Subway : la critique du film (1985)

Policier | 1h44min
Note de la rédaction :
6/10
6
Subway, l'affiche

Note des spectateurs :

Film culte d’une génération, Subway est une œuvre hybride, magnifiquement réalisée, mais souffrant d’un scénario exsangue.

Synopsis : Après avoir dérobé des documents compromettants, un homme se réfugie dans l’univers fascinant et agité du métro parisien. Une impitoyable chasse à l’homme s’organise au cours de laquelle d’étranges liens se tissent entre le cambrioleur et sa victime.

Un film ambitieux au script binaire

Critique : Après avoir signé l’étrange film de science-fiction Le Dernier combat (1983) avec Pierre Jolivet et Jean Reno, le réalisateur Luc Besson obtient un budget bien plus conséquent pour son second essai derrière la caméra. Fasciné depuis toujours par le monde des délinquants et des déclassés, il s’attache ici à suivre le destin tragique de deux personnages que tout oppose. Le voleur n’a de cesse de se faire passer pour un grand de ce monde alors qu’il n’a aucun domicile fixe, tandis que sa proie est une femme de milliardaire en rupture avec un milieu qu’elle ne supporte plus. Chacun veut finalement s’immiscer dans l’univers de l’autre, mais leurs différentes tentatives seront systématiquement vouées à l’échec.

Le script de Subway (1985), parfois très maladroit, fonctionne par oppositions binaires. Monde souterrain des clochards contre univers raffiné des élites, gendarmes contre voleurs, amour fou contre autorité normative sont autant de contrastes mal digérés. Au milieu de cette société totalement compartimentée, où le destin de chacun semble inscrit dès la naissance, se débattent un certain nombre de personnages décalés, figures grotesques prises au piège d’un modèle préétabli.

Une esthétique en rupture avec le cinéma français traditionnel

Projet très ambitieux, Subway est également marqué par un esthétisme évoquant immanquablement celui du Diva (1981) de Jean-Jacques Beineix. La réalisation virtuose de Besson éclate effectivement à chaque plan : la caméra virevolte et flotte dans les couloirs du métro avec une aisance extraordinaire pour l’époque.

On comprend donc mieux pourquoi le public fut scotché par cette œuvre novatrice sur le plan formel et ambitieuse sur le plan narratif. La présence des deux stars les plus en vue du moment a également fait beaucoup pour transformer ce trip esthétisant en succès populaire. Isabelle Adjani était alors au sommet de sa carrière, tandis que Christophe Lambert sortait tout juste du triomphe de Greystoke. Ce casting très mode est épaulé par un Michel Galabru impérial et de jeunes espoirs qui ont fait bien du chemin depuis, de Jean-Hugues Anglade à Jean Reno en passant par Jean-Pierre Bacri.

Un film urbain sur papier glacé au scénario en berne

Totalement ancré dans l’esthétique urbaine et glaciale des années 80, ce second opus de Besson n’est pourtant pas exempt de défauts majeurs. Le scénario manque cruellement de structure et les personnages ne sont souvent que des figures archétypales dépourvues de la moindre psychologie. Grâce à une mise en scène impeccable, le cinéaste arrive à camper en quelques plans des caractères. Mais ceux-ci n’évoluent plus d’un iota par la suite, donnant l’étrange impression d’un film en points de suspension.

L’ambiance surréaliste est variablement convaincante et de nombreuses séquences tombent à l’eau, comme si l’auteur se contrefichait finalement de ce qu’il raconte. Enfin, l’humour déployé ne fait que renforcer l’impression d’immaturité générale.

Premier d’une longue liste de succès pour Luc Besson

Cela n’empêcha pourtant pas le film d’être le premier gros succès commercial de Besson, tout en obtenant trois Césars, dont celui du meilleur acteur pour un Christophe Lambert moyennement convaincant. Improbable grand écart entre recettes classiques du cinéma d’action et poétisation du réel, Subway apparaît aujourd’hui comme un film hybride, aux influences multiples parfois mal digérées.

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Critique de Virgile Dumez

Subway, l'affiche

© 1985 Les Films du Loup – TSF Productions – TF1 Films Production -Gaumont. / Illustration : Bernard Bernhardt. Tous droits réservés.

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