Dominique, les yeux de l’épouvante est un film mineur dans la filmographie élogieuse de Michael Anderson, qui revenait au thriller machiavélique sous la forme d’une ghost story qui se cherche dans son ambiance.
Synopsis : A peine remise d’une grave chute, Dominique Ballard, femme d’un riche homme d’affaires, commence à être victime d’étranges et angoissantes visions. Est-elle en train de perdre la tête ? Est-elle victime d’une machination ? La demeure du couple est-elle réellement hantée ?
Critique : Dominique – les yeux de l’épouvante est une histoire malheureuse, celle de l’adaptation du roman de trente ans d’âge d’Harold Lawlor, What Beckoning Ghost, qui sera vouée à l’échec pour son producteur et fondateur de la société Sword & Sorcery. Milton Subotsky, en effet, espérait beaucoup de ce produit clé en main pour satisfaire les studios et distributeurs puissants du globe, en manque de sensations fortes, à une époque où le paranormal, le fantastique, mais aussi les scénarii tordus à la Agatha Christie, faisaient vibrer le box-office.
Malheureusement, il n’en sera rien. A l’issue de la projection au Marché du film à Cannes, en 1978, du nouveau long de Michael Anderson, l’auteur de l’adaptation du Tour du monde en 80 jours, avec David Niven, et plus récemment du succès du film de science-fiction avec Michael York, L’âge de Cristal, qui s’était vu adapté en série télévisée, les intéressés s’éloignent de l’offre jugée lente et poussiéreuse. A raison.
Milton Subotsky, ancienne figure de la Amicus, spécialiste de l’épouvante britannique, est donc contraint de se rabattre sur des distributeurs indépendants de toute petite taille pour essayer d’imposer ce film qui pourtant compte un casting royal (Jean Simmons, Cliff Robertson, Simon Ward…). Aussi, la première mondiale est organisée à Paris, au premier trimestre 1979, au Festival du Film Fantastique de Paris, durant lequel Alain Schlockoff, rédacteur en chef de L’Ecran Fantastique et créateur du Festival, reçoit Milton Subotsky, mais le jury de cette huitième édition ne le distinguera pas, préférant parer La nuit des masques (Halloween) de John Carpenter de la Licorne d’Or et du Prix d’interprétation féminine. Plus virtuose et dans l’air du temps.
Dominique sort in extremis trois ans après le marché du film de Cannes…
A compter de cette première mondiale un 11 mars 1979, il faudra compter pas moins de 2 ans et 3 mois pour que Dominique – les yeux de l’épouvante n’apparaisse sur le grand écran, chez un micro distributeur, Discop, qui lui trouvera 5 écrans parisiens pour un score minime de 4 120 entrées en deux petites semaines. Le secteur horrifique est alors embouteillé (le même jour sort Le monstre du train de Roger Spottiswoode) et un slasher au titre similaire, Les Yeux de la terreur , est toujours à l’affiche pour brouiller les pistes. Pour distinguer Dominique de la chanson qui nique nique par Sœur Sourire, Dominique était en effet affublé du titre alternatif Les Yeux de l’épouvante. Pas de chance.
La production britannique est d’autant plus maudite qu’entre son passage au Marché du Film et son apparition en salle, Michael Anderson réalise une mini série pour Milton Subotsky, Chroniques Martiennes, d’après l’œuvre de Ray Bradbury qui s’était impliqué sur ce projet. Malgré son extrême médiocrité, la série est resserrée dans un montage téléfilm de près de 2 heures qui atterrit dans nos salles un an avant la sortie hexagonale de Dominique, en juillet 1980. On en perd sa chronologie.
La réticence des distributeurs à exploiter Dominique est compréhensible. Cette Ghost Story qui évoque les films de cette fin de décennie comme Le fantôme de Milburn, ou Trauma, n’a ni le rythme ni l’allure pour épouvanter les spectateurs de l’époque qui se tournent vers des productions plus iconiques qui ne manquent pas. En V.H.S., en France, l’éditeur V.I.P. n’en tirera pas l’un des titres phares de son répertoire. Loin de là. C’est finalement dans la version blu-ray de 2023, chez Rimini Editions, qu’on réussit à trouver un charme à cette modeste enquête qui parvient à surmonter le rythme voulu par Anderson qui en avait perdu le montage désiré, tant le monteur et le producteur trouvèrent le résultat soporifique.
Une copie blu-ray qui redonne de l’allure à une œuvre jadis vue comme télévisuelle
En 2023, la fibre surnaturelle vieillotte somnole toujours et l’on n’est toujours pas pris par les frissons de l’angoisse, mais le thriller autour du décès d’une épouse riche et paranoïaque et ses (possibles) réapparitions de l’au-delà, est orchestré de façon plutôt chiadée, avec un bel éclairage et une atmosphère qui bénéficie énormément de ce que la restauration HD a pu lui apporter.
Dominique – les yeux de l’épouvante est le 26e titre de l’édition angoisse de Rimini, en combo DVD + Blu-ray, dans son éternel packaging limité cartonné. Il est paru le 1er septembre 2023, entre Sweet Sixteen et Fête sanglante, the Slumber Massacre Party. Pas de bonus audiovisuel, mais en lieu et place d’interview, on saura se contenter de la culture de Marc Toullec qui évoquera la carrière du producteur Milton Subotsky, l’un des gourous de la Amicus dans les années 60.