Marqué par des idées particulièrement réactionnaires, Rome violente est un poliziottesco efficace, mais qui pâtit d’un script aux abonnés absents. Du pur film d’exploitation putassier.
Synopsis : Le commissaire Betti a perdu son frère au cours d’un hold-up meurtrier. Endurci par ce drame, il tente de mener un combat exemplaire contre le crime. Cependant, peu de jours après, un jeune homme est abattu dans un autobus, en plein centre-ville. Cet événement ravive son traumatisme. Désireux de châtier les coupables sans délais, les méthodes expéditives de Betti finissent par lui coûter son poste. Renvoyé de la police, il rejoint un comité de citoyens-justiciers désireux, tout comme lui, d’en découdre avec l’impunité dont jouissent les criminels.
Rome violente entend dénoncer les errements des années de plomb
Critique : Après le succès rencontré par Franco Nero dans Le témoin à abattre (1973), le propre père du réalisateur Enzo G. Castellari a été embauché pour donner une suite aux aventures du commissaire Belli. Toutefois, Franco Nero a refusé de rempiler et, par un coup de baguette magique, Marino Girolami a transformé le commissaire Belli en commissaire Betti. Afin de se rapprocher au plus près du modèle d’origine, Girolami octroie le rôle principal à Maurizio Merli qui pouvait passer pour un clone de Franco Nero, notamment sur les affiches dessinées de l’époque. C’est donc dans un pur esprit d’exploitation qu’est né Rome violente (1975).
Cherchant à surfer sur le succès de plusieurs poliziotteschi, mais aussi sur la popularité d’œuvres américaines comme L’inspecteur Harry (Siegel, 1971) et Un justicier dans la ville (Winner, 1974), Marino Girolami entend ici dénoncer l’insécurité galopante de la société italienne marquée par les années de plomb. Pour cela, il ne fait pas dans la dentelle et signe un nombre conséquent de scènes violentes. Ainsi, il enchaîne hold-up, prises d’otages, expéditions punitives et fusillades en pleine rue ou sur un jardin d’enfants afin de décrire l’état de décrépitude d’une société au bord de l’anarchie. L’argumentaire réactionnaire est bien connu et parfaitement rodé pour scandaliser le petit peuple.
Maurizio Merli, à la fois policier, juge et exécuteur
Face à ce désordre permanent se dresse donc un justicier qui se déclare à la fois policier, juge et exécuteur. Dans la peau de ce flic aux méthodes expéditives, Maurizio Merli incarne pour la première fois un rôle qui va le poursuivre pendant plusieurs années. Il faut dire que l’acteur n’est pas le plus expressif qui soit, jouant surtout de son regard froid et de sa mâchoire serrée. En revanche, il est très à l’aise dans les scènes d’action et incarne donc un gros dur avec une certaine crédibilité. Si Rome violente ne se distingue guère de la concurrence, on notera toutefois une vraie tendance au fascisme lorsque le policier déchu participe à un groupe d’autodéfense citoyen. Le film va même jusqu’à justifier le lynchage, ce qui est un comble!
A la tête de cette milice que l’on peut qualifier d’extrême droite, la star américaine Richard Conte s’avère tout à fait convaincant dans ce qui fut sa dernière apparition à l’écran. Sans doute conscients de l’aspect très extrême de son long-métrage, Marino Girolami et son scénariste Vincenzo Mannino ont l’intelligence de terminer sur une note plus ambiguë. Désormais habitué à sa fonction d’exécuteur, l’ex-commissaire Betti s’aperçoit qu’il devient incontrôlable et qu’il prend finalement plaisir à tuer. Il abandonne donc sa mission au cours d’une fin ouverte qui imagine deux possibilités par le biais d’un rêve. Au spectateur de se faire son idée et de choisir l’issue qu’il préfère.
Y a-t-il un scénariste aux commandes ?
Si la réalisation de Marino Girolami est plutôt efficace, on retiendra surtout du film une excellente scène de course poursuite en voiture qui dure quasiment dix minutes. Celle-ci permet de faire de Rome violente une œuvre énergique, mais cela peine à compenser l’absence de véritable script. Effectivement, les aventures du commissaire Belli sont constituées de petites intrigues successives qui n’entretiennent aucun rapport entre elles. Cela donne l’impression d’assister à un spectacle en roue libre, qui serait un collage de plusieurs séquences dépareillées. C’est le plus gros défaut d’un film qui ne semble jamais structuré et qui part donc dans tous les sens.
Cela n’a pourtant pas empêché le long-métrage de rencontrer un gros succès en Italie, au point de générer deux suites lucratives : Opération casseurs (Lenzi, 1976) et Opération Jaguar (Girolami, 1976). En France cependant, Rome violente ne serait sorti qu’en mars 1980 dans quelques salles du sud-est de la France, avant de paraître en VHS chez Proserpine en 1983. Ce fut la dernière exploitation physique du film en France à ce jour. On notera que le même mois, l’éditeur culte des années 80 proposait en vidéocassette Opération casseurs.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 12 mars 1980
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Biographies +
Marino Girolami, John Steiner, Silvano Tranquilli, Richard Conte, Daniela Giordano, Mimmo Palmara, Benito Pacifico, Mario Novelli, Giovanni Cianfriglia, Pietro Torrisi, Attilio Dottesio, Ray Lovelock, Luciano Rossi, Maurizio Merli