Doctor Strange in the Multiverse of Madness n’est pas mauvais, mais pâtit d’un scénario à peine passable et d’acteurs visiblement peu concernés. Le reste est adressé aux seuls aficionados de Marvel.
Synopsis : Dans ce nouveau film Marvel Studios, l’univers cinématographique Marvel déverrouille et repousse les limites du multivers encore plus loin. Voyagez dans l’inconnu avec Doctor Strange, qui avec l’aide d’anciens et de nouveaux alliés mystiques, traverse les réalités hallucinantes et dangereuses du multivers pour affronter un nouvel adversaire mystérieux.
Sam Raimi revient à l’univers super-héroïque sans grande inspiration
Critique : Après le joli succès remporté par le premier volet des aventures du Doctor Strange (Derrickson, 2016), et surtout le triomphe mondial reçu par le quatrième film de la 5ème phase de l’univers cinématographique Marvel (ou MCU), à savoir Spider-Man : No Way Home (Watts, 2021), un nouvel épisode mettant en scène le maître du mysticisme allait de soi. Alors que la conception du métrage a été débutée par Scott Derrickson, le projet lui a échappé pour cause de différends artistiques et s’est retrouvé dans les mains de Sam Raimi.
Réalisateur culte pour toute une génération grâce à sa trilogie Evil Dead et pour la première trilogie Spider-Man avec Tobey Maguire, Raimi n’a pourtant plus fait d’étincelles depuis des lustres. Son dernier long-métrage en date n’est autre que le très laid Le monde fantastique d’Oz (2013) et les précédents films n’étaient pas bien fameux non plus. Doctor Strange in the Multiverse of Madness (2022) est donc vendu sur une vague promesse de rendre l’univers Marvel plus horrifique. Encore une fois, il s’agit bien d’une tentative markéting puisque le film est accessible à tous les publics et qu’il risque de n’effrayer que les plus petits.
Le Multivers ouvre le champ des possibles… et du n’importe quoi
Certes, le cinéaste se livre par moments à l’intrusion de démons squelettiques qui rappellent vaguement son Armée des ténèbres (1992), qui elle-même citait le bijou Jason et les Argonautes (Chaffey, 1963), mais l’absence de véritable enjeu dramatique annule toute tentative d’effrayer le spectateur au-delà de quinze ans.
Effectivement, l’énorme problème de cette nouvelle phase du MCU tient en un seul concept : si le Multivers permet tous les délires, il implique également que les enjeux pour les super-héros sont quasiment nuls. Ainsi, les auteurs peuvent bien faire apparaître n’importe quel personnage important et même le tuer, puisqu’il s’agit d’une version alternative du protagoniste et que cela n’aura pas nécessairement d’impact sur la continuité classique de l’univers Marvel. On peut donc explorer toutes les pistes narratives possibles puisque rien n’aura vraiment de poids sur l’avenir des franchises concernées. Du coup, cela dilue totalement les enjeux dramatiques.
Le scénario s’est perdu dans un univers parallèle
Ainsi, Doctor Strange in the Multiverse of Madness ne présente guère d’intérêt sur le plan dramatique puisque l’on est invité à traverser des univers parallèles – certes séduisants car les centaines de techniciens derrière leurs ordinateurs sont talentueux – qui n’agiront pas vraiment sur le présent des héros. Pire, le film manque clairement d’un méchant digne de ce nom puisque l’antagoniste principale n’est autre que la Sorcière Rouge jouée par une Elizabeth Olsen toujours en manque de charisme. Ses motivations personnelles (avoir une petite famille comme tout le monde) sont parfaitement conformistes et inintéressantes.
Dire que l’on se contrefiche assez rapidement de ce qui se passe à l’écran est un euphémisme, même s’il faut reconnaître à Sam Raimi un certain savoir-faire dans la gestion de l’action et de l’efficacité. Malheureusement, il lui manque ici un support scénaristique valable.
Des acteurs fades pour un produit formaté pour cartonner auprès de la jeunesse
On peut également signaler la faiblesse générale du casting féminin. Outre Olsen qui n’imprime pas vraiment, on doit aussi compter avec Rachel McAdams et surtout avec la jeune Xochitl Gomez qui n’est jamais crédible en super-héroïne capable de voyager entre les dimensions. Heureusement que Benedict Cumberbach n’a plus rien à prouver et qu’il s’acquitte de son rôle avec une application toujours appréciable. Les autres membres du casting ne semblent guère se détacher d’un jeu fade, très proche de celui vu dans de nombreuses séries télévisées.
Passé la moulinette Marvel et Disney, le talent de Sam Raimi peine donc à émerger, tandis que le compositeur Danny Elfman livre une partition assourdissante qui relève globalement de la bouillie symphonique. Doctor Strange in the Multiverse of Madness, bien entendu, n’est jamais mauvais et il devrait même contenter la fanbase habituelle de Marvel en lui livrant en pâture des clins d’œil et autres private joke qui la mettra en joie. Pour les autres, le spectacle ne propose rien de nouveau sous le soleil et constitue un exemple de plus d’un pur produit prémâché et prédigéré à destination d’un public déjà acquis à sa cause avant même sa sortie.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 4 mai 2022
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Sam Raimi, Benedict Wong, Elizabeth Olsen, Benedict Cumberbatch, Charlize Theron, Patrick Stewart, Bruce Campbell, Hayley Atwell, Chiwetel Ejiofor, Rachel McAdams, Michael Stuhlbarg, John Krasinski, Lashana Lynch, Xochitl Gomez
