5 femmes à abattre : la critique du film (1985)

Action, WIP (Women In Prison) | 1h20min
Note de la rédaction :
6,5/10
6,5
5 femmes à abattre, l'affiche

  • Réalisateur : Jonathan Demme
  • Acteurs : Barbara Steele, Roberta Collins, Cheryl Smith, Juanita Brown, Erica Gavin, Ella Reid, Warren Miller
  • Date de sortie: 31 Juil 1985
  • Année de production : 1974
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : Caged Heat
  • Titres alternatifs : Renegade Girls (titre reprise USA) / Caged Heat - Das Zuchthaus der verlorenen Mädchen (Allemagne) / La cárcel caliente (Espagne) / A Gaiola das Tormentas (Portugal) / Więzienna gorączka (Pologne) / Jaula caliente (Mexique) / Femmine in gabbia (Italie) / Börtönterror (Hongrie) / Naarashäkki (Finlande) / Celas em Chamas (Brésil)
  • Autres acteurs : Crystin Sinclaire, Mickey Fox, Toby Carr Rafelson, Ann Stockdale, Irene Stokes, Cynthia Songé, Carmen Argenziano
  • Scénariste : Jonathan Demme
  • Monteurs : Johanna Demetrakas, Michal Goldman, Carolyn Hicks
  • Directeur de la photographie : Tak Fujimoto
  • Compositeur : John Cale
  • Chef Maquilleur : Rhavon
  • Chef décorateur : Eric Thiermann
  • Directeur artistique : Eric Thiermann
  • Producteurs : Roger Corman, Samuel W. Gelfman, Evelyn Purcell
  • Producteurs exécutifs : -
  • Sociétés de production : Renegade Women Company, Artists Entertainment Complex
  • Distributeurs : Visa Films Distribution (France) / New World Pictures (USA)
  • Distributeur reprise :
  • Date de sortie reprise :
  • Editeurs vidéo : Punch Vidéo (VHS, 1986) / René Chateau Vidéo (VHS, 1989) / Marathon Pictures (VHS, années 90) / The Ecstasy of Films (DVD et blu-ray, 2023)
  • Dates de sortie vidéo : 1986 (VHS) / 1989 (VHS) / années 90 (VHS) / 2023 (DVD et blu-ray)
  • Budget : 180 000 $ (soit 1 151 900 $ au cours de 2024)
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 41 905 entrées / 17 108 spectateurs
  • Box-office nord-américain / monde :
  • Classification : Interdit aux moins de 18 ans à sa sortie (16 ans de nos jours)
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals :
  • Illustrateur/Création graphique : © Michel Landi (affiche française). Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Artists Entertainment Complex. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Attachés de presse :
  • Tagline : Par le réalisateur de "Le Silence des agneaux". Certains établissement pénitencier de femme pratiquent leur règlement. (jaquette VHS des années 90, les fautes d'orthographe sont d'origine)
Note des spectateurs :

Premier film de Jonathan Demme, 5 femmes à abattre est un bon Women in Prison, marqué par une vision anarchisante et porté par des comédiennes de qualité. Un spectacle tout à fait recommandable pour les bisseux.

Synopsis : Cinq détenues, incarcérées dans un pénitencier subissent la tyrannie d’une directrice sadique et du médecin de l’établissement qui se livrent à des expériences sur certaines d’entre elles. Elles parviennent à s’échapper, mais l’une reste prisonnière du tortionnaire. Une expédition est mise sur pied pour la délivrer…

Et Jonathan Demme intègre New World Pictures

Critique : En 1970, le réalisateur Roger Corman décide de créer sa propre compagnie indépendante nommée New World Pictures. Dès lors, le réalisateur va peu à peu laisser de côté la mise en scène pour se consacrer uniquement à la production. A l’aide d’un système entièrement fondé sur des économies réalisées à tous les postes par des budgets contraints, Roger Corman a mis le pied à l’étrier à de nombreux cinéastes qui se sont avérés des grands auteurs. Parmi eux, on peut citer Francis Ford Coppola, Martin Scorsese, Peter Bogdanovich, ou encore Jonathan Demme.

Dans ses mémoires Comment j’ai fait 100 films sans jamais perdre un centime (Capricci, 2018), Roger Corman relate leur rencontre en ces termes :

J’ai fait la connaissance de Jonathan Demme alors qu’il vivait à Londres. Par le biais de United Artists, il a été mon attaché de presse pendant environ un mois quand je faisais Le Baron rouge. Il avait de l’expérience dans la publicité, la production commerciale et un peu dans l’écriture de films.

Un Women In Prison de plus pour Roger Corman

Dès lors, le producteur avisé propose à Jonathan Demme de lui écrire un film de motards qui deviendra Angels Hard as They come (Joe Viola, 1971). Ils réitèrent avec The Hot Box (Joe Viola, 1972) et après avoir assuré les prises de vues de la seconde équipe, Jonathan Demme va prendre son envol, comme l’explique bien Roger Corman :

Demme m’a demandé s’il pouvait réaliser un long métrage. J’avais bien aimé les deux films et ils avaient été rentables tous les deux. Bien sûr, lui ai-je répondu, fais-moi un film sur des femmes en prison. Il a passé un an à travailler sur le scénario et Frances Doel l’a beaucoup conseillé. J’ai décidé de ne pas financer le projet car on avait épuisé le filon. Mais j’aimais le travail de Jonathan. Il a obtenu un financement par ses propres moyens – 180 000 dollars – et j’ai accepté de distribuer le film, qui est sorti sous le titre 5 femmes à abattre en 1974.

Effectivement, comme le précise Roger Corman, 5 femmes à abattre appartient à un genre typique du cinéma d’exploitation des années 60-70, à savoir le WIP (pour Women In Prison) qui est par ailleurs une subdivision de la Sexploitation. Si le genre existe déjà dans les années 30 avec un certain nombre de déclinaisons plus ou moins crapoteuses, il connaît une véritable naissance avec Femmes en cage (John Cromwell, 1950) avec Eleanor Parker. Certes, le long métrage émarge encore aux frontières du mélodrame et du voyeurisme, mais ses nombreuses itérations vont plonger dans l’exploitation le plus pure au début des années 70, relâchement de la censure oblige.

Tous les clichés du genre sont convoqués

Parmi les titres majeurs, pour la plupart produits par la New World Pictures de Roger Corman, on peut citer The Big Doll House (Jack Hill, 1971) avec Pam Grier et Roberta Collins, Femmes en cages (Gerardo de Leon, 1971), toujours avec Roberta Collins ou encore The Big Bird Cage (Jack Hill, 1972) avec Pam Grier. Bien entendu, l’Europe ne fut pas en reste et notamment l’Italie, terre de prédilection du cinéma d’exploitation ou bien la France avec la compagnie Eurociné qui a également creusé le filon les années suivantes.

5 femmes à abattre (Caged Heat), affiche américaine

© 1974 Artists Entertainment Complex, Inc. Tous droits réservés.

Lorsque le jeune débutant Jonathan Demme se lance dans la réalisation de 5 femmes à abattre, il arrive plutôt à la fin de cette mode, du moins aux Etats-Unis. Certes, le cinéaste répond parfaitement aux exigences de son producteur-distributeur en passant en revue toutes les séquences habituelles du genre dont la fouille au corps, les bagarres entre prisonnières et matonnes et les inévitables scènes de douche. Pourtant, le réalisateur va y ajouter une dimension supplémentaire, souvent absente des différentes occurrences du genre, à savoir des personnages bien campés et rapidement attachants.

Un regard empathique avec ses personnages féminins

Si les cinq femmes en question sont bien des criminelles, elles paraissent finalement bien plus saines que leurs geôlières. Bien sûr, Jonathan Demme dénude régulièrement son casting, mais son regard ne semble jamais concupiscent. En fait, il est en empathie complète avec ces femmes à qui l’on fait subir des outrages au nom d’une loi finalement aussi contestable que les actes initiaux des délinquantes.

Jonathan Demme livre ainsi une véritable ode à l’anarchie avec ce 5 femmes à abattre qui valorise ces femmes libres dans leur tête. Certes, Erica Gavin, l’égérie de Russ Meyer, Roberta Collins, star du genre, et Cheryl Smith (sous son pseudo Rainbeaux Smith) sont des blanches qui représentent la classe ouvrière américaine, mais le cinéaste a inclus dans son quintet deux actrices de couleur (Juanita Brown, starlette de la Blaxploitation et Ella Reid dont ce fut l’unique rôle à l’écran), afin de rappeler le racisme alors à l’œuvre au cœur des Etats-Unis, et ceci malgré le récent mouvement pour les droits civiques.

Des autorités plus déviantes que les prisonnières

Face à ces cinq personnalités attachantes, le cinéaste a personnifié les autorités administratives à l’aide de la géniale Barbara Steele dont ce fut le retour sur grand écran après plus de quatre ans d’absence. Elle incarne ici une infirme qui fait preuve de bien peu de sollicitude envers ses détenues. Pire, elle est secondée par un docteur impitoyable qui jouit de sa position dominante pour compenser son impuissance sexuelle, signifiée lors d’une scène marquante de trépanation avortée. L’acteur Warren Miller trouve là son meilleur rôle, lui qui officiera ensuite beaucoup chez Jonathan Demme dans des rôles secondaires.

Promo de 5 Femmes à abattre, édition limitée chez The Ecstasy of Films

Promo de 5 Femmes à abattre, édition limitée chez The Ecstasy of Films © Design : Gengiskahn-Artwork.com

Devant des autorités aussi déviantes et perverses, le spectateur prend nécessairement fait et cause pour les cinq prisonnières, même lorsqu’elles n’hésitent pas à jouer du flingue face aux forces de l’ordre durant leur évasion. Devenues des icones de la révolution anarchiste en marche, les cinq femmes ne peuvent que susciter la sympathie d’un spectateur désireux de les voir s’échapper. Pour cela, Jonathan Demme fait preuve d’une belle efficacité lors des nombreuses scènes de fusillade, tandis que le suspense lié à l’évasion est également bien géré.

5 femmes à abattre, une réussite dans le genre

Il est aidé en cela par la très belle photographie de Tak Fujimoto. Les deux artistes se rencontrent ici pour la première fois et ils travailleront sur une bonne dizaine de films par la suite dont Le silence des agneaux (1991). En matière de musique, Jonathan Demme se paye les services de John Cale, ancien membre du groupe culte The Velvet Underground. Ce dernier compose une bande originale estampillée country, mais qui est capable de dynamiser la narration et d’échapper aux clichés attachés au genre de la musique folklorique.

Mené par un groupe d’actrices aux fortes personnalités, 5 femmes à abattre est donc l’une des grandes réussites d’un genre bien souvent voué à la médiocrité. Cela est notamment dû au regard du cinéaste, ainsi qu’aux nombreuses touches d’humour bienvenues.

Une sortie française avec onze ans de retard

Si le métrage est bien sorti dans quelques villes américaines durant le printemps 1974, il a mis plus de onze ans avant de s’immiscer le temps de quelques semaines dans les salles françaises. Ainsi, 5 femmes à abattre est proposé par Vista Films à partir du 31 juillet 1985 lors d’une semaine marquée par la prééminence du cinéma bis.

Les nouveautés ont pour titre Porky’s contre-attaque (James Komack), Le facteur de Saint-Tropez (Richard Balducci) avec l’inénarrable Paul Préboist, mais aussi Vendredi 13, chapitre 5 : une nouvelle terreur (Danny Steinmann). Cette même semaine, les adeptes du cinéma asiatique pouvaient aller voir Les enragés du kung-fu (Godfrey Ho) ou L’enfer des armes (Tsui Hark). Enfin, le cinéma porno sévissait toujours avec des titres improbables comme Croupes en feu pour tireurs d’élite (Gilbert Roussel).

Le film de Jonathan Demme terminera sa carrière française avec 41 905 adeptes d’un cinéma bis qui s’épanouit surtout en VHS. Ainsi, le long métrage a été édité par trois fois entre 1986 et le début des années 90, certains éditeurs profitant notamment des succès récents du cinéaste du Silence des agneaux pour ressortir ses premiers essais. En ce qui concerne l’exploitation plus récente, on notera l’existence d’un combo DVD / Blu-ray édité par l’indépendant The Ecstasy of Films qui livre le film dans une copie intégrale restaurée de toute beauté. Un must have pour tous les fans d’exploitation à l’américaine.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 31 juillet 1985

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5 femmes à abattre, l'affiche

© 1974 Artists Entertainment Complex, Inc. / Affiche : Michel Landi. Tous droits réservés.

Biographies +

Jonathan Demme, Barbara Steele, Roberta Collins, Cheryl Smith, Juanita Brown, Erica Gavin, Ella Reid, Warren Miller

Mots clés

Cinéma indépendant américain, Films de prison pour femmes, Les évasions au cinéma, Les cavales au cinéma, New World Pictures

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5 femmes à abattre, l'affiche

Bande-annonce de 5 femmes à abattre (VO)

Action, WIP (Women In Prison)

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