Impitoyable : la critique du film (1992)

Western | 2h10min
Note de la rédaction :
8/10
8
Impitoyable, l'affiche

  • Réalisateur : Clint Eastwood
  • Acteurs : Clint Eastwood, Gene Hackman, Richard Harris, Morgan Freeman, John Pyper-Ferguson, Saul Rubinek, Jaimz Woolvett, Frances Fisher, Anna Thomson (Anna Levine)
  • Date de sortie: 09 Sep 1992
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : Unforgiven
  • Titres alternatifs : Impardonnable (Québec) / Sin perdón (Espagne) / Imperdoável (Portugal) / Los imperdonables (Mexique, Pérou) / Gli spietati (Italie) / Erbarmungslos (Allemagne) / Os Imperdoáveis (Brésil)
  • Année de production : 1992
  • Scénariste(s) : David Webb Peoples
  • Directeur de la photographie : Jack N. Green
  • Compositeur : Lennie Niehaus, Clint Eastwood (non crédité)
  • Société(s) de production : Warner Bros., Malpaso Productions
  • Distributeur (1ère sortie) : Warner Bros.
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : Warner Home Video (VHS) / Warner Bros. Entertainment France (DVD, 1998, 2011) / Warner Bros. Entertainment France (blu-ray, 2015) / Warner Bros. Entertainment France (UHD 4K, 2017)
  • Date de sortie vidéo : 17 mai 2017 (UHD 4K)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 801 320 entrées / 243 622 entrées
  • Box-office nord-américain : 101,1 M$
  • Budget : 14,4 M$
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 2.39 : 1 / Couleurs / Son : Dolby Digital
  • Festivals et récompenses : Oscars 1993 : meilleur film ; meilleur réalisateur : Clint Eastwood ; meilleur second rôle masculin : Gene Hackman ; meilleur montage : Joel Cox sur un total de 9 nominations / British Academy Film Award du meilleur acteur dans un second rôle pour Gene Hackman / Golden Globes 1993 de la meilleure réalisation et du meilleur acteur dans un second rôle pour Gene Hackman / LAFCA du meilleur film 1992 / Prix Sant Jordi du cinéma du meilleur film étranger 1993 / Fotogramas de Plata du meilleur film étranger 1993 / National Film Preservation Board en 2004
  • Illustrateur / Création graphique : Bill Gold
  • Crédits : Warner Bros.
Note des spectateurs :

Western crépusculaire, Impitoyable est avant tout une réflexion sur la violence qui opère la synthèse entre classicisme de la forme et progressisme du discours. Une belle réussite.

Synopsis : William Munny a tiré une croix sur son passé de criminel et de hors-la-loi. Seuls comptent maintenant ses enfants et la ferme qu’il exploite avec peine. Mais la perspective d’une prime pour abattre les auteurs d’un meurtre odieux ramène Munny au cœur de la violence. Et le paisible fermier redevient un tueur impitoyable…

Un script resté dix ans dans un tiroir

Critique : Au début des années 80, Malpaso, la société de Clint Eastwood, reçoit un script de western intitulé The William Munny Killings rédigé par David Webb Peoples. Malheureusement, le comité chargé de la lecture du scénario ne le retient pas, le trouvant trop violent. Pourtant, au milieu des années 80, Clint Eastwood tombe dessus car il cherche à se renseigner sur Peoples. La lecture s’avère totalement satisfaisante et Eastwood pense pouvoir en faire un bon film. A cette époque, il vient pourtant de tourner plusieurs westerns et pense qu’il est également trop jeune pour incarner le personnage principal. Il laisse donc dormir ce script dans un tiroir jusqu’au début des années 90.

Impitoyable, jaquette UHD 4K

© 1992 Warner Bros / Conception graphique : © 2017 Warner Bros Entertainment Inc. Tous droits réservés.

Effectivement, au début de cette décennie, Eastwood est à la croisée des chemins. Il vient d’enchaîner plusieurs échecs commerciaux en tant qu’acteur et ses films plus ambitieux comme Chasseur blanc, cœur noir (1990) n’ont pas trouvé leur public. Il était donc temps pour lui de renouer avec le genre qui a fait sa gloire, tout en bouclant la boucle à l’aide d’un script plus ambitieux que la moyenne.

Un casting de haute volée

Il obtient d’ailleurs la confiance de la Warner qui lui octroie un budget cossu de 14,4 millions de dollars pour pouvoir offrir les rôles secondaires à des grosses pointures. Impitoyable bénéficie donc de l’apport de comédiens chevronnés comme Gene Hackman, mais aussi de la présence de Morgan Freeman qui venait tout juste d’être nommé à l’Oscar du meilleur acteur pour Miss Daisy et son chauffeur (Beresford, 1989), ou encore de Richard Harris. Le budget a été tenu grâce à un tournage dans un coin perdu du Canada où l’intégralité du village a été construit. Etalé sur trente-neuf jours, le tournage s’est déroulé dans une bonne ambiance, malgré des horaires intenses liés à de nombreuses scènes nocturnes.

Loin de n’être qu’un simple film de genre, Impitoyable peut être vu rétrospectivement comme une synthèse quasiment parfaite de trente années d’évolution du western. Dédié à Sergio Leone et Don Siegel, les deux maîtres à filmer d’Eastwood, le long-métrage opère une fusion entre plusieurs styles. Ainsi, le réalisateur situe son histoire dans un Ouest débarrassé de toute forme de glamour, suivant en cela les descriptions osées du western européen. Les hommes y sont d’une violence terrible, les vêtements sont crasseux, les villes sales et délabrées et la pluie règne en maître lors de séquences orageuses qui rappellent les délires opératiques des films de Sergio Corbucci ou Antonio Margheriti.

Impitoyable ou comment saper les fondements de l’Ouest mythique

Pour autant, Eastwood reste et demeure un cinéaste américain classique. Si sa description de l’Ouest cherche à se rapprocher d’une certaine véracité historique, son interrogation principale reste centrée sur les conséquences de la violence dans une vision qui demeure fortement marquée par la notion de péché. Les personnages de vieux tueurs sur le retour sont marqués à jamais par leurs exactions de jeunesse, souvent réalisées sous l’emprise de l’alcool. Ces exploits montés en épingle par la presse de l’époque ne sont finalement que des actes de violence monstrueux qui n’apportent à leurs auteurs que des remords.

D’ailleurs, Impitoyable développe la thématique passionnante abordée par John Ford dans L’homme qui tua Liberty Valance (1962), à travers le personnage de biographe interprété avec talent par Saul Rubinek. Celui-ci est chargé de conter les exploits sanglants des héros de l’Ouest dont il forge la légende. Eastwood démontre ainsi que l’on a totalement fabriqué cette histoire du grand Ouest en fondant l’Amérique sur des valeurs liées à la violence. Le film s’inscrit donc bien dans une forme de western battant en brèche l’histoire officielle.

Une volonté d’épure qui peut étonner

Encore une fois, Impitoyable n’invente rien, mais opère une synthèse de toutes les thématiques des trente dernières années qu’il englobe dans une histoire où les femmes et les minorités sont les victimes d’hommes sadiques (superbe Gene Hackman). Très lent dans sa progression, Impitoyable peut désarçonner de prime abord par son refus du spectacle et sa volonté d’épure stylistique. Toujours classique, la réalisation d’Eastwood entre en symbiose avec le sujet traité et ne cherche jamais l’épate. Il s’agit ici de développer la psychologie des différents personnages et de les confronter à leurs propres contradictions.

En cela, le plus beau personnage est sans nul doute celui du jeune kid qui souhaite se conformer à la légende en devenant un grand pistolero. Le jeune chien loup interprété avec force par Jaimz Woolvett fanfaronne auprès des plus vieux en faisant valoir un nombre conséquent de victimes. Pourtant, l’histoire révélera qu’il n’a tué personne et son premier méfait le laisse traumatisé. Cette séquence où il révèle son dégoût de la violence est sans aucun doute la plus belle de tout le film, et peut-être même la plus réussie de toute l’œuvre d’Eastwood.

Un énorme succès aux Etats-Unis et aux Oscars

Sublimé par une belle photographie crépusculaire de Jack N. Green, enrobé de la belle musique de Lennie Niehaus (sur un thème principal composé par Eastwood, non crédité), Impitoyable a cartonné dans les salles américaines, au point d’atteindre les cent millions de dollars de recettes. De quoi positionner le film pour les Oscars où il glane quatre statuettes (meilleur film, meilleur réalisateur pour Eastwood, meilleur second rôle masculin pour Gene Hackman et meilleur montage pour Joel Cox).

En France, Impitoyable connaît aussi un engouement de la part des critiques (considéré comme le film de l’année par Les Cahiers du Cinéma, par exemple), mais le public ne se précipite pas davantage que pour les autres films du réalisateur à cette époque. Ainsi, le film s’arrêtera à 801 320 entrées sur l’ensemble du territoire, soit à peine plus qu’une œuvre aussi décevante que La relève (1991). Certes, le long-métrage a beaucoup fait pour crédibiliser Eastwood auprès des cinéphiles, mais cela s’est donc fait sur le long terme.

Désormais, Impitoyable est considéré à juste titre comme une œuvre majeure du cinéaste et le film revient régulièrement en support vidéo, bénéficiant même d’un disque en UHD 4K dont l’image est pourtant assez décevante par rapport aux possibilités du support.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 9 septembre 1992

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Impitoyable, l'affiche

© 1992 Warner Bros / Affiche d’après Bill Gold. Tous droits réservés.

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