Trauma : la critique du film de Dario Argento (1994)

Epouvante-horreur, Thriller, Giallo | 1h49min
Note de la rédaction :
5,5/10
5,5
Trauma chez Delta Vidéo (1994)

  • Réalisateur : Dario Argento
  • Acteurs : Brad Dourif, Frederic Forrest, James Russo, Piper Laurie, Asia Argento, Christopher Rydell
  • Date de sortie: 10 Août 1994
  • Année de production : 1993
  • Nationalité : Italien
  • Titre original : Trauma
  • Titres alternatifs : Dario Argento's Trauma (titre complet, USA) / Uraz (Pologne) / Aura (Allemagne)
  • Autres acteurs : Laura Johnson, Dominique Serrand, David Chase, Ira Belgrade, Hope Alexander-Willis, Sharon Barr, Isabell O'Connor
  • Scénaristes : Franco Ferrini, Gianni Romoli, Dario Argento, T.E.D. Klein
  • Monteur : Bennett Goldberg
  • Directeur de la photographie : Raffaele Mertes
  • Compositeur : Pino Donaggio
  • Chef Maquilleur : Tom Savini
  • Chef décorateur : Billy Jett
  • Directeur artistique : Nance Derby
  • Producteur : Dario Argento
  • Producteurs exécutifs : T. David Pash, Andrea Tinnirello
  • Sociétés de production : Oversea Filmgroup, ADC Production
  • Distributeur : Metropolitan Filmexport
  • Distributeur reprise : -
  • Date de sortie reprise : -
  • Editeurs vidéo : Delta Vidéo (VHS, 1994 et 1995) / Metropolitan Vidéo (DVD, 2004) / Opening (DVD, 2008) / Extralucid Films (blu-ray, 2022)
  • Dates de sortie vidéo : 1994 (VHS) / 1995 (VHS) / 9 mars 2004 (DVD) / 10 janvier 2008 (DVD) / 14 décembre 2022 (blu-ray)
  • Budget : 7 000 000 $ (soit 15 130 000 $ au cours de 2024)
  • Box-office France / Paris-Périphérie : -
  • Box-office nord-américain / monde : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Interdit aux moins de 16 ans
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleurs / Son : Dolby Stéréo
  • Festivals : -
  • Nominations : -
  • Récompenses : -
  • Illustrateur/Création graphique : © John Capone (design blu-ray) ; Gilles Vranckx (artwork). Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Delta Vidéo Diffusion 1994. © ADC Films. Tous droits réservés / All rights reserved
Note des spectateurs :

Considéré comme un titre mineur de Dario Argento, Trauma est une œuvre inégale qui pâtit d’un cadre américain sans charme et d’un jeu limité des acteurs. L’intrigue tortueuse, elle, peut toutefois séduire les fans du maître transalpin.

Synopsis : Aura Petruscu, une jeune fille anorexique de 16 ans, s’évade d’un hôpital psychiatrique et rencontre David. Elle est ramenée à ses parents, qui sont décapités le soir des retrouvailles. Aidée par David, la jeune fille va mener l’enquête pour arrêter l’assassin, mais celui-ci continue à tuer d’une façon effroyable tous les témoins d’un drame qui s’était déroulé des années plus tôt et qui semble représenter la clé du mystère…

Trauma ou la tentative américaine avortée de Dario Argento

Critique : Ayant acté la mort du cinéma populaire italien, le réalisateur Dario Argento a choisi de s’exiler aux Etats-Unis à la fin des années 80, à la suite de l’échec injuste de son Terreur à l’opéra (1987). Accueilli à bras ouvert par George A. Romero, Dario Argento a pu réaliser le sketch du Chat noir contenu dans le film omnibus Deux yeux maléfiques (1990) qui a pourtant été un gros échec commercial.

Quelque peu désœuvré, le réalisateur racle ses fonds de tiroirs et en ressort une histoire qui prend pour point de départ l’enquête d’une jeune fille atteinte d’anorexie intitulée Trauma. Pour le cinéaste, il s’agissait d’évoquer au cinéma cette maladie qui frappait justement Anna Ceroli, la belle-fille de Dario Argento et sœur d’Asia Argento. Toutefois, le cinéaste n’en tire pas une œuvre dramatique, mais concocte une intrigue policière tortueuse, avec l’aide de ses complices italiens Franco Ferrini et Gianni Romoli. Une fois le script de Trauma établi, Dario Argento a confié au romancier américain T.E.D. Klein le soin d’adapter le scénario à la réalité américaine.

Un casting au rabais

Avec un budget resserré de 7 000 000 $ (soit 15 130 000 $ au cours de 2024), Dario Argento ne peut se payer des acteurs prestigieux et doit se contenter d’un tournage provincial à Minneapolis et Saint-Paul, deux villes du Minnesota. En ce qui concerne les comédiens, il doit tout d’abord avoir recours au talent précoce de sa propre fille Asia Argento, dont le jeu est correct, mais qui n’est pas connue du grand public. Pour le héros masculin, Argento doit se rabattre sur Christopher Rydell, fils du réalisateur Mark Rydell, qui ne possède pas un grand charisme à l’écran.

Trauma, jaquette blu-ray

© 1993 ADC Films / © 2022 Extralucid Films. Graphisme : John Capone / Artwork : Gilles Vranckx. Tous droits réservés.

Ainsi, son personnage rejoint la longue liste des protagonistes masculins fades de l’œuvre d’Argento. Heureusement, pour compenser, il peut compter sur quelques valeurs sûres du cinéma américain comme Piper Laurie (déjà en mère possessive dans Carrie au bal du diable), Frederic Forrest (vu dans le chef d’œuvre Apocalypse Now) ou encore Brad Dourif (la voix de Chucky, c’est lui). Ce sont ces acteurs secondaires qui portent l’interprétation sur leurs solides épaules.

Minneapolis, ville sans charme

Loin d’être un modèle sur le plan du jeu, Trauma souffre également de sa localisation aux Etats-Unis. Effectivement, l’œuvre de Dario Argento a toujours bénéficié de son cadre italien, avec ses paysages splendides et ses monuments prestigieux qui donnaient de la plus-value à ses images gothiques. Or, Minneapolis, comme bon nombre de ses voisines, est une ville américaine typique, dépourvue d’histoire et de charme sur le plan visuel. Dès lors, Argento s’est débrouillé pour filmer l’une des plus vieilles maisons de Saint-Paul pour l’introduction – le moment le plus réussi du film – mais le reste manque cruellement de cachet sur le plan esthétique. Ainsi, la caméra d’Argento est toujours aussi inspirée, s’engouffrant partout et virevoltant dans les airs, mais elle ne peut filmer que des décors banals et dépourvus de charme.

Enfin, Trauma souffre d’une autre contrainte imposée au réalisateur. Initialement, il pensait confier la musique à Claudio Simonetti, son complice depuis de nombreuses années à travers le groupe de rock progressif Goblin. Malheureusement, les coproducteurs américains ont imposé une musique symphonique composée par Pino Donaggio, habituel collaborateur de Brian De Palma. Le résultat ne convient absolument pas aux images tournées par Dario Argento. Pire, la musique semble toujours à contre-temps par rapport aux images et donne le sentiment d’avoir été plaquée au hasard.

Des fulgurances au sein d’un film bancal

Tous ces éléments, alliés à un scénario qui, in fine, ne tient pas la route, explique le désamour du grand public envers cette œuvre maladroite qui signe indubitablement le déclin d’un artiste peu adapté à la réalité économique des années 90. Pour autant, Trauma n’est pas non plus le désastre que nous avions en tête depuis plusieurs décennies, souvenir d’une découverte par une VHS de piètre qualité. Certes, la photographie de Raffaele Mertes est plus douce et moins rentre-dedans que celle des précédents Argento, mais il s’agissait ici de tourner dans un contexte différent.

Le résultat, désormais appréciable en HD, est à nuancer. Si les plans nocturnes sont très beaux, les scènes de jour dans la grande ville de Minneapolis se rapprochent plus d’une esthétique téléfilmesque. Mais le grand gagnant demeure Dario Argento lui-même, dont l’imagination en termes de mise en scène demeure impeccable à l’orée des années 90. Le cinéaste est encore capable de trousser des séquences mémorables comme certains meurtres, moins gore que d’accoutumée, mais aussi la séquence inaugurale où, comme dans Les frissons de l’angoisse, l’héroïne pense voir quelque chose qui s’avèrera faux par la suite. On adore également la scène du trauma initial qui reste un grand moment d’horreur et de cruauté.

Un thriller découvert essentiellement en VHS

A redécouvrir de nos jours, Trauma ne peut donc toujours pas être considéré comme une œuvre majeure au sein du corpus argentien, mais le métrage demeure agréable à regarder, par-delà ses nombreux défauts évoqués plus haut. Il faut dire que le cinéaste a fait tellement pire par la suite (au hasard d’une longue liste, Le fantôme de l’opéra, La terza madre, Dracula 3D)!

Sorti de manière très confidentielle* en salles au mois d’août 1994 par Metropolitan Filmexport, Trauma a surtout connu une carrière en VHS au cœur des vidéo-clubs de l’époque sous l’égide de Delta Vidéo. Ensuite, le long métrage a été édité de nombreuses fois en DVD dans des parutions indignes. Il a donc fallu attendre fin 2022 pour que l’éditeur Extralucid Films sorte une double édition blu-ray de belle tenue, portée par un superbe visuel.

Critique de Virgile Dumez

L’étrange sortie de Trauma en France

1994. Le film d’épouvante est exsangue en France et se retrouve banni des cinémas, contrairement à l’omniprésence du genre tout au long des années 70 et 80. Metropolitan Film Export s’y est essayé à deux fois durant l’année, avec, en janvier 1994, Evil Dead 3 l’armée des ténèbres de Sam Raimi, qui a été une déception (143 100 entrées contre plus de 600 000 entrées pour le second volet 6 ans plus tôt) et le canin enragé Max le meilleur ami de l’homme paru en juillet de la même année, qui mordra à peine 55 123 spectateurs. Une semaine avant “Max le copain baveux”, c’était Le Bazaar de l’épouvante de Fraser C. Heston qui floppait avec 64 000 spectateurs malgré la caution Stephen King sur l’affiche. A l’exception de Critters 3 et 4 qui sortiront dans une salle, aucun autre film d’épouvante ne sortira dans les cinémas français durant les 7 premiers mois de l’année. Mais pourquoi ?

Le genre a été tué par la VHS et ses DTV ; les cinémas de quartiers ou/et dits “populaires” sont morts avec l’avènement du “home cinéma”, de Canal+ et de sociologie qui s’est manifesté par une crise de l’exploitation terrifiante, avec des fermetures de sites par centaine entre 1985 et 1993. Par ailleurs, ce nettoyage des salles, qui s’orientait vers des multisalles proprets avec investissements financiers à rentabiliser, s’accompagnait d’un virage anti violence qui a saisi la production américaine. Le gore n’a plus la cote. Zombies, slashers n’ont plus la cote. Le genre est désormais dans les mains de studio qui font basculer les sociétés de séries B dans la faillite. La production est devenue fade et triste.

En France, 1994 est une année tristement symbolique puisque pour la première fois Avoriaz n’est plus un Festival de films fantastiques, car la manifestation n’était plus assez médiatisée et le genre clairement en manque de vitesse. Lionel Chouchan est prié de faire son festival ailleurs. Il trouve Gérardmer. Cette année-là naissait donc, dans la difficulté et une certaine disette financière, Fantastic’Arts, sans aucun renfort médiatique et aucune sortie en salle pour accompagner la naissance du festival que l’on aime tant aujourd’hui.

Face à cette désaffection généralisée, Métropolitan FilmExport, entre deux navets (Surf Ninja, Monsieurs Nounou, Corrina Corrina) décide de rassembler, pour une sortie salle au 10 août, plusieurs titres sélectionnés au festival de Gérardmer dans un rétrospective maison intitulée les Inédits Fantastica 1994. Pourquoi le 10 août ? L’été était plus propice au cinéma de genre et, au mois d’août, l’espoir de trouver des salles de disponibles à Paris ainsi que la possibilité de programmer les films sur la cote rendaient ce positionnement judicieux. De plus, Métropolitan se retrouvait, à la dernière minute, avec une case de libre sur son planning, puisque Street Fighter avec Van Damme, était repoussé à la dernière minute pour mai 1995.

Plusieurs films figuraient dans ce festival de films de genre Métro : Ticks de Tony Randel, Le retour des morts vivants 3 de Brian Yuzna, Doppelganger, le double maléfique de Avi Nesher, avec Drew Barrymore, et Vendredi 13 – Jason va en enfer. Trauma fait partie du lot de productions très moyennes, au filmage très vidéo, et donc parfaitement dispensables au cinéma. L’objectif du distributeur était surtout de faciliter l’édition vidéo des séries B. Il était toujours plus positif de sortir un film en vidéocassette avec la mention accrocheuse “sorti au cinéma”, en l’occurrence ici via la société créée par Samuel Hadida et Michel Poirier, Delta Vidéo.

Au final, ce regroupement de 5 films rassemblera 8 640 spectateurs. Il est difficile de savoir quelle part occupe Trauma dans ce lot. Et par conséquent de dire que cet ersatz américain de Dario Argento est bel et bien sorti dans nos salles.

La sortie du film par Frédéric Mignard

Les sorties de la semaine du 10 août 1994

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Trauma chez Delta Vidéo (1994)

© 1993 ADC Films / 1994 Delta Vidéo Diffusion. Tous droits réservés.

Biographies +

Dario Argento, Brad Dourif, Frederic Forrest, James Russo, Piper Laurie, Asia Argento, Christopher Rydell

Mots clés

Giallo, Les relations mère-fille au cinéma, Les tueurs fous au cinéma

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Trauma chez Delta Vidéo (1994)

Bande-annonce de Trauma (VO)

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