Réalisateur, producteur et scénariste américain, Jonathan Demme a effectué ses études en Floride où il découvre le cinéma. Il devient alors relation presse des firmes Ambassy Pictures, puis United Artists, avant d’entrer à la New World Pictures de Roger Corman.
Jonathan Demme fait ses classes chez Roger Corman
Là, il écrit et produit Angels Hard as They Come (1971), thriller réalisé par Joe Viola avec Scott Glenn. Pour le même cinéaste, il écrit The Hot Box (1972). Toujours dans le domaine du cinéma d’exploitation, il écrit le traitement de Black Mama White Mama (Eddie Romero, 1973).
Finalement, Roger Corman lui permet de passer à la réalisation avec 5 femmes à abattre (1974) qui ne sortira qu’en 1985 en France pour un résultat dérisoire au box-office (41 905 entrées / France). Toutefois, le long-métrage lui permet de rencontrer le directeur de la photographie Tak Fujimoto, avec qui il a collaboré sur une grande partie de sa carrière. Demme enchaîne avec une autre production Corman intitulée Crazy Mama (1975) qui est restée inédite en salles en France. Toujours dans le domaine de la série B, mais sans Corman, il dégoupille Colère froide (1976) avec Peter Fonda qui lutte pour conserver sa ferme face à une grande entreprise minière. Le métrage sort dans l’indifférence générale en France (47 091 entrées).
En 1977, il tourne Citizens Band, également connu sous le titre Handle with Care. Ce film sur la radio ne laisse guère de souvenir. Après un épisode pour la série Columbo en 1978, Jonathan Demme passe à la vitesse supérieure en rendant hommage au cinéma d’Hitchcock. Meurtres en cascade (aussi appelé La dernière victime), tourné en 1979, est une réussite, mais le métrage est un échec commercial. Il signe ensuite Melvin et Howard (1980) qui met en scène la rencontre improbable entre un pompiste et Howard Hughes. Le film reste inédit en France, malgré le gain de deux Oscars : ceux du meilleur scénario et de la meilleure actrice dans un second rôle pour Mary Steenburgen.
Les années 80, entre documentaire musical et comédies policières
Après quelques travaux télévisuels, Jonathan Demme accepte de tourner Swing Shift (1984) pour l’actrice Goldie Hawn. Malheureusement, le tournage s’avère un enfer à cause de conflits incessants avec l’actrice. On préférera retenir de cette année 1984 le tournage du documentaire Stop Making Sense qui suit la tournée du groupe pop Talking Heads. Si le film musical n’attire que 23 251 spectateurs en France, il est en revanche un beau succès aux Etats-Unis. Dès lors, Jonathan Demme est aussi sollicité par des groupes musicaux pour tourner des clips, ce qu’il fera pour le groupe New Order.
C’est pourtant avec la comédie policière Dangereuse sous tous rapports (1986) que Demme commence vraiment à intéresser les cinéphiles. Porté par Melanie Griffith, le métrage s’impose comme une œuvre dynamique et inspirée. Le public français est encore rétif (176 390 entrées), mais les cinéphiles ne s’y trompent pas. Après un Swimming to Cambodia (1987) où il filme un monologue théâtral de Spalding Gray, il tourne la comédie noire Veuve, mais pas trop… (1988) qui met en avant les talents de Michelle Pfeiffer. Le métrage est un succès américain qui laisse une fois de plus le public français de marbre (83 097 entrées).
Le chef-d’œuvre : Le silence des agneaux
Finalement, il faut attendre 1991 pour que le grand public international découvre vraiment son nom grâce au succès foudroyant du Silence des agneaux. Le film est un triomphe mondial qui a changé à jamais la face du thriller horrifique. Il se place à la quatrième marche du podium nord-américain de l’année 1991 en générant près de 130 millions de dollars de recettes (soit 254,9 millions de dollars ajustés au cours de 2021). Au passage, Le silence des agneaux glane cinq Oscars dont ceux du meilleur film, meilleur réalisateur pour Demme, meilleur acteur pour Anthony Hopkins, meilleure actrice pour Jodie Foster et meilleur scénario. En France, le film cartonne également (3 105 193 entrées).
Copyright TriStar Pictures
Au lieu d’enchaîner avec une autre production d’envergure, Jonathan Demme signe un documentaire sur son cousin sobrement intitulé Cousin Bobby (1992). Il choisit ensuite de traiter du délicat sujet du sida dans Philadelphia (1993), un autre beau succès qui rapporte deux Oscars (celui du meilleur acteur pour Tom Hanks et de la meilleure chanson pour Bruce Springsteen). A noter que Tom Hanks a également décroché l’Ours d’argent du meilleur acteur au Festival de Berlin pour ce rôle poignant et difficile. En France, le drame a ému 2 750 152 spectateurs.
Après un nouveau documentaire musical sur Robyn Hitchcock, Jonathan Demme revient en 1998 avec une adaptation d’un roman complexe de Toni Morrison intitulé Beloved. Malgré de réelles qualités, le long-métrage a été un très gros échec commercial et la France l’a quasiment ignoré (22 615 entrées pour un tel film, cela frise la correctionnelle). Une injustice qu’il faudra réparer un jour, d’autant qu’il s’agit du dernier vrai bon film du réalisateur.
Les déceptions des années 2000-2010
On passera effectivement sur un banal La vérité sur Charlie (2002) qui fut un autre gros échec public (61 611 spectateurs en France) et on préfère s’attarder sur le documentaire Jean Dominique, the Agronomist (2003) qui a conquis les critiques tandis que le public ne le calcule pas du tout.
Demme retrouve Denzel Washington dix ans après Philadelphia pour un remake d’un film de Frankenheimer des années 60. Un crime dans la tête (2004) n’a rien de bien passionnant à offrir au spectateur. Le résultat est médiocre et seuls 344 694 spectateurs ont fait le déplacement en salles.
En 2006, Demme retrouve l’univers de la musique avec le documentaire Neil Young : Heart of Gold qui passe inaperçu en France, mais glane de bonnes critiques. L’année suivante, le cinéaste s’attaque à une figure controversée de la politique américaine avec le documentaire Jimmy Carter Man from Plains. Toutefois, il revient enfin à la fiction avec Rachel se marie (2008) qui n’a guère de saveur malgré la présence au casting d’Anne Hathaway. Les Français ne se rendent pas à la cérémonie (53 595 entrées).
Jonathan Demme continue à œuvrer dans le documentaire musical, notamment pour Neil Young, filme Wallace Shawn dans A Master Builder (2013) et signe une dernière œuvre de fiction avec Ricki and the Flash (2015) qui met en scène Meryl Streep sur un scénario de Diablo Cody. Cette ultime tentative n’éveille pas davantage l’intérêt du public français avec 84 596 mélomanes dans les salles.
En 2017, Jonathan Demme est victime d’un cancer à l’œsophage. Il avait 73 ans. On signalera enfin qu’il est l’oncle du réalisateur Ted Demme.