de l’acteur Totò. On leur doit notamment Totò cherche un appartement (1949) qui remporte un énorme succès en Italie et connaît même une jolie popularité en France (382 949 entrées), mais aussi Gendarmes et Voleurs (1951, et surtout 371 215 spectateurs en France). Dans un genre un peu plus sérieux, ils créent aussi Les infidèles (1953) avec la belle Gina Lollobrigida qui réunit 694 651 amoureux dans les salles françaises.
Avec Totò e Carolina (1955), Mario Monicelli s’individualise enfin de Steno et signe ainsi sa première comédie en solo. Malheureusement pour lui, le long-métrage connaît de gros problèmes avec la censure et ne parvient pas jusqu’en France. Après le drame plus classique Du sang dans le soleil (1955), Monicelli fait tourner Alberto Sordi dans Un héros de notre temps (1955). Si la comédie est un succès en Italie, elle n’attire que 1 917 spectateurs français pour une sortie qu’on imagine très confidentielle. Il continue sur sa lancée avec des films intéressants comme Donatella (1956) où il révèle Elsa Martinelli.
Mario Monicelli et le tournant du Pigeon
En 1958, il rencontre enfin un succès mémorable avec un film fondateur de la comédie à l’italienne : Le pigeon. Le long-métrage remporte un accueil triomphal dans le monde entier. Ainsi, en France, la comédie a attiré 763 868 amateurs d’humour à l’italienne. Il enchaîne avec La grande guerre (1959) où il retrouve Alberto Sordi qu’il associe à Vittorio Gassman pour se payer la tête de l’armée italienne durant la Première Guerre mondiale. Le succès est encore au rendez-vous avec près d’un million de spectateurs rien qu’en France. Par la suite, il tente une incursion dans la comédie sentimentale avec Larmes de joie (1960) où il donne à nouveau un rôle principal à Totò.
Il ralentit ensuite sa production, intègre le film à sketchs Boccace 70 (1962), et signe Les camarades (1963) qui est un grand film historique et social avec Marcello Mastroianni. Toujours fidèle à l’acteur, il lui octroie le rôle principal de Casanova 70 (1965), ce qui lui permet de générer 683 410 entrées en France. En 1966, Mario Monicelli s’attaque au Moyen-Age et notamment à la période des Croisades avec L’armée Brancaleone qui est porté par Vittorio Gassman. Si la comédie désopilante est un triomphe en Italie, elle demeure inédite en salles en France.
Mario Monicelli, un auteur primé dans les grands festivals durant les années 60-70
Dès lors, il devient un habitué des films à sketchs (Les ogresses et Caprice à l’italienne), puis donne une suite à son succès de 1966 avec Brancaleone s’en va-t-aux croisades (1970). Ce second volet sort cette fois en salles et obtient un succès d’estime (286 104 entrées). Mario Monicelli continue sur sa lancée avec une satire politique cinglante Nous voulons les colonels (1973) qui connaît moins les faveurs du public français. Toujours très inspiré durant les années 70, Mario Monicelli brille avec une œuvre plus personnelle intitulée Romances et confidences (1974) avec Ugo Tognazzi et compose une comédie savoureuse avec Mes chers amis (1975) qui lui permet de retrouver les faveurs du public français avec 749 536 convives.
Ce long-métrage est également un triomphe en Italie et offre à Mario Monicelli un David di Donatello du meilleur réalisateur. Durant cette période faste, le cinéaste commence à être reconnu des cinéphiles et ses œuvres les plus récentes sont souvent sélectionnées dans les grands festivals comme celui de Cannes. Alors qu’il a débuté avant bon nombre de ses confrères, Monicelli participe pleinement à l’aura du cinéma italien à l’international.
Par la suite, le cinéaste désormais auréolé de gloire signe une comédie dramatique qui reçoit un bel accueil (Caro Michele en 1976). Cette fois-ci, c’est le Festival de Berlin qui offre au réalisateur un Ours d’argent du meilleur réalisateur. Toujours au top de sa créativité, Monicelli offre à Alberto Sordi un nouveau rôle marquant avec Un bourgeois tout petit, petit (1977) qui reçoit cinq David di Donatello dont ceux du meilleur film, meilleur réalisateur et meilleur acteur principal. La comédie caustique a également été en compétition au Festival de Cannes.
Cette même année 1977, le cinéaste participe à l’excellent film à sketch Les nouveaux monstres (1977) avec ses collègues Ettore Scola et Dino Risi. Il y retrouve Alberto Sordi et fait tourner la jeune Ornella Muti. La comédie grinçante s’avère être un des bijoux de la comédie sardonique à l’italienne, saluée par un beau succès français avec 760 962 spectateurs hilares.
Des années 80 plus contrastées
Malheureusement, l’inspiration semble moins présente sur les films suivants dont Rosy la bourrasque (1980) qui, malgré la présence de Gérard Depardieu, n’a pas suscité d’envie des spectateurs français avec seulement 46 490 tickets vendus. Il faut donc attendre 1981 pour que Mario Monicelli retrouve la grâce et Alberto Sordi pour Le marquis s’amuse (1981). Une fois de plus, le Festival de Berlin consacre le cinéaste à qui il attribue un nouvel ours d’argent du meilleur réalisateur. Toujours en quête de succès, le réalisateur signe ensuite Mes chers amis 2 (1982) porté par Ugo Tognazzi. En France, ses 107 068 entrées sont une sacrée déception par rapport au beau succès du premier volet. L’Italie fut davantage favorable à cette suite.
Après l’inédit Bertoldo, Bertoldino e Cacasenno (1983), Mario Monicelli retrouve Marcello Mastroianni pour La double vie de Mathias Pascal (1985) qui fait partie de la compétition du Festival de Cannes. Pourtant, le long-métrage ne sort pas sur les écrans français. Il faut donc attendre la comédie Pourvu que ce soit une fille (1986) pour que le cinéaste refasse parler de lui en France, d’autant que le film est une coproduction franco-italienne avec Catherine Deneuve et Bernard Blier. Malgré une présence importante dans les médias, la comédie plutôt moyenne n’est pas un succès avec seulement 145 722 curieux dans les salles.
Monicelli face au déclin de l’industrie du cinéma en Italie
Désormais, le temps béni du cinéma italien est passé et Mario Monicelli est désormais considéré comme une gloire du passé. S’il tourne encore Une catin pour deux larrons (1987), ses œuvres vont avoir moins d’écho au cours des deux décennies suivantes. On parle tout de même un peu de son biopic musical Rossini! Rossini! (1991) car il est interprété par Philippe Noiret, mais c’est surtout la comédie Une famille formidable (1992) qui le remet au centre du jeu grâce à son prix au Festival d’humour de Chamrousse. Toutefois, ces deux dernières œuvres à sortir au cinéma en France ne réalisent que fort peu d’entrées, ce qui pousse les distributeurs français à abandonner le cinéaste.
Pour autant, toujours très actif, le réalisateur a encore signé une dizaine de longs-métrages au cours des années suivantes, restés inédits chez nous. Il s’agit souvent de comédies comme Cari fottutissimi amici (1994), Facciamo paradiso (1995) et Panni sporchi (1999). En 2001, le cinéaste s’engage auprès du mouvement altermondialiste en cosignant le documentaire Un altro mondo è possibile (2001) et il œuvre ensuite fréquemment dans le domaine du documentaire engagé comme avec Firenze, il nostro domani (2003). Il termine son impressionnante carrière cinématographique en 2006 avec la comédie Le rose del deserto, menée par Michele Placido.
Vers la fin de sa vie, le réalisateur est atteint d’un cancer de la prostate qui est incurable. Il choisit donc de mettre fin à ses jours en sautant de la fenêtre de sa chambre d’hôpital le 29 novembre 2010. Une fin tragique pour celui qui a fait rire toute l’Italie durant plusieurs décennies. Il avait l’âge très respectable de 95 ans et restera comme l’un des grands maîtres de la comédie italienne. Chapeau, maestro !