Les vacances de la Toussaint ont démarré avec un box-office de ouf. Smile retrouve le sourire et L’amour ouf est énorme.
Effectivement, L’Amour ouf, le film le plus buzzé du Festival de Cannes 2024, réalisé par Gilles Lellouche, est un véritable triomphe. Si l’on prend en considération ses avant-premières, ce sont pas moins de 1 000 000 de spectateurs qui se sont précipités pour aller voir le film distribué par StudioCanal.
Gilles Lellouche a évidemment l’intention de faire au moins aussi bien que Le Grand Bain qui, en 2018, sorti exactement à la même époque, avait réalisé un total flamboyant de 4 302 000 baigneurs. L’Amour ouf est bien parti pour récupérer cette première place également en 2e semaine. C’est en tout cas ce que laissent présager les chiffres du mercredi 23 octobre, puisque la réalisation branchée avec François Civil était, du moins à Paris et sa périphérie, en tête avec 15 000 spectateurs supplémentaires.
On notera que L’Amour ouf est le seul film à dépasser les 1 000 spectateurs par salle dans l’ensemble du top 60, encore un exploit !
L’autre grosse nouveauté de la semaine était un petit film d’horreur de 27 000 000 de dollars de budget. Il s’agit de Smile 2, le film réalisé par Parker Finn, très ambitieux jusque dans sa durée de plus de 2h00, ciblé par une interdiction aux moins de 16 ans. Il réussit une première semaine exaltante avec 325 183 spectateurs dans seulement 358 cinémas. La production Blumhouse accouche de la meilleure entame hebdomadaire pour un film d’horreur en France en 2024. Elle semble bien partie pour perdurer en 2e semaine grâce à Halloween et un bouche-à-oreille très favorable.
©️ Paramount Pictures. All Rights Reserved.
C’est le monde à l’envers est la 3e nouveauté du jour. Cette production Gaumont est un véritable échec avec seulement 163 000 spectateurs dans 505 cinémas. Le film de Nicolas Vanier avec Michaël Youn, Valérie Bonneton, Éric Elmosnino, Barbara Schulz, François Berléand et Yannick Noah, visait bien plus, mais c’était sans compter un démarrage catastrophique à Paris où seulement 11 511 spectateurs ont franchi le pas dans les 29 cinémas qui le diffusaient. Le coefficient Paris-province est très élevé puisqu’il s’élève à 14,79. Et évidemment, c’est une très mauvaise nouvelle pour Gaumont qui traverse une année noire depuis la sortie de Chiens et Chats en février, énorme production qui n’avait séduit que 1 122 884 spectateurs. Le distributeur a connu les échecs consécutifs de Black Tea, Rosalie, Notre monde et surtout La Famille Hendricks, Presque légal et La nuit se traîne. Historiquement, la division cinéma de Gaumont ne s’est jamais aussi mal portée.
Croquette le chat merveilleux est le succès pour enfants de la semaine, parmi les nouvelles sorties, avec 149 220 spectateurs dans 474 cinémas. Le distributeur KMBO, bien ancré en province, est parvenu à faire un très beau travail de promotion. Cela a un prix : l’échec fatal de Bambi, l’histoire d’une vie dans les bois. Malgré la voix de Mylène Farmer comme narratrice, la production animalière distribuée par Gebeka Films déconcerte son distributeur avec seulement 47 199 spectateurs dans 430 cinémas. C’est à peine s’il entre dans le top 20.
Artistiquement, un autre film familial, cette fois-ci d’animation, est en très mauvaise posture. Sauvages, distribué par Haut et Court, trouve une petite dix-neuvième place avec 36 217 spectateurs dans 288 salles. La production franco-belge et suisse était pourtant signée par Claude Barras, à qui l’on doit le très joli Ma vie de Courgette.
© Gebecka Films MC4. All Rights Reserved.
Une autre production familiale s’avère désastreuse, mais là le flop était attendu : il s’agit d’Harold et le crayon magique que proposait en salle Sony Pictures Releasing. Avec 19 000 entrées dans 143 cinémas, le film avec Zachary Levi parvient tout juste à la 25e position et devrait très vite être retiré de l’affiche. Son casting fade qui évoque peu de chose aux spectateurs ainsi qu’une affiche peu attrayante ont largement éconduit les spectateurs qui auront senti au mieux de l’indifférence devant ce qui aurait dû être un direct-to-plateforme.
Déception également pour Macpat le chat chanteur proposé par Les Films du Préau dans 158 cinémas. Cette petite production indépendante n’a trouvé que 16 127 matous à faire ronronner, soit presque autant que Moi, moche et méchant 4 en 15e semaine, qui perd à peine 23% de sa fréquentation pour un total de 4 500 000 spectateurs.
En 13e position, une entrée fait plaisir : celle du dernier film d’Alain Guiraudie, Miséricorde. Celui-ci était distribué par Les Films du Losange dans 175 cinémas, essentiellement d’art et d’essai. Il assume fièrement 80 000 spectateurs exigeants si l’on prend en considération les avant-premières. Le réalisateur radical fait déjà mieux que ses 2 derniers films, Rester vertical et Viens je t’emmène, qui avaient plafonné entre 50 000 et 70 000 entrées. Alain Guiraudie, qui pouvait compter sur la présence notamment de Catherine Frot, réalisera sans aucun mal son meilleur score au box-office. Pour mémoire, L’Inconnu du lac, thriller à caractère homosexuel sorti en 2013, était parvenu à franchir la barre des 110 000 spectateurs malgré une interdiction aux moins de 16 ans.
Affiche Check Morris, d’après affiche de Xavier Lambours © 2024 CG Cinéma, Scala Films, Arte France Cinéma, Andergraun Films, Rosa FIlms. All Rights Reserved.
Une autre sortie est encourageante : il s’agit de Barbès, Little Algérie, réalisé par l’attaché de presse Hassan Guerrar, avec le chanteur urbain Sofiane Zermani. Le film se distingue avec 40 000 spectateurs dans 89 salles. Attention, le succès est essentiellement parisien puisque le coefficient Paris-province s’élève à 2,1. Qu’est-ce qui explique le manque d’appétence de la province ? Probablement un sujet très parisien qui se livre à l’introspection d’un quartier de la ville, et d’une promotion dans les médias bobos auxquels l’attaché de presse est habitué, puisque c’est là qu’il envoie les films qu’il défend.
Parmi les continuations, peu de films s’écroulent. Les vacances sont toujours favorables à l’exploitation et permettent de limiter la casse. On considère qu’un film est soit en fin de carrière, soit a du mal à trouver son public s’il perd plus de 40% de sa fréquentation durant les vacances de la Toussaint.
C’est le cas par exemple de Joker : Folie à deux qui perd 42% de sa fréquentation. Il trouve tout de même 122 000 spectateurs mais dans 793 salles et cumule donc en 3 semaines 935 000 spectateurs. Il finira sa carrière au-dessus du million d’entrées, ce qui est 5 fois moins que son prédécesseur.
Autre chute vertigineuse, celle de Terrifier 3 était inévitable. Le clown tueur perd 58% de sa fréquentation en 2e semaine, victime probable de la sortie événementielle de Smile 2, mais également déjà à court d’arguments auprès d’un public forcément limité. La production interdite aux moins de 18 ans, extrêmement gore, peut se satisfaire de ses 395 000 spectateurs en 15 jours. On applaudit encore ces 116 000 spectateurs en 2e semaine pour une petite série B aussi violente, cela relève de l’exploit.
© Factory Films, ESC Films
Une autre chute fait mal aux yeux : c’est celle de My Hero Academia: You’re Next, distribué par Sony Pictures Releasing. En laissant filer 58% de sa fréquentation, le manga en est réduit à 21 793 spectateurs pour sa 2e semaine dans 232 cinémas. Son total de 74 000 spectateurs est décevant.
Megalopolis de Francis Ford Coppola s’effondre et doit assumer un champ de ruine : – 55% de sa fréquentation en 4e semaine. Désormais en 30e place, avec 14 000 spectateurs, le bide mondial se retrouve donc bien en France où il aurait dû trouver les arguments nécessaires pour attirer les cinéphiles. 246 000 amateurs du Nouvel Hollywood, en 2024, est-ce là une vision catastrophiste de a cinéphilie ? Cette époque est bien révolue.
Sortie le même jour, la nouvelle adaptation d’Emmanuelle par Audrey Diwan perd 60% de sa fréquentation en 4e semaine et se retrouve seulement à 2 165 spectateurs dans 148 cinémas. Sa moyenne de 15 tickets achetés par écran est évidemment insoutenable pour son distributeur qui a décidé de l’envoyer en vidéo sans passer par la case blu-ray. Quand le premier Emmanuelle de Just Jaeckin en 1974 célébrait une carrière de 10 ans avec plus de 8 000 000 de spectateurs, son cousin féministe en 2024 devra se contenter de 67 000 curieux en 4 semaines. C’est dommage, le film méritait mieux.
Parmi les belles continuations, de très nombreux films se distinguent. C’est le cas de DreamWorks avec Le Robot sauvage qui offre à Universal Pictures International un beau succès sur la durée. Le film ne perd que 9% de sa fréquentation et affiche 359 000 amateurs de beauté animée, soit un total de 754 000 entrées. À situer entre WALL-E et Le Géant de fer, ce film très poétique est un succès à la fois critique et public, et prend tout le monde de court.
Le biopic sur la photographe Lee Miller est encore un bel argument de la diversité au cinéma : 177 000 spectateurs supplémentaires en 2e semaine et une baisse de 28%. C’est l’un des plus beaux succès pour un film féministe en 2024 avec 425 000 entrées en 15 jours.
©️ 2024 DreamWorks Animation – Universal Pictures / Affiche : AV Print. Tous droits réservés.
François Ozon reste dans le top ten en 3e semaine puisque Quand vient l’automne regroupe 136 000 spectateurs, il est vrai dans une combinaison très élevée de 668 salles. Avec une perte de 15% de sa fréquentation, le film dépasse les 500 000 spectateurs en 3 semaines. C’est convenable.
Le Comte de Monte-Cristo n’en finit plus de triompher. En 17e semaine, la superproduction de Pathé, avec Pierre Niney au sommet de sa « fame », a dépassé les 9 000 000 de spectateurs en France et les 1 600 000 à Paris. Avec beaucoup d’audace, la fresque littéraire augmente même sa fréquentation de 5%. On peut évidemment parler ici de phénomène de société.
Beetlejuice Beetlejuice dépasse, lui aussi, les 1 600 000 spectateurs mais sur la France et en 6e semaine. Avec une belle stabilité, Tim Burton ne perd que 14% de sa fréquentation et se retrouve en 8e place.
Quand on vous dit que le cinéma français se porte bien, le secteur de l’art et essai n’est pas en reste, avec L’Histoire de Souleymane. Les bons résultats sont là. Dans un circuit de 253 cinémas, cette histoire émouvante séduit 106 000 spectateurs supplémentaires pour un total excellent de 232 000 cinéphiles. Proportionnellement, c’est à Paris qu’il fonctionne le mieux puisque son coefficient Paris-province est de 2,93.
Création : Silenzio © Unité. All Rights Reserved.
Quand on compare les 470 000 spectateurs de L’Heureux élu, comédie avec Camille Lellouche sortie il y a 4 semaines, et les 470 000 spectateurs des Graines du figuier sauvage, film primé à Cannes de près de 3h00, sorti il y a 5 semaines, il n’y a pas de doute : le premier est un échec, le second est un succès.
Après un démarrage décevant en première semaine, Emilia Perez n’a eu de cesse d’étonner avec une stabilité à toute épreuve. En 9e semaine, le film de Jacques Audiard réalise encore 23 000 spectateurs dans 148 salles, soit une baisse minime de 18% de sa fréquentation. Le film se situe désormais à 1 029 000 spectateurs dans l’ensemble du territoire. Son très bon accueil international et sa présence sur Netflix à l’étranger lui permettront de rentabiliser un budget très élevé qu’il était difficile de rentabiliser sur son seul territoire de naissance.
Certains se demandent ce qu’est devenu À l’ancienne avec Didier Bourdon : pas grand-chose. La comédie qui marquait la rentrée 2024, avec une sortie au 4 septembre, n’a été vue que par 240 000 spectateurs. En cette semaine, le thriller féministe Blink Twice aura fait mieux avec 300 000 spectateurs plutôt enthousiastes.