L’épée sauvage : la critique du film (1982)

Heroic-Fantasy, Aventures, Fantastique, Cape et épée | 1h39min
Note de la rédaction :
6/10
6
L'épe sauvage, affiche cinéma française du film d'Albert Pyun

  • Réalisateur : Albert Pyun
  • Acteurs : Jay Robinson, Lee Horsley, Kathleen Beller, Simon MacCorkindale, George Maharis, Richard Lynch
  • Date de sortie: 28 Juil 1982
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : The Sword and the Sorcerer
  • Titres alternatifs : Talon im Kampf gegen das Imperium (Allemagne) / Det grymma svärdet (Suède) / Cromwell, el rey de los bárbaros (Espagne) / A Espada e o Feiticeiro (Portugal) / Miecz i czarnoksiężnik (Pologne) / La espada y el hechicero (Mexique) / La spada a tre lame (Italie) / Talen kardja - Harc a mágia ellen (Hongrie) / Sværdet og troldmanden (Danemark) / A Espada e os Bárbaros (Brésil)
  • Année de production : 1982
  • Autres acteurs : Richard Moll, Anthony De Longis, Robert Tessier, Nina Van Pallandt, Anna Bjorn, Jeff Corey, Joseph Ruskin, Joe Regalbuto
  • Scénaristes : Tom Karnowski, Albert Pyun et John V. Stuckmeyer
  • Directeur de la photographie : Joseph Mangine
  • Compositeur : David Whitaker
  • Monteur : Marshall Harvey
  • Producteurs : Brandon Chase, Marianne Chase, Tom Karnowski, John V. Stuckmeyer et Robert S. Bremson
  • Sociétés de production : Sorcerer Productions, Group One Films
  • Distributeur : Gaumont
  • Éditeurs vidéo : Gaumont (GCR, VHS, 1982), Antarès & Travelling (VHS, 1990) / Carlotta Films (blu-ray et 4K UHD, 2023)
  • Dates de sortie vidéo : 1990 (VHS) / 4 avril 2023 (blu-ray et 4K UHD)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 63 637 entrées
  • Box-office nord-américain : 39,1 M$ (soit 122,9 M$ au cours de 2023)
  • Budget : 2 M$ (soit 6,2 M$ au cours de 2023)
  • Classification : Interdit aux moins de 13 ans (interdit aux moins de 12 ans à partir de 1990)
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Dolby Stéréo
  • Festivals et récompenses : Saturn Award 1983 : 6 nominations dont 1 prix pour Richard Lynch (Meilleur acteur dans un second rôle)
  • Illustrateur / Création graphique Andrzej Malinowski (affiche française 1982) et Peter Andrew Jones (illustrateur affiche américaine et jaquette UHD 4K) © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : Group One Films © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Franchise : Premier volet des aventures de Talon. Suivi par Tales of an Ancient Empire (Albert Pyun, 2010)
Note des spectateurs :

Film inégal et fauché, L’épée sauvage n’en demeure pas moins sympathique par l’esthétisation de sa réalisation et son ambiance horrifique. Le jeu des acteurs est également bon dans cet ensemble bancal, mais attachant.

Synopsis : Le tyrannique Lord Cromwell est prêt à tout pour conquérir le royaume d’Ehdan, même à recourir à la magie noire. Avec l’appui du sorcier démoniaque Xusia de Delos, il parvient à anéantir ses ennemis et à neutraliser le roi Richard et sa famille. Seul son fils Talon réussit à échapper au massacre. Onze ans plus tard, le jeune homme, devenu un guerrier redoutable, est de retour au royaume où un complot contre Cromwell se prépare…

Les débuts difficiles du réalisateur Albert Pyun

Critique : Au début des années 80, le jeune Albert Pyun décide de quitter l’île d’Hawaï avec quelques amis à lui pour tenter sa chance à Hollywood en tant que réalisateur. Dépourvu de la moindre expérience si ce n’est un stage effectué au Japon, mais doté d’une soif de réussir propre à la jeunesse, Albert Pyun écume les studios pour proposer des projets ambitieux. Bien entendu, son inexpérience ne lui ouvre aucune porte et il doit finalement attendre 1981 pour que son projet de L’épée sauvage reçoive le soutien d’un petit producteur indépendant nommé Brandon Chase.

L'épée sauvage, réedition VHS chez Antares Vidéo

L’épée sauvage, réedition VHS chez Antares Vidéo. D’après le visuel de © 1982 Group One Films / Illustrateur : Peter Andrew Jones. Tous droits réservés.

A travers sa firme Group 1 International, Chase accepte de laisser sa chance au jeune hawaïen car il flaire la bonne affaire. Effectivement, Excalibur (Boorman, 1981) vient tout juste de débarquer sur les écrans et connaît un succès fulgurant, tandis que le studio Universal annonce la mise en chantier de Conan le barbare (Milius, 1982). Autant de signes qui montrent que le genre de l’heroic-fantasy a le vent en poupe.

L’épée sauvage ou le cauchemar d’un tournage sans argent

Brandon Chase propose donc un budget d’un million et demi de dollars pour effectuer les prises de vues (qui feront 2 millions avec les frais de publicité, soit 6,2 M$ au cours de 2023). Autant dire une misère quand l’on sait que le projet comprend des batailles épiques, des décors en grand nombre, des costumes à caractère historique et des effets spéciaux pour donner forme au seigneur du mal Xusia de Delos.

Pourtant, très heureux de bénéficier d’un tel budget pour réaliser son premier long-métrage, Albert Pyun se lance à corps perdu dans un tournage qui va vite tourner au cauchemar. Si les acteurs s’impliquent eux aussi à fond dans le projet, Albert Pyun doit faire face aux exigences drastiques de Brandon Chase, un producteur très interventionniste avec qui il se dispute régulièrement. Grâce à sa force de persuasion, Albert Pyun parvient à tirer le meilleur de son équipe, avec des moyens décidément trop réduits pour le script à illustrer. Pyun doit donc faire des choix, multiplie les ellipses – on ne voit quasiment aucune bataille à l’écran – et doit faire un usage immodéré des canons à fumée pour masquer la pauvreté des décors.

Albert Pyun contourne les problèmes par le brio de sa réalisation

Il faut donc bien avoir ces conditions extrêmes en tête lorsque le cinéphile découvre cette série B très fauchée, mais plutôt bien fichue et dont le cinéaste a su masquer les éléments les plus problématiques par des artifices de mise en scène. Cela commence très bien avec une séquence qui nous plonge immédiatement dans une ambiance fantastique et même horrifique du plus bel effet (grâce aux effets spéciaux des frères Chiodo). Certes, la photographie s’avère déjà un peu trop sombre, mais les maquillages gore font parfaitement illusion. L’épée sauvage débute donc sous les meilleurs auspices.

La suite s’avère un peu plus frustrante puisque, faute de moyens, l’intrigue se concentre surtout sur la classique reconquête du trône par son héritier légitime. Le spectateur féru de film de cape et d’épée reconnaîtra ici les bases de plus de la moitié des œuvres appartenant au genre. Albert Pyun paye ainsi son tribut aux films de l’âge d’or hollywoodien et la présence de Lee Horsley confirme ceci puisque l’acteur ressemble à s’y méprendre à Errol Flynn. Il incarne un héros bondissant qui possède une épée particulière à trois lames, dont deux sont éjectables. Autre référence directe, le combat final entre Horsley et l’excellent Richard Lynch produit des étincelles lorsque les lames s’entrechoquent, au point de ressembler aux duels de sabres lasers de la récente saga Star Wars.

Une dernière demi-heure plus efficace qui compense les faiblesses de script

Malheureusement, L’épée sauvage ne peut jamais se hisser au niveau de ses modèles, entravé par des décors trop étroits qui contraignent la scénographie, une photographie qui alterne esthétisation extrême et moments bien trop sombres, ainsi que des trous narratifs qui s’expliquent par une réécriture constante du script en cours de tournage. Il ne faut donc pas toujours chercher la logique dans L’épée sauvage, mais plutôt se laisser porter par une ambiance sombre et des velléités épiques.

Finalement, lors de la dernière demi-heure, Albert Pyun fait à nouveau appel au fantastique et il semble plus à son aise que dans le genre cape et épée. Cette dernière partie redonne du lustre à cette Epée sauvage qui démontre en tout cas le talent inné d’un réalisateur sachant manier une caméra et transcender par la forme un scénario banal. Comme dit précédemment, il est aidé par des comédiens de bonne qualité, la plupart étant issus de la télévision ou du théâtre. On apprécie Lee Horsley en héros aux dents qui étincellent, mais aussi George Maharis et Richard Lynch, respectivement en traître et en grand méchant. Côté féminin, Kathleen Beller fait une princesse agréable à regarder.

Une sortie parfaitement réussie aux Etats-Unis

Avec sa musique orchestrale pompeuse signée à peu de frais par David Whitaker et son montage réalisé par Marshall Harvey, tous deux sans l’accord d’Albert Pyun, L’épée sauvage n’est donc pas un mauvais bougre et peut même être considéré comme un bon exemple de débrouillardise, surtout quand on le compare aux mêmes films du genre tournés peu après en Italie.

Sorti aux Etats-Unis volontairement quelques semaines avant Conan le barbare, L’épée sauvage a connu un incroyable succès dans son pays d’origine avec des recettes de 39,1 M$ (soit 122,9 M$ au cours de 2023). Il s’agit du film indépendant le plus lucratif de l’année et une sacrée bonne affaire pour Brandon Chase. En ce qui concerne Albert Pyun, celui-ci a tenté de monter la suite annoncée au générique de fin, à savoir Tales of an Ancient Empire. Malgré le triomphe de L’épée sauvage, personne n’a misé sur cette suite qui n’a vu le jour qu’en 2010 avec dans les rôles principaux les has been Kevin Sorbo et Michael Paré. En tout cas, le métrage a permis de lancer la carrière hollywoodienne d’Albert Pyun qui a toutefois rencontré des difficultés pour monter son second long-métrage, Le dernier missile (1984).

L'épée sauvage, édition blu-ray ultra hd 4K chez Carlotta Vidéo.

L’épée sauvage, édition blu-ray ultra hd 4K chez Carlotta Vidéo. D’après le visuel de © 1982 Group One Films / Illustrateur : Peter Andrew Jones. Graphisme 2023 L’Etoile graphique. Tous droits réservés

L’épée sauvage, un échec estival en France

En France, L’épée sauvage a été distribué par la prestigieuse firme Gaumont au cœur de la saison estivale 1982, propice aux séries B. A Paris et sa banlieue, il sort dans une importante combinaison de 24 salles et se hisse à la 3ème place du classement, juste derrière le succès de la comédie franchouillarde Mon curé chez les nudistes (Thomas) et le chef d’œuvre musical Pink Floyd, The Wall (Parker) qui, lui, en est à sa deuxième semaine d’exploitation. Ils furent donc 40 270 Franciliens à faire le déplacement en salles. Toutefois, le bouche-à-oreille semble moins favorable qu’aux Etats-Unis puisque le film s’écroule en deuxième semaine avec 17 578 guerriers supplémentaires dans un parc légèrement diminué à 18 salles pour faire de la place aux nombreuses nouveautés. Seulement sept écrans parviennent à rameuter plus de 1 000 spectateurs par écran. C’est largement insuffisant.

En troisième semaine, dix salles se débarrassent de la production vendue comme le Conan le Barbare de l’été 1982, dont des écrans Gaumont. En intra-muros, on ne le retrouve guère qu’au Gaumont Ambassade, au Montparnasse Pathé, au Français Pathé, au Hollywood Boulevard et au Nation. Aucun site ne peut afficher une fréquentation supérieure à 900 salles. 4 277 spectateurs en semaine trois pour un film situé à plus de 40 000 tickets deux semaines plus tôt…  En quatrième semaine, L’épée sauvage ne figure plus qu’au temple du cinéma bis de René Chateau, le Hollywood Boulevard qui en tire 883 spectateurs. La messe est dite. Il faut baisser les armes.

En France, le film d’heroic-fantasy démarre au-dessus des 84 000 entrées en première semaine et le long-métrage terminera légèrement au-dessus des 200 000 spectateurs, ce qui est peu par rapport aux 1 778 722 entrées de Conan le Barbare que la Fox avait exploité sur les écrans trois mois plus tôt. Gaumont pensait pouvoir profiter du phénomène de ce dernier, avec un visuel français exclusif qui évoquait largement le futur classique avec Arnold Schwarzenegger. Le la force du distributeur lui a permis de sortir dans une combinaison large, notamment dans ses propres salles. En vain. La sortie de Mad Max 2 (Warner), le 11 août 1982, accentuera le désintérêt généralisé dans l’Hexagone.

Un an plus tard, Dar l’invincible de Don Coscarelli, proposé par Prodis, relancera le genre, avec 911 000 guerriers, qui s’éteindra durant la deuxième moitié des années 80, avec Conan le destructeur en 1984 (1 285 821) et Les Barbarians en 1987 (675 341).

Le métrage a été édité en VHS à deux reprises, tout d’abord chez Gaumont, dans une belle édition devenue rare, puis chez Antarès au début de la décennie suivante.

Carlotta dégaine un blu-ray et une édition UHD 4K

Après plusieurs éditions vidéo aux USA, et notamment l’édition collector combo 4K-blu-ray de Shout Factory, en avril 2022, L’épée sauvage n’est finalement réapparu en France qu’en 2023 par les bons soins de Carlotta Films qui l’édite en blu-ray et même en UHD 4K dans une copie remasterisée. Carlotta en a récupéré le master mais aussi quelques suppléments pertinents édité par Shout Factory.

Si la copie a bien été restaurée, elle demeure inégale à cause d’un rendu d’origine trop sombre et d’un abus de fumigènes qui passent mal à la compression. Il s’agit pourtant du meilleur moyen de (re)découvrir cette série B inégale, mais fort sympathique qui initiait la carrière d’un stakhanoviste du cinéma bis.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 28 juillet 1982

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L'épe sauvage, affiche cinéma française du film d'Albert Pyun

© 1982 Group One Films / Affiche : Andrzej Malinowski. Tous droits réservés.

Biographies +

Albert Pyun, Jay Robinson, Lee Horsley, Kathleen Beller, Simon MacCorkindale, George Maharis, Richard Lynch

Mots clés

Les films fantastiques des années 80, Les sorciers au cinéma, La chevalerie au cinéma, Premier Film

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L'épe sauvage, affiche cinéma française du film d'Albert Pyun

Bande-annonce de L'épée sauvage (VO)

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