Secret défense (Hidden Agenda) : la critique du film (1991)

Drame, Thriller, Politique | 1h48min
Note de la rédaction :
8/10
8
Hidden Agenda, l'affiche

  • Réalisateur : Ken Loach
  • Acteurs : Brad Dourif, Frances McDormand, Brian Cox, Michelle Fairley, Mai Zetterling
  • Date de sortie: 28 Août 1991
  • Nationalité : Britannique
  • Titre original : Hidden Agenda
  • Titres alternatifs : Geheimprotokoll (Allemagne) / Dolda fakta (Suède) / Agenda oculta (Espagne) / Agenda Secreta (Portugal) / Tajna placówka (Pologne) / L'agenda nascosta (Italie) / Titkos hadsereg (Hongrie)
  • Année de production : 1990
  • Autres acteurs : Bernard Archard, John Benfield, Jim Norton, Maurice Roëves
  • Scénariste : Jim Allen
  • Monteur : Jonathan Morris
  • Directeur de la photographie : Clive Tickner
  • Compositeur : Stewart Copeland
  • Cheffe maquilleuse : Louise Fisher
  • Chef décorateur : Martin Johnson
  • Directeur artistique : Nigel Phelps
  • Producteurs : Eric Fellner, Rebecca O'Brien
  • Producteurs exécutifs : John Daly, Derek Gibson, Scott Millaney
  • Sociétés de production : Hemdale, Initial
  • Distributeur : Diaphana Distribution
  • Distributeur reprise : -
  • Date de sortie reprise : -
  • Editeurs vidéo : MGM / United Artists (DVD, 2004, 2006) / Rimini Editions (DVD et blu-ray, 2022)
  • Dates de sortie vidéo : 18 mai 2004 (DVD) / 3 mai 2006 (DVD) / 15 mars 2022 (DVD et blu-ray)
  • Budget : -
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 84 797 entrées / 31 982 entrées
  • Box-office nord-américain : 1 030 938 $ (soit 2 420 000 $ au cours de 2023)
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleur / Son : Dolby Stéréo
  • Festivals : Festival de Cannes 1990 : en sélection officielle / Festival de Chicago 1990 : en sélection officielle
  • Nominations : Goya 1993 : 1 nomination en tant que meilleur film européen de l'année
  • Récompenses : Festival de Cannes 1990 : Prix du jury ; Prix spécial du jury œcuménique
  • Illustrateur/Création graphique : © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Orion Pictures Corporation. All Rights Reserved. Tous droits réservés.
  • Attaché de presse : Jérôme Jouneaux
  • Tagline : Prix spécial du jury Cannes 1990
Note des spectateurs :

Brûlot politique prenant la forme d’un thriller, Secret défense – Hidden Agenda a permis à Ken Loach de se faire mieux connaître à une époque où sa carrière végétait. Le film à la lisière du documentaire est d’une rigueur remarquable.

Synopsis : Paul Sullivan et sa fiancée Ingrid Jessner se rendent à Belfast pour enquêter sur des allégations d’atteinte aux droits de l’homme commises par les forces de sécurité britanniques. Paul est assassiné dans des circonstances mystérieuses et est enregistré en tant que complice de l’IRA. Mais Ingrid et l’enquêteur britannique Paul Kerrigan, mettent en doute les conclusions de l’enquête et viennent à découvrir un complot mettant en cause des personnalités haut placées…

Un scénario coup de poing difficile à produire

Critique : Lorsqu’il souhaite se lancer dans la réalisation de Secret défense – Hidden Agenda, le réalisateur Ken Loach a déjà deux décennies d’activité derrière lui. Pourtant, il a sans cesse lutté pour pouvoir monter ses films, au point de devoir tourner un nombre conséquent de téléfilms et séries télé. Certes, il est à nouveau d’actualité avec Fatherland (1986), mais sa difficulté à monter Hidden Agenda l’éloigne à nouveau des grands écrans pour quelques temps.

Effectivement, le film fondé sur un scénario de Jim Allen est hautement inflammable puisqu’il évoque la situation dramatique en Irlande du Nord alors même que le conflit avec le Royaume-Uni est encore d’actualité. Peu de producteurs misent donc sur ce script qui emprunte pourtant de nombreux éléments au genre du thriller politique. Après plusieurs années de développement infructueux, Ken Loach reçoit finalement l’aval de John Daly qui engage la société Hemdale dans la production du brûlot politique. Pour mémoire, cette firme est responsable de la production d’œuvres ambitieuses comme Terminator (James Cameron, 1984), Platoon (Oliver Stone, 1987) et Le dernier empereur (Bernardo Bertolucci, 1987). Il s’agit d’un allié de poids qui offre à Ken Loach des moyens dont il n’a guère l’habitude.

Des comédiens chevronnés pour un style documentaire

Ainsi, il a pu travailler avec des acteurs de plus grande stature comme Frances McDormand qui sortait de plusieurs succès des frères Coen, Brad Dourif qui a marqué les années 80 de son empreinte avec des films de Michael Cimino et David Lynch ou encore Brian Cox dont ce fut l’un des premiers rôles principaux. A ce parterre de comédiens en vogue, il faut ajouter la présence de la star suédoise des années 40-50 Mai Zetterling.

Pourtant, malgré l’emploi de comédiens plus aguerris que les habituels amateurs qu’il dirige usuellement, Ken Loach ne se départit pas de son style documentaire et se refuse donc à adopter les codes du thriller politique conventionnel. Dès les premières images d’Hidden Agenda, le spectateur est plongé dans un style le plus réaliste et épuré possible. Il s’agit pour le cinéaste d’évoquer l’utilisation de la torture, de l’intimidation et même de l’élimination pure et simple des opposants irlandais par le gouvernement britannique. Si Ken Loach évoque très brièvement les attentats perpétrés par l’IRA, il n’insiste pas sur ce point connu de tous pour se concentrer sur les méthodes douteuses employées par la démocratie anglaise afin de gagner cette guerre de colonisation qui ne veut pas dire son nom.

De l’art de dénoncer un complot d’Etat

Au passage, le cinéaste et son scénariste donnent de nombreux exemples d’exactions commises par le gouvernement britannique. Il porte notamment à notre connaissance des événements qui seront ensuite repris et développés dans le magnifique Au nom du père (Jim Sheridan, 1993) avec le grand Daniel Day-Lewis. Pour construire son script, Jim Allen s’est également largement inspiré du cas John Stalker qui était un officier de police britannique ayant écrit un rapport incendiaire sur la situation en Irlande du Nord et qui a fini par être limogé en 1986. Ce scandale a beaucoup influencé l’écriture d’Hidden Agenda qui dévoile de manière très claire un vaste complot mené par les conservateurs britanniques afin de garder le pouvoir en Grande-Bretagne en manipulant l’opinion à l’aide de fake news.

Hidden Agenda, jaquette blu-ray

© 1990 Orion Pictures Corporation / Jaquette : ©  2022 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. All Rights Reserved.

Exposée avec un didactisme qui n’est aucunement négatif dans le cas présent, la thèse de Ken Loach donne lieu à un thriller politique tendu, sans cesse en alerte, comme dans les meilleures créations d’un certain Costa-Gavras. La comparaison vient immédiatement à l’esprit tant les deux cinéastes ont la volonté de convaincre, tout en respectant la pluralité des points de vue.

Une projection agitée lors du Festival de Cannes 1990

Absolument remarquable, Hidden Agenda a été présenté en sélection officielle au Festival de Cannes en 1990. Sa projection a suscité de nombreuses protestations de la part des journalistes britanniques les plus conservateurs qui ont déclaré qu’il s’agissait d’un film pro-IRA. Si ce n’est jamais le cas, il est certain que le long-métrage constitue une attaque directe envers la première ministre conservatrice Margaret Thatcher, dont on ne cessera jamais assez de rappeler la capacité de nuisance. L’affaire a même failli tourner au pugilat diplomatique lorsque le Festival de Cannes a attribué au long-métrage son Prix du jury par l’entremise de son président Bernardo Bertolucci. Les choix de ce jury furent d’ailleurs audacieux puisque la Palme d’or est allée cette année-là au délirant Sailor et Lula de David Lynch.

Distribué en salles plus d’un an et demi après sa projection cannoise (soit fin août 1991), Hidden Agenda a été titré Secret défense en France, tout en laissant son titre original bien en évidence sur l’affiche. Par la suite, les différentes sorties vidéo des années 2000-2020 oublieront le titre français pour se concentrer uniquement sur l’original britannique.

Hidden Agenda, un beau succès outre-Atlantique

A Paris, le brûlot politique sort dans une petite combinaison de six salles et réunit lors de sa première semaine 11 077 spectateurs engagés. Après un tel démarrage, le triplement de ses entrées parisiennes lors de son exploitation (31 982 au total) démontre un bon bouche-à-oreille. Si l’on regarde les chiffres français, le thriller débute avec 14 226 irlandais dans les salles en première semaine et les chiffres se maintiennent plutôt bien durant la suivante avec 10 865 retardataires. La suite descend au-dessous de la barre des 9 000 entrées par semaine, mais le total final de 84 797 entrées est plutôt encourageant pour un cinéaste dont le nom n’évoquait absolument rien en 1991.

On notera d’ailleurs que le film s’est très bien comporté aux Etats-Unis où réside une importante communauté irlandaise. Hidden Agenda y a rapporté la jolie somme de 1 030 938 $ (soit 2 420 000 $ au cours de 2023). De quoi lancer enfin la carrière de Ken Loach alors que celui-ci avait déjà l’âge de 54 ans. Le reste de la décennie 90 allait enfin consacrer cet auteur engagé avec des gros succès comme Raining Stones (1993), Land and Freedom (1995) ou encore My Name Is Joe (1998).

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 28 août 1991

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Hidden Agenda, l'affiche

© Orion Pictures Corporation. All Rights Reserved. Tous droits réservés.

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Ken Loach, Brad Dourif, Frances McDormand, Brian Cox, Michelle Fairley, Mai Zetterling

Mots clés

Festival de Cannes 1990, La torture au cinéma, Pamphlet politique

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Hidden Agenda, l'affiche

Bande annonce de Secret défense - Hidden Agenda (VO)

Drame, Thriller, Politique

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