D’une redoutable efficacité, La nuit se traîne est un thriller belge filmé pied au plancher par un jeune cinéaste au talent formel évident. Les acteurs contribuent au plaisir ressenti durant une projection sous haute tension. Une vraie réussite.
Synopsis : Ce soir-là, Mady, étudiant le jour et serrurier la nuit, voit sa vie basculer quand il ouvre la mauvaise porte et devient accidentellement complice d’une affaire de grand banditisme. Au cœur d’une ville en pleine ébullition, Mady n’a qu’une nuit pour se tirer d’affaires et retrouver la trace de Claire, celle qui a trahi sa confiance. Le compte à rebours est lancé…
Nuit de folie à Bruxelles
Critique : Commencé durant la période de confinement liée à la pandémie de Covid-19, le scénario de La nuit se traîne est issu de la volonté de son jeune cinéaste de concentrer l’action du film en une seule nuit. Cette apparente contrainte l’a motivé pour créer une intrigue de thriller qui soit à la fois crédible et en même temps trépidante. Par ailleurs, Michiel Blanchart tenait à témoigner des troubles de l’époque à travers les manifestations bruxelloises liées à Black Lives Matter et au développement du racisme en Europe. Ce sont donc ces deux éléments qui ont fusionné au cœur de La nuit se traîne.
Effectivement, le spectateur est invité à suivre les aventures mouvementées d’un jeune serrurier noir qui se retrouve par hasard au cœur d’une affaire trouble entre truands. Pris dans les rets d’une sombre histoire d’argent volé, le jeune homme va devoir se tirer d’affaire avec les moyens du bord le temps d’une nuit très agitée. Par ailleurs, cette histoire intervient durant une nuit de manifestation du mouvement Black Lives Matter, violemment réprimée par la police belge.
De belles scènes d’action et une efficacité de chaque instant
Certes, le cinéaste dont c’est le premier film entend ici témoigner du racisme galopant dans nos sociétés européennes, mais il ne fait pas pour autant de son thriller le porte-drapeau d’une cause. Ainsi, La nuit se traîne s’inscrit pleinement dans son époque par le contexte dans lequel se déroule l’action, mais ce premier essai cherche avant tout à distraire le spectateur avec une intrigue bien ficelée et entièrement tournée vers l’efficacité du film de genre. De manière assez classique, Michiel Blanchart entraine un jeune innocent au cœur d’une situation inextricable et qui n’ira qu’en empirant au fil des bobines.
Pour cela, il multiplie les scènes d’action, avec des affrontements particulièrement violents, de nombreuses cascades et surtout une réalisation endiablée. Car La nuit se traîne est filmé pied au plancher par un cinéaste désireux de montrer de quoi il est capable. Sa caméra se fait virevoltante, tandis qu’il enchaîne les plans-séquence impressionnants, avec multiples changements d’axe, lors des combats. Toute proportion gardée, Michiel Blanchart s’inscrit donc dans la lignée du cinéma d’artistes comme Matthew Vaughn ou d’Alfonso Cuarón, notamment dans sa gestion de l’espace et ses chorégraphies martiales. Le résultat s’avère donc diablement efficace, faisant souffler sur le cinéma de genre franco-belge un souffle nouveau qu’on aimerait voir plus souvent.
Romain Duris compose une figure machiavélique marquante
Par ailleurs, le thriller est soutenu par une solide interprétation de l’ensemble du casting. Le jeune Jonathan Feltre se révèle tout à fait crédible en jeune homme dépassé par les événements mais qui se tire toujours d’affaire malgré sa faible carrure. Face à lui Natacha Krief incarne une jeune femme bien de son temps, tandis que Jonas Bloquet confirme sa capacité à monopoliser l’attention à l’écran. Bien entendu, la star Romain Duris surplombe tout ce petit monde par son interprétation magnétique du grand méchant. L’acteur qui attire toujours la sympathie du spectateur parvient à octroyer une certaine humanité à ce personnage pourtant démoniaque. C’est assurément ce qui fait sa grandeur que de ne pas tomber dans la caricature du salaud intégral.
Boosté par une musique d’une belle efficacité de l’artiste électro Tepr (ici sous son vrai nom de Tanguy Destable), La nuit se traîne est donc un thriller trépidant qui remplit largement son contrat de divertissement, tout en laissant présager un bel avenir pour ce jeune cinéaste à suivre de près.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 28 août 2024
Biographies +
Michiel Blanchart, Romain Duris, Claire Bodson, Sam Louwyck, Jonas Bloquet, Jonathan Feltre, Natacha Krief, Thomas Mustin (Mustii)
Mots clés
Cinéma belge, Nuit de folie au cinéma, Les cavales au cinéma, Les violences policières au cinéma