Viens je t’emmène : la critique du film + le test DVD (2022)

Comédie dramatique | 1h40min
Note de la rédaction :
6,5/10
6,5
Viens je t'emmène, affiche du film

  • Réalisateur : Alain Guiraudie
  • Acteurs : Noémie Lvovsky, Doria Tillier, Jean-Charles Clichet, Nathalie Boyer, Farida Rahouadj, Sami Outalbali, Ilies Kadri, Michel Masiero
  • Date de sortie: 02 Mar 2022
  • Nationalité : Français, Belge
  • Titre original : Viens je t'emmène
  • Titres alternatifs : Nobody's Hero (titre international) / Biegacz, dziwka, Arab, mąż (Pologne)
  • Année de production : 2020
  • Scénariste(s) : Alain Guiraudie, Laurent Lunetta
  • Directeur de la photographie : Hélène Louvart
  • Société(s) de production : CG Cinéma, Arte France Cinéma, Auvergne Rhône-Alpes Cinéma, Umedia
  • Distributeur : Les Films du Losange
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : Blaq Out (DVD)
  • Date de sortie vidéo : 5 juillet 2022
  • Box-office France / Paris-périphérie : 55 496 entrées / 21 227 entrées
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : 3 200 000 euros
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics avec avertissement. La commission propose une autorisation pour tous publics assortie de l'avertissement suivant : "Plusieurs scènes de sexe crues sont susceptibles de choquer un jeune public".
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : 5.0
  • Festivals et récompenses : Festival de Berlin 2022 : en compétition
  • Illustrateur / Création graphique : Benjamin Seznec pour Troïka (affiche) / L'Atelier d'Images pour Blaq Out (jaquette DVD)
  • Crédits : © 2020 CG Cinéma, Arte France Cinéma, Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma, Umédia
Note des spectateurs :

Avec Viens je t’emmène, Alain Guiraudie livre un vaudeville assez léger à partir de sujets graves. Le décalage fonctionne grâce aux acteurs, même si l’écriture n’est pas toujours totalement maîtrisée.

Synopsis : Clermont-Ferrand, Médéric tombe amoureux d’Isadora, une prostituée de 50 ans, mais elle est mariée. Alors que le centre-ville est le théâtre d’une attaque, Selim, un jeune sans-abri se réfugie dans l’immeuble de Médéric provoquant une paranoïa collective. Tout se complique dans la vie de Médéric, tiraillé entre son empathie pour Selim et son désir de vivre une liaison avec Isadora.

Un vaudeville nocturne et urbain pour Alain Guiraudie

Critique : Aussitôt après avoir terminé Rester vertical (2016), le cinéaste Alain Guiraudie a commencé l’écriture de ce qui allait devenir Viens je t’emmène (2022). Inspiré par les tragiques attentats qui ont endeuillé la France entre 2015 et 2016, Guiraudie envisage de signer une œuvre qui serait une comédie vaudevillesque au cœur d’événements tragiques. Pour trouver le juste équilibre entre rire et émotion, il lui a fallu un travail acharné d’environ trois ans. Après avoir défini son casting, Guiraudie débute le tournage au mois de janvier 2020. Toutefois, la crise de la Covid-19 a empêché la sortie du long-métrage durant près de deux ans. Finalement, c’est en mars 2022 que le métrage fait une apparition furtive sur nos écrans, emporté par la vague de désaffection des salles à la suite de la crise sanitaire. Finalement, Viens je t’emmène n’a embarqué à son bord que 55 496 curieux.

Pourtant, Alain Guiraudie a tenté de se renouveler avec cette comédie décalée qui se déroule majoritairement de nuit dans un milieu urbain et anxiogène. Jusque-là, l’auteur sortait rarement d’un cadre pastoral baigné par le soleil. Il s’agit d’un changement de cadre, mais pas de style puisque la caméra de Guiraudie reste plutôt fixe et davantage attentive aux personnages qu’à une quelconque virtuosité technique. Dès les premiers instants, on retrouve le ton habituel du réalisateur, avec des personnages volontairement décalés, au phrasé quelque peu inspiré par la Nouvelle Vague.

Des archétypes malmenés

Si le cinéaste semble initialement se conformer aux archétypes du film noir, avec le schéma classique d’un client qui tombe amoureux d’une prostituée au grand cœur et qui doit l’extirper de son milieu, Guiraudie fait rapidement fi des clichés et préfère orienter son film vers tout autre chose. En introduisant des attentats terroristes au cœur d’une ville de province calme (Clermont-Ferrand, rarement filmée au cinéma), le cinéaste ausculte alors les réactions d’un panel de personnages dont on pense connaître à l’avance les réactions. En réalité, le métrage va consciencieusement rebattre les cartes et dézinguer la pensée unique débitée à longueur de journée sur les chaînes d’information en continu.

Non, la femme battue interprétée par l’excellente Noémie Lvovsky (à nouveau prostituée comme dans l’excellent Filles de joie en 2020) n’est pas aux abois et conserve un amour intact pour son bourreau quotidien. Non, le héros qui recueille le SDF n’est pas un militant humaniste et il n’hésite pas à dénoncer le jeune intrus à la police. Non, tous les musulmans ne sont pas des terroristes en puissance, et même s’ils prient régulièrement. Et non, l’adepte de l’autodéfense n’est pas nécessairement un facho borné. En concentrant tout ce petit monde dans un lieu quasiment unique (l’immeuble d’habitation), Alain Guiraudie entraîne le film vers le pur vaudeville, ce qui nous permet de mieux connaître les différents protagonistes et de mieux comprendre leurs failles, leurs doutes.

Haro sur la France du repli

A travers cette comédie inspirée par les premiers films d’Almodovar – dixit Guiraudie lui-même – le réalisateur démontre que les clichés volent en éclats à partir du moment où les gens commencent à s’écouter les uns les autres. Par la connaissance de l’autre vient la tolérance et l’acceptation des différences. Ainsi, Viens je t’emmène ausculte de manière sévère cette France du repli sur soi qu’a fait naître le terrorisme, ainsi que les réseaux sociaux et leur effet de niche.

Si le film est porté par des comédiens formidables dont un très lunaire Jean-Charles Clichet (en mode Vincent Macaigne), une toujours vibrante Noémie Lvovsky et Michel Masiero en bourru de service, le script n’est pas toujours aussi rigoureux qu’attendu. Certaines situations s’avèrent un peu répétitives et donnent aussi le sentiment que le cinéaste ne sait pas vraiment où il veut en venir. Cette hésitation se retrouve dans une fin en points de suspension qui laisse le spectateur sur sa faim.

Toutefois, il faut saluer le courage d’avoir osé traiter un sujet brûlant avec une certaine légèreté et surtout d’avoir su conserver un vrai esprit d’indépendance au cœur d’une production française trop souvent formatée. En cela, Viens je t’emmène demeure une comédie fort sympathique à découvrir.

Critique de Virgile Dumez

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Viens je t'emmène, affiche du film

© 2020 CG Cinéma – Arte France Cinéma – Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma – Umédia / Design : Benjamin Seznec pour l’agence Troïka. Tous droits réservés.

Le test du DVD :

Une édition très basique d’un film passé inaperçu en salles. A découvrir tout de même. Ce test a été réalisé à partir du produit définitif.

Compléments & packaging : 2,5 / 5

Le DVD est présenté dans un boitier Amaray classique, avec un simple fourreau pour lui donner un peu plus de cachet. Du côté des suppléments vidéo, on est très content de retrouver un entretien de 24min avec Alain Guiraudie qui ne dit rien des vicissitudes du tournage et de la sortie, mais qui se livre à une analyse précise de son film. Il cite notamment ses références comme Almodovar ou encore John Carpenter (lui-même reconnaît que cela ne se voit pas beaucoup dans le résultat final). L’homme est toujours aussi sympathique et jamais avare de précisions sur son travail.

L’image : 3 / 5

Il s’agit d’une version SD standard qui n’est clairement pas de la haute définition. Lors des scènes nocturnes, le grain est bien visible et la définition n’est pas toujours exemplaire. Malheureusement, le film n’est pas édité en blu-ray et il vous faudra passer par la SVOD pour pouvoir découvrir le film en HD. En DVD, l’image est un peu terne et fade, sans être catastrophique pour autant. Nos yeux ne sont plus vraiment habitués à ce support frustre.

Le son : 3 / 5

Le métrage est proposé dans deux formats sonores (en 2.0 et en 5.0). Honnêtement, on n’a pas vraiment senti la différence entre les deux pistes tant les enceintes arrière sont peu mobilisées durant la projection. De toute façon, l’esbroufe n’est pas le but de l’œuvre, et les voix sont clairement posées et détachées du reste pour un réel confort d’écoute des dialogues. On notera enfin la présence de sous-titres pour sourds et malentendants et d’une piste en audiodescription.

Test du blu-ray de Virgile Dumez

Viens je t'emmène, jaquette DVD

© 2020 CG Cinéma – Arte France Cinéma – Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma – Umédia / Design : Benjamin Seznec pour l’agence Troïka / Conception jaquette : L’Atelier d’Images pour Blaq Out. Tous droits réservés.

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