Mystère à Saint-Tropez tente de remettre à la mode le burlesque des années 60-70. Les gags sont nombreux, souvent efficaces, parfois déplorables, dans un ensemble très nanar. Sympathique au dixième degré.
Synopsis : Août 1970, en pleine période yéyé. Comme chaque année, le milliardaire Claude Tranchant et sa femme Eliane ont invité le gratin du show-business dans leur somptueuse villa tropézienne. Rien ne semble pouvoir gâcher les festivités, si ce n’est l’inquiétant sabotage de la décapotable du couple. Persuadé d’être victime d’une tentative de meurtre, Tranchant fait appel à son ami Chirac pour bénéficier des services du meilleur flic de Paris. Mais au coeur de l’été, seul le commissaire Boulin, à quelques semaines de la retraite, est disponible. Aussi arrogant qu’incompétent, c’est avec des méthodes toutes personnelles que le policier va se lancer sur les traces du trouble-fête…
Le retour du duo Poiré-Clavier
Critique : Au commencement de Mystère à Saint-Tropez, il y a l’envie pour Christian Clavier et son vieux complice Jean-Marie Poiré de rendre hommage à un pan de cinéma passé de mode, à savoir le comique burlesque des années 60-70 incarné notamment par le cinéaste Blake Edwards. Les deux artistes ont donc conçu une intrigue policière permettant de créer une figure de flic gaffeur comme l’inspecteur Clouseau dans la saga de La panthère rose (1963). Après avoir écrit le scénario, Jean-Marie Poiré fait le choix de ne pas réaliser le long-métrage. Il faut donc se mettre en quête d’un réalisateur capable à la fois de saisir l’humour de cette époque, tout en apportant une touche de modernité à l’ensemble.
Leur choix s’est porté sur Nicolas Benamou, surtout connu pour avoir été complice de Michaël Youn, puis coréalisateur du diptyque comique Babysitting, auquel a d’ailleurs participé Christian Clavier. Très heureux d’intégrer un projet de telle envergure, Benamou retravaille le script avec Jean-François Halin et le tournage peut commencer. Doté d’un budget confortable qui permet de recréer l’intérieur de la villa en studio, mais aussi de se payer un casting en or, Mystère à Saint-Tropez avait tout pour être une Rolls-Royce du rire.
Un nanar, certes, mais sympathique
Pourtant, son distributeur StudioCanal ne semble pas avoir eu vraiment confiance dans le film qui sort en plein mois de juillet, sans grosse promotion à la clé, ce qui est souvent la marque des accidents industriels dont personne n’est fier. Au vu du résultat final, on peut comprendre l’embarras de certains des artistes impliqués puisque le métrage entre directement dans la catégorie nanar. Attention toutefois, on le classera plus exactement dans celle des nanars sympathiques et agréables à regarder pour peu qu’on laisse son bon goût au placard.
Volontairement situé dans les années 70 afin de rendre hommage à un type d’humour pratiqué à l’époque, Mystère à Saint-Tropez apparaît effectivement comme un film totalement démodé. Chaussant les pas du burlesque le plus pur, le long-métrage multiplie les gags énormes à base de personnages maladroits qui se vautrent par terre, se prennent des portes dans la figure ou des râteaux. Ainsi, Christian Clavier incarne un inspecteur qui ressemble trait pour trait à celui joué autrefois par Peter Sellers (et plus récemment Steve Martin). D’une maladresse absolue, l’enquêteur est non seulement un gros beauf indélicat, mais aussi un gaffeur extraordinaire, maladroit comme on n’en fait plus. Les réfractaires à ce type d’humour passeront donc leur chemin puisque le film ne fonctionne que grâce à la profusion de gags de ce genre.
Des acteurs en roue libre
Ce qui entraîne le film dans la catégorie nanar vient d’une tendance à multiplier les gags régressifs : ici Clavier urine dans un jacuzzi sous l’effet du haschich, tombe dans un trou à excréments, vomit son petit déjeuner sur Poelvoorde et ainsi de suite. Cela peut être particulièrement embarrassant pour les acteurs impliqués, d’autant que la plupart surjouent de manière éhontée. Si Clavier, Poelvoorde et Depardieu restent dignes dans la tempête, on n’en dira pas autant de Thierry Lhermitte – au rôle vraiment inintéressant – ou encore de Jérôme Commandeur et Vincent Desagnat. À côté de cela, les rôles féminins semblent sacrifiés car Virginie Hocq et Rossy De Palma ont été curieusement sous-employées.
Enfin, le long-métrage pâtit clairement d’une intrigue policière qui ne fonctionne pas, puisque l’on se fiche assez rapidement de qui est le coupable. La résolution en est d’ailleurs tellement précipitée que l’on peine à saisir la cohérence de la révélation finale. Réalisé pourtant avec soin, y compris dans les décors et les costumes bariolés et la lumière, Mystère à Saint-Tropez n’est pas une catastrophe en tant que comédie. L’ensemble est même plutôt drôle et sympathique au dixième degré. On n’ira pourtant pas la recommander à tout le monde, puisqu’il faut vraiment aimer le burlesque décomplexé pour y adhérer.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 14 juillet 2021
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Nicolas Benamou, Gérard Depardieu, Christian Clavier, Rossy De Palma, Benoît Poelvoorde, Thierry Lhermitte, Jérôme Commandeur, Vincent Desagnat, Virginie Hocq, Nicolas Briançon