Malgré un léger manque de rythme, Le dernier jour de la colère fait partie des réussites du western à l’italienne car le réalisateur respecte le genre qu’il aborde.
Synopsis : Souffre-douleur de la petite ville de Clifton, Scott est méprisé par la population qui le charge des pires corvées. Jusqu’au jour où Talby, un redoutable pistolero, arrive en ville et prend la défense de Scott. Ce dernier lui voue alors une admiration sans bornes et ne le quitte jamais d’une semelle. Talby le prend alors sous son aile et décide de faire de lui un tueur à sa solde…
Un western européen qui respecte les codes américains
Critique : Disciple et collaborateur de Sergio Leone, Tonino Valerii est resté célèbre de nos jours pour avoir tourné Mon nom est Personne (1973) sur un scénario du maître. Pourtant, Valerii avait déjà prouvé dès son deuxième long métrage qu’il était tout à fait capable de mener à bien tout seul un western spaghetti. Ainsi, Le dernier jour de la colère (1967) est la preuve évidente du savoir-faire d’un cinéaste déjà en pleine possession de ses moyens.
Tranchant avec le style habituel des westerns transalpins, le metteur en scène choisit ici la voie du classicisme à l’américaine. Effectivement, on note peu de débordements dans cette œuvre modérément violente et au rythme posé. Loin des délires baroques des deux Sergio (Leone et Corbucci), Valerii opte pour une sobriété étonnante qui devrait ravir les détracteurs du western à l’italienne. Point de violence gratuite et graphique, point d’ambiance brumeuse ou horrifique, mais plutôt un grand respect pour les grands classiques du cinéma américain.
Quelques implications politiques bienvenues
La thématique est en revanche bien plus latine avec, comme d’habitude, des notations politiques évidentes : les élites sont forcément rongées par la corruption et les “héros” du film sont donc des personnages qui renversent l’ordre établi. On peut également voir le film comme une métaphore d’un cinéma italien qui se sent redevable de son père (Hollywood), mais qui doit le tuer pour pouvoir se développer lui-même. Même si le scénariste Ernesto Gastaldi insiste sur l’absence de point de vue politique dans son script, ces notations lui ont échappé et sont bien présentes au cœur de ce western plus intéressant que la moyenne.
S’attardant sur la psychologie des personnages et sur leurs relations, Valerii prend son temps et signe une œuvre assez lente, avec un léger déficit d’action. Cependant, il met en scène un duel à cheval d’anthologie à goûter sans aucune modération.
Les derniers jours de la colère (On m’appelle Saligo) en VHS, DVD et blu-ray en France © All Rights Reserved
Un nouveau succès italien pour Giuliano Gemma
Le dernier jour de la colère a permis à Giuliano Gemma de parfaire son image de jeune premier starisé par Un pistolet pour Ringo (Duccio Tessari, 1965), tandis que Lee van Cleef devenait peu à peu une figure incontournable du genre depuis qu’il a joué pour Sergio Leone dans l’inoubliable Le bon, la brute et le truand (1966). Arrivant à la 5ème place du box-office italien annuel, Le dernier jour de la colère compte parmi les plus gros succès du genre et confirmait alors la vogue du western européen.
Ainsi, dès sa sortie à Paris, le mercredi 27 novembre 1968, le film décroche une belle quatrième place au box-office hebdomadaire et 35 715 pistoleros. Il s’agit d’ailleurs de la meilleure entrée de la semaine parmi les nouveautés du moment. Le métrage distribué par Les Films Marbeuf se maintient bien en deuxième semaine avec 24 292 retardataires. Toutefois, il doit céder sa place à d’autres nouveautés et va continuer sa carrière dans des salles de quartier, parvenant ensuite à cumuler, au fil des reprises, 238 425 aficionados de western spaghetti.
© 1967 Sancrosiap – Corona Filmproduktion – Divina-Film
Quand Le dernier jour de la colère devient On m’appelle Saligo
Sur la France entière Le dernier jour de la colère a eu les honneurs d’une présence sur les écrans avant Paris et le métrage cumule déjà 84 329 entrées au début du mois de décembre, lui permettant d’arriver en 18ème position du box-office hebdomadaire. A la mi-décembre, le western a déjà franchi la barre symbolique des 100 000 tickets vendus et va ensuite poursuivre une longue exploitation. Ainsi, le futur classique a été repris par le distributeur Audi Film qui l’a retitré On m’appelle Saligo, ce qui a permis au western de cumuler en fin de carrière 692 904 entrées.
A Paris, ce sont cinq cinémas qui proposent le film le 27 novembre 1968 : l’Ermitage, le Marbeuf, le Rex, le Telsar et la Rotonde. Grâce à un score costaud au Rex (23 525), Le dernier jour de la colère atterrit en 3e place hebdomadaire, avec 36 455 spectateurs. La prisonnière en 2e semaine et Le Gendarme se marie en 5e semaine, le coiffent au poteau. Le film est prévu pour deux semaines d’exclusivité, malgré une belle seconde semaine à 24 292 entrées. Les reprises lui permettront d’étoffer ses chiffres.
Les cinéphiles pourront noter que c’est d’ailleurs sous ce titre plus comique qui entend surfer sur la vogue des Trinita qu’il a été édité de nombreuses fois en VHS. Parmi les incongruités de l’exploitation, on signalera aussi une VHS intitulée Le duel des géants parue en 1989. En fait, il a fallu attendre les années 2000 pour que le long de Valerii retrouve son titre d’origine Le dernier jour de la colère, il est vrai plus proche de l’original.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 27 novembre 1968
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© 1967 Sancrosiap – Corona Filmproduktion – Divina-Film / Affiche : C. Belinsky. Tous droits réservés.
Biographies +
Tonino Valerii, Giuliano Gemma, Ricardo Palacios, Lee Van Cleef, Andrea Bosic, Yvonne Sanson, Mauro Mannatrizio, Paul Naschy, José Calvo, Vladimir Medar, Walter Rilla