Marco Ferreri, auteur de films subversifs et poétiques, reste un cinéaste italien majeur des années 60 à 80.
Le collectionneur de films à scandales
Marco Ferreri a d’abord été producteur de documentaires néoréalistes (signés De Sica, Fellini…), réalisateur de films publicitaires, directeur d’une revue de cinéma, acteur de second plan et directeur de production.
C’est en Espagne qu’il réalisa ses premiers longs métrages, dont L’Appartement/El Pisito (1959), satire de la crise du logement, et La Petite voiture/El Cochecito (1960), d’un humour noir ravageur, bien accueilli au Festival de Venise.
De retour en Italie, il peaufina une œuvre critique vis-à-vis de la société italienne, et la société en général, avec une prédilection pour les fables caustiques dont certaines ont connu un parfum de scandale.
Il tourna en dérision les liens du mariage dans Le Lit conjugal (1963), exhiba Annie Girardot dans Le Mari de la femme à barbe (1964), fit de Mastroianni un obsédé des ballons gonflables dans Break-up, érotisme et ballons rouges (1965), et de Michel Piccoli un concepteur de masques à gaz qui finit par assassiner sa femme dans Dillinger est mort (1969).
Marco Ferreri, l’un des poètes du cinéma italien
Les années 70, décennie de la libération sexuelle, firent celles où son génie créatif fut le plus manifeste. Il transforma Catherine Deneuve en femme chienne dans Liza (1972), avant de signer de beaux contes qui constituent ses meilleurs films : La Grande bouffe qui choqua la Croisette en 1973 était une métaphore des désillusions de la société de la consommation, quand La Dernière femme (1976) était une belle étude sur le couple, magnifiée par l’interprétation de Gérard Depardieu, qu’il dirigea à nouveau dans Rêve de singe (1978).
Les années 80 le virent un peu s’assagir, mais quatre de ses films méritent l’attention. Conte de la folie ordinaire (1981), avec Ben Gazzara et Ornella Muti, adaptait avec intelligence un recueil de nouvelles de Charles Bukowski. L’Histoire de Piera (1983) était un beau portrait de femmes, bien servi par le jeu de Hanna Schygulla et Isabelle Huppert. Dans I Love you (1986), Christophe Lambert tombait amoureux d’un porte-clefs. Quant au méconnu Y a bon les blancs (1988), il constituait une réjouissante et non politiquement correcte satire des mouvements humanitaires engagés en Afrique.
D’autres œuvres de la filmographie de Marco Ferreri mériteraient sans doute d’être redécouvertes, comme Le Harem (1967), La Semence de l’homme (1969), L’Audience (1971), Touche pas la femme blanche ! (1974), Pipicacadodo (1980), Le Futur est femme (1984) et La Maison du sourire (1991), son dernier film.
Filmographie sélective
- 1959 : L’Appartement (El pisito)
- 1960 : La Petite voiture (El cochecito)
- 1963 : Le Lit conjugal (Una storia moderna: l’ape regina)
- 1964 : Le Mari de la femme à barbe (La donna scimmia)
- 1965 : Break-up, érotisme et ballons rouges (L’uomo dei palloni)
- 1965 : Aujourd’hui, demain et après-demain (Oggi, domani, dopodomani), segment L’homme aux cinq ballons (L’uomo dei 5 palloni)
- 1967 : Le Harem (L’harem)
- 1969 : La Semence de l’homme (Il seme dell’uomo)
- 1969 : Dillinger est mort (Dillinger è morto)
- 1971 : L’Audience (L’udienza)
- 1972 : Liza
- 1973 : La Grande bouffe (La grande abbuffata)
- 1974 : Touche pas à la femme blanche (Non toccare la donna bianca!)
- 1976 : La Dernière femme (L’ultima donna)
- 1978 : Rêve de singe (Ciao maschio)
- 1980 : Pipicacadodo (Chiedo asilo)
- 1981 : Conte de la folie ordinaire (Storie di ordinaria follia)
- 1983 : L’Histoire de Piera (Storia di Piera)
- 1984 : Le Futur est femme (Il futuro è donna)
- 1986 : I Love You
- 1988 : Y a bon les blancs
- 1991 : La Chair (La carne)