Morituri : la critique du film (1966)

Guerre, Espionnage | 2h03min
Note de la rédaction :
6/10
6

  • Réalisateur : Bernhard Wicki
  • Acteurs : Marlon Brando, Trevor Howard, Yul Brynner, Hans Christian Blech, Janet Margolin
  • Date de sortie: 09 Mar 1966
  • Année de production : 1964
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : Morituri
  • Titres alternatifs : Le Saboteur (Québec), Saboteur: Code Name Morituri (reprise américaine), The Saboteur Code Name - "Morituri (Royaume-Uni), Sabotören (Suède), Saboteur in volle zee (Pays-Bas), Sabotøren (Danemark), I morituri (Japon)
  • Autres acteurs :
  • Scénariste : Daniel Taradash
  • D'après une oeuvre de : Werner-Jörg Lüddecke
  • Monteur : Joseph Silver
  • Directeur de la photographie : Conrad L. Hall
  • Compositeur : Jerry Goldsmith
  • Chef Maquilleur : Ben Nye
  • Chef décorateur : Moss Mabry
  • Directeur artistique :
  • Producteur : Aaron Rosenberg
  • Producteur associé Barney Rosenzweig
  • Sociétés de production : Arcola Pictures, Colony Productions
  • Distributeur : 20th Century Fox (France), Twentieth Century Fox (USA)
  • Date de sortie américaine : 25 août 1965
  • Date de sortie reprise :
  • Editeur vidéo : 20th Century Fox (2006), ESC (DVD, 2017), ESC (DVD, Blu-ray, 2018)
  • Date de sortie vidéo : 22 février 2006 (DVD, Twentieth Century Fox), 17 février 2017 (2017, ESC), 18 septembre 2018 (DVD, Blu-ray ESC)
  • Budget : 6 290 000$
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 328 063 entrées / 65 688 entrées
  • Box-office nord-américain / monde : 4 045 000$
  • Classification : Tous publos
  • Formats : 1.85 : 1 / Noir et Blanc (35mm) / Mono
  • Nominations : Oscar des Meilleurs costumes et Oscar de la Meilleure photo pour un film en noir et blanc
  • Récompenses : -
  • Illustrateur/Création graphique : © Vanni Tealdi. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © 20th Century Fox. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Tagline : (...) un des suspenses les plus puissants de la seconde guerre mondiale !
Note des spectateurs :

Film de guerre classique mâtiné d’espionnage, Morituri bénéficie d’une réalisation efficace, d’acteurs de premier ordre et d’un point de vue intéressant sur les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale. Malgré tout, l’essai coula aux fins fonds du box-office mondial devenant l’un des flops de l’année 1965 aux USA et de l’année 1966 en France.

Synopsis : Japon, 1942. L’amiral Wendel, de l’état-major de la marine allemande, confie au capitaine Mueller, malgré ses mauvais états de service, le commandement de l’Ingo. Ce cargo doit lever l’ancre pour aller livrer à Bordeaux un chargement de caoutchouc naturel. Mueller a ordre de saborder le navire en cas d’attaque des Alliés afin d’empêcher qu’ils ne s’emparent de sa cargaison, indispensable à l’effort de guerre. De son côté, en Inde, le colonel britannique Statter n’ignore rien de la précieuse livraison de l’Ingo. Pour récupérer le bâtiment intact en pleine mer, il contraint Schroeder, un pacifiste allemand et déserteur caché sous la fausse identité de Robert Crain, d’embarquer sur le navire en tant qu’officier SS chargé de la sécurité, afin d’en désarmer les charges explosives…

Critique : Alors que les années 50 ont permis l’ascension fulgurante de Marlon Brando au firmament des grandes stars, le début de la décennie suivante s’avère plus difficile pour lui. Les succès se font de plus en plus rares et l’acteur fait quelques mauvais choix dont celui de jouer dans ce Morituri face à Yul Brynner. Le film n’est aucunement médiocre, mais son sujet même, assez peu enthousiasmant sur le papier, n’avait pas grand-chose pour séduire le grand public. Et de fait, le long-métrage a été un cuisant échec commercial sur tous les territoires, ne réussissant à glaner que 4 millions de dollars pour une mise de départ de plus de six millions. Une contre-performance qui n’a pas arrangé les affaires de la star, décidément en perte de vitesse en ce milieu des années 60.

Pourtant, tout n’est pas à jeter dans ce récit de guerre traditionnel concocté par la plume de Werner Jörg Lüddecke (auteur du diptyque Le tombeau hindou/Le tigre du Bengale pour Fritz Lang). On apprécie notamment le cadre d’un navire allemand – même si tous à bord s’expriment en anglais, bien entendu – ce qui permet d’avoir un point de vue différent sur la guerre. Cette finesse d’analyse n’est pas étrangère au fait que les principaux auteurs sont allemands eux-mêmes. Ainsi, le réalisateur Bernhard Wicki a effectivement participé à la Seconde Guerre mondiale et peut être considéré comme un spécialiste de ce type de film depuis le triomphe mérité du Pont tourné en 1959. Rappelons également qu’il fut chargé par Zanuck des scènes germaniques du Jour le plus long (1962), ce qui lui a ouvert les portes d’Hollywood

Dans Morituri, les Allemands ne sont plus tous considérés comme des nazis fanatiques, mais bien comme des humains à part entière qui doutent de leur mission et qui, pour certains, font l’objet de menaces et chantages qui les contraignent à agir contre leur gré. Bien entendu, l’on y croise aussi un officier dogmatique – excellente prestation de Martin Benrath, vraiment charismatique dans ce rôle – ainsi que quelques figures patibulaires comme celle incarnée par Hans Christian Blech. L’intégralité du long-métrage se déroulant sur le bateau, il fallait tout le talent des acteurs et le savoir-faire technique de Wicki pour ne pas ennuyer le spectateur.

Editions vidéo de Morituri (1966), chez 20th Century Fox, et ESC.

Editions vidéo de Morituri (1966), chez 20th Century Fox, et ESC éditions.
© 20th Century Fox. Tous droits réservés / All rights reserved

Le pari est en partie réussi, car si l’on excepte l’introduction artificielle d’un personnage féminin d’origine juive – qui semble parachuté pour évoquer le destin tragique de ce peuple – le suspense est tenu de bout en bout par un réalisateur plutôt inspiré. Il est sans nul doute aidé en cela par son directeur de la photographie Conrad Hall qui allait par la suite se faire remarquer sur des œuvres marquantes comme Luke la main froide, De sang-froid et Butch Cassidy et le Kid. Ici, les cadrages sont savants, les mouvements de caméra amples et les contrastes magnifiquement gérés, faisant de Morituri un régal pour les yeux.

Box-office de Morituri : une cargaison dangereuse

Le film ne serait pas aussi prenant s’il n’était interprété par un Marlon Brando au sommet de son talent. Avec peu d’effets, il réussit à faire ressentir chaque doute de son personnage, homme apolitique complexe qui finit par choisir son camp après moult hésitations. Face à lui, Yul Brynner est moins monolithique que d’habitude et insinue également le doute quant à ses motivations. Si toutes les péripéties ne sont pas passionnantes et si une quinzaine de minutes sont en trop, Morituri demeure un film d’espionnage tout à fait recommandable en dépit d’un échec commercial qui le voua aux oubliettes du 7e art. Il ne réalisera même pas la moitié de son budget et pour la Fox, toujours dans la tourmente, un an après l’accident industriel de Cléopâtre, de Joseph L. Mankiewicz, l’obus est létal.

Pourtant promis aux vertiges des Oscars, la production 20th Century Fox devra se contenter de deux nominations dites techniques (photo et costumes) quand Docteur Jivago, La mélodie du bonheur (également issu du catalogue de la Fox), mais aussi Darling, Des Clowns par milliers et La Nef des fous se retrouvent au firmament des nominations annuelles.

La Fox cale la production Darryl-F. Zanuck le 9 mars 1966 sur 3 écrans parisiens d’importance : le Rex, le Normandie et la Rotonde. De quoi pimenter les curiosités de 35 388 spectateurs en première semaine, soit une petite 4e place, derrière Du Rififi à Paname qui réalisait près du double en première semaine, mais aussi derrière L’espion qui venait du froid, la comédie française Monnaie de singe d’Yves Robert, avec Robert Hirsch qui savourait 46 947 entrées en première semaine.

Il termine son exclusivité parisienne à l’issue d’une seconde semaine affichant à peine 30 300 spectateurs supplémentaires, pour un total déstabilisant de 65 688 spectateurs. Sur l’ensemble du territoire, il devra se contenter de 328 063 tickets et ne sera plus exploité dans nos cinémas.

Plusieurs éditions DVD paraitront en France, la première en 2006 chez la Fox, puis en 2017 chez ESC Editions, qui reproposera le film un an plus tard en blu-ray, avec un visuel différent.

 Critique de Virgile Dumez – Box-office de Frédéric Mignard

Les sorties de la semaine du 9 mars 1966

Affiche de Morituri de Bernhard Wicki

Affiche : © Vanni Tealdi © 20th Century Fox. Tous droits réservés / All rights reserved

Biographies +

Bernhard Wicki, Marlon Brando, Trevor Howard, Yul Brynner, Hans Christian Blech, Janet Margolin

Mots clés

1966, Cinéma américain, Deuxième guerre mondiale au cinéma, Les flops de l’année 1965, Les flops de l’année 1966, Noir et blanc, Les affiches de Vanni Tealdi, Oscars 1966

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