Brendan Fraser est une vedette déchue des années 90, dont l’imbécilité d’une grande partie de la filmographie rend la résurrection artistique d’autant plus revigorante. Retour sur la carrière de la star franchise Universal de La momie.
Porté sur la comédie, le jeune homme américain et canadien de nationalité, intervient pour la première fois au cinéma en 1991. Son premier beau rôle, il l’obtient dans le drame scolaire La différence de Robert Mandel, en 1993. Il intervient dans quelques films grunge et culte de l’époque, comme California Man et surtout Radio Rebels de Michael Lehmann. Leur succès se fait surtout auprès des jeunes sur le support de la VHS.
Quelques errances avant la reconnaissance
Au milieu des années 90, on le retrouve en tête d’affiche dans Avec les félicitations du jury, film académique par le réalisateur d’In Bed With Madonna, et surtout dans le chef d’œuvre d’onirisme de Philip Ridley, Darkly Noon, le jour du châtiment. Ashley Judd et Viggo Mortensen l’accompagnent dans le trip du cinéaste. La carrière de ces deux films s’accomplit essentiellement en VHS.
En 1996, Richard Benjamin dirige Brendan Fraser aux côtés de Shirley MacLaine dans Mrs Winterbourne, autre échec au box-office et nouvel essai du jeune homme dans l’académisme boursoufflé. Still Breathing avec Joanna Going vire au drame commercial en 1997.
Brendan Fraser, enfer star !
En 1997, l’acteur connaît un vrai succès personnel avec l’adaptation du film d’animation George de la jungle, par le studio Disney. Le film flirte avec les 600 000 entrées en France. Le bien-aimé Ni dieux ni démons du débutant Bill Condon, biopic sur le réalisateur de Frankenstein, James Whale, lui permet d’engranger un beau succès critique aux USA. Son film suivant sera La momie, une adaptation du classique de la Universal. Coïncidence ? Le triomphe de ce dernier au box-office (3 153 000 entrées France) donnera naissance à deux suites, l’une en 2001 (Le retour de la momie) et l’autre en 2008 (La momie la tombe de l’empereur Dragon).
Entre deux blockbusters estampillés La momie, une armada de désastres commerciaux
Brendan Fraser connaîtra une carrière en dents de scie hors de la franchise de La momie. Il s’agit d’échecs comme Allô la police (Duldey Do-Right) d’Hugh Wilson, avec Sarah Jessica Parker ; Première sortie, encore d’Hugh Wilson, mais cette fois-ci avec Alicia Silverstone ; Endiablé d’Harold Ramis, avec le mannequin Elizabeth Hurley ; ou Un Américain bien tranquille de Phillip Noyce, avec Michael Caine nommé à l’Oscar. Au moins, l’adaptation du roman de Graham Greene bénéficie d’excellentes critiques et démontre une fois de plus la capacité de Fraser à incarner des rôles plus sérieux.
Le plus gros bide, Fraser le subit en 2001 lors de l’accident industriel Monkeybone de Henry Selick, production pour enfants de 75 000 000$ qui n’en rapporte que 7 600 000$ dans le monde, États-Unis compris. Les Français le découvriront en DVD.
Dans le blockbuster, il échoue dans le film mi-animé mi-live de Joe Dante, Les Looney Tunes passent à l’action, qui est un désastre aux USA. Dans le film d’auteur choral, Collision de Paul Haggis, il est présent dans une œuvre récompensée de l’Oscar du Meilleur Film.
La traversée du désert
Chez New Line, en 2008, Brendan Fraser connaît un succès avec Voyage au centre de la terre, qui profite de la technologie 3D relief. Avec le demi-succès du troisième épisode de La momie qui sortira durant l’été 2008, et un rôle dans G.I. Joe le réveil du Cobra qui réalise 150M$ aux USA, l’acteur est frappé par la malédiction au cinéma et connaîtra une terrifiante descente aux enfers durant les années 2010. Les échecs du sous-Harry Potter Cœur d’encre, de la comédie pour enfants La forêt contre-attaque et du drame médical avec Harrison Ford, Mesures exceptionnelles, le placent dans une situation difficile. Son nom porte la poisse et on lui reproche un manque de charisme qui s’affirme avec le temps qui passe.
Aucun de ses films suivants ne sortiront vraiment en salle en France pendant onze ans, à l’exception de Gimme Shelter, avec Vanessa Hudgens, qui est découvert par 563 spectateurs dans une seule salle hexagonale. Jusqu’en 2014, Fraser multiplie les apparitions dans des films inconnus des Français (Coup de filet, Tout pour lui plaire, Hairbrained…).
La résurrection du paria de Hollywood
En 2014, délaissé par Hollywood, il arrête pendant sept ans le cinéma et trouve refuge dans l’éternel berceau des acteurs dépassés par le néant de leur carrière, la télévision. Il est ainsi présent dans la série Texas Rising, puis The Affair, Trust, Condor, Professionals et surtout Doom Patrol, adaptation DC qui le replace en circulation entre 2019 et 2021. Il fait même partie des artistes les plus régulièrement consultés sur IMDB durant l’année 2021.
Redevenu “in”, Brendan Fraser démontre qu’une traversée du désert, même longue, peut toujours être suivie d’une résurrection étonnante. No Sudden Move de Steven Soderbergh (2021), le film sur l’obésité The Whale de Darren Aronofsky (2022), dont il tient le rôle principal, et qui est plébiscité à Venise où l’acteur a été ovationné pendant de longues minutes, et Killers of the Flower Moon de Martin Scorsese (2021), avec Leonardo DiCaprio et Robert De Niro, marquent un retour fracassant sur les devants de la scène. De quoi nous faire oublier sa participation, en 2019, au projet The Poison Rose, avec Travolta et Morgan Freeman, dont on garde un mauvais souvenir.
L’acteur qui, en 2018, confiait une agression sexuelle par le gourou des Golden Globes, Philip Berk, est désormais redevenu très fréquentable, libéré des inepties pour gamins qui lui ont collé à la peau. En 2022, il trouve même une rédemption artistique dans The Whale de Darren Aronofsky dans lequel il incarne une personne souffrant d’obésité morbide. Le drame divise la critique, mais son interprétation lui vaut des dithyrambes. Il reçoit des nominations aux Oscars, Golden Globes, BAFTA et de nombreux prix d’interprétation. En septembre, son retour à Venise pour la première mondiale du film le précipite à la 2e place du STARMeter d’IMDB, un exploit pour un acteur de son âge.