Où est passé Tom ? : la critique du film (1971)

Drame, Aventures, Action | 1h50min
Note de la rédaction :
6/10
6
Où est passé Tom, affiche du film de José Giovanni

  • Réalisateur : José Giovanni
  • Acteurs : Rufus, Paul Crauchet, Alexandra Stewart, Paul Beauvais, Jean Gaven, François Simon
  • Date de sortie: 13 Oct 1971
  • Nationalité : Français, Italien
  • Titre original : Où est passé Tom?
  • Titres alternatifs : Where Did Tom Go? (titre international) / Was ist mit Tom geschehen? (Allemagne) / Hvor er du blitt av Tom? (Norvège)
  • Année de production : 1971
  • Scénariste(s) : José Giovanni, d'après le roman homonyme de Bill Reade (Alan White)
  • Directeur de la photographie : Pierre-William Glenn
  • Compositeur : François de Roubaix
  • Société(s) de production : Profilms, Valoria Films
  • Distributeur (1ère sortie) : Valoria Films
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : -
  • Date de sortie vidéo : -
  • Box-office France / Paris-périphérie : 122 426 entrées / 30 257 entrées
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.66 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : Ferracci
  • Crédits : Profilms, Valoria Films
Note des spectateurs :

Film d’aventures étonnant, Où est passé Tom ? propose des scènes d’action efficaces, et ceci malgré un script pas toujours à la hauteur. Inabouti certes, mais loin d’être inintéressant.

Synopsis : Tom Coupar, secrétaire d’une organisation pacifique vouée à la libération des prisonniers politiques, décide un jour de passer à l’action. Avec Alexandra, il parvient à assassiner le dictateur Anton Caras. Incarcéré dans une forteresse où se trouvent des prisonniers qu’il tentait de faire libérer, il prépare une évasion.

Un film d’aventures avec Rufus en vedette. Une bonne idée ?

Critique : Au début des années 70, le réalisateur José Giovanni vient de connaître un beau succès public avec Dernier domicile connu (1969) qui a réuni plus de 2,2 millions de spectateurs, attirés par le duo formé par Lino Ventura et Marlène Jobert. Giovanni décide de continuer à explorer la littérature policière anglo-saxonne avec tout d’abord Un aller simple (1971) et ensuite Où est passé Tom ? (1971). Si le premier film est un patent échec commercial, le second est un pur désastre, devenant l’un des plus gros revers de sa carrière.

Sans doute est-ce dû à l’incongruité apparente du casting puisque José Giovanni a tout misé sur l’acteur Rufus qu’il a déjà fait tourner dans des rôles secondaires et qui connaît à cette époque un gros succès sur scène dans un one-man-show. Est-ce que le grand public était prêt à voir un film d’aventures avec en tête d’affiche un acteur de comédie, le tout affublé d’un titre peu parlant ? La réponse a clairement été négative. Pourtant, Rufus s’est beaucoup investi dans ce rôle d’un homme proche de la nature qui décide de passer de l’idéalisme politique à l’action violente. Lui-même militant écologiste, Rufus ne pouvait qu’être séduit par ce rôle d’un être lunaire et quelque peu naïf qui va découvrir la réalité de l’action politique.

Un tournage difficile en pleine montagne

José Giovanni s’appuie ici sur un roman de Bill Reade (en réalité un pseudonyme d’Alan White) intitulé I Wonder what Happened to Tom ? publié dans la collection Série noire en 1969. Il fait le choix de traiter ce sujet délicat à la manière d’un vrai film d’aventures, avec notamment des séquences d’action spectaculaires, comme il en tournera encore plus tard dans Les loups entre eux (1985).

Il se lance donc dans un tournage ambitieux à la fois en France dans les Pyrénées, mais aussi dans les montagnes suisses, alors même que l’action est censée se dérouler dans un pays fictif. A l’aide de grands spécialistes comme Rémy Julienne pour les cascades en voiture et Pierre William Glenn pour la photographie, Giovanni signe plusieurs scènes d’action particulièrement efficaces et qui sentent le danger à chaque minute. Rufus n’est d’ailleurs pas en reste dans les scènes de montagne où il s’avère parfaitement crédible.

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Preuve de la difficulté d’un tel tournage, José Giovanni confie dans ses mémoires (Mes grandes gueules, 2002) que l’acteur Charles Denner devait initialement jouer un prisonnier de la forteresse, mais il précise :

Dans le décor de la forteresse de Salce, Charles Denner, fébrile, joue un prisonnier politique antifasciste. Il nous abandonne au bout de deux jours, marqué par les sombres souvenirs de l’Occupation, écorché par la sensibilité de son talent. Le décor le détruit. Je respecte son désarroi et je recommence les deux journées avec un acteur qui avait tourné avec Claude Sautet.

Une fable politique pas toujours maîtrisée

Ce sont pourtant bien ces efforts pour donner de la véracité à ses images qui sont aujourd’hui payantes et font de la projection d’Où est passé Tom ? un moment agréable à suivre. Par contre, le long-métrage n’est pas totalement abouti à cause d’une hésitation constante quant au ton à adopter. Le spectateur ne sait jamais vraiment si l’ensemble doit être vraiment pris au sérieux ou non. En réalité, José Giovanni semble vouloir dénoncer toute forme de fascisme, tout en se moquant d’une certaine haute bourgeoisie qui cherche à se donner bonne conscience en signant des pétitions, mais en ne joignant jamais le geste à la parole. Mais sa conclusion pessimiste sur l’absence d’utilité de toute forme d’action violente vient contredire in fine les développements de sa fable politique.

Difficile également de croire dans la romance qui s’esquisse entre le personnage lunaire incarné par Rufus et la belle et aristocratique Alexandra Stewart. Ce sont donc ces petits dérapages qui font que le film n’est pas totalement satisfaisant et laisse un goût d’inachevé dans la bouche. Pourtant, on en apprécie le constat final plutôt désabusé qui allait à l’encontre des idées défendues à l’époque par bon nombre d’intellectuels, persuadés du bien-fondé de l’action politique.

Un cuisant échec commercial

Dès que le film est achevé, José Giovanni doit se rendre à l’évidence, comme il le décrit bien dans son autobiographie :

L’avant-première, moitié invitations et moitié public, ne remplit pas le Balzac. Marceau, qui avait assuré avec son hôtel l’intendance du tournage en Suisse, s’est déplacé avec sa femme pour admirer ses paysages suisses. Cette splendeur ne suffit pas non plus. Et pas davantage la meilleure musique qu’ait jamais composée François de Roubaix. À la sortie, Hercule Muchielli me dit sobrement : « C’est perdu. »

Et de fait, Où est passé Tom ? est un véritable accident industriel lors de la semaine de sa sortie où il doit affronter deux mastodontes comme La veuve Couderc (Granier-Deferre) avec Alain Delon et Simone Signoret et Boulevard du rhum (Enrico) avec Lino Ventura. Le film de Giovanni n’arrive qu’en dixième position du box-office parisien de la semaine et perdra la moitié de ses maigres entrées en deuxième semaine. Il terminera sa carrière française à 122 426 entrées, soit le deuxième plus gros échec de la carrière du réalisateur, juste derrière Mon père (72 361 entrées-France en 2001).

Malgré ses errances et ses maladresses, Où est passé Tom ? n’est pourtant pas une catastrophe et mérite donc d’être redécouvert de nos jours sur les plateformes VOD, puisqu’aucun support physique ne propose le métrage.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 13 octobre 1971

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Où est passé Tom, affiche du film de José Giovanni

Illustration : Ferracci

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