OSS 117 se déchaîne ! fait pâle figure à côté de son concurrent direct James Bond. Mais on peut encore trouver un certain charme à ces aventures désuètes qui pâtissent d’un script un peu terne.
Synopsis : Hubert Bonnisseur de la Bath, alias OSS 117, est chargé d’une enquête en Corse à propos d’un détecteur de sous-marin nucléaire qui pourrait faire basculer le sort d’un monde alors en pleine guerre froide.
OSS 117 contre James Bond 007
Critique : Souvent considérée comme un James Bond du pauvre, la saga littéraire OSS 117 est née de la plume de Jean Bruce qui a entamé cette série en 1949, soit trois ans avant Ian Fleming et son 007. L’auteur est donc bien à l’origine d’un genre très populaire et non un simple copieur, contrairement à ce qui a trop souvent été avancé. Il en est de même pour ses adaptations cinématographiques puisque le tout premier long-métrage date de 1957. Il fut réalisé par Jean Sacha et intitulé OSS 117 n’est pas mort.
Certes, le film n’a pas ouvert le bal d’un nouveau sous-genre, mais il devance là aussi de cinq bonnes années le Docteur No de Terence Young (1962). D’ailleurs, si le premier volet des aventures de James Bond fait bien son apparition sur les écrans français en janvier 1963, le tournage d’OSS 117 se déchaîne ! est déjà achevé. Le petit jeu de l’original et de la copie n’a donc guère d’intérêt dans le cas précis, d’autant que l’agent Hubert Bonnisseur de la Bath ne lutte pas à armes égales avec Bond.
Des moyens limités et un unique décor corse
Effectivement, ce qui choque immédiatement lorsque l’on découvre ce premier épisode de la saga des années 60, c’est le flagrant manque de moyens à la disposition d’André Hunebelle, et donc le peu de confiance des producteurs envers cette aventure d’espionnage dont ils ne soupçonnaient pas le potentiel commercial. Là où James Bond se balade dans des îles paradisiaques au bout du monde, OSS 117 doit se contenter de la Corse comme unique cadre exotique.
Quand James se pavane en couleur, Hubert doit faire avec un noir et blanc peu enthousiasmant. En lieu et place de gadgets sophistiqués, OSS 117 doit souvent se contenter de ses poings qu’il utilise d’ailleurs dans des bagarres plutôt bien réglées qui introduisent auprès du public français les techniques du karaté jusqu’alors ignorées. Enfin, le thème composé par Michel Magne est une insipide chanson yéyé qui ne pouvait aucunement rivaliser avec le thème mythique composé par John Barry pour l’agent 007.
De l’action au sein d’une intrigue inutilement alambiquée
Si les corps à corps sont assez nombreux et plutôt réussis, on compte malheureusement peu de scènes marquantes durant cette aventure un peu terne. On note bien quelques séquences sous-marines sympathiques mais desservies par l’emploi du noir et blanc, ce qui ne suffit pas vraiment à donner du peps à une intrigue cousue de fil blanc où tout le monde se trahit à tour de rôle.
Très alambiquée pour pas grand-chose, l’histoire d’OSS 117 se déchaîne ! se perd trop souvent dans des développements inutiles qui n’ont d’autre but que de rallonger la sauce. Heureusement que les auteurs ont ajouté quelques dialogues hauts en couleur dont on se demande s’ils ont été écrits au premier ou au second degré. On préférera opter pour la seconde proposition, même si un doute raisonnable demeure.
Un casting plutôt satisfaisant
Alors que le rôle principal a été un temps envisagé par Jean Marais, André Hunebelle a choisi de faire confiance à un acteur américain afin de faciliter l’exportation du produit fini. Auréolé du succès de films d’aventures comme Le septième voyage de Sinbad (1957), Kerwin Mathews incarne avec une certaine prestance Hubert Bonnisseur de la Bath, son jeu ne se résumant pas à une stature monolithique.
Capable de vraiment jouer la comédie, il s’investit également dans les séquences plus physiques (souvent doublées par Yvan Chiffre). Il est entouré par des acteurs sympathiques et aux gueules patibulaires dont l’intrigant Daniel Emilfork. Côté petites pépées, les amateurs de beautés blondes pourront se régaler devant la plastique froide de Nadia Sanders ou encore le charme mutin d’Irina Demick (Le jour le plus long et Le clan des Siciliens).
OSS 117 remporte un beau succès et initie une saga populaire
Sans doute porté par le succès du premier James Bond sorti quelques mois plus tôt, OSS 117 se déchaîne ! a attiré plus de 2,3 millions de spectateurs sur toute la France (avec un gros coefficient Paris-Province), se plaçant à la 14ème place du podium annuel. Un résultat particulièrement satisfaisant qui a permis cette fois-ci de lancer une franchise lucrative, bien que la qualité ne soit pas toujours au rendez-vous.
Critique de Virgile Dumez