Démons 2 poursuit la saga de manière efficace, malgré une tendance à exploiter les mêmes ressorts narratifs que le précédent. On peut également y voir une métaphore sur le déclin du cinéma de genre italien dans les années 80.
Synopsis : Une adolescente fête son anniversaire avec des amis tandis que la télévision diffuse un film d’horreur avec des démons. Ceux-ci finissent par sortir de l’écran et par contaminer tous les invités. Ils commencent alors à dévorer tous les habitants de l’immeuble…
Une suite mise en chantier en urgence
Critique : Afin de profiter du succès de Démons (1985), Dario Argento et Lamberto Bava se lancent à corps perdu dans la conception de cette suite qui reprend le même procédé que dans l’original, à savoir une invasion de démons assoiffés de sang dans un lieu clos. Ils se sont mis au travail à peine une semaine après la sortie triomphale du premier volet. Remplaçant le cinéma par la télévision comme vecteur de la contagion, les auteurs ne prennent une fois de plus pas la peine d’expliquer le pourquoi du comment.
Cependant, ils n’hésitent pas à lâcher leurs démons à l’assaut d’innocentes victimes au bout d’une vingtaine de minutes, retrouvant par-là l’efficacité redoutable du premier opus. Sans aucune arrière-pensée, les auteurs signent un script qui reprend un à un les éléments du précédent volet et ne s’embarrassent pas de vraisemblance. Ainsi, des protagonistes disparaissent en cours de film, les téléphones fonctionnent alors que l’électricité est coupée et deux acteurs du premier (Bobby Rhodes et Lino Salemme) reviennent pour incarner d’autres personnages.
Démons 2, l’efficacité avant tout
Malgré ces évidentes bévues, Lamberto Bava arrive souvent à instaurer un climat d’angoisse et ne lésine pas sur le sang et les effets spéciaux pour rendre son film excitant. Pourtant, il choisit ici de privilégier l’action pure et dure au gore, bien moins présent que dans le premier. Les amateurs se contenteront donc de quelques métamorphoses démoniaques particulièrement réussies signées Sergio Stivaletti.
La mise en scène de Lamberto Bava est moins inspirée et présente de nombreuses faiblesses, même si le cinéaste parvient encore à créer quelques plans mémorables comme cette arrivée des démons sur la musique mystique du groupe Dead Can Dance. La photographie est toujours aussi colorée, rendant une fois de plus hommage au talentueux Mario Bava, tandis que la musique est typique de la production horrifique transalpine des années 80, oscillant sans cesse entre kitsch et envolées macabres donnant la chair de poule.
L’invasion de la tour des nantis
La bande originale est signée du Britannique Simon Boswell qui donne une allure plus rock au thème principal du film. En ce qui concerne les musiques additionnelles, celui-ci évite le recours au hard-rock du premier volet et privilégie les groupes dark indépendants qui fleurissaient à l’époque comme The Cult, The Smiths, The Art of Noise ou encore Dead Can Dance et son superbe De Profundis.
Si cette suite est moins cohérente sur le plan strictement narratif, on notera tout de même la présence d’une métaphore sociale intéressante. Ainsi, la fameuse tour abrite essentiellement une population aisée qui représente à elle seule les fameux yuppies des années 80. A l’intérieur, la plupart des personnages sont volontairement superficiels et uniquement inquiets de leur apparence. A un étage, la présence d’une salle de gymnastique rappelle la mode du gym tonic et l’obsession des années 80 pour la forme physique. D’ailleurs, les auteurs se moquent des gars bodybuildés qui, malgré leur force physique, ne parviennent pas à échapper à la vindicte des démons. En témoigne le personnage joué par Bobby Rhodes, une fois de plus sacrifié par le réalisateur.
Quand la télévision menaçait l’hégémonie du cinéma
Mieux, on peut aujourd’hui lire Démons 2 comme un témoignage poignant de la fin d’une époque. Alors que le premier film situait son intrigue dans une salle de cinéma, le deuxième prend acte de la victoire de la télévision. Désormais, la société est individualiste et la contamination ne peut être que personnelle par le biais du tube cathodique. Les auteurs utilisent d’ailleurs un effet spécial repris du Videodrome de David Cronenberg pour faire sortir ses démons de l’écran. Lamberto Bava constate donc la mort programmée du cinéma au profit de la télévision. Lui-même a d’ailleurs commencé à accepter des contrats pour tourner des séries et téléfilms pour le petit écran, signe d’une crise très grave touchant le cinéma populaire italien. En cela, Démons 2 est bien représentatif du déclin d’un genre.
Ce deuxième film, moins bon que le précédent, réserve quand même de bons moments aux amateurs du genre. Il fut présenté au Festival d’Avoriaz dans la section Peur, sans toutefois décrocher la moindre récompense puisque le Prix de cette section est allé au Bloody Bird de Michele Soavi. Ayant moins fonctionnée que Démons, cette suite a tout de même rapporté suffisamment pour que l’on envisage une suite. Toutefois, Lamberto Bava était engagé pour des travaux télévisuels et le script a échoué dans les mains de Michele Soavi qui l’a transformé pour donner naissance à Sanctuaire (1989). A noter qu’il faut se méfier des imitations puisqu’existe sur le marché un Black Demons intitulé parfois Démons 3 (Umberto Lenzi, 1991) qui n’entretient aucun rapport avec la série produite par Argento.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 25 mars 1987
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Antonio Cantafora, Lamberto Bava, Bobby Rhodes, Lino Salemme, David Edwin Knight, Nancy Brilli, Coralina Cataldi-Tassoni, Asia Argento