Willard : la critique du film de Daniel Mann (1972)

Fantastique, Epouvante | 1h35min
Note de la rédaction :
6,5/10
6,5
Willard, l'affiche

  • Réalisateur : Daniel Mann
  • Acteurs : Ernest Borgnine, Bruce Davison, Sondra Locke, Elsa Lanchester
  • Date de sortie: 16 Fév 1972
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : Willard
  • Titres alternatifs : Råttorna (Suède) / La revolución de las ratas (Espagne) / A Mansão do Terror (Portugal) / Szczury (Pologne) / ¡Escalofrío! (Mexique) / Willard e i topi (Italie) / Rotterne kommer (Danemark) / Calafrio (Brésil)
  • Année de production : 1972
  • Autres acteurs : Michael Dante, Jody Gilbert, Joan Shawlee, Almira Sessions, Minta Durfee
  • Scénariste : Gilbert Ralston, d'après le roman de Stephen Gilbert
  • Directeur de la photographie : Robert B. Hauser
  • Compositeur : Alex North
  • Monteur : Warren Low
  • Producteur : Mort Briskin
  • Sociétés de production : Bing Crosby Productions
  • Distributeur : SNC - Imperia Distribution
  • Éditeur vidéo : Proserpine (VHS, 1986) / ESC Editions (DVD et blu-ray, 2020)
  • Date de sortie vidéo : 1986 (VHS) / 17 mars 2020 (DVD et blu-ray)
  • Box-office Paris-périphérie : 42 781 entrées
  • Box-office nord-américain : 14 545 941$ (soit 108,6 M$ au cours de 2023)
  • Budget : 800 000 $ (soit 5,9 M$ au cours de 2023)
  • Classification : Interdit aux mineurs de 13 ans (moins de 12 ans depuis 1990) / PG-13 (USA)
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : Prix Edgar-Allan-Poe du meilleur film en 1972 : 1 nomination non récompensée.
  • Illustrateur / Création graphique Dark Star, l'étoile graphique (jaquette blu-ray, 2020) © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : Bing Crosby Productions © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Franchise : 1er segment du diptyque qui est suivi de Ben (Karlson, 1972). Le film a eu le droit à un remake : Willard (Glenn Morgan, 2003).
Note des spectateurs :

Davantage une plongée dans la psyché torturée d’un jeune homme déclassé qu’un film d’horreur, Willard séduit par le jeu de Bruce Davison et ses interactions avec des rats particulièrement bien dressés. Agréable à défaut d’être totalement mémorable.

Synopsis : Willard est un jeune homme plutôt asocial, sans amis, vivant avec une mère envahissante dans une vieille demeure, humilié par son patron dans une entreprise au sein de laquelle aucun des employés ne le respecte. Alors qu’un jour il quitte furieux un repas d’anniversaire, il va tomber nez à nez avec un rat dans une partie calme de son jardin. Après s’être montré incapable de se débarrasser des rats qui vivent là, il va se lier d’amitié avec l’un d’entre eux qu’il va surnommer Socrate. Willard va par la suite utiliser une véritable armée de rats pour se venger de ses humiliations.

Une série B  sur laquelle les fées se sont penchées

Critique : En 1968, le romancier irlandais Stephen Gilbert rencontre un formidable succès avec son roman horrifique Ratman’s Notebooks. L’auteur parvient à vendre les droits d’adaptation cinématographique à la Bing Crosby Productions et plus particulièrement au producteur Mort Briskin qui engage la somme minimale de 800 000 $ (soit 5,9 M$ au cours de 2023) pour concrétiser le projet. Afin de rendre au mieux les invasions de rats décrites dans le livre, le producteur estime qu’il faut utiliser de véritables rats par centaines, plutôt que des effets spéciaux dispendieux et jugés peu efficaces à l’écran, voire franchement ridicules.

Tourné à l’économie, Willard (1971) dispose donc de quelques décors principaux, d’une centaine de rats dirigés par le spécialiste Moe Di Sesso et d’une unique vedette en la personne d’Ernest Borgnine qui, pourtant, avait une sainte horreur des rongeurs. Par ailleurs, le casting a été majoritairement effectué en fonction des animaux et de la capacité des comédiens à interagir avec eux. Ainsi, les témoins du casting s’amusent encore aujourd’hui du fait que ce soit le rat Ben qui a réellement choisi Bruce Davison pour être son partenaire car il est l’un des seuls prétendants au rôle qu’il n’a pas mordu. Enfin, la jeune Sondra Locke a été sélectionnée à la suite de sa prestation remarquée dans Le cœur est un chasseur solitaire (Miller, 1968).

Willard est réalisé par un artisan peu habitué à l’horreur

Afin de mettre en boite ce petit film d’horreur, le choix s’est étrangement porté sur le cinéaste Daniel Mann dont l’ensemble de l’œuvre n’entretient aucun rapport avec le cinéma de genre. En réalité, Mann était surtout connu pour ses films à Oscars des années 50 et sa carrière battait sérieusement de l’aile au début des années 70. Il était également réputé pour sa capacité à livrer un travail bien fait en respectant le budget alloué, un impératif pour cette petite série B.

Willard, la jaquette blu-ray

© 1971 Bing Crosby Productions / © 2020 ESC Editions. Jaquette : Dark Star, l’étoile graphique. Tous droits réservés.

Si les amateurs de grands frissons ne seront guère rassasiés avec ce Willard qui est très timide en matière d’effusion sanglante, ceux qui apprécient les ambiances hitchcockiennes prendront un certain plaisir à découvrir cette création explorant surtout la psyché désordonnée d’un jeune homme sociopathe. Totalement émasculé par une mère castratrice magnifiquement interprétée par la légende vivante Elsa Lanchester (La Fiancée de Frankenstein, c’était elle !), le pauvre Willard doit également supporter un patron odieux – parfait Ernest Borgnine – et des collègues de bureau peu sympathiques. Alors qu’il est au bord du gouffre, Willard se prend d’amitié pour des rats qui envahissent son terrain, puis sa cave.

Willard révèle le talentueux Bruce Davison

Bien entendu, l’intégralité du film peut être lu comme une métaphore de la folie galopante chez ce jeune garçon incapable de grandir, confiné qu’il est dans une demeure qui est à la fois son havre de paix et sa prison. Ses relations compliquées avec la jeune fille jouée par Sondra Locke témoignent aussi d’une forme d’immaturité sexuelle qui est lourde d’implications. Petit à petit, Willard se transforme donc en une sorte de Norman Bates (Psychose, d’Hitchcock est une référence à peine déguisée) dont la folie vengeresse passe par des attaques de rats spectaculaires. Si celles-ci paraissent toutefois assez modestes, le fait d’avoir utilisé de véritables animaux est assurément une plus-value pour le long-métrage.

Pourtant, la véritable révélation de Willard est à coup sûr le jeune Bruce Davison qui venait tout juste d’exploser dans deux films d’auteur intitulés Dernier été (Perry, 1969) et Des fraises et du sang (Hagmann, 1970), ce dernier étant même primé au Festival de Cannes. L’acteur juvénile livre ici une interprétation fiévreuse assez impressionnante et il dévore l’écran de son talent. Davison était à l’aube d’une carrière vertigineuse forte de près de 300 crédits et qui se prolonge encore de nos jours.

VHS française de Willard - Editeur : Proserpine

© 1971 Bing Crosby Productions. All Rights Reserved.

Quand tout vous sourit au box-office!

En ce qui concerne la réalisation de Daniel Mann, celle-ci fait preuve de professionnalisme et d’une certaine justesse dans la description de la descente aux enfers psychologique du héros. Sans doute tout ceci manque de folie dans la mise en forme, mais son choix de ne pas surenchérir dans l’horreur sert plutôt le propos du film.

Sorti aux Etats-Unis dans quelques villes test au cours des mois de février à juillet 1971, Willard a bénéficié d’un excellent bouche-à-oreille qui en a fait un véritable phénomène américain. Au long d’une carrière de près d’un an, la micro-production a fini par récolter 14,5 M$ (soit 108,6 M$ au cours de 2023) et ainsi par se hisser à la 11ème place annuelle du box-office nord-américain. Cette performance inattendue a permis d’initier tout un cycle de longs-métrages sur des agressions animales et de concevoir une suite ratée intitulée Ben (Karlson, 1972). Enfin, Willard a eu le droit à son remake éponyme dans les années 2000, tourné par Glen Morgan et interprété par Crispin Glover. Cette fois, le remake fut un flop international.

Un film peu connu en France

Pour sa sortie française en février 1972, Willard n’a pas renouvelé le miracle américain, mais a toutefois réussi un score estimable. Sur la capitale, il est présenté dans 6 cinémas, avec trois écrans en périphérie. Il figure ainsi au Boul’Mich, au Bretagne, Mistral-Club, Clichy Pathé, au Caméo, et surtout au Normandie sur les Champs Elysées où il grignotte 5 212 tickets. Au total, les chiffres de cette première semaine s’élèvent à 22 597 spectateurs.

En deuxième semaine, Willard perd un écran en intra-muros. La copie part immédiatement en banlieue. Le film chute à 12 619 mulots. Cette production américaine vigoureuse finit sa carrière à 7 565 spectateurs en troisième semaine, dans 5 cinémas, avec des salles parisiennes affichant toutes plus de  1 300 spectateurs par écran, et même 1 786 retardataires au Bretagne. Au total, 42 781 tireront le mal par la queue sur la capitale et sa banlieue.

Le métrage a été ensuite édité en VHS en 1986 chez Proserpine, avant de disparaître à nouveau des écrans jusqu’à sa résurrection chez ESC Editions dans une excellente copie entièrement restaurée et aux couleurs pimpantes, dû au master de chez Scream Factory qui propose une édition vidéo haute-définition en 2017.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 16 février 1972

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Willard, l'affiche

© 1971 Bing Crosby Productions. All Rights Reserved.

Biographies +

Daniel Mann, Ernest Borgnine, Bruce Davison, Sondra Locke, Elsa Lanchester

Mots clés 

Les animaux tueurs, Les rats au cinéma, Les relations mère-fils au cinéma, Les tueurs fous au cinéma

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Willard, l'affiche

Bande-annonce de Willard (VO)

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