Danse macabre : la critique du film et le test du blu-ray UHD 4K (1965)

Epouvante-horreur, Gothique | 1h27min
Note de la rédaction :
8/10
8
Danse Macabre d'Antony Dawson, affiche du film

  • Réalisateur : Antonio Margheriti (Anthony M. Dawson)
  • Acteurs : Salvo Randone, Silvano Tranquilli, Barbara Steele, Georges Rivière, Giovanni Cianfriglia, Arturo Dominici, Umberto Raho, Margrete Robsahm
  • Date de sortie: 21 Avr 1965
  • Année de production : 1964
  • Nationalité : Italien, Français
  • Titre original : Danza macabra
  • Titres alternatifs : Castle of Blood (titre international) / Gäst i fasornas hus (Suède) / Dança Macabra (Portugal, Brésil) / La danza macabra (Mexique)
  • Autres acteurs : Sylvia Sorrent, Benito Stefanelli
  • Scénaristes : Sergio Corbucci, Giovanni Grimaldi
  • Monteur : Otello Colangeli
  • Directeur de la photographie : Riccardo Pallottini
  • Compositeur : Riz Ortolani
  • Chef Maquilleur : Sonny Arden
  • Chef décorateur : Ottavio Scotti
  • Producteurs : Giovanni Addessi, Franco Belotti, Walter Zarghetta
  • Producteurs exécutifs : Leo Lax, Marco Vicario
  • Sociétés de production : Giovanni Addessi Produzione Cinematografica, Ulysse Productions, Vulsinia Films
  • Distributeur : Les Films Marbeuf
  • Distributeur reprise : -
  • Date de sortie reprise : -
  • Editeurs vidéo : Fantastic Vidéo (RCA Vidéo, VHS, 1981) / Seven 7 (DVD, 2008) / Artus Films (blu-ray et UHD 4K, 2024)
  • Dates de sortie vidéo : 1981 (VHS) / 6 mai 2008 (DVD) / 3 décembre 2024 (blu-ray, UHD 4K)
  • Budget : -
  • Box-office Paris-Périphérie : 33 951 entrées (2 semaines à l'affiche)
  • Box-office nord-américain / monde : -
  • Classification : Interdit aux moins de 13 ans (Tous publics de nos jours)
  • Formats : 1.85 : 1 / Noir et Blanc / Son : Mono
  • Festivals : -
  • Nominations : -
  • Récompenses : -
  • Illustrateur/Création graphique : © Constantin Belinsky. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Giovanni Addessi Produzione Cinematografica, Ulysse Productions, Vulsinia Films. Tous droits réservés / All rights reserved
Note des spectateurs :

Sublimé par un noir et blanc magnifique et le charme de Barbara Steele, Danse macabre est un petit classique du cinéma gothique italien, dont on adore l’ambiance et les audaces.

Synopsis : 2 novembre, le Jour des Morts. C’est la nuit où se manifestent les esprits du Château de Providence, et Lord Blackwood, propriétaire de cette demeure historique, cherche, comme chaque année, un homme courageux capable de détruire la légende. Le journaliste Alan Foster ne croit pas aux récits effrayants selon lesquels personne ne serait jamais sorti vivant du château après y avoir passé la nuit. Certain de pouvoir tirer de l’aventure un excellent article, il accepte volontiers le défi…

Un démarquage du fantastique gothique anglosaxon

Critique : Au début des années 60, le cinéma italien tente de copier les succès américains et européens du moment avec des productions qui ont parfois su rivaliser avec leurs modèles prestigieux. Dès 1960, Mario Bava a ouvert la voie du cinéma gothique italien avec son chef d’œuvre Le masque du démon (1960) qui a fait de son actrice Barbara Steele une star du genre.

Rappelons toutefois que le but initial de ce type de production était de rivaliser avec le cinéma d’horreur britannique alors en plein essor grâce au studio de la Hammer. Cela explique la présence de noms anglosaxons au générique de Danse macabre (1964) qui est réalisé par Anthony Dawson (Antonio Margheriti) et interprété par Henry Kruger (Arturo Dominici), Montgomery Gleen (Silvano Tranquilli), Raul H. Newman (Umberto Raho) ou encore Phil Karson (Giovanni Cianfriglia).

Margheriti, seul maître à bord du film

Ce générique cryptique n’a d’ailleurs pas facilité les recherches de la part des historiens du cinéma afin de savoir qui a fait quoi sur cette petite production fauchée. Ainsi, de nombreux sites et livres indiquent une participation très active de Sergio Corbucci à la réalisation du long-métrage, ce qui a été largement démenti par plusieurs entretiens avec Ruggero Deodato (alors assistant) qui a insisté sur le fait que Margheriti a tourné l’ensemble du film. Initialement prévu pour être réalisé par Corbucci, celui-ci se serait désisté à la dernière minute, proposant à Margheriti de prendre sa suite.

Nightmare Castle (blu-ray) / Danse macabre

Blu-ray © Severin Films. © 1964 Giovanni Addessi Produzione Cinematografica – Ulysse Productions – Vulsinia Films. All Rights Reserved.

Antonio Margheriti retrouve donc un univers macabre et gothique qu’il connaît déjà pour avoir déjà tourné le très bon La vierge de Nuremberg (1963), démontrant une réelle appétence pour ce type d’univers fait de demeures hantées, de décors poussiéreux et de cryptes baignées dans la brume. Pour Danse macabre, le cinéaste dispose non seulement d’un scénario assez solide de Sergio Corbucci et Giovanni Grimaldi, mais également de décors issus d’une autre production intitulée Le religieux de Monza (Sergio Corbucci, 1963), une comédie médiévale.

Edgar Allan Poe cité, mais peu convoqué

Comme le pratiquait souvent Roger Corman aux Etats-Unis, l’argument est censé être tiré d’une nouvelle d’Edgar Allan Poe, mais il s’agit une fois de plus d’un pieux mensonge. En réalité, Poe intervient bien dans le film, mais en tant que personnage et donc en tant que source d’inspiration. Il est interprété par un Silvano Tranquilli charismatique durant le prologue de ce qui va devenir un pur film de fantômes.

Alors que le point de départ de l’intrigue n’a rien de bouleversant – un journaliste trop curieux fait le pari qu’il peut survivre à une nuit passée dans un château hanté – les auteurs sont parvenus à synthétiser tout ce qui fait l’attrait du cinéma gothique italien en un seul long métrage. Tout d’abord, le film d’horreur bénéficie d’un magnifique noir et blanc contrasté élaboré par Riccardo Pallottini. Son goût évident pour les noirs profonds permet de mettre en valeur les décors superbes de ce château fantasmatique. Certes, Danse macabre n’a pas la perfection formelle de son glorieux ainé Le masque du démon, mais on s’en approche fortement.

Danse macabre, un brillant cauchemar éveillé

Ensuite, Danse macabre ose plonger le spectateur dans un monde parallèle durant la quasi-totalité de la projection, abolissant notamment les barrières du temps, de l’espace et jouant sur les incessantes interactions entre morts et vivants. Dans la même position inconfortable que le journaliste interprété avec charisme par Georges Rivière, le spectateur finit par douter de ce qu’il voit. Conçu comme un cauchemar éveillé, Danse macabre nous convie à suivre les évolutions de fantômes qui doivent revivre éternellement leur mort tragique.

On notera d’ailleurs que leur statut n’est jamais très clair puisqu’ils se comportent à la fois comme des fantômes (ils disparaissent en un clin d’œil), mais aussi des vampires (ils réclament du sang frais) et même des zombis (ils dévorent les vivants). Cette incertitude qui pourrait passer pour de la négligence vis-à-vis des grands mythes du fantastique vient au contraire fortifier le sentiment d’inconfort du spectateur.

Des séquences érotiques qui ont été longtemps écartées des copies

Mais Danse macabre ne serait pas un sommet du cinéma bis rital sans l’apport de notations érotiques très osées pour l’époque. Ainsi, la relation entre la superbe Barbara Steele et Margrete Robsahm est clairement décrite comme saphique, tombant donc sous le sceau du lesbianisme. Enfin, la sculpturale Sylvia Sorrent nous gratifie d’un plan dénudé qui dévoile sans pudeur son opulente poitrine. Autant dire que ces deux passages ont été largement commentés en Italie où le scandale a été conséquent.

Malheureusement pour les spectateurs français de l’époque, la copie française a été expurgée de ces passages pour permettre au film de recevoir une interdiction bénigne aux moins de 13 ans. Désormais, la version restaurée en HD contient bien ces deux moments qui firent l’objet de fantasme auprès des fantasticophiles des années 60.

Un film récemment restauré

D’une lenteur hypnotique qui n’exclut pas la fascination, Danse macabre est donc une œuvre majeure du cinéma gothique italien des années 60 et une preuve supplémentaire du talent d’Antonio Margheriti dès qu’il s’attaquait à un univers sombre et torturé. Rarement édité en France, le long métrage a fait l’objet d’une récente restauration, en partie financée en crowdfunding, qui a été projetée à plusieurs reprises à la Cinémathèque française fin 2023. En 2024, on attend également la sortie d’une édition HD chez Artus Films. On a vraiment hâte de découvrir ce petit classique dans les conditions qu’il mérite vraiment.

Pour être complet, on signalera au passage que le cinéaste Antonio Margheriti a lui-même réalisé un remake de son film, cette fois-ci en couleurs, sous le titre Les Fantômes de Hurlevent (1971) avec le trio Anthony Franciosa, Michèle Mercier et Klaus Kinski. Malgré un budget nettement supérieur, le résultat ne semble pas avoir convaincu les cinéphiles.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 21 avril 1965

Voir le film en VOD

Danse Macabre d'Antony Dawson, affiche du film

© 1964 Giovanni Addessi Produzione Cinematografica – Ulysse Productions – Vulsinia Films / Affiche : C. Belinsky. Tous droits réservés.

Biographies +

Antonio Margheriti (Anthony M. Dawson), Salvo Randone, Silvano Tranquilli, Barbara Steele, Georges Rivière, Giovanni Cianfriglia, Arturo Dominici, Umberto Raho, Margrete Robsahm

Mots clés

Cinéma gothique, Les maisons hantées au cinéma, Les fantômes au cinéma, Les Films Marbeuf

Le test de la box 4K UHD

Impliqué dans la restauration du film, l’éditeur Artus a mis les petits plats dans les grands pour cette sortie en proposant une box luxueuse dont le format étonne par son aspect assez volumineux. Test réalisé à partir du produit finalisé.

Danse macabre, jaquette UHD 4K

© Artus Films – Lyre / Jaquette : Benjamin Mazure. Tous droits réservés.

Packaging & Compléments : 5 / 5

Avec Danse macabre, Artus Films entend franchir un pas supplémentaire vers les produits de luxe à destination d’une niche de cinéphiles relativement aisés. Le format est tout d’abord celui d’une box plus imposante qu’un simple Mediabook. Celle-ci est épaisse car elle contient non seulement un superbe digipack s’ouvrant en trois volets, mais également un livret de 96 pages richement illustré et six photos du film au format carte postale. L’ensemble est très soigné et parfaitement à l’image de ce beau film gothique.

En ce qui concerne le livret, il contient un long entretien entre Jean-Pierre Bouyxou et Vincent Roussel qui reviennent sur chaque étape de création du film, mais aussi sur les mystères entourant son tournage, ainsi que sur les souvenirs personnels de Bouyxou liés à la découverte du long métrage. La lecture est fort agréable et permet de se plonger deux heures durant dans la cinéphilie de deux passionnés. Le tout est agrémenté de très nombreuses reproductions d’affiches de films et de photographies afin de satisfaire aussi les amoureux de beaux visuels.

Dans le digipack orné lui aussi d’affiches, dont le poster français, on retrouve donc un blu-ray UHD 4K, ainsi qu’un blu-ray pour le film et une troisième galette entièrement consacrée aux nombreux suppléments vidéo. Parmi eux, on signalera que les redites sont légions, mais au moins, les fans du film sauront absolument tout sur le film une fois le tour des bonus effectué.

On démarre donc avec un long entretien (1h12) avec Nicolas Stanzick, le grand spécialiste de la Hammer, qui débute par une mise en contexte pointilleuse, avant d’évoquer un à un les nombreux mystères qui entourent la création du film. De tous les intervenants, il est assurément le plus prudent et le plus nuancé, mais aussi le plus intéressant par sa faconde et sa passion véritable, notamment pour la superbe Barbara Steele. Fait rare, on ne s’ennuie jamais alors qu’il ne sort pas de son canapé.

Le second bonus fait s’entrecroiser trois interlocuteurs différents à propos du film, à savoir Paola Palma, spécialiste universitaire des coproductions franco-italiennes des années 50-60, mais aussi les habitués Olivier Père et Jean-François Rauger. Cette fois, le bonus dure tout de même 1h33min, ce qui est conséquent, mais très redondant avec l’entretien précédent et le livret. En gros, les trois nouveaux spécialistes reviennent sur les mêmes points que Stanzick et ne révèlent rien de plus. Même sentiment de redondance absolue avec le court module de 8min d’Adrian Smith, un peu inutile.

Danse macabre, jaquette 4K UHD détails

© Artus Films – Lyre / Jaquette : Benjamin Mazure. Tous droits réservés.

La suite est nettement plus intéressante puisqu’elle invite les cinéphiles à revenir sur les lieux de tournage des extérieurs du film (23min). En cherchant à visiter cette demeure retrouvée seulement en 2023, les enquêteurs ont rencontré un employé de la demeure (située à Bolsena) qui était présent lors du tournage et qui livre ses souvenirs. Avec ce monsieur fort âgé, on est invité à faire le tour de la demeure, tandis que l’image est scindée en deux pour avoir un comparatif entre les images du film et les lieux tels qu’ils sont aujourd’hui. Ce saut dans le temps s’avère absolument passionnant.

Le propre fils d’Antonio Margheriti, Edoardo, évoque son père durant une douzaine de minutes. Il rappelle notamment que son père n’aimait pas les effusions de sang et que c’est pour cela que Danse macabre était son film préféré, contrairement à Pulsions cannibales (1980) qu’il détestait. Comme beaucoup, il signale l’importance qu’a joué Quentin Tarantino dans la reconnaissance du travail de ces artisans du bis italien.

Enfin, l’éditeur propose de visionner une prise alternative de l’effeuillage de Sylvia Sorrente qui dure un peu plus longtemps et permet de suivre chaque étape du strip-tease de la belle starlette. Reste à consulter un diaporama riche en affiches et la bande-annonce originale.

L’image du 4K UHD : 5 / 5

Avec sa restauration récente effectuée à partir d’un scan 4K, Danse macabre est ici proposé dans une copie optimale. Tout d’abord, l’ensemble bénéficie d’un piqué impeccable qui fait clairement honneur au support, avec une précision chirurgicale. Ensuite, le noir et blanc bénéficie d’un traitement satisfaisant, avec des noirs profonds et des zones grisées séduisantes à l’œil, sans que le contraste soit trop poussé.

En fait, la netteté est telle que l’on peut désormais apercevoir un technicien se refléter dans la porte vitrée de l’auberge, et ceci dès les premières minutes du film. Il s’agit d’un témoignage évident de la rapidité d’un tel tournage et de l’impossibilité de refaire une prise lorsque celle-ci n’est pas totalement réussie. Notons enfin que le métrage a été nettoyé de toute scorie et impureté et que les bords du cadre apparaissent également très propres. Du très beau travail.

Le son du 4K UHD : 4 / 5

La restauration sonore est également de premier ordre sur ce film, aussi bien en version originale qu’en VF (les deux en DTS-HD Master Audio mono). La piste italienne sous-titrée est sans aucun doute la plus propre et surtout la mieux équilibrée. Elle a été débarrassée de tout bruit parasite et ne sature à aucun moment. En ce qui concerne la version française, elle a aussi fait l’objet d’un beau nettoyage, avec une absence de souffle. Les voix sont davantage mises en avant et elles peuvent être un peu nasillardes, mais cela est conforme aux doublages français de l’époque. En tout cas les voix sont bien posées et les acteurs de doublage sont toujours justes. Enfin, Danse macabre sera accessible aux handicapés, avec non seulement une piste en audiodescription, mais aussi des sous-titres pour malentendants.

Test blu-ray : Virgile Dumez

Danse macabre, jaquette 4K UHD box ouverte

© Artus Films – Lyre / Jaquette : Benjamin Mazure. Tous droits réservés.

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