Alberto Sordi est l’un des rois de la comédie italienne. Il fut particulièrement grandiose pour Monicelli et Comencini.
Du music-hall à Fellini et Risi
Alberto Sordi débute au music-hall et à la radio, tout en assurant des doublages au cinéma. Son premier rôle au grand écran est dans Scipion l’Africain (1937) de Carmine Gallone. Il joue ensuite des seconds rôles pour Mario Bonnard, Mario Soldati, Goffredo Allesandrini ou Renato Castellani. C’est dans les années 50 que sa notoriété se consolide. Il donne la réplique à Totò dans Totò e i re di Roma (1952) de Steno et Monicelli, avant de collaborer avec Federico Fellini qui lui confie le rôle-titre dans Le Cheik blanc (1952) et en fait l’un des Vitelloni (1953). Il est ensuite tête d’affiche de la comédie musicale Une fille formidable (1953) de Mauro Bolognini, du péplum parodique Deux nuits avec Cléopâtre (1953) de Mario Mattoli, ou de la comédie La belle de Rome (1955) de Luigi Comencini, où il campe un bistrotier sensible au charme de Silvana Pampanini. La seconde moitié des années 60 le voit tourner une vingtaine d’autres films.
Plus que sa composition de l’empereur dans le curieux Les week-ends de Néron (1956) de Steno, on retiendra son rôle du Milanais Giovanni Busacca dans La grande guerre (1959) de Mario Monicelli, un sommet de la comédie italienne où il a pour partenaire Vittorio Gassman. Mais il est tout aussi excellent dans Venise, la lune et toi (1958) de Dino Risi ou Profession Magliari (1959) de Francesco Rosi. Dans les années 60, le personnage de Sordi est au point, celui d’un Italien moyen souvent pleutre et pathétique, mais dont la drôlerie et le manque de réelle malveillance attirent la sympathie du public. Il est savoureux en lieutenant dépassé par les événements dans La grande pagaille (1960) de Luigi Comencini, joueur impénitent dans Chacun son alibi (1960) de Mario Camerini, journaliste raté dans Une vie difficile (1961) de Dino Risi, cadre d’entreprise dans Mafioso (1962) d’Alberto Lattuada, ou homme d’affaires dans Il boom (1963) de Vittorio De Sica.
Alberto Sordi, un monument de la comédie italienne
Et si Sordi n’a pas le prestige international de Mastroianni, il obtient tout de même le Golden Globe du meilleur acteur dans une comédie pour L’amour à la suédoise (1963) de Gian Luigi Polidoro. Plus de vingt autres longs métrages le voient à l’affiche au cours de la décennie, comme Le gynéco de la mutuelle (1968) de Luigi Zampa. Alberto Sordi se lance même dans la réalisation avec Fumo di londra (1966), qui sera suivi de plusieurs autres films, dont Poussière d’étoiles (1973) et Je sais que tu sais… (1982), où il est covedette avec Monica Vitti. Les années 70 confirment le succès et le talent de Sordi, qui gagne le prix d’interprétation masculine au Festival de Berlin avec Détenu en attente de jugement (1971) de Nanni Loy. Son meilleur rôle de cette période est cependant celui du malchanceux joueur de cartes dans L’argent de la vieille (1972) de Luigi Comencini, aux côtés de Silvana Mangano, Joseph Cotten et Bette Davis.
Roi de la comédie italienne, Alberto Sordi brille aussi dans La plus belle soirée de ma vie (1972) d’Ettore Scola, Un bourgeois tout petit (1977) de Mario Monicelli, ou Le témoin (1978) de Jean-Pierre Mocky. Dans les années 80 et 90, Sordi répond encore présent sur les studios de tournage mais les bons rôles sont plus rares, malgré d’honorables prestations pour les fidèles Monicelli (Le marquis s’amuse, 1981) ou Scola (Le roman d’un jeune homme pauvre, 1995). D’autres cinéastes l’accompagnent également au cours de cette dernière période, tels Sergio Corbucci (Sono un fenomeno paranormale, 1985) ou Luigi Magni (Au nom du peuple souverain, 1990). Outre les récompenses mentionnées, Alberto Sordi est lauréat de douze David di Donatello.