Pur film d’exploitation, Un justicier dans la ville 2 bouscule les consciences en multipliant les scènes violentes avec une efficacité redoutable. L’ambiance très sombre crée un malaise qui plaira assurément aux amateurs de cinéma déviant.
Synopsis : Cinq ans après avoir nettoyé les rues de New York de sa faune la moins fréquentable, Paul Kersey mène une existence paisible à Los Angeles, auprès d’une nouvelle compagne, une journaliste. Mais, à nouveau, le destin le frappe de plein fouet. Enlevée et violée par une bande de voyous, sa fille se suicide. Accablé, il retrouve un à un ses agresseurs et, de sang-froid, leur applique le châtiment suprême.
Une suite tardive plus efficace que l’original
Critique : Au début des années 80, la firme Cannon de Menahem Golan et Yoram Globus rachète les droits d’exploitation des personnages d’Un justicier dans la ville, très gros succès avec Charles Bronson datant de 1974. Le but affiché est de tourner une suite, même si celle-ci est tardive. Une occasion en or de se faire beaucoup d’argent pour tous les artistes impliqués. Effectivement, Charles Bronson vient de connaître une série de revers au box-office et doit impérativement retrouver le chemin du succès. Même topo du côté du réalisateur Michael Winner qui n’arrive plus à tourner depuis trois ans. Tous accueillent donc favorablement cette suite qui ne se justifie pourtant à aucun moment.
En fait de scénario, David Engelbach offre une sorte de remake déguisé du premier volet, mais en n’ayant cette fois-ci pas besoin de présenter la lente descente du personnage principal vers l’enfer de la violence. Cette absence d’exposition des personnages rend le long-métrage bien plus efficace que son prédécesseur. On peut également apprécier le fait que Paul Kersey n’a qu’une motivation : la vengeance personnelle. Contrairement au premier volet, ses actes punitifs ne touchent donc que les hommes qui ont violé sa femme de ménage et sa fille. L’ensemble demeure bien réactionnaire quand même, mais finalement plus acceptable humainement parlant.
Une escalade dans la violence graphique
Par contre, Michael Winner prend acte de l’évolution du cinéma du début des années 80 et pousse le curseur de la violence à un point assez inédit à l’époque. La longue scène inaugurale du viol est particulièrement trash. Les acteurs semblent possédés par le démon du vice et la séquence s’avère très graphique et choquante, même encore de nos jours. Du coup, les critiques de l’époque et les censeurs de tous poils sont tombés sur le réalisateur en l’accusant de tous les maux. Pourtant, il est impossible de ressortir indemne d’une telle séquence et cela ne peut aucunement encourager les esprits fragiles à reproduire l’horreur du geste.
La mort de la fille, par un suicide très spectaculaire, est lui également d’une rare puissance. En comparaison, la suite, plus classique dans son déroulement, semble moins inspirée. Il s’agit d’un vigilante movie balisé, mais qui n’est pas exempt de fulgurances. Certes, Winner ne fait pas dans la nuance, mais on ne peut nier une incroyable efficacité de sa mise en scène. Il a très souvent recours au grand angle comme dans les films d’horreur, ce qui embellit de nombreuses séquences et rend l’objet cinématographique assez fascinant.
Un film dérangeant et outrancier qui fera le bonheur des bisseux
Porté par une jolie photographie, des décors naturels judicieusement mis en valeur et une musique très originale de Jimmy Page, Un justicier dans la ville 2 ne fera clairement pas l’unanimité par son usage putassier et outrancier d’effets de dramatisation, mais il peut être vu comme un proche cousin des bisseries italiennes parcourues de passages provoquant le malaise. Ce qui est plutôt une qualité, selon nous.
Sortie en grande pompe aux Etats-Unis, cette suite a cartonné malgré des critiques assassines et des problèmes avec la censure. En France, le long-métrage a écopé d’une interdiction méritée aux moins de 16 ans, ce qui ne l’a pas empêché de fonctionner avec plus d’un million de spectateurs, surtout concentrés en province. De quoi motiver la mise en chantier d’autres suites qui, elles, vont peu à peu plonger dans la nullité la plus crasse.
Box-office : la sortie du film
Distribué en France le même jour que Les Sous-doués qui a trusté la première place du box-office, Un Justicier dans la ville numéro 2 s’est contenté d’une seconde place au box-office hebdomadaire, fort d’une combinaison de 16 salles à Paris intra-muros, et de 13 cinémas en périphérie.
Le circuit parisien, très large, comprenait les Paramount City, Bastille, Montparnasse, Orléans, Gobelins, Maillot, Galaxie, Odéon, Montmatre, Opéra, l’UGC Ermitage et l’UGC Opéra, , le Max Linder, le Passy, les 3 Secrétan et le Convention St-Charles.
Fort d’une première semaine à 103 000 entrées sur la capitale, il réussira à quasiment tripler son score localement, mais c’est sur l’Hexagone entier qu’il se démarquera en dépassant le million.
Le test blu-ray :
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Compléments : 4/5
L’éditeur a écarté le commentaire audio disponible sur les galettes américaines, mais a conservé le petit making of d’époque (6min) qui nous permet d’avoir des images du tournage et un court entretien avec Michael Winner.
Toutefois, le plat de résistance de cette édition vient d’un documentaire de 58min réalisé par Rob Ager qui analyse la réception critique calamiteuse du film à l’époque de sa sortie. L’auteur du documentaire s’exprime en voix off et défend bec et ongles le long-métrage, tout en analysant les réactions épidermiques des critiques de l’époque. Cela nous permet de découvrir des documents hallucinants où Michael Winner se fait incendier en direct sur les plateaux télé par des chroniqueurs heureux d’en découdre. L’ensemble est absolument passionnant, d’autant que les arguments avancés par l’auteur sont plutôt convaincants.
Enfin, il reste à découvrir la bande-annonce du film.
L’image : 4,5/5
Si le métrage souffre parfois d’un certain grain, il s’agit bien du rendu voulu par les auteurs. La copie proposée a été magnifiquement restaurée et propose des couleurs pimpantes, une définition à couper au rasoir qui explose lors des plans larges en plein jour. Le degré de détails de l’image est époustouflant. De l’excellent boulot, donc.
Le son : 4/5
Les deux pistes sonores en DTS HD Master Audio 2.0 sont d’inégale qualité. La version française est nettement plus étouffée, mettant surtout en avant les voix au détriment des ambiances et de la musique. La version originale (sous-titres non imposés) est par contre beaucoup plus équilibrée et permet une immersion totale dans le film.
Critique et test blu-ray : Virgile Dumez