Le justicier de minuit : la critique du film (1983)

Thriller | 1h41min
Note de la rédaction :
7/10
7
Le justicier de minuit, l'affiche

  • Réalisateur : Jack Lee Thompson
  • Acteurs : Charles Bronson, Cosie Costa, Geoffrey Lewis, Kelly Preston, Wilford Brimley, Lisa Eilbacher, Gene Davis, Andrew Stevens
  • Date de sortie: 13 Juil 1983
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : 10 to Midnight
  • Titres alternatifs : Ein Mann wie Dynamit (Allemagne) / Al filo de la medianoche (Espagne) / Dez para a Meia-Noite (Portugal) / 10 minut do północy (Pologne) / Diez minutos para morir (Pérou) / 10 minuti a mezzanotte (Italie) / Dez Minutos para Morrer (Brésil)
  • Année de production : 1983
  • Scénariste(s) : William Roberts
  • Directeur de la photographie : Adam Greenberg
  • Compositeur : Robert O. Ragland
  • Société(s) de production : Cannon Films, City Films, Y & M Productions
  • Distributeur (1ère sortie) : S.N. Prodis
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : Manhattan Video - Carrère Vidéo (VHS, 1983) / MGM - United Artists (DVD, 2004) / Sidonis Calysta (DVD et blu-ray, 2021)
  • Date de sortie vidéo : Octobre ou novembre 1983 (VJS, FRANCE° 20 mai 2021 (blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 578 000 entrées / 174 546 entrées
  • Box-office nord-américain : 7,1 M$ (19,2 M$ au cours ajusté en 2021)
  • Budget : 4,5 M$ (12,1 M$ au cours ajusté en 2021)
  • Rentabilité : -
  • Classification : Interdit aux moins de 18 ans à sa sortie, moins de 16 ans aujourd'hui
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : R.S.C.G. Best seller (agence)
  • Crédits : MGM
Note des spectateurs :

Pur film d’exploitation, Le justicier de minuit est un thriller violent qui bénéficie d’une ambiance nocturne perturbante du meilleur effet. Efficace.

Synopsis : Warren Stacey est un dangereux détraqué sexuel qui, selon un rite minutieux, éventre ses victimes à coups de poignard. Deux policiers, un vieux routier, Léo Kessler, et son jeune adjoint, Paul McAnn, cherchent en vain à appréhender le coupable. Cependant, lors de l’enterrement de l’une des femmes assassinées, la fille de Kessler, Laurie, reconnaît dans la procession un jeune homme qui, naguère, avait eu des liens avec la victime. La police enquête et le jeune homme, qui n’est autre que Warren Stacey, apparaît comme le suspect numéro un.

Quand la Cannon rencontre Charles Bronson

Critique : Forts du succès phénoménal obtenu par Le justicier dans la ville 2 (Winner, 1982) qu’ils viennent de produire pour le compte de leur société Golan-Globus Productions, Menahem Golan et Yoram Globus présentent au marché du film de Cannes 1982 un nouveau projet intitulé 10 to Midnight et mettant en scène Charles Bronson. Immédiatement acheté par des distributeurs du monde entier, le film ne dispose pourtant que d’un titre trouvé par Golan, qu’il trouvait “cool” (dixit Le Cannon Film Guide Volume I), puisqu’aucun scénario n’a été écrit. Une méthode classique de l’époque.

Le justicier de minuit, jaquette blu-ray

© 1983 MGM / Conception graphique : Dark Star, l’étoile graphique. Tous droits réservés.

Parallèlement, un script intitulé Blood Bath, rédigé par le scénariste William Roberts (Les sept mercenaires), circule à Hollywood et cherche preneur. Largement inspiré des crimes du serial killer Richard Speck qui s’en prenait à des infirmières, le scénario n’a absolument aucun rapport avec le titre 10 to Midnight, mais Golan et Globus se portent acquéreurs des droits et font de conséquentes modifications pour ajuster le propos et en faire un véhicule pour leur nouvelle star maison. Le long-métrage sera d’ailleurs la première véritable production Cannon mettant en vedette Charles Bronson.

Un thriller violent et porté sur le sexe

Afin d’emballer le produit, on fait appel au vétéran Jack Lee Thompson qui a déjà travaillé à de multiples reprises avec Bronson, notamment sur l’étonnant Bison blanc (1977). L’option prise par les producteurs et le réalisateur est clairement celle de la surenchère, aussi bien dans la sexualité que dans la violence. Faisant fi de tout bon goût, Le justicier de minuit (1983) a pour caractéristique de foncer tête baissée dans le film de serial killer, le croisant donc avec le film de vigilante traditionnel. Autant dire que le mélange des genres s’avère plutôt étonnant, tirant même vers le slasher le plus décomplexé possible.

Ainsi, lorsque le tueur agit, il trucide ses victimes à coups de couteau, ce qui donne lieu à des éclairs de violence et des flots d’hémoglobine assez exceptionnels. Quant au tueur, il commet ses méfaits totalement nu afin de ne pas laisser de traces – on parle d’une époque où les recherches ADN n’étaient pas encore effectuées, bien entendu. Cette tendance à multiplier la nudité gratuite à l’écran – outre le tueur, les victimes sont souvent dénudées – en fait un pur produit d’exploitation comme on en voyait surtout en Europe, et notamment en Italie. D’ailleurs, si le film a connu une exploitation très moyenne aux États-Unis, le succès fut plus conséquent en Europe.

La prime revient au méchant d’anthologie

Dans un rôle finalement assez peu intéressant, Charles Bronson garde une bonne présence à l’écran, mais est clairement éclipsé par les seconds rôles. Ainsi, on se souvient davantage de la prestation très spéciale de Gene Davis (le frère de Brad Davis) qui passe le plus clair du film dans le plus simple appareil. Jack Lee Thompson semble d’ailleurs davantage fasciné par ce personnage de psychopathe que par celui du flic vieux jeu incarné par Bronson.

L’autre élément qui donne au long-métrage une saveur particulière vient de la captation d’une ambiance urbaine nocturne typique du début des années 80. Par l’ajout d’une musique angoissante de Robert O. Ragland, le film s’inscrit pleinement dans cette vogue de thrillers urbains dégénérés tournés à la même époque par William Lustig (Maniac), Abel Ferrara (Driller Killer, L’ange de la vengeance) et bien d’autres.

“La justice n’est plus ce qu’elle était”

Assurément putassier dans sa démarche et réactionnaire dans son propos, Le justicier de minuit bénéficie pourtant d’une ambiance malaisante qui en fait tout le sel. Puisque les auteurs ne semblent avoir aucune limite, tout est possible dans ce thriller horrifique alternant les moments de pure terreur avec des passages décalés qui font sourire. Il s’agit ainsi d’un spectacle total qui ne plaira qu’aux amateurs d’un certain cinéma d’exploitation franc du collier. Dans ce grand bain réac, le tueur est présenté comme un maniaque sexuel (on suppose une forme d’homosexualité refoulée et d’impuissance réelle) qui n’a aucune circonstance atténuante. Le long-métrage se termine donc de manière logique par le triomphe du flic qui est à la fois juge et bourreau.

Le justicier de minuit, affiche italienne par Enzo Sciotti

Le justicier de minuit – Affiche italienne © Enzo Sciotti. Tous droits réservés.

Effectivement, Le justicier de minuit développe une thématique classique de l’époque, déjà vue dans la saga de L’inspecteur Harry, qui oppose le difficile labeur des policiers face à la clémence coupable des juges et des avocats. Le film démontre donc les limites d’un système judiciaire américain qui soutient davantage les coupables que les victimes. Comme on peut le voir, ce discours, souvent repris de nos jours, n’est pas neuf. Bien entendu, ce n’est pas avec ce thriller rentre-dedans que la réflexion est approfondie et nuancée, mais le film a le mérite de poser les bases d’un débat autour de l’idée de justice.

Un succès au cinéma et en vidéo

Le polar urbain est interprété de manière solide par un casting sympathique comprenant Andrew Stevens, mais aussi pléthore de jeunes actrices sympathiques comme Lisa Eilbacher, Kelly Preston (la future Madame Travolta), Ola Ray (qui a tourné la même année dans le clip culte Thriller de Michael Jackson) et même la chanteuse Jeane Manson dans le rôle d’une prostituée. L’ensemble est réalisé avec un grand sens de l’efficacité par un Jack Lee Thompson très professionnel.

Petit succès aux États-Unis, Le justicier de minuit est sorti en France avec un titre racoleur qui souhaite rattacher le film à la saga du Justicier dans la ville. Il faut dire que le numéro 2 venait de connaître une sortie triomphale avec 1 160 534 entrées sur toute la France en mars 1982. Positionné au mois de juillet 1983, Le justicier de minuit a fait moins de bruit, mais le métrage a toutefois attiré 578 000 curieux et a même pris la tête du box-office parisien la semaine de sa sortie avec 64 300 maniaques en salles. On retrouve cette belle santé à l’échelon national puisque le métrage arrive en tête du box-office français la semaine de sa sortie avec 125 501 amateurs de psycho killers. Les critiques, elles, furent désastreuses, mais qui peut s’en étonner ?

Aujourd’hui, Le justicier de minuit jouit d’un statut un peu plus enviable et s’inscrit parmi les indéniables réussites de la Cannon. Le film vient de faire l’objet d’une sortie française en Blu-ray, doté d’une copie très correcte chez l’éditeur Sidonis Calysta.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 13 juillet 1983

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Les films de la Cannon sur CinéDweller

Le justicier de minuit, l'affiche

© 1983 MGM / Affiche : R.S.C.G. Best seller (agence). Tous droits réservés.

Box-office :

Beau succès estival pour l’hyperviolent Le justicier de minuit au plus creux de l’exploitation de 1983

Avec une sortie au 13 juillet 1983, Le justicier de minuit allait compter sur les plaisanciers dans les stations balnéaires et des copies itinérantes sur toute la France pour faire son buzz. Lourdement interdit aux moins de 18 ans, cet uppercut, entre slasher détraqué et thriller sombre, trouve 28 écrans sur Paris-Périphérie. En intra-muros, la première semaine est riche : le Rex où il attire 10 528 spectateurs en sept jours, l’UGC Normandie, l’UGC Convention, le Mistral, l’UGC Montparnasse, l’UGC Danton, le Wepler Pathé, l’UGC Boulevard, l’UGC Gare de Lyon, l’UGC Gobelins, les 3 Murat, les 3 Secrétan, le St-Lazare Pasquier, et et le Forum Cinéma.

Le justicier de minuit écrase la concurrence en première semaine

La combinaison est belle et le film entre en première place du box-office parisien avec 64 300 spectateurs. Les prédateurs de Tony Scott, avec David Bowie et Catherine Deneuve démarre en seconde place, avec 56 727 spectateurs. Stella, on peut tout faire par amour, de Laurent Heynemann, avec Thierry Lhermitte, Nicole Garcia, Brialy et Lanoux, échouait en 3e place, avec 52 259 spectateurs dans près de 35 salles. Ils se maintiendront toutefois mieux.

Ce sont les vaches maigres pour les exploitants parisiens qui doivent se contenter de reprises cette semaine-là (Exhibition, Le docteur Jivago, Hair, La taverne de l’enfer qui reviennent tous dans le top 15).

Les autres sorties de la semaine réalisaient des scores faibles, voire catastrophiques comme Mon curé chez les Thaïlandaises de Robert Thomas, accident de parcours pour la comédie franchouillarde (9 928 spectateurs dans plus de 20 salles). Escroc, macho et gigolo, qui ne dépassait pas les 4 652 entrées en première semaine malgré 7 écrans en intra-muros, dont le Max Linder). La comédie de Corbucci avec Bud Spencer et Tomás Milián laissait sans voix. Dans 3 salles, Angkor (Kampuchea Express), coproduction italienne et thaïlandaise, réunissait 6 348 spectateurs dans 3 cinémas. Dans deux cinémas de quartier, Les incorruptibles karatékas de Lo Mar accomplissait leurs péripéties devant 8 423 spectateurs. La dernière nouveauté notable cette semaine-là, Quartier de femmes, alias La chienne des prisons (No Physical Contact) parquée dans le circuit Paramount (8 salles, dont le Hollywood Boulevard), assemblait un total insuffisant de 5 772 spectateurs. Score nul pour ce wipe & prison movie.

Le justicier de minuit dézingue Norman Bates dans Psychose 2

Pendant 9 semaines à l’affiche parisienne, Le justicier de minuit triplera la donne de départ. En deuxième semaine, il chute vite en 5e place : la raison est aussi due à la sortie d’un concurrent frontal, Œil pour œil de Steve Carver, avec Chuck Norris et David Carradine. Ce dernier prend d’ailleurs la première place. Le psychopathe qu’affronte Charles Bronson est toutefois plus fort que Norman Bates, dont le retour dans Psychose 2 se vautre en 6e place, malgré l’appui de CIC et près de 30 écrans. Le sequel au classique d’Alfred Hitchcock sera l’un des flops du mois en France.

25 967 entrées en 3e semaine parisienne pour 10 to Midnight qui chute en 7e place quand Œil pour œil glissait en 3e place et Psychose 2 sur la 10e marche. Les deux grosses nouveautés de la semaine étaient le film érotique Joy (numéro 1) et le nanar italien Ironmaster, la guerre du fer (34 688).

Le papy flingueur fait de la résistance

La 4e semaine offre une belle stabilité à la production Cannon, avec 19 312 entrées et une belle 8e place dans 14 cinémas. En 5e semaine, le bouche-à-oreille est bon : le slasher est 9e, malgré 5 nouveautés devant lui dont Vivement dimanche (ultime film de Truffaut), Superman 3, le film érotique Patricia, un voyage vers l’amour (avec Anne Parillaud) et le nanar très agréable Vous habitez chez vos parents ? avec Michel Galabru et Isabelle Mergault. Dans 11 salles, le papy flingueur cible encore 12 143 spectateurs.

La 6e semaine est celle de la chute (4 929 spectateurs, dans 6 cinémas). Les rentrées de septembre précipitent Bronson vers la sortie. La 7e semaine le voit finir sur un seul site en intra-muros (l’UGC Opéra) et un seul site de banlieue, pour un total de 1 032 entrées.

Deuxième meilleur score annuel pour un film interdit aux moins de 18 ans

Grâce à l’apport du Gaîté Boulevard, salle de quartier conséquente, en 8e semaine, Bronson remonte à 3 620 spectateurs et dépasse les 170 000 spectateurs. En 9e et ultime semaine d’exploitation sur la capitale, Le justicier de minuit réunit 3 350 retardataires dans un cinéma de quartier mythique, le Gaîté Rochechouart, situé dans un quartier très fréquenté.

Avec au total 578 000 entrées, Le justicier de minuit fera beaucoup moins d’entrées que Le justicier dans la ville 2 (son prédécesseur) et ses successeurs L’enfer de la violence et Le justicier de New York. Après Joy, film érotique à plus de 800 000 tickets, il s’agira du 2e meilleur score annuel pour un film interdit aux moins de 18 ans exploité en France en 1983. Il finira en 73e place annuelle sur Paris.

Le film sort à l’automne 1983 en VHS chez Carrère / Manhattan Vidéo où il connaîtra un grand succès. On notera qu’aux USA, outre le hit en vidéocassette, 10 to Midnight connaît une belle carrière sur les chaînes du câble. La Cannon a été suffisamment maline pour demander à Gene Davis, le tueur au corps d’athlète, de tourner les scènes d’attaque deux fois, en version habillée et déshabillée malgré le tournage d’hiver particulièrement froid. Evidemment, le cut déshabillé était destiné au câble.

Frédéric Mignard

Le justicier de minuit en VHS chez Manhattan Vidéo / Carrère (1983)

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Le justicier de minuit, l'affiche

Bande-annonce VHS du Justicier de minuit (VF)

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