Citizen Kane : la critique du film (1941)

Drame | 1h59min
Note de la rédaction :
10/10
10
Citizen Kane, reprise 1956

  • Réalisateur : Orson Welles
  • Acteurs : Joseph Cotten, Orson Welles, Alan Ladd, Dorothy Comingore, Agnes Moorehead, Ruth Warrick, Paul Stewart, Arthur O’Connell
  • Date de sortie: 01 Juil 1946
  • Nationalité : Américain
  • Scénario : Herman J. Mankiewicz, Orson Welles
  • Montage : Robert Wise
  • Distributeurs : R.K.O. Radio Cinéma (1946), Archeo Pictures (1996, 2002), Action Cinémas (2005 & 2008),
  • Éditeur vidéo : Editions Montparnasse (DVD 2000, 2003), Warner Bros. Entertainment France
  • Date de sortie vidéo : 2000 (DVD, aux Editions Montparnasse) 9 juillet 2005 (DVD) - 13 mai 2015 (Blu-ray, édition prestige)
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 838 736 entrées / 594 860 entrées (sortie 1946) - 1 960 entrées France (1996) - 1 408 entrées France (2002) - 1 047 entrées France (2005) - 936 entrées France (2008)
  • Box-office USA (nord-américain) : 1 585 634 $ (reprise 1991)
  • Classification : Tous publics
  • Récompenses : 9 nominations aux Oscars 1942 (Oscar du Meilleur scénario original). Egalement nommé comme Meilleur Film, Meilleur réalisateur, Meilleur acteur, Meilleurs décors, Meilleure photographie, Meilleur montage, Meilleur son, Meilleure musique
  • Crédits visuels : © Film 1941 RKO Pictures © Conception Graphique blu-ray 2015 Warner Bros Entertainment © Film 1941 Ariès RKO Pictures © Conception Graphique blu-ray Warner Bros Entertainment
Note des spectateurs :

Considéré comme l’un des plus grands films de tous les temps, Citizen Kane est une œuvre passionnante qui a fait entrer Orson Welles dans la légende du cinéma.

SynopsisÀ la mort du milliardaire Charles Foster Kane, un grand magnat de la presse, Thompson, un reporter, enquête sur sa vie. Les contacts qu’il prend avec ses proches lui font découvrir un personnage gigantesque, mégalomane, égoïste et solitaire.

Citizen Kane frappe toujours par sa construction audacieuse

Critique : Produit par la RKO et Mercury, compagnie théâtrale associée à Welles, Citizen Kane est d’abord l’un des premiers films hollywoodiens où un seul homme a tenu plusieurs fonctions majeures. Producteur, réalisateur, scénariste, acteur principal, Orson Welles a réussi à convaincre les studios de s’impliquer totalement dans le projet. Si l’on excepte le cas de Charles Chaplin, ce fut une situation inédite dans le cinéma américain de l’époque. Jusqu’alors connu à la scène et à la radio, Orson Welles, aidé du scénariste Herman Mankiewicz, a écrit un récit inspiré de la vie du magnat de la presse William Randolph Hearst (1863-1951), l’un des hommes les plus puissants des États-Unis, qui se battra bec et ongles pour faire interdire le film. Les superlatifs n’ont pas manqué pour qualifier cette œuvre grandiose et novatrice, élue à plusieurs reprises « meilleur film de tous les temps », et notamment par l’American Film Institute en 1997 et 2007. On y suit dans une narration éclatée et déstructurée le parcours de Charles Foster Kane, séparé dès l’enfance de sa mère (Agnes Moorehead) pour être éduqué par un financier (George Coulouris). Devenu dirigeant d’un grand titre de presse, il épouse la nièce du président des États-Unis (Ruth Warrick) et tente de percer dans la politique. Piégé dans ce domaine par son adversaire (Ray Collins), il est contraint de rester dans l’édition et se marie avec Susan, une cantatrice médiocre (Dorothy Comingore). La fin de son existence se poursuivra à Xanadu, un immense manoir inachevé, emblématique de sa richesse et sa mégalomanie.

Citizen Kane jaquette blu-ray 2015 Warner Bros Entertainment

© Film 1941 Ariès RKO Pictures © Conception Graphique blu-ray Warner Bros Entertainment

Ce parcours est d’abord retracé de façon linéaire dès la deuxième séquence, dans un faux film d’actualité, nécrologie du magnat. Auparavant, on aura assisté à la mort de Kane, dont la dernière parole a été « Rosebud », prononcée en laissant s’échapper de ses mains une boule neigeuse… Un reporter (William Alland) est alors chargé de percer le mystère de ce mot. Par une série de flash-back au gré des témoignages de ceux qui ont côtoyé Kane, le film se propose alors de cerner sa personnalité. Citizen Kane éblouit dès son ouverture, où une caméra subjective transgresse un panneau « Défense d’entrer », avant de nous conduire à l’intérieur de la propriété jusqu’à la fenêtre de la chambre du mourant, et de filmer ces derniers instants par un champ-contre champ. Tout le reste de l’œuvre est de cette force et réussit l’osmose entre innovations narratives et visuelles, tout en proposant par ailleurs un portrait au vitriol de la société américaine.

Dans les couloirs de Xanadu

L’utilisation des profondeurs de champ (le jeune Kane jouant dans la neige avec sa luge), des plongées-contre-plongées (la scène qui suit la rupture avec la seconde femme), ou le recours à des toiles peintes pour certains décors extérieurs révèlent un renouvellement du langage cinématographique. Et il en est de même avec la superposition des points de vue que permettent les différents retours en arrière, ces caractéristiques culminant avec les témoignages successifs de Leland (Joseph Cotten), Susan, et du majordome (Paul Stewart). Aujourd’hui, le film frappe encore par son audace baroque, des statues antiques ornant les couloirs de Xanadu à la représentation à l’opéra, qui voit un professeur de chant s’époumoner pour encourager la chanteuse dotée d’un ridicule filet de voix. Il faut ici rappeler la charge corrosive de Welles puisque le personnage de Susan est calqué sur celui de Marion Davies, une actrice hollywoodienne maîtresse de Hearst, et que celui-ci avait voulu hisser au rang de star.

Edition prestige de Citizen Kane, en blu-ray chez Warner Bros

© Film 1941 Ariès RKO Pictures © Conception Graphique blu-ray Warner Bros Entertainment

Au sens large, Welles s’en prend aux absurdités de la machine hollywoodienne et au pouvoir de l’argent, tout en mettant en exergue les contradictions du système américain, Kane exerçant à la fois fascination et répulsion. Il n’est pas superflu d’ajouter que même si Welles est le véritable auteur de ce monument, ses collaborateurs ont contribué à sa réussite exceptionnelle. Il s’agit notamment de Robert Wise (au montage), Bernard Herrmann (à la musique) et Gregg Toland (à la photo). Tous sont crédités au générique qui apparaît (autre innovation) à la fin du film, après qu’une voix off eut présenté les comédiens, mentionnant leur première apparition à l’écran. À sa sortie, Citizen Kane connut un triomphe critique mais dérouta quelque peu les spectateurs. Les professionnels choisirent une ligne médiane et lui décernèrent le premier Oscar du meilleur scénario. Le film fut dès les années qui suivirent considéré comme une date dans l’histoire du septième art, et il faudra attendre Lola Montès pour découvrir un autre sommet de cette envergure.

Critique de Gérard Crespo

Sorties du 1er juillet 1946

Citizen Kane, reprise 1956

© Film 1941 Ariès RKO © Tous droits réservés. Imprimerie : Richier-Laugier

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Citizen Kane, reprise 1956

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