Western parodique, Et viva la révolution ! échoue à trouver le ton juste entre farce et brûlot politique. Le divertissement, bien que plaisant, se révèle donc anodin.
Synopsis : Un prince russe, un bandit mexicain et une jeune Irlandaise se rencontrent au Mexique. Les deux hommes sont à la recherche d’un trésor, tandis que la jeune femme veut participer à la révolution.
Tessari en mode automatique
Critique : Le réalisateur et scénariste Duccio Tessari peut s’enorgueillir d’avoir signé deux westerns majeurs (Un pistolet pour Ringo et surtout Le retour de Ringo) qui ont contribué à la popularité du genre en Italie. Non content d’avoir fait de Giuliano Gemma une star, le cinéaste introduisait une forme d’humour primesautier et ultra-référentiel qui tranchait avec le cynisme d’un Sergio Leone. En ce début des années 60, Duccio Tessari est donc un cinéaste original, dont le ton est immédiatement identifiable et qui n’est pas réductible à un moule préfabriqué.
Le constat est malheureusement plus sombre lorsque l’on aborde sa carrière des années 70. Certes, le réalisateur parvient encore à signer des divertissements honorables, mais on ne retrouve pas toujours ce sens de l’humour qui le caractérisait jusqu’alors. On en trouve une preuve éclatante avec Et viva la révolution ! (1971) qui chausse les gros sabots de la parodie à l’italienne, sans que l’on perçoive de véritable implication de l’auteur. Alors que Tessari est un brillant scénariste, il ne semble pas avoir participé à l’écriture de cette œuvre de commande qui ne paraît avoir d’autre but que de décrocher un succès facile.
Une première partie qui tient de la farce
Production importante qui a bénéficié de financements italiens, allemands et espagnols, Et viva la révolution ! (1971) a coûté cher. Cela se voit par la profusion des décors (construits aux studios De Paolis de Rome), mais aussi par la présence d’un casting haut de gamme comprenant Franco Nero, Eli Wallach et Lynn Redgrave. Pourtant, malgré ces moyens conséquents, Duccio Tessari ne semble pas particulièrement à l’aise avec le script qu’il doit illustrer.
Le plus gros problème du film réside dans l’hésitation constante des auteurs quant au ton à adopter. Débutant comme un western purement parodique, Et viva la révolution ! (1971) semble par la suite adopter un point de vue plus sérieux sur la révolution mexicaine. Durant la première moitié du film, on peine à retrouver la patte de Tessari tant l’humour déployé s’inscrit dans la lignée du western parodique italien du moment. Les gags sont parfois efficaces, parfois très lourds, mais en tout cas jamais finauds. Ainsi, la chasse au trésor est l’occasion pour les deux personnages principaux de se trahir mutuellement dans un esprit de farce qui amuse un temps, mais finit par épuiser.
Une deuxième moitié plus sérieuse et réussie
Sans doute conscient des limites de cette mécanique narrative usée jusqu’à la corde, les auteurs décident de changer légèrement leur braquet. Dès lors, le faux révolutionnaire mexicain incarné avec bonhomie par Eli Wallach se prend peu à peu à son propre jeu. Lui qui se fait passer pour un révolutionnaire afin de mieux approcher du trésor finit par épouser la cause des paysans mexicains révoltés. A partir de là, le long-métrage se fait un peu plus sérieux et la dernière demi-heure s’avère nettement plus intéressante et réussie.
A partir de là, les scènes de fusillades s’enchaînent de manière plus efficace et l’on commence enfin à éprouver un peu d’empathie envers des personnages qui n’étaient jusque-là que de simples caricatures. Toutefois, Duccio Tessari ne tient pas jusqu’au bout et livre un dernier retournement de situation qui ruine ses efforts de dramatisation une bonne fois pour toute. Il retrouve alors une posture cynique qui ne lui convient visiblement pas.
Des acteurs charismatiques sauvent les meubles
Assez peu à l’aise avec son sujet, Tessari ne fait pas non plus preuve d’une grande application dans sa réalisation qui abuse de zooms disgracieux. Certaines scènes sont même sacrément bis, à la limite du nanar. Et comment laisser passer ce générique improbable fondé sur des images arrêtées toutes plus laides les unes que les autres ? Il ne faut pas non plus compter sur la musique passe-partout de Gianni Ferrio pour compenser ces faiblesses. On est donc particulièrement reconnaissant envers les acteurs qui sauvent en partie le film. Ainsi, le duo formé par Franco Nero et Eli Wallach fonctionne plutôt bien, tandis que le personnage de Lynn Redgrave est assez amusant (même si l’on sent poindre une bonne dose de misogynie derrière tout cela).
Sorti avec un certain succès dans les salles françaises en 1973, Et viva la révolution ! a séduit 413 713 spectateurs, majoritairement provinciaux.
Sur Paris, Fox/Lira le propose dans 4 cinémas, la Rotonde, le Helder, le Cambronne et le Clichy Palace, pour 7 455 spectateurs en première semaine. En semaine 2, sur 3 écrans, il réunit encore 4 290 curieux. Carrière locale achevée à 12 292 Parisiens.
Bizarrement, le long-métrage est réapparu en VHS sous le titre Pour quelques pépites de plus. Depuis, un DVD a permis de revoir le film dans une version restaurée, récupérant au passage son premier titre d’exploitation.
Si le film se suit sans réel déplaisir, il n’est en tout cas pas un modèle du genre et on peut notamment largement lui préférer Compañeros (Corbucci, 1970) ou encore Mais qu’est-ce que je viens foutre au milieu de cette révolution ? (Corbucci, 1972).
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 31 janvier 1973
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