David Lynch fut le cinéaste expérimental le plus fascinant depuis les années 1980. En revisitant les genres du polar et du fantastique, il a en outre réussi à capter une large audience internationale.
Un univers insolite
Eraserhead (1977), son premier long métrage, bel objet underground relatant l’univers fantasmatique d’un homme abandonné, inscrivait déjà son style et sa démarche.
Alors qu’il pouvait sembler être un réalisateur cantonné à la marge, pour public initié, il surprit avec le triomphe mondial de Elephant Man (1980), biopic de Joseph Merrick, sommet de sobriété émotionnelle, qui reste son plus gros succès.
Après le fiasco de la superproduction Dune (1984), commande du producteur Dino De Laurentis, Lynch revint à un cinéma plus personnel avec Blue Velvet (1986) : l’histoire de ce jeune homme menant l’enquête après avoir trouvé une oreille humaine dans un terrain vague reprenait l’étrangeté de son premier film, tout en bouleversant les codes du thriller.
Sur un ton plus léger, la comédie policière Sailor et Lula/Wild at Heart (1990) était dans la même veine, et décrocha la Palme d’or au Festival de Cannes.
La même année, Twin Peaks, réalisé pour la télévision américaine en collaboration avec Mark Frost, révolutionnait le monde des séries télévisées par sa structure audacieuse et captiva les téléspectateurs par son mélange d’intrigue criminelle, de soap, de surnaturel et de ton décalé.
Son préquel cinématographique, Twin Peaks – Fire Walk with Me, radical et surréaliste, fut éreinté au Festival de Cannes 1992, mais a depuis été réévalué et s’inscrit en cohérence avec la série et l’univers de Lynch.
David Lynch, un maître de la déconstruction narrative
En 1996, Lost Highway, récit d’un assassinat du point de vue des différentes personnalités du meurtrier lui-même, confirmait définitivement la griffe du cinéaste, maître dans l’art de déstructurer un récit en apparence linéaire.
Une histoire vraie (1999), road movie sur un vieil homme entreprenant un singulier voyage, put paraître plus classique. Il n’en demeure pas moins une réussite.
Le sommet de son œuvre fut sans doute Mulholland Drive (2001), prix de la mise en scène à Cannes, jeu de piste policier, mise en abyme fascinante, et démystification du rêve hollywoodien.
Inland Empire (2006) connut par contre un accueil plus mitigé, trip vertigineux pour les uns, fourre-tout ampoulé pour les autres.
David Lynch prit ensuite ses distances avec le cinéma. Mais Twin Peaks: The Return, saison 3 de la série initiale, s’avéra d’une beauté inouïe, chef-d’œuvre d’originalité et d’audace. Les deux premiers épisodes ont été présentés au Festival de Cannes 2017, avant une diffusion de l’ensemble sur le petit écran (Canal+ en France), et une sortie DVD en mars 2018.
Outre les prix mentionnés, David Lynch a obtenu une quinzaine d’autres récompenses, dont un Oscar d’honneur pour l’ensemble de sa carrière en 2020.