Spectacle magique, Le septième voyage de Sinbad est un pur plaisir pour tous ceux qui ont conservé leur âme d’enfant. Le métrage enchante encore par la beauté des effets spéciaux artisanaux de Ray Harryhausen. Une merveille.
Synopsis : Le magicien Sokurah rétrécit la princesse Parisa, fiancée de Sinbad, et pousse ce dernier à retourner sur l’île de Colossa. C’est ici que Sinbad avait libéré Sokurah des griffes d’un cyclope qui avait néanmoins gardé la lampe magique. Afin de retrouver sa précieuse lampe, Sokurah a donc joué ce mauvais tour à Sinbad. Le seul remède qui puisse rendre à Parisa sa taille normale se trouve sur cette fameuse île. Pour Sinbad et quelques autres marins, c’est le début d’un long périple…
Une version très fantaisiste des aventures de Sinbad
Critique : Au milieu des années 50, le producteur Charles H. Schneer développe au sein de la firme Columbia une collaboration fructueuse avec Ray Harryhausen, grand spécialiste de l’animation de créatures fantastiques image par image. Ils rencontrent notamment le succès avec des films comme Le monstre vient de la mer (Gordon, 1955), Les soucoupes volantes attaquent (Sears, 1956) et A des millions de kilomètres de la Terre (Juran, 1957). Ils ont alors l’idée de se saisir des Contes des mille et une nuits, dans leur version revue et corrigée par Antoine Galland au 18ème siècle, pour laisser libre cours à leur imagination.
Ils utilisent notamment le personnage très populaire de Sinbad pour conter des aventures extraordinaires qui s’inspirent des récits traditionnels, mais s’affranchissent de toute fidélité aux textes d’origine. Ainsi, ils n’hésitent pas à mélanger plusieurs récits différents, à mixer le tout avec des traditions venues de lieux et d’époques divers et variés, tout en multipliant les épisodes spectaculaires. Effectivement, le but avoué est de laisser Ray Harryhausen créer des effets spéciaux impressionnants selon son principe appelé Dynamation.
Un film particulièrement dynamique et généreux en péripéties
Et de fait, la particularité de ce Septième voyage de Sinbad est de ne jamais laisser le temps au spectateur de s’ennuyer. Cela commence directement par une expédition maritime au cœur d’un océan plongé dans le brouillard, puis la lutte de l’équipage complet contre un cyclope issu de l’île de Colossa. Point de présentation fastidieuse des personnages, mais un saut immédiat dans un univers merveilleux et fantastique porté par des effets spéciaux magnifiques (certes, vieillis, mais qui possèdent un charme fou). Par la suite, les auteurs mettent en place une intrigue assez basique qui oblige Sinbad à retourner sur cette île fantastique, pour le bonheur du plus grand nombre.
Dès lors, Ray Harryhausen nous propose un bestiaire formidable composé d’un cyclope géant, de volatiles à deux têtes, d’un superbe dragon et également d’un squelette animé qui préfigure la séquence culte de Jason et les Argonautes (Chaffey, 1963). Ainsi, la dernière demi-heure du long-métrage s’avère particulièrement enthousiasmante, avec un nombre conséquent de séquences mémorables. L’action chevillée au corps, le cinéaste Nathan Juran ne cherche aucunement à philosopher, mais bien à livrer le spectacle le plus grisant possible. Il enflamme ainsi notre imagination à plusieurs reprises durant ce film qui mérite largement son appellation de film culte.
Sinbad au cinéma
Des acteurs un peu à la peine, mais le charme opère tout de même
Toutefois, le principal défaut du film tempère quelque peu notre admiration. Effectivement, le couple de cinéma formé par Kerwin Mathews et Kathryn Grant est loin d’être impérissable. Mathews ne possède pas de réel charisme, tandis que sa princesse n’est guère charmante. Ils sont à coup sûr le gros point faible du film, tandis que l’acteur shakespearien Torin Thatcher compose un magicien d’anthologie.
Tout ceci est sublimé par une partition musicale pompeuse à souhait de Bernard Herrmann qui multiplie les thèmes héroïques et arabisants avec bonheur. Les images sont splendides (bien que kitsch, comme le veut ce genre de sucrerie exotique) et concourent au plaisir éprouvé par le spectateur.
Sorti en France durant la période de Noël 1958, Le septième voyage de Sinbad a connu un joli succès, majoritairement dans les salles provinciales où il a enchanté les gosses de l’époque. Plus d’un million de têtes blondes ont succombé à ces aventures merveilleuses devenues avec le temps un véritable classique de l’aventure et du cinéma fantastique. Tous les artistes se retrouveront avec moins de bonheur pour un Jack, le tueur de géants (Juran, 1962), tandis que la saga cinématographique de Sinbad continuera dans les années 70.
Critique de Virgile Dumez