Vaincre ou mourir : critique du film et test blu-ray (2023)

Biopic, Historique, Film de guerre | 1h39min
Note de la rédaction :
3/10
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Vaincre ou mourir, affiche

  • Réalisateur : Vincent Mottez Paul Mignot
  • Acteurs : Olivier Barthélémy, Jean-Hugues Anglade, Anne Serra, Dorcas Coppin, Francis Renaud, Gilles Cohen, Antoine Basler, Dominique Bettenfeld, Grégory Fitoussi, Hugo Becker, Rod Paradot, Constance Gay
  • Date de sortie: 25 Jan 2023
  • Nationalité : Français
  • Titre original : Vaincre ou mourir
  • Titres alternatifs : -
  • Année de production : 2022
  • Autres acteurs : Jonathan Demurger, Damien Jouillerot, Jacques Milazzo, Léon Durieux
  • Scénariste : Vincent Mottez d'après le spectacle du Puy du Fou, Le Dernier Panache
  • Directeur de la photographie : Alexandre Jamin
  • Compositeur : Nathan Stornetta
  • Monteur : Tao Delport
  • Producteur : Nicolas de Villiers
  • Sociétés de production : Puy du Fou Films, StudioCanal
  • Distributeur : Saje Distribution
  • Éditeur vidéo : Puy Du Fou Films (DVD et blu-ray, 2023)
  • Date de sortie vidéo : 25 mai 2023
  • Box-office France / Paris-périphérie : 306 433 entrées / 59 175 entrées
  • Box-office nord-américain / monde : -
  • Budget : Entre 3,5 M d’euros et 5M d’euros selon les sources
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleurs / Son : 5.1
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique Affiche RYSK © Photos : Thibault Grabherr & Christine Tamalet © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : Puy du Fou Films, StudioCanal © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Tagline : L'incroyable épopée de Charette
Note des spectateurs :

Adaptation d’un spectacle du Puy du Fou, Vaincre ou mourir aborde une période complexe de l’histoire par un biais idéologique rendant sa pertinence caduque. En outre, il s’agit d’une œuvre cinématographique très faible.

Synopsis : 1793. Voilà trois ans que Charette, ancien officier de la Marine Royale, s’est retiré chez lui en Vendée. Dans le pays, la colère des paysans gronde : ils font appel au jeune retraité pour prendre le commandement de la rébellion. En quelques mois, le marin désœuvré devient un chef charismatique et un fin stratège, entraînant à sa suite paysans, déserteurs, femmes, vieillards et enfants, dont il fait une armée redoutable car insaisissable. Le combat pour la liberté ne fait que commencer…

De la docu-fiction à la fiction tout court

Critique : En 2021, Nicolas de Villiers, fils du politicien controversé Philippe de Villiers, crée une société de production originale nommée Puy du Fou Films. Le but de cette nouvelle structure est de conquérir le marché du film avec des œuvres librement inspirées des spectacles du fameux parc du Puy du Fou situé en Vendée. Ainsi, le premier spectacle à avoir les honneurs d’une transposition à l’écran est Le dernier panache qui a conquis des millions de visiteurs lors de ses représentations scéniques au sein du parc. Afin de concrétiser ce rêve de cinéma, Nicolas de Villiers a fait appel au scénariste et auteur Vincent Mottez qui est déjà connu des amateurs d’histoire pour avoir signé plusieurs numéros de l’émission Secrets d’histoire, présentée par Stéphane Bern.

Si l’ambition initiale était de réaliser une docu-fiction comme on en voit beaucoup sur le service public, Vaincre ou mourir a progressivement évolué vers autre chose. En s’attachant les services du cinéaste publicitaire Paul Mignot, le projet a pris une autre ampleur, devenant en cours de route une véritable fiction autour d’un personnage clé des guerres de Vendée, le controversé François Athanase Charette de La Contrie, nommé plus fréquemment Charette. Malheureusement, le long-métrage ne se remet pas de ce changement de braquet effectué en cours de production puisque Vaincre ou mourir n’est finalement ni une bonne docu-fiction, ni un bon film de cinéma.

Un biopic orienté qui se donne de fausses allures de film historique

Le film sur la Vendée rebelle débute par de très courts entretiens avec des historiens qui évoquent très rapidement le contexte révolutionnaire des années 1789-1793. La forme étonne d’autant plus que ce type de format ne correspond aucunement à une œuvre cinématographique, mais bien à un programme télévisuel. Trop courtes, ces interventions, dont une de l’historien Reynald Sécher dont la thèse sur le « génocide » vendéen est loin de faire l’unanimité parmi les historiens, n’ont visiblement pas d’autre but que de légitimer l’intégralité de ce qui va suivre, à savoir un biopic très orienté sur Charette, ce leader de la révolte vendéenne au parcours complexe.

Vaincre ou mourir échoue pleinement dans la caractérisation de ses personnages principaux. Là ou des œuvres comme Les Chouans (Calef, 1947) ou encore Chouans ! (De Broca, 1988) parvenaient à investir le champ de la fiction en impliquant le spectateur dans cette tragédie vécue effectivement par la Vendée, Vaincre ou mourir est sans cesse contaminé par son idéologie passéiste au risque d’en devenir caricatural. Ici, pas un Républicain pour sauver les autres, tandis que tous les Vendéens apparaissent comme des victimes du régime. Exit donc toute forme de nuance dans ce tableau à charge contre la République et l’héroïsation systématique des victimes de la Terreur.

Vaincre ou mourir, un film sans nuance qui ne sert pas sa cause

En réalité, si l’on omet deux ou trois petites erreurs, Vaincre ou mourir n’est aucunement faux sur le plan historique. Les faits et événements ont été globalement respectés. Le problème vient de l’absence de contextualisation (hormis les entretiens du début, trop évasifs) et dans le regard porté sur les événements. Ainsi, il n’est jamais fait mention du fait que de nombreux Républicains se sont insurgés contre l’horreur qui se déroulait en Vendée – notamment par le biais des Colonnes infernales, une réalité historique absolument glaçante. Ensuite, la figure de Charette n’est pas aussi lisse que celle proposée par les auteurs. Il ne faut pas oublier que pendant longtemps, les monarchistes ne se référaient pas à son action car sa vie était loin de répondre aux canons de l’Eglise, lui qui fut infidèle et qui, lors des combats, a même sciemment tué un prêtre.

Bien entendu, rien de tout cela n’est mentionné dans Vaincre ou mourir qui préfère faire de son héros une figure christique, comme l’indique la scène de son exécution, proche du dolorisme chrétien. Au lieu de tenter d’expliquer la période et sa dureté manifeste (la Terreur menée par Robespierre est assurément une honte pour la République), les auteurs préfèrent donc simplifier au-delà du raisonnable les enjeux pour ne livrer qu’un basique film de guerre opposant les gentils chrétiens maltraités et les méchants républicains mécréants.

Une réalisation confuse et une musique pompeuse

Enfin, signalons pour ceux ayant écrit que la période était méconnue et rarement traitée, qu’elle est enseignée en classe de Première au lycée sans faire l’impasse sur les massacres occasionnés par la République et que de nombreux films ont déjà abordé cette période sombre de notre histoire nationale (outre les deux films cités précédemment, on peut se rappeler également du Danton (1983) de Wajda et même de la deuxième partie du film officiel de La Révolution française (1989) dirigée par Richard T. Heffron et basée sur les violences républicaines sous le titre Les années terribles).

Vaincre ou mourir, photo

© 2022 Puy du Fou Films / Photographie : Christine Tamalet. Tous droits réservés.

Outre ce biais idéologique, Vaincre ou mourir est aussi et avant tout un mauvais film de cinéma. Baignant dans une lumière outrageusement esthétisante pour essayer de masquer la pauvreté initiale du budget, la réalisation de Paul Mignot et Vincent Mottez privilégie l’image publicitaire choc à la puissance de la suggestion. Ici, tout est surligné à l’envi par des plans signifiants, des dialogues ampoulés et une musique pompeuse qui dégouline en permanence des enceintes pour indiquer au spectateur quelle émotion il doit ressentir. A force de multiplier les batailles, jamais lisibles contrairement à ce que sait faire un cinéaste comme Ridley Scott, les réalisateurs noient leur œuvre dans un flot permanent de violence qui ne laisse jamais vivre les personnages, tous réduits à des archétypes.

Un téléfilm de luxe qui a su trouver son public en province

Noyés dans la masse, les acteurs ont d’ailleurs un mal fou à exister. Si Hugo Becker s’en sort moyennement dans le rôle de Charette, on remarque à peine Rod Paradot, pourtant si bon dans La tête haute (Bercot, 2015). Et que dire de l’intervention de Jean-Hughes Anglade, si ce n’est que l’acteur semble comme absent. Comme d’autres comédiens chevronnés peinent à s’imposer, on évoquera sans doute un défaut de direction générale. Terriblement ennuyeux, ce téléfilm de luxe échoue donc à faire partager le sort peu enviable de ces Vendéens qui méritaient bien mieux comme hommage que ce pamphlet au message politique douteux, visant à diviser le peuple français.

Soutenu par StudioCanal, le métrage qui s’annonçait polémique a finalement été distribué par Saje Distribution, société habituée à sortir des films chrétiens sur notre territoire. Le résultat a été assez prévisible à Paris où le film n’a trouvé que six salles pour le programmer. Le long-métrage n’a pas dépassé les 59 175 Franciliens en fin de carrière. Le reste de la France a été plus conciliant avec une belle entame la semaine de sa sortie – 107 762 entrées dans 188 sites, ce qui en a fait la meilleure moyenne de la septaine. Par la suite, le long-métrage a profité de la polémique l’entourant et a continué à attirer un public conquis d’avance en se maintenant parfaitement bien. Il a terminé sa course avec 306 433 aficionados de CNews, ce qui en fait à ce jour le plus gros succès du distributeur Saje.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 25 janvier 2023

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Vaincre ou mourir, affiche

Affiche RYSK © Photos : Thibault Grabherr & Christne Tamalet

Biographies +

Vincent Mottez, Paul Mignot, Olivier Barthélémy, Jean-Hugues Anglade, Anne Serra, Dorcas Coppin, Francis Renaud, Gilles Cohen, Antoine Basler, Dominique Bettenfeld, Grégory Fitoussi, Hugo Becker, Rod Paradot, Constance Gay

Mots clés

La révolution française au cinéma, Film historique, La religion au cinéma

 

Box-office :

Retour sur l’un des films les plus clivants de l’année 2023, au buzz qui déchaîna les passions et les haines entre internautes et camps politiques.

Véritable reflet de la société française de l’information continue et des raisons sociaux, une société globalisée, twittérisée, surinformée, prête à endosser des idéaux qui dépassent la réalité culturelle et la réalité tout court, Vaincre ou mourir a déchaîné les haines et les passions lors de sa sortie en salle. La France conservatrice a encensé le projet quand la Gauche très à Gauche s’est insurgée contre ce phénomène médiatique monté de toutes pièces par des manipulateurs de l’histoire.

Le grand remplacent au cinéma ?

Le résultat au box-office a été à l’image du déchaînement de vents contraires à l’encontre de cette reconstitution. Après une série d’avant-premières fructueuses à travers la France (23 152 entrées), la première semaine a su galvaniser les troupes : 83 814 entrées dans 188 cinémas, pour un projet entre 3.5 et 5 millions d’euros (cela varie en fonction des sources), ce n’est pas mal du tout. La 8e place hebdomadaire malgré des échos assez catastrophiques démontre la validité de cette offre politico-cinématographique auprès d’une frange de la population qui aime se laisser conter l’histoire via le prisme déformant et obsessionnel de la chaîne de Vincent Bolloré, CNews. C’est même la 4e meilleure moyenne de la semaine derrière le prestigieux Tar, de Todd Field, avec Cate Blanchett qui entre en 7e place, Babylon alors en deuxième semaine et en seconde position (347 316 entrées dans 618 salles) et évidemment, l’éternel Avatar : La voie de l’eau, magnifique numéro 1, en 7e semaine, avec 515 002 entrées dans 791 cinémas.

Vaincre ou mourir, une photo du film

© 2022 Puy du Fou Films / Photographie : Christine Tamalet. Tous droits réservés.

Vaincre ou mourir ou Tirailleurs ? Le public sommé de choisir son camp

Cette semaine-là, un autre film historique français poursuit une carrière satisfaisante : Tirailleurs (Gaumont). Ce film, objectivement très moyen, avec Omar Sy, est alors érigé en œuvre progressiste qu’il faut défendre pour contrer le racisme et les préjugés, puisqu’il s’agit de reconnaitre le rôle des Tirailleurs sénégalais, dans l’armée française, pendant la première guerre mondiale. L’anti CNews, par conséquent.

Armée d’un budget de 12 millions d’euros, Tirailleurs affiche cette semaine-là de vrais arguments. Il est évidemment devant la production du Puy du fou, en 4e place, avec 121 709 entrées dans plus de 900 cinémas. Le score est poussif, mais le million est accompli, ce qui démontre une vraie adhésion du public à la cause défendue, à ses valeurs humaines et au choix d’Omar Sy, toujours en tête des personnalités masculines préférées des Français.

Vaincre ou mourir ne bénéficiera jamais d’autant de salles, de positivité pour calibrer ses ambitions sur le grand écran. Néanmoins, il serait incohérent que de minimiser son importance dans les salles. Sa deuxième semaine à 73 397 entrées (-12%) est le fruit des débats qui animent les plateaux et le Web français. La baisse minime de ses chiffres démontre une authentique volonté d’afficher sa couleur politique en salle. On notera que la production du Puy du Fou a gagné 52 écrans supplémentaires et conserve une belle moyenne par salle.

Les débats à la télévision et sur les réseaux alimentent le buzz

La troisième semaine est loin d’être grandiose (-29%, 51 790 entrées, 304 cinémas), car la réalité qualitative est un frein pour embrasser un public plus large qui louerait un grand spectacle populaire, ce que Vaincre ou mourir rêverait de devenir et ne deviendra pas à ce niveau. La production Canal+ se range encore dans le top 15 et a dépassé largement les 200 000 tickets. C’est gagnant.

Les choses redescendent en 4e semaine. Les débats télévisés portent sur une actualité plus brûlante qui relègue le programme aux opportunités éventuelles pour le public retardataire. Vaincre ou mourir est 20e, avec une baisse très acceptable de 37% de sa fréquentation, pour un total de 264 695 spectateurs.

C’est vraiment en 5e semaine que le programme dérouille avec une baisse de 54% (30e place, 14 890 entrées). Dès lors, la chute est inexorable (-64%, en 6e semaine ; – 54% en 7e semaine où il n’a plus que 2 475 spectateurs dans 57 cinémas).

Pour son 8e tour, alors que les Vendéens doivent s’incliner en 80e place (-71%, 713 entrées dans 4 salles), on pourrait penser que les 287 463 spectateurs de Vaincre ou mourir sonnent le glas du film. Il n’en est rien. Le distributeur Saje a de la ressource et permettra au film de dépasser les 300 000 spectateurs grâce à un tour de France des petites villes.

Vaincre ou mourir, une photo du film 2

© 2022 Puy du Fou Films / Photographie : Christine Tamalet. Tous droits réservés.

Un film historique malgré tout

Dans le combat progressiste/conservateur de l’année 2023, en proie à une guerre culturelle à l’école, dans les médias et évidemment sur les réseaux très asociaux, la 9e semaine de Vaincre ou mourir est remarquable puisque avec une baisse de 80% de sa fréquentation et 146 spectateurs dans 1 salle, la production se retrouve derrière Les Rascals, alors en bout de vie également. Le film antiracisme d’une Gauche militante qui revient sur les années 80 et les ratonnades, est atone, avec 176 spectateurs dans 1 salle pour un total de 37 415 entrées et un budget dans la fourchette basse de Vaincre ou mourir (3 500 000 euros).

Historiquement, les générations à venir auront beaucoup d’intérêt à regarder la sociologie du box-office en 2023 pour mieux comprendre la physionomie de la France. Ce début d’année 2023 offre sans conteste un bel éclairage sur la fracture et la binarité d’une nation, celle d’un président qui se dit ni de Gauche, ni de Droite, mais qui semble dans son rapport vertical au peuple, accroître les clivages.

Comme quoi, Vaincre ou mourir est devenu contre toute attente un vrai film historique au-delà de toute considération de succès  ou d’échec.

Box-office de Frédéric Mignard

Le test du blu-ray

Une édition classique, mais techniquement probante d’une œuvre franchement dispensable. Test effectué à partir du produit fini.

Compléments & packaging : 3 / 5

Le blu-ray dispose d’un boitier classique noir, recouvert d’un fourreau protecteur reprenant l’affiche cinéma du film. Sur la galette proprement dite, le spectateur pourra suivre un making of assez complet de 25 minutes qui donne largement la parole aux producteurs, réalisateurs et acteurs, le tout baignant dans un pur esprit promotionnel. Toutefois, il est intéressant de comprendre comment un tel film a pu voir le jour, notamment grâce aux costumes et équipements déjà présents dans le parc du Puy du Fou. Ensuite, un module très court évoque l’avant-première parisienne du film, avec aucun recul critique. Reste donc à consulter un teaser et la bande-annonce du long.

L’image : 5 / 5

Très belle, parfaitement définie et boostée par des couleurs pimpantes et chatoyantes, l’image de Vaincre ou mourir pourrait s’apparenter à celle d’un clip vidéo de type Laurent Boutonnat – le talent pour la mise en scène en moins. Le blu-ray rend parfaitement justice au travail du directeur de la photographie.

Le son : 4 / 5

Le long-métrage est proposé à la fois en DTS HD Master Audio 5.1 et en simple stéréo. La piste spatialisée est bien entendu la plus efficace, profitant notamment aux nombreuses intrusions d’une musique volontairement pompeuse et sirupeuse. Les batailles sont également bien spatialisées sur les différentes enceintes. On notera aussi la présence d’une piste en audiodescription et des sous-titres pour malentendants.

Test du blu-ray : Virgile Dumez 

Vaincre ou mourir, jaquette blu-ray

© 2022 Puy du Fou / Design : Edouard Chastenet. Tous droits réservés.

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Vaincre ou mourir, affiche

Bande-annonce de Vaincre ou mourir

Biopic, Historique, Film de guerre

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