Le champion : la critique du film (1949)

Drame, Film noir | 1h39min
Note de la rédaction :
7,5/10
7,5
Le champion, l'affiche

  • Réalisateur : Mark Robson
  • Acteurs : Kirk Douglas, Arthur Kennedy, Paul Stewart, Marilyn Maxwell, Ruth Roman
  • Date de sortie: 29 Juin 1949
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : Champion
  • Titres alternatifs : Zwischen Frauen und Seilen (Allemagne) / El ídolo de barro (Espagne) / O Grande Ídolo (Portugal) / El triunfador (Mexique) / Il grande campione (Italie) / Nyrkkeilysankari (Finlande) / O Invencível (Brésil) / Sieger ohne Herz (Autriche)
  • Année de production : 1949
  • Autres acteurs : Lola Albright, Harry Shannon, Esther Howard
  • Scénaristes : Carl Foreman, Ring Lardner
  • Monteur : Harry W. Gerstad
  • Directeur de la photographie : Franz Planer
  • Compositeur : Dimitri Tiomkin
  • Chef maquilleur : Gustaf Norin
  • Chef décorateur : Rudolph Sternad
  • Directeur artistique : -
  • Producteur : Stanley Kramer
  • Producteurs exécutifs : -
  • Sociétés de production : Screen Plays, Stanley Kramer Productions
  • Distributeur : Les Artistes Associés
  • Distributeur reprise : -
  • Date de sortie reprise : -
  • Editeurs vidéo : Société Industrielle de l’Image (VHS, 1992) / Rimini Editions (DVD, blu-ray, 2020)
  • Dates de sortie vidéo : 1992 (VHS) / 25 août 2020 (DVD et blu-ray)
  • Budget : 595 000 $ (soit 7 617 550 $ au cours de 2024)
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 434 077 entrées / 80 351 entrées
  • Box-office nord-américain : 5 800 000 $ (soit 74 260 000 $ au cours de 2024)
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.37 : 1 / Noir et Blanc / Son : Mono
  • Festivals : Festival de Venise 1949 : en compétition
  • Nominations : Golden Globes 1950 : Meilleur espoir féminin pour Ruth Roman / Oscars 1950 : Meilleur acteur pour Kirk Douglas; Meilleur acteur dans un second rôle pour Arthur Kennedy; Meilleur scénario; Meilleure photographie; Meilleure musique
  • Récompenses : Golden Globes 1950 : Meilleure photographie pour Franz Planer / Oscars 1950 : Meilleur montage pour Harry Gerstad
  • Illustrateur/Création graphique : © Koemzo Artwork (jaquette blu-ray). Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Paramount Pictures. All Rights Reserved. Tous droits réservés.
  • Tagline : -
Note des spectateurs :

Fausse success story, Le champion détruit consciencieusement le mythe américain du self made man à l’aide d’une esthétique expressionniste et du jeu remarquable de Kirk Douglas, en mode Rastignac. Intéressant.

Synopsis : Venu avec son frère à Los Angeles pour s’occuper d’un restaurant, Midge Kelly rencontre Tommy Haley, un manager qui va lui apprendre l’art de la boxe. Prêt à tout pour réussir, dénué de scrupules, Midge va devenir un champion. Mais le prix à payer sera très élevé.

Une œuvre signée par des transfuges de la RKO Pictures

Critique : Formé à l’école de la RKO Pictures, le cinéaste Mark Robson s’est d’abord fait remarquer au côté de Robert Wise en tant que monteur sur des chefs d’œuvre comme Citizen Kane (Orson Welles, 1941) et La splendeur des Amberson (Orson Welles, 1942), mais aussi sur les productions Val Lewton comme La féline, Vaudou et L’homme-léopard, tous trois réalisés par Jacques Tourneur. Très content de son travail en tant que monteur, Val Lewton lui a permis de devenir réalisateur sur des petites productions comme Le vaisseau fantôme (1943), L’île des morts (1945) et surtout l’excellent Bedlam (1946). A cette époque, Mark Robson a également fait la connaissance de Stanley Kramer qui se met finalement à son compte après la Seconde Guerre mondiale.

Celui qui va bientôt devenir un producteur influent demande donc à Mark Robson de le rejoindre au sein de sa compagnie Screen Plays Inc. et lui propose de réaliser la comédie Ça c’est New York (1948). Robson n’est pas intéressé par le sujet du long-métrage qui tombe finalement dans l’escarcelle de Richard Fleischer et préfère se pencher sur le script de Carl Foreman intitulé Le champion (1949). Ce dernier s’inspire d’une histoire de l’ancien journaliste sportif Ring Lardner qui décrit l’ascension d’un champion de boxe au cœur d’un milieu gangrené par la corruption.

Le champion déploie une esthétique expressionniste typique du film noir

Le réalisateur Mark Robson y voit l’opportunité de tourner un film noir marqué par une esthétique expressionniste. Pour cela, il est accompagné du directeur de la photographie Franz Planer qui est un vétéran du cinéma muet germanique et qui connaît donc parfaitement le secret des éclairages contrastés. Cela explose de manière évidente dès le premier plan du film où le couloir qui mène au ring est plongé dans l’obscurité, uniquement traversé de quelques halos de lumière. Ce premier plan programmatique annonce ce que sera ce curieux film sportif qui entend montrer la face cachée d’un sport où héroïsme et combattivité riment avec trahison et coups bas.

Le champion, la jaquette du blu-ray

© 1949 Paramount Pictures / Design : Koemzo Artwork. Tous droits réservés.

Si la promotion du Champion (1949) invite le spectateur à une success story dans le style qui deviendra celui d’une œuvre comme Rocky (John G. Avildsen, 1976), la réalité du long-métrage en est profondément éloignée. Certes, les auteurs suivent bien l’ascension d’un homme issu du peuple qui prend sa revanche sur sa destinée toute tracée, mais loin d’être une ode à la réussite personnelle, le film s’avère très critique envers la philosophie du self made man. Interprété avec beaucoup de hargne par un tout jeune Kirk Douglas, le héros dégage une vraie volonté de surpasser sa condition et de prendre sa revanche sur la vie. Mais au lieu de susciter l’empathie du spectateur, le boxeur obstiné devient un véritable anti-héros tant son attitude envers ses proches est abjecte.

Une critique franche de l’arrivisme

Monstre d’égoïsme et d’arrivisme, Midge (Kirk Douglas, la mâchoire serrée) doit abattre tous les obstacles qui l’empêchent d’atteindre le sommet. Ainsi, il est prêt à laisser tomber les femmes de sa vie (excellente Ruth Roman en jeune fille amoureuse), mais aussi le manager qui lui a mis le pied à l’étrier (très juste Paul Stewart), ainsi que son frère handicapé (formidable Arthur Kennedy, éternel acteur de l’ombre). Dans sa quête infinie de reconnaissance par la foule, Midge ne remarque même pas qu’il détruit son entourage et qu’il sacrifie tout à son ambition personnelle. Un discours étonnant au cœur du cinéma américain qui a généralement tendance à vanter la réussite personnelle. On sent donc bien ici l’influence du producteur Stanley Kramer, connu pour ses opinions de gauche, vis-à-vis d’une société capitaliste agressive et destructrice.

Bien entendu, Le champion ne serait pas aussi réussi sans l’incroyable prestation de Kirk Douglas qui a insisté lourdement auprès de la production pour obtenir le rôle. Le film pourrait presque être vu comme une œuvre autobiographique pour ce comédien qui vient lui aussi d’une famille très pauvre et qui s’est hissé au plus haut par l’unique force de son caractère. Alors qu’il n’obtenait que des seconds rôles au cours des années 40, Kirk Douglas a senti que ce rôle d’anti-héros pouvait lui apporter la gloire, ce qui fut effectivement le cas.

Le champion permet à Kirk Douglas d’accéder au vedettariat

En effet, Le champion a été distribué aux Etats-Unis par la United Artists avec un beau succès à la clé. Ainsi, la petite production estimée à 595 000 $ (soit 7 617 550 $ au cours de 2024) a fini par rapporter la coquette somme de 5 800 000 $ (soit 74 260 000 $ au cours de 2024) au box-office nord-américain. De quoi faire de Kirk Douglas une vedette bankable.

Présenté en compétition lors du festival de Venise 1949, Le champion a ensuite été diffusé en France au cours de l’été 1949, comme le prouve son recensement dans Le Cinéopse n°280 du 1er septembre 1949 (page 6), affublé d’une critique laudative. En France, le film a terminé sa carrière avec 434 077 sportifs dans les salles le diffusant.

Nominé dans deux catégories aux Golden Globes 1950, Le champion a obtenu le prix de la meilleure photographie pour Franz Planer. Aux Oscars 1950, le métrage décroche six nominations, mais ne reçoit qu’une unique récompense pour son montage réalisé par Harry Gerstad. Depuis, le film est considéré comme un petit classique du film de boxe et du film noir. Paru en France en VHS au début des années 90, Le champion a été publié en 2020 dans une édition blu-ray restaurée par l’éditeur Rimini. L’occasion rêvée de (re)découvrir les premiers pas convaincants de Kirk Douglas en tant que star.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 29 juin 1949

Acheter le film en blu-ray

Voir le film en VOD

Le champion, l'affiche

© 1949 Paramount Pictures. All Rights Reserved.

Biographies +

Mark Robson, Kirk Douglas, Arthur Kennedy, Paul Stewart, Marilyn Maxwell, Ruth Roman

Mots clés

Films sur la boxe, Films sur le sport, Film noir

 

Trailers & Vidéos

trailers
x
Le champion, l'affiche

Bande annonce de Le champion (VO)

Drame, Film noir

x