Voulu comme un hommage aux cascadeurs, grands oubliés du cinéma, The Fall Guy est surtout un naufrage embarrassant à cause d’un humour lourdingue et d’un couple très mal assorti à l’écran. Le film ne fonctionne qu’à brèves intermittences.
Synopsis : C’est l’histoire d’un cascadeur, et comme tous les cascadeurs, il se fait tirer dessus, exploser, écraser, jeter par les fenêtres et tombe toujours de plus en plus haut… pour le plus grand plaisir du public. Après un accident qui a failli mettre fin à sa carrière, ce héros anonyme du cinéma va devoir retrouver une star portée disparue, déjouer un complot et tenter de reconquérir la femme de sa vie tout en bravant la mort tous les jours sur les plateaux. Que pourrait-il lui arriver de pire ?
L’adaptation tardive d’une série oubliée
Critique : Véritable arlésienne à Hollywood, la version cinéma de la série L’homme qui tombe à pic (The Fall Guy, diffusée entre 1981 et 1986 avec Lee Majors dans le rôle principal) est passée à peu près entre toutes les mains depuis le début des années 2000. Un temps envisagé pour George Clooney, puis Dwayne Johnson, le film n’a jamais vu le jour à cause de problèmes de scénario et de rachat des droits par différents studios.
© 2024 Universal Studios. All Rights Reserved.
Finalement, c’est au début des années 2020 que le film est réactivé, cette fois par le studio Universal, le réalisateur David Leitch et l’acteur Ryan Gosling. Ancien cascadeur lui-même, le cinéaste David Leitch semblait effectivement la personne idéale pour traiter du métier le plus ingrat de l’industrie cinématographique. Avec The Fall Guy, il allait pouvoir rendre hommage à tous ces hommes et toutes ces femmes de l’ombre qui risquent leur vie pour divertir les spectateurs du monde entier avec leurs prouesses insensées.
Le couple Ryan Gosling – Emily Blunt ne fonctionne pas à l’écran
Pour donner vie à ses personnages, David Leitch s’est une fois de plus appuyé sur un scénario de Drew Pearce, avec qui il a signé le fort sympathique Fast and Furious : Hobbs and Shaw (2019), le spin-off réussi de la fameuse saga aux dix épisodes. Malheureusement, la sauce ne prend pas avec The Fall Guy à cause d’une erreur de taille, à savoir la présence d’une insipide histoire d’amour entre le cascadeur incarné par Ryan Gosling et la réalisatrice du film jouée par Emily Blunt. Ce problème de taille intervient dès les premières minutes du long métrage et se poursuit tout au long de la projection : on ne croit tout simplement pas à cette romance sans charme entre deux acteurs sous-employés et dont les échanges verbaux tournent systématiquement à la caricature.
Cette tendance au cabotinage caractérise assez bien le cinéma de David Leitch qui aime décidément développer un humour au second degré constant. Cela peut fonctionner lorsque l’ensemble du projet ressemble à une vaste bande dessinée comme ce fut le cas avec Atomic Blonde (2017), Fast and Furious : Hobbs and Shaw (2019) ou encore Bullet Train (2022). Mais le cinéaste n’échappe pas toujours à la sortie de route. Ainsi, on se souvient avec douleur de la projection insupportable de Deadpool 2 (2018), d’une lourdeur pachydermique.
Quand la citation remplace la création originale
Avec The Fall Guy, David Leitch alterne sans cesse les idées saugrenues plutôt amusantes – on a bien ri avec le running gag de la licorne ou encore grâce au chien Jean-Claude – avec des passages, malheureusement plus nombreux, qui exaspèrent par leur volonté trop affichée de se la jouer cool. Outre un script trop relâché qui tarde à mettre en place une intrigue téléphonée, le métrage pâtit d’une longueur excessive par rapport à ses (maigres) enjeux.
Enfin, même si nous ne remettons aucunement en cause l’amour de David Leitch pour le septième art, ses citations méta incessantes finissent par donner le tournis et il apparaît dès lors comme un Quentin Tarantino du pauvre qui se doit de dévoiler ses sources pour que le public comprenne bien la blague. Cette lourdeur se retrouve dans la réalisation qui ne nous épargne aucun cliché du Hollywood actuel. Des plans aux drones en passant par les cascades filmées au ralenti et l’utilisation d’une BO qui arrose large pour plaire au plus grand nombre (cherchez le rapport entre AC/DC et Taylor Swift), The Fall Guy se révèle une comédie romantique poussive, avec des scènes d’action à l’intérieur.
Le film qui tombe à pic… au box-office
Certes, le savoir-faire en la matière du cinéaste n’est plus à prouver, mais cela ne suffit assurément pas à faire un film cohérent et intéressant à suivre. Ainsi, tous les protagonistes apparaissent comme des marionnettes sans personnalité et sans profondeur au sein d’un spectacle totalement décérébré.
© 2024 Universal Studios. All Rights Reserved.
Malgré un accueil critique étonnamment clément, The Fall Guy n’est pas parvenu à convaincre le grand public de venir s’amuser avec le couple mal assorti Ryan Gosling et Emily Blunt. Aux Etats-Unis, ce fut même la douche froide puisque le film a tout de même coûté 130 millions de dollars (sans compter les frais publicitaires qui doublent généralement l’addition) et n’a rapporté que 27,7 millions lors de son week-end d’investiture, alors qu’il était présent dans plus de 4 000 cinémas. Par la suite, le film a rapidement perdu 50 % de ses entrées à cause d’un bouche à oreille négatif. Au bout d’un mois de présence dans les salles, le film glanait déjà moins de 10 millions de dollars par semaine. The Fall Guy a donc terminé sa course nord-américaine avec 92 900 355 $ engrangés, ce qui en fait un cuisant échec.
Box-office international et français de The Fall Guy
Le même rejet de la part du public a eu lieu dans toutes les contrées du monde. Il n’y a guère qu’au Royaume-Uni que The Fall Guy s’en sort avec 15,2 M$. Immédiatement derrière, on tombe à 9,4 M$ en Australie – là où s’est déroulé le tournage – puis 7,7 M$ pour l’Allemagne. La France arrive encore derrière avec seulement 5,9 M$. Alors qu’il a été diffusé dans le monde entier, The Fall Guy n’a rapporté à son studio que 181 073 291 $, soit des clopinettes.
Distribué par Universal, la romance d’action a été proposée en France dès le 1er mai 2024 – un jour férié en plus – dans un parc large de 606 salles pour glaner 312 000 spectateurs. Il s’est donc littéralement fait atomiser par la comédie phénomène Un p’tit truc en plus d’Artus qui a mobilisé 1,1 million de spectateurs cette même semaine, ne laissant aucune chance à la concurrence, même américaine. Visiblement détesté par le public – franchement à raison – The Fall Guy devient le film qui tombe à pic en perdant 56 % de ses entrées en deuxième septaine.
Avec seulement 134 327 retardataires, le métrage n’arrive même pas à atteindre les 500 000 entrées en quinze jours. Le désaveu se confirme de semaine en semaine, malgré le soutien indéfectible de son distributeur qui pousse les exploitants à le conserver pendant un peu plus de deux mois. Finalement, le film qui devait cartonner se retrouve à terre avec seulement 660 291 entrées, ce qui en fait une sacrée mauvaise affaire pour Universal. Au moins, avec de tels résultats, on est assuré qu’aucune suite ne verra le jour et on ne s’en plaindra pas.
Critique de Virgile Dumez
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David Leitch, Jason Momoa, Winston Duke, Emily Blunt, Ryan Gosling, Aaron Taylor-Johnson, Teresa Palmer, Lee Majors
Mots clés
Cinéma américain, Comédies d’action, Comédie de duo, Le film dans le film, Métacinéma
