Polar de série, La peur règne sur la ville ne brille pas par son originalité, mais il divertira assurément les amateurs de bis italien. Sympathique, à défaut d’être indispensable.
Synopsis : “Mitraille”, véritable fauve à la gâchette facile, s’évade de prison de Rome avec sa bande. Les vengeances muries par les bandits pendant leurs années de détention sont immédiates, terribles, impitoyables. La police est dépassée.
Et pour un Maurizio Merli de plus…
Critique : Depuis le beau succès remporté par Rome violente (Marino Girolami, 1975) où il incarnait pour la première fois le rôle du commissaire Betti, l’acteur Maurizio Merli n’a eu de cesse de répéter le même emploi de flic implacable qui dégaine plus vite que son ombre. Dans La peur règne sur la ville (1976), il interprète cette fois le rôle du commissaire Muri, en tout point identique à son prédécesseur. Comme si les noms de ses personnages importait peu, l’acteur trimballe toujours la même silhouette, arborant la même coupe de cheveux, la même moustache et la même garde-robe de film en film.
Ainsi, lorsque débute l’intrigue de La peur règne sur la ville, il est fait mention de nombreux dérapages commis par le flic dans le passé, ce qui est immédiatement crédible aux yeux du public d’alors puisque celui-ci se souvient des actes violents du comédien dans ses films précédents. Inutile de s’étendre donc sur la caractérisation d’un personnage immuable. Ici, le réalisateur et scénariste Giuseppe Rosati se contente du minimum syndical, à savoir un flashback léonien en forme de trauma récurrent, pour expliquer le comportement borderline de son exécuteur de flic.
Une forme soignée pour un poliziottesco classique
Exit donc toute forme de psychologie puisque le cinéaste est là pour appuyer sur le champignon de l’action à toute vitesse. Cela démarre d’ailleurs plutôt bien avec de nombreuses fusillades, généreusement arrosées de sang frais qui suinte des cadavres. Les règlements de comptes s’enchaînent à un rythme suffisamment régulier pour que l’ennui ne nous prenne pas trop rapidement. On notera d’ailleurs que le cinéaste et son directeur de la photographie Giuseppe Berardini se donnent du mal pour octroyer un certain cachet visuel à l’ensemble. On pense notamment à cette séquence se déroulant sous des arcades d’où filtre la lumière du soleil.
Pour enrober les images, le musicien Giampaolo Chiti nous offre une bande sonore très correcte, fondée au départ sur des sonorités étranges qui évoquent la musique contemporaine. La suite sera plus classique, mais la musique permet de sublimer les images et d’offrir un bon moment de divertissement au spectateur.
Une histoire d’amour dispensable parasite l’ensemble
Toutefois, malgré des efforts constants pour maintenir l’intérêt, le long-métrage souffre d’un classique ventre mou au bout d’une cinquantaine de minutes de projection. Ainsi, l’intrigue n’offre plus beaucoup de rebondissements et l’intrusion d’une histoire d’amour entre Maurizio Merli et Silvia Dionisio n’est pas forcément la meilleure des idées. Effectivement, si la star Merli est capable de nous emporter dans le feu de l’action, ses capacités d’acteur dramatique s’avèrent bien plus limitées. Comme Silvia Dionisio n’est pas non plus la meilleure des comédiennes – en gros, elle se contente d’être jolie – le couple ne fonctionne jamais pleinement à l’écran et cela dessert le polar hard-boiled.
Heureusement, les vingt dernières minutes renouent avec la tension du début lors d’un hold-up qui entend détourner un train de la banque d’Italie. Dès lors, les vieilles gloires d’antan reprennent la main et le professionnalisme de Raymond Pellegrin, James Mason et Cyril Cusack joue en faveur du film. Certes, Giuseppe Rosati n’est assurément pas un grand réalisateur, mais il s’appuie sur une équipe chevronnée capable de livrer des scènes d’action valables.
La peur règne sur la ville, sorti en VHS avant la salle
Poliziottesco de série qui ne cherche même pas à délivrer le moindre message, si ce n’est que la police a les mains entravées par les fonctionnaires – merci à L’inspecteur Harry (Don Siegel, 1971) pour l’influence. Plutôt réactionnaire comme l’ensemble de la filmographie de Maurizio Merli, sorte de Charles Bronson rital, La peur règne sur la ville n’est ni le meilleur épigone de son genre, ni le pire. Il a le mérite de divertir à bon compte.
On notera que le long-métrage est d’abord sorti en France en VHS au début des années 80, avant d’être finalement exploité en salles en novembre 1983, soit sept ans après sa réalisation. Son parcours en salles semble avoir été aussi rapide que l’éclair et il a fallu attendre une quarantaine d’années pour voir ressurgir le film coup de poing au sein du riche catalogue de l’éditeur Le Chat qui Fume, affublé d’une copie superbement restaurée. L’occasion de compléter sa collection de polizziotesci, genre qui a enfin les faveurs des éditeurs depuis quelques années.
Biographies +
Giuseppe Rosati, Maurizio Merli, Raymond Pellegrin, Silvia Dionisio, Cyril Cusack, James Mason, Andrea Scotti, Mario Novelli, Claudio Nicastro
Sorties de la semaine du 2 novembre 1983
© 1976 – Triomphe Film s.r.l. – Roma
© 1976 – Triomphe Film s.r.l. – Roma