Moonfall : la critique du film (2022)

Science-fiction, Film catastrophe, Blockbuster | 2h04min
Note de la rédaction :
4/10
4
Moonfall, affiche générique

  • Réalisateur : Roland Emmerich
  • Acteurs : Donald Sutherland, Halle Berry, Patrick Wilson, Michael Peña, Maxim Roy, John Bradley
  • Date de sortie: 09 Fév 2022
  • Année de production : 2021
  • Nationalité : Américain, Britannique, Chinois
  • Titre original : Moonfall
  • Titres alternatifs : Moonfall - Rota de Colisão (Portugal) / Moonfall: Ameaça Lunar (Brésil)
  • Scénaristes : Spenser Cohen, Roland Emmerich, Harald Kloser
  • Directeurs de la photographie : Robby Baumgartner
  • Monteurs : Ryan Stevens Harris, Adam Wolfe
  • Compositeurs : Harald Kloser, Thomas Wanker
  • Producteurs : Roland Emmerich, Harald Kloser
  • Sociétés de production : Lionsgate presents, in association with Huayi Brothers International and Huayi Tencent Entertainment International, a Centropolis Entertainment production, in association with Street Entertainment and AGC Studios.
  • Distributeur : Metropolitan FilmExport
  • Editeur vidéo : Metropolitan Films
  • Date de sortie vidéo : 9 juin 2022 (DVD, blu-ray, VOD)
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 342 251 entrées / 70 390 entrées
  • Box-office nord américain / monde : 19 060 660$ / 59 049 032$
  • Budget : 150 000 000$
  • Classification : PG-13 for violence, disaster action, strong language, and some drug use (USA) / Tous publics (France)
  • Formats : 2.39 : 1 / Couleurs / Dolby Atmos / IMAX 6-Track
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : © Les Aliens.com. Photo : ca. 1980s-1990s --- Earth curvature displays the Florida Peninsula under cloud cover with sun starburst, taken with a Hasselblad camera on board the . --- Image by © NASA/Roger Ressmeyer/CORBIS. Tous droits réservés / All rights reserved. Photos : © Reiner Bajo
  • Crédits : © Lionsgate. UK Moonfall LLP. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Hashtag : #Moonfall
Note des spectateurs :

Les 5 premières minutes du film

Avec son scénario absurde de bout en bout et ses personnages creux, Moonfall est un sommet de crétinerie dont on ne sauvera que les scènes de destruction, toujours très impressionnantes. Attention, nanar !

Synopsis : Une mystérieuse force a propulsé la Lune hors de son orbite et la précipite vers la Terre. L’impact aura lieu dans quelques semaines, impliquant l’anéantissement de toute vie sur notre planète. Jo Fowler, ancienne astronaute qui travaille pour la NASA, est convaincue de détenir la solution pour tous nous sauver, mais seules deux personnes la croient : un astronaute qu’elle a connu autrefois, Brian Harper, et un théoricien du complot, K.C. Houseman. Ces trois improbables héros vont tenter une mission impossible dans l’espace… et découvrir que notre Lune n’est pas ce que nous croyons.

Affiche allemande de Moonfall

© 2022 Lionsgate

Roland Emmerich persiste et signe dans la destruction massive

Critique : Les années passent et le cinéaste Roland Emmerich semble inoxydable, toujours aussi passionné par la science-fiction et les films catastrophe qu’il y a maintenant plus de trente ans lorsqu’il dégoupillait son Moon 44 (1990) tourné dans sa patrie d’origine, l’Allemagne. Si l’on sent toujours l’amour du cinéaste pour des sujets improbables, celui-ci n’a jamais évolué d’un iota dans sa conception du cinéma. Malgré les critiques qui ont toujours porté sur son incapacité à créer des intrigues plausibles et des personnages qui ne soient pas de simples caricatures, Emmerich persiste dans ses erreurs avec une constance qui laisse pantois. Autant le dire tout de suite, ce n’est pas avec Moonfall que le cinéaste va se racheter une réputation auprès des cinéphiles les plus exigeants.

La première séquence dans l’espace est symptomatique du système Emmerich : des astronautes travaillent dans le grande vide spatial sur un satellite en faisant des blagues pourries et en écoutant une chanson de Toto. Le ton est posé dès cette entame totalement improbable, suivie par une impressionnante séquence qui reprend le style développé dans Gravity (Cuaron, 2013). Ainsi, dès les premières minutes, Moonfall souffle le chaud et le froid en mêlant redoutable efficacité de l’action et absurdité totale des personnages et des situations. Bienvenu dans cet univers parallèle qui n’existe que dans le cinéma de Roland Emmerich!

Affiche teaser française de Moonfall

© 2022 UK Moonfall LLP

Des personnages creux pour un discours populiste

La suite est à l’avenant, avec une première heure d’exposition où le postulat délirant est encore vaguement soutenu par une tentative d’explication scientifique. Il va toutefois falloir supporter des personnages qui ne sont que des enveloppes vides, débitant des fadaises ou des phrases sentencieuses qui font inévitablement sourire. Bien entendu, le cinéaste n’a pas pu s’empêcher d’intégrer à son intrigue un geek complotiste (incarné avec une certaine stature par John Bradley) qui est en réalité un petit génie (ben voyons !). Ce protagoniste s’avère profondément problématique puisqu’il vient valider l’idée que les scientifiques académiques nous mentent et que seuls des dilettantes géniaux peuvent être le salut de l’humanité. Où comment conforter le public dans des idées populistes éminemment dangereuses.

Toutefois, cela serait faire trop d’honneur au film que d’y déceler un propos vraiment construit, tant le scénario aligne les énormités à la vitesse d’un pachyderme au galop. Dans sa deuxième heure notamment, le long-métrage devient un incroyable fatras de séquences toutes plus absurdes les unes que les autres. Peu importe que le geek ne soit pas astronaute, il peut supporter un voyage spatial sans aucun entrainement. Peu importe que la technologie utilisée par la mission de sauvetage n’ait pas été utilisée depuis des années, puisque tout fonctionne parfaitement. Et si les héros sont en très mauvaise posture, Emmerich trouve la parade en coupant la scène en plein milieu à l’aide d’une ellipse qui nous permet de retrouver les personnages sains et saufs par la grâce du saint scénariste.

Affiche espagnole de Moonfall

© 2022 Lionsgate

Des ambitions contredites par un script invraisemblable

A ce niveau, ce n’est plus de la suspension d’incrédulité dont il faut faire preuve. Rédigé par un grand gamin qui aurait 12 ans d’âge mental, le script est à ce point invraisemblable que les héros ne cessent de clamer que ce qu’ils font est tout bonnement impossible. A se demander si c’est un clin d’œil de la part du cinéaste, ou du cynisme pur et dur. Certes, on voit bien ce qui motive Emmerich dans ce Moonfall, à savoir retrouver un certain esprit d’innocence comme on pouvait en déceler dans les œuvres littéraires d’un Jules Vernes. Et de fait, certaines idées, bien que saugrenues, pouvaient être intéressantes sur le papier, d’autant que le réalisateur a tout de même l’ambition de nous raconter les origines de l’espèce humaine.

Malheureusement, son traitement sans nuance, sans application et consternant de crétinerie ne peut jamais aboutir à un spectacle pour adultes. Il reste alors à admirer les impressionnantes séquences de destruction, dont un raz-de-marée, une pluie de météores et des destructions de cités entières. On peut également sauver de l’ensemble l’exploration des entrailles de la Lune qui donne lieu à des plans de toute beauté. Assurément sincère dans sa démarche et désireux d’en mettre plein la vue, Roland Emmerich en donne pour son argent au public venu assister à des catastrophes en série. Mais comme d’habitude, il oublie l’essentiel : rien ne peut vraiment nous faire frissonner si les personnages impliqués nous indiffèrent. D’autant que ces destructions massives sont toujours dépourvues du moindre cadavre. Ainsi, on a la désagréable impression que le monde entier est déjà désert lorsque les calamités s’abattent sur la planète.

Blu-ray de Moonfall

© 2022 Lionsgate

Voyage au centre de la Lune… et du néant scénaristique

Pire, il n’y a quasiment aucune victime parmi la pléthore de personnages principaux qui se tirent de situations impossibles de manière surréaliste – et sans égratignure. Gros nanar ayant coûté plus de 150 millions de dollars, Moonfall n’est pas nécessairement pire que les autres longs-métrages du réalisateur, mais il ne le réconciliera pas non plus avec ses détracteurs habituels qui ne verront dans cette série B boursouflée qu’une énième manifestation de son incapacité à s’intéresser à la narration d’une histoire bien charpentée. Finalement, le spectacle s’avère plutôt drôle, mais au quinzième degré. Gageons que ce n’était pas le but initial du réalisateur !

Critique de Virgile Dumez

Sorties de la semaine du 9 février 2022

Moonfall, affiche générique

Design : Les Aliens.Com – © 2022 Lionsgate

Box-office :

Moonfall semble parti pour devenir l’ultime gros budget accordé à Roland Emmerich, dont la carrière avait déjà été entamée par de nombreux crashes récents. En effet, il est l’un des plus gros échecs de l’histoire du cinéma.

Sorti à la fin de l’épidémie de COVID-19, quand les salles étaient aux prémices d’une énorme crise cinématographique à venir, le blockbuster de 150 000 000$, hors frais de marketing, a souffert d’être assimilé dans l’esprit et sa promotion à une œuvre des années 90, notamment aux yeux des jeunes spectateurs.

Genre passé de mode, le film catastrophe n’a de surcroit que rarement laissé de bons souvenirs aux spectateurs, autres qu’adolescents au moment de la sortie de ceux-ci. Pour le triomphe artistique de Titanic, combien de navetons? Citons les ratures que sont Twister, Volcano, Le Pic de Dante, Geostorm, Black Storm, Hurricane, San Andreas, Fusion. Des sommets du ridicule qui ne comptent que pour ceux qui les ont vus à 10-16 ans…

Affiche roumaine de Moonfall

© 2022 Lionsgate

Qui fait encore confiance à Roland Emmerich? Plus personne…

Moonfall restera pour sa part un cas d’école. A une époque d’obsessions super-héroïques monomaniaques, cette coproduction américaine, chinoise, canadienne et britannique, avait été lancée hors studio, avec des acteurs sans pouvoir de séduction pour les foules. Pis, le cinéaste Roland Emmerich avait perdu toute crédibilité artistique avec ce même genre de films de destruction massive, ringardisé par les critiques et le public, notamment la suite de Independence Day en 2016.

Quand Moonfall paraît sur 3 446 écrans américains, le 4 février 2022, la bande-annonce efficace, les nombreux visuels ahurissants de lune s’écrasant sur la Terre, ont envahi l’internet. Si les jeunes ne les remarquent pas, les quadras savourent un revival éventuel d’une mode de leur adolescence, mais ne se déplacent pas pour autant.

Moonfall : un crash lunaire aux Etats-Unis

En termes de recettes, le vertige est abyssal : 9 868 000$ pour ses trois premiers jours. Les premiers échos des internautes sont assassins. Rarement un démarrage aura été aussi bas pour une œuvre bénéficiant d’un tel budget. L’affront est tel que la production dantesque ne s’empare même pas de la première place du box-office américain, devant se contenter d’une deuxième place derrière un challenger à petit budget, Jackass Forever, premier succès annuel pour Paramount (Top Gun Maverick, Smile…cela sera eux). Le satellite de la Terre va pouvoir s’écraser avec fracas lors des week-ends suivants : 2.9M$ (-70%), 1M$ (-64%)… Le grand spectacle demeure à peine 6 semaines à l’affiche.

Moonfall, affiche sans logo

© 2022 UK Moonfall LLP

La Chine confinée, la Russie en “opération spéciale”

La Chine qui aurait dû l’aider à contrebalancer ses pertes sèches ne peut rien y faire : son marché est fermé en raison de l’épidémie de coronavirus. Pour la Russie qui est sur le point d’envahir l’Ukraine, l’humeur n’est pas festive. Les 2 000 cinémas locaux trouveront 3 876 000$ en fin de compte. Cela sera le deuxième moins mauvais score du film après les désastreux résultats américains, en raison du goût pour le grand public russe pour les grosses machines hollywoodiennes balourdes.

L’Allemagne (2 900 000$), le Mexique (2 789 000), le Royaume-Uni (2 757 000), la Corée du Sud (1 546 000$), l’Espagne et l’Australie (1M$) suivent.

En France, où le distributeur Metropolitan FilmExport propose une affiche exclusive et a savamment travaillé la promotion. Le département distribution en raison d’échecs en série pendant la pandémie, devait symboliquement se redresser grâce à Moonfall, qui toutefois, sortira sans passion.

La France, sixième marché mondial pour Moonfall

Avec des recettes de 2 625 000$, la France devient le 6e marché au monde pour ce blockbuster. Sur la capitale, la production opulente ne parviendra jamais à dépasser les 80 000 entrées et sera retirée de l’affiche de toute urgence, à l’issue d’une balade de 6 petites semaines dans des salles vides.

La combinaison balourde de 615 copies sur l’ensemble de notre territoire fera à peine mieux. 207 000 entrées en première semaine. La moyenne de 337 spectateurs par salle est très médiocre. Les choses empirent très vite malgré un mois de vacances sur l’Hexagone : 88 000 entrées en 2e semaine, 32 000 en troisième semaine, 10 000 en 4e… L’accident est lunaire.

Moonfall, affiche americaine sans logo

© 2022 UK Moonfall LLP

Le plus gros flop de l’année 2022

Dans le besoin de rattraper le coup, le distributeur Metropolitan éditera le vidéo exactement trois mois après la sortie, avec un visuel différent, en juin 2022.

Si d’autres productions paieront de lourds tributs en 2022 (Nightmare Alley de Guillermo del Toro, Amsterdam de David O. Russell, Morbius, The Northman, 355, et même Buzz l’éclair de Pixar…), Moonfall est devenu le plus gros flop annuel pour une œuvre sortie en salle. Alerte Rouge de Pixar, essentiellement proposé sur la plateforme Disney +, avec ses 20M$ de recettes dans les salles et son budget de 175 000 000$, reste un cas à part, mais peu glorieux.

Au final, la crise de la COVID-19, conjuguée à un sujet hors-mode et un piètre niveau artistique, ont surtout fait de Moonfall l’un des plus gros échecs de l’histoire du cinéma.

Frédéric Mignard

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