Nosferatu Fantôme de la nuit : la critique du film (1979)

Epouvante, Horreur, Fantastique | 1h37min
Note de la rédaction :
8/10
8
Nosferatu, fantôme de la nuit, l'affiche

  • Réalisateur : Werner Herzog
  • Acteurs : Isabelle Adjani, Klaus Kinski, Bruno Ganz, Jacques Dufilho, Walter Ladengast, Clemens Scheitz
  • Date de sortie: 17 Jan 1979
  • Année de production : 1978
  • Nationalité : Allemand, Français
  • Titre original : Nosferatu, Phantom der Nacht
  • Titre alternatifs : Nosferatu - Nattens vampyr (Suède), Nosferatu - Il principe della notte (Italie), Nosferatu: Phantom der Nacht (Allemagne), Nosferatu: Nattens vampyr (Norvège), Nosferatu - vampyren (Danemark), Nosferatu, vampiro de la noche (Espagne), Nosferatu - yön valtias (Finlande), Nosferatu the Vampyre (Royaume-Uni), Nosferatu, o Fantasma da Noite (Portugal), Νοσφεράτου, το φάντασμα της νύχτας (Grèce), Nosferatu: O Vampiro da Noite (Brésil), Nosferatu, el vampiro (Argentine), ノスフェラトゥ (Japon), Носферату: Фантом ноћи (Serbie)
  • Casting intégral : Klaus Kinski, Isabelle Adjani, Bruno Ganz, Roland Topor, Walter Ladengast, Dan van Husen, Jan Groth, Carsten Bodinus, Martje Grohmann, Rijk de Gooyer, Clemens Scheitz, Lo van Hensbergen, John Leddy, Margiet van Hartingsveld, Tim Beekman, Jacques Dufilho, Michael Edols, Werner Herzog, Beverly Walker, Attila Árpa
  • Scénariste : Werner Herzog
  • Dialogues : Tom Shachtman, Martje Grohmann
  • Directeur de la photographie : Jörg Schmidt-Reitwein
  • Compositeur : Florian Fricke, Popol Vuh
  • Monteur : Beate Mainka-Jellinghaus
  • Ingénieur du son : Harald Maury
  • Chef Maquilleur : Dominique Colladant, Reiko Kruk
  • Chef décorateur : Henning Von Gierke
  • Superviseur des effets-spéciaux : Cornelius Siegel
  • Coiffeur : Ann Poppel
  • Assistant réalisateur : Remmelt Remmelts, Mirko Tichacek
  • Scripte : Anja Schmidt-Zäringer
  • Producteurs délégué : Werner Herzog
  • Producteur exécutif : Walter Saxer
  • Sociétés de production : Werner Herzog Filmproduktion, Gaumont, Zweites Deutsches Fernsehen
  • Distributeur français : Gaumont
  • Distributeur américain : Twentieth Century Fox
  • Distributeur reprise :
  • Date de sortie reprise :
  • Box-office reprise :
  • Editeur vidéo : Gaumont (VHS, DVD, Blu-ray)
  • Date de sortie vidéo : 23 septembre 2010 (DVD, Blu-ray)
  • Budget :
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 933 533 entrées / 247 765 entrées
  • Box-office nord-américain / monde : -
  • Formats : 1.85:1 / Couleur (35mm) / Mono
  • Festivals : Sélection Officielle Avoriaz 1979, Göteborg Film Festival (Suède, 1979), Festival de Berlin (1979), New York Film Festival (1979), Foro Internacional de la Cineteca (Mexique, 1980)
  • Nominations : 5 nominations aux German Film Awards (1979) dont Meilleur Réalisateur, Meilleure actrice, Meilleure photo...
  • Récompenses : Meilleur acteur, Klaus Kinski, Cartagena Film Festival 1980 ; Outstanding Single Achievement, Henning von GierkeBerlin International Film Festival (1979), Meilleur acteur aux German Film Awards 1979
  • Photographe de plateau ©
  • Illustrateur/Création graphique : © David Palladini. All Rights Reserved.
  • Crédits : © Werner Herzog Filmproduktion (1979)
  • Classification : Interdit aux moins de 12 ans
  • Visa : 49385
  • Attachés de presse : Simon Mizrahi, Martine Marignac
  • Franchise : Remake de Nosferatu de Friedrich Wilhelm Murnau
  • Film recommandé Art et Essai
Note des spectateurs :

Nosferatu Fantôme de la nuit, remake de Murnau par Herzog est un chef d’oeuvre malade dont l’austérité confine à l’épouvante. Brillant.

Synopsis : A Wismar, les habitants meurent par centaines d’un mal présumé être la peste. Cette hécatombe est, en fait, l’œuvre du vampire Dracula qui vient de s’établir dans une maison abandonnée de la ville. Personne ne peut enrayer l’épidémie, mais Lucy est prête à tout sacrifier pour venir à bout du monstre, au lever du jour…

Critique : Anti commerciale au possible, la relecture du roman de Bram Stoker par Herzog a été un franc succès en 1979 avec pas moins de 933 000 entrées en France et des critiques dithyrambiques. Beau score pour une œuvre austère qui cultive l’errance et la désespérance sur une tonalité dépressive.

Un classique de la Gaumont dirigée par Daniel Toscan du Plantier

Cette coproduction franco-allemande, qui a vu la puissante Gaumont, celle de Daniel Toscan du Plantier (Don Giovanni, cette même année) s’associer à FilmProduktion était pourtant loin d’être un pari gagné. Dracula, en perte de vitesse au box-office, pâtissait un peu de l’image gothique poussiéreuse donnée par la surexploitation du mythe du vampire pendant plusieurs décennies, notamment dans les productions de la Hammer. Et puis le titre renvoyait explicitement à la première adaptation par Murnau, chef d’œuvre inégalable de l’expressionnisme.

Osant avec audace l’exercice du remake impossible, Herzog réussit pourtant l’exploit, à savoir la réalisation d’un chef d’œuvre personnel qui possède sa propre temporalité.

Herzogienne jusqu’au bout, la version contemporaine rappelle beaucoup Aguirre du même auteur, non seulement de par la présence incarnée de Klaus Kinski, mais aussi dans ses thèmes de voyage intérieur funeste. L’impression est évidente notamment à l’arrivée de Bruno Ganz dans les Carpathes, au début du métrage sur le Rheingold Prelude de Wagner. L’homme redevient cette figure d’explorateur dans un monde hostile où la nature est morbide. Le comte Dracula, ombre métaphorique de la peste, vermine des cales comme un rat, devient lui-même voyageur jusqu’en Allemagne, sur un navire où la maladie a raison de l’équipage.

Une production austère dévorée par le Mal, la maladie et le désespoir

Evoqué comme “le Maître des rats”, Nosferatu n’est plus ici l’incarnation du Mal comme dans le film original, mais bel et bien une figure désespérée dévorée par la solitude. Sa difformité physique, son teint blafard, ses mains froides, son appétence pour la vie en s’abreuvant du sang de victimes, hommes ou femmes, comme une évocation de sa bisexualité, cette passion soudaine pour la belle Lucy, à la jeunesse écrasée par la prémonition (elle est elle-même étrangement pâle et croit aux pressentiments)… tout renvoie à la détresse de Dracula. L’éternel Nosferatu, créature nocturne pathétique, inspire le rejet comme un virus qui vient se nourrir du vivant et ne pourra jamais être désiré par le monde diurne représentée par celle dont il s’est épris. La tragédie est grandiose.

Pour apprécier le talent énorme d’Herzog, on comparera son adaptation du livre de Bram Stoker à celle plus pop de John Badham sortie quelques mois plus tard (Dracula avec Frank Langella, 1979) et à la suite de Nosferatu de pure exploitation donnée par des Italiens en 1988. Nosferatu in Venice fut d’ailleurs l’avant-dernier film de Klaus Kinski.

Frédéric Mignard

Box-office de Nosferatu Fantôme de la nuit

Sorti deux semaines après Les yeux de Laura Mars d’Irvin Kershner, avec Faye Dunaway, Nosferatu le fantôme de la nuit réalisera à peu près le même nombre d’entrées en France, à savoir près d’un million de spectateurs. Le savoir-faire de la Gaumont, avec alors Daniel Toscan du Plantier (Don Giovanni, Les sœurs Brontë la même année), à la direction générale, est un atout manifeste aux yeux du public qui n’a pas revu la star montante Isabelle Adjani depuis plusieurs mois (Driver de Walter Hill est sorti quelques mois auparavant). Le film sera souvent associé à une autre production Gaumont, Possession de Zulawski, dans la filmographie fébrile de la comédienne à l’ascension irrésistible.

1929 – 1979 : les 50 ans du cinéma parlant

Nosferatu – Phantom der Nacht est présenté en exclusivité au Festival d’Avoriaz et sort sereinement le 17 janvier face au Cavaleur de Philippe de Broca qui s’empare de la première place. Néanmoins, avec 85 385 spectateurs, le vampire, terré dans 17 salles, double Galactica qui entre en 3e place, avec 68 550 nostalgiques de La Guerre des étoiles. Au Montparnasse 83, le remake du classique de Murnau génère 10 588 entrées en une semaine ; le Gaumont Champs Elysées en rassemble 10 383. Parallèlement, dans les cinémas art et essai, le film original ressort et trouve 4 575 spectateurs. Le symbole est formidable puisqu’en 1979 l’on célèbre les 50 ans du cinémas parlant.

En 2e semaine, Herzog rétrograde en 3e place parisienne en raison de l’arrivée de Furie de Brian De Palma qui vise un public adulte sensible au fantastique. Il trouve encore 66 485 spectateurs quand le film muet se distingue en 2e semaine avec 4 201 spectateurs dans 2 cinémas.

La troisième semaine de Nosferatu est plus compliquée en raison de la sortie de Superman (203 915 entrées) et Le gendarme et les extra-terrestres (126 138) deux superproductions. Klaus Kinski et Isabelle Adjani glissent en 5e place avec 42 925 spectateurs dans 21 salles, ce qui est mieux que Furie qui s’écroule en 6e place (35 661). La version de Murnau trouve encore 3 098 nostalgiques du cinéma muet. Au total, la reprise achèvera sa carrière à 18 638 spectateurs. Un score remarquable.

La production franco-allemande de 1979 restera 12 semaines à l’affiche à Paris. En dernière semaine, Nosferatu Fantôme de la nuit peut encore compter sur 1 530 spectateurs dans 2 cinémas, l’Espace Gaîté et le Calypso. Il s’éteint avec 288 148 spectateurs à son bord.

Le film d’auteur exigeant de Werner Herzog se permettra de faire plus que le Dracula de  John Badham, en érigeant sa vision unique à la croisée des hommages au cinéma muet et aux productions mentales des années 70.

Box-office par Frédéric Mignard

Nosferatu, fantôme de la nuit, l'affiche

© 1979 Werner Herzog Filmproduktion – Gaumont / Affiche : David Palladini. Tous droits réservés.

Test blu-ray de Nosferatu de Werner Herzog

Perle indéniable du cinéma d’auteur européen des années 70, cette coproduction franco-allemande, réalisée par l’auteur d’Aguirre avec le génial Klaus Kinski, est le remake du chef d’œuvre de Murnau. Une relecture du mythe de Dracula qui, 30 ans après, fascine toujours autant. Le film est aujourd’hui proposé dans une version haute-définition de grande qualité. On redécouvre cette œuvre inclassable au souffle morbide dans des conditions satisfaisantes. Un tel plaisir macabre fait presque froid dans le dos…

Compléments : 3 / 5

Outre la superbe et originale bande-annonce d’époque (en HD !), forcément très rare, on apprécie les trois copieux documents inédits produits par Gaumont. Le premier « Voyage au pays de l’indicible » (37 mn) est un documentaire de Dominique Maillet, faisant intervenir d’anciens techniciens d’Herzog, Anne Demoulin, une spécialiste du cinéma allemand, et Serge Moati. Analyse, comparaison avec le film d’origine, anecdotes sur un tournage décrit comme très artisanal… On apprend énormément de choses. C’est un vrai beau cadeau pour les cinéphiles que nous sommes.
Dans Klaus Kinski : la métamorphose (21mn), la chef maquilleuse évoque sa rencontre avec le génie acariâtre et souligne l’importance du maquillage dans l’évolution du personnage de Nosferatu, notamment aux yeux d’Herzog, peu concerné au premier abord par cet aspect technique.
Plus court (11mn), l’entretien avec un spécialiste du mythe du vampire donne un éclairage historique et littéraire sur les origines de Dracula, la créature sanguinaire issue de l’imagination de l’Irlandais Bram Stocker. Il revient aussi sur les transpositions qui ont suivi. Un cours magistral à voix basse passionnant.

Image : 3.5 / 5

Très attaché à la haute-définition (ressortie régulière de ses classiques en salle dans de superbes versions numériques), Gaumont a fait montre d’un travail de restauration appréciable sur de nombreux classiques. Aujourd’hui encore avec Nosferatu Fantôme de la nuit, on est ravi par le résultat. La copie est riche en détails qui avaient été longtemps invisibles. La photographie sombre, voire austère, particulièrement granuleuse, n’a ici rien perdu de sa texture. On est face à une œuvre qui réaffirme son appartenance aux années 70, tout en dégageant une fraîcheur perdue depuis longtemps. Avait-on d’ailleurs jamais pu autant profiter des efforts photographiques de son auteur et de ses techniciens ? On en doute.

Son : 3 / 5

Très attaché à la haute-définition (ressortie régulière de ses classiques en salle dans de superbes versions numériques), Gaumont a fait montre d’un travail de restauration appréciable sur de nombreux classiques. Aujourd’hui encore avec Nosferatu, on est ravi par le résultat. La copie est riche en détails qui avaient été longtemps invisibles. La photographie sombre, voire austère, particulièrement granuleuse, n’a ici rien perdu de sa texture. On est face à une œuvre qui réaffirme son appartenance aux années 70, tout en dégageant une fraîcheur perdue depuis longtemps. Avait-on d’ailleurs jamais pu autant profiter des efforts photographiques de son auteur et de ses techniciens ? On en doute.

Test blu-ray de Frédéric Mignard

Sorties de la semaine du 17 janvier 1979

Nosferatu le fantôme de la nuit en blu-ray

© Gaumont. All Rights Reserved.

Biographies +

Werner Herzog, Isabelle Adjani, Klaus Kinski, Bruno Ganz, Jacques Dufilho, Walter Ladengast, Clemens Scheitz

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