Zig Zag Story (Et la tendresse?… Bordel! n° 2) : la critique (1983)

Comédie, Burlesque | 1h40min
Note de la rédaction :
7/10
7
Zig Zag Story (Et la tendresse?... Bordel! 2)? - Affiche

  • Réalisateur : Patrick Schulmann
  • Acteurs : Fabrice Luchini, Philippe Khorsand, Michel Bertay, Franca Maï, Diane Bellego, Christian François, Ronny Coutteure
  • Date de sortie: 04 Mai 1983
  • Nationalité : Français
  • Titre original : Zig Zag Story
  • Titres alternatifs : Et la tendresse?... Bordel! n° 2 (titre de la ressortie salle et édition vidéo) / Verdammt nochmal!... wo bleibt die Zärtlichkeit? 2.Teil (Allemagne) / Zig Zag (Portugal)
  • Année de production : 1983
  • Scénariste(s) : Patrick Schulmann
  • Directeur de la photographie : Gilberto Azevedo
  • Compositeur : Patrick Schulmann
  • Société(s) de production : Chloë Productions, Parano Films, Sphinx Films
  • Distributeur (1ère sortie) : AAA
  • Distributeur (reprise) : AAA
  • Date de reprise : 25 juillet 1984
  • Éditeur(s) vidéo : Fil à Film (VHS, sous le titre Et la tendresse?... Bordel! n° 2) / TF1 Vidéo (DVD, 2001)
  • Date de sortie vidéo : 17 octobre 2001
  • Box-office France / Paris-périphérie : 476 336 entrées / 137 670 entrées (1983) / 8 093 entrées (Paris-périphérie, reprise de 1984)
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : Couleurs / Mono
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : Copyrights : Tactics (agence) - Yves Prince (affichiste) - Claude Serre (dessinateur)
  • Crédits : Chloë Productions, Parano Films, Sphinx Films
  • Franchise : Fausse suite de Et la tendresse?... Bordel!
Note des spectateurs :

Zig Zag Story est une comédie délirante et absurde qui confirmait le goût de Patrick Schulmann pour l’humour burlesque et déjanté. Le tout avec une liberté de ton typique de la libération sexuelle des années 70.

Synopsis : Les vies de trois Parisiens – un peintre daltonien, une animatrice de radio et un photographe pervers – s’entremêlent et échappent à tout contrôle. Lorsqu’une gamine est enlevée dans leur entourage, la police s’en mêle.

Patrick Schulmann se lance dans le burlesque et l’humour absurde

Critique : Le réalisateur Patrick Schulmann a connu un triomphe surprise dès son premier long-métrage, la comédie culte Et la tendresse ? Bordel ! (1979) qui a réuni plus de 3,3 millions de spectateurs adeptes d’un humour potache et de mauvais goût, largement porté sur le sexe. Le film devient un véritable phénomène, mais le réalisateur ne parvient pas à confirmer cet engouement avec Rendez-moi ma peau (1980) qui ne fédère que 814 224 spectateurs. Une cruelle déception qui empêche le réalisateur de revenir sur le devant de la scène pendant quelques temps.

Zig Zag Story, jaquette dvd

Copyright : TF1 Vidéo.

Patrick Schulmann ne se laisse pourtant pas abattre et confirme son goût pour l’humour absurde avec son scénario suivant intitulé Zig Zag Story (1983). Il y développe encore plus qu’auparavant son goût pour le burlesque et l’humour des Marx Brothers et de Tex Avery. Cela démarre très fort avec la scène d’ouverture qui suit les catastrophes en série provoquées par une simple goutte d’eau. Ce style de gag, qui est à rapprocher de la BD, sera d’ailleurs repris par Caro et Jeunet dans leurs films des années 90 (Delicatessen et La cité des enfants perdus, notamment).

Un film aux gags outranciers qui symbolisent la libération sexuelle des années 70-80

Toutefois, Patrick Schulmann ne se contente pas de gags purement burlesques et déploie aussi un univers fortement marqué par l’influence d’Hara-Kiri et notamment du professeur Choron qu’il admirait. Dans la mouvance libertaire des années 70, Patrick Schulmann propose ainsi des gags grossiers qui montrent un goût pour la provocation. Il n’hésite pas à montrer les relations entre hommes et femmes comme étant des rapports de pouvoir.

Il ne cesse de décrire les hommes comme des dragueurs invétérés, totalement obsédés par le sexe opposé. On le voit notamment à travers le personnage incarné avec justesse par Fabrice Luchini. Par opposition, le couple formé par Diane Bellego et Christian François est un peu plus classique, même si le peintre profite du handicap de sa partenaire pour prendre l’ascendant sur elle.

Patrick Schulmann ose tout

Malgré un nombre conséquent de gags que l’on pourrait qualifier de machistes, on remarque que les femmes ont finalement souvent le dernier mot et que les rapports de domination sont en train d’évoluer. Ainsi, la présentatrice de radio a certes subi une promotion canapé, mais c’est elle qui dicte quand même ses conditions au peintre qu’elle aime. D’ailleurs, les victimes finales du long-métrage sont systématiquement les hommes.

Autre élément typiquement contestataire de l’époque, Patrick Schulmann se moque des médias qu’il dézingue habilement, mais aussi des élites – on adore le ministre qui descend à coup de fusil des ouvriers immigrés qui font trop de bruit à son goût. Enfin, les policiers sont ridiculisés à travers le personnage de Philippe Khorsand. Là encore, Patrick Schulmann introduit une trouvaille visuelle géniale en mettant en scène les pensées du flic à l’aide de phylactères, comme dans une BD. Tirant à boulets rouges sur les autorités, Zig Zag Story est donc un film en totale liberté, dont il est difficile de résumer l’intrigue puisque celle-ci se termine même sur une boucle temporelle plutôt étonnante. En cela, le long-métrage portait bien son titre lors de sa sortie en salles.

Zig Zag Story est un magma d’idées délirantes

Souvent hilarant, pullulant d’idées folles et franchement barrées – la visite de la prison par des touristes comme s’il s’agissait d’un zoo, la vengeance de la nonne qui se transforme en bombe sexuelle adepte du Kâma-Sûtra – Zig Zag Story dépasse de très loin tout ce qui se faisait à l’époque en matière de comédie en France. On peut seulement regretter un manque de soin dans l’éclairage et l’aspect franchement bis de la musique composée par Patrick Schulmann lui-même. Si l’on excepte ces quelques reproches, la comédie dingue confirme tout le bien que l’on pense d’un auteur qui n’a pas encore été reconnu à sa juste valeur par l’ensemble de la critique.

Sorti initialement sous le titre de Zig Zag Story, le film a été une grosse déception au box-office en ne récoltant que 476 336 entrées sur le territoire français. Du coup, pour sa sortie sur les territoires étrangers, les distributeurs ont opté pour le titre plus vendeur : Et la tendresse ? Bordel ! n°2. C’est également sous ce nouveau titre, qui ne correspond pourtant pas au film qui n’a rien à voir avec le premier, que le long-métrage est ressorti une seconde fois dans les salles le 25 juillet 1984. Cette tentative du distributeur AAA s’est soldée par un nouvel échec avec seulement 8 093 adeptes du rire absurde sur la capitale et sa périphérie. Enfin, c’est ce même titre racoleur qui a servi de base pour les différentes éditions vidéo, que ce soit en VHS ou en DVD. Pourtant, celui-ci n’était absolument pas validé par son auteur.

Patrick Schulmann s’est toutefois rapidement relevé de cet échec cuisant grâce à sa comédie suivante, le triomphal P.R.O.F.S. (1985), où il retrouvera une fois de plus son ami Fabrice Luchini. En tout cas, Zig Zag Story doit aujourd’hui être redécouvert pour ce qu’il est, à savoir une très bonne comédie libertaire qui ose absolument tout, avec un sens de l’absurde qui fait plaisir à voir.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 4 mai 1983

Les sorties de la semaine du 25 juillet 1984

Acheter le film en DVD

ZIg Zag Story, affiche Cinédweller

Copyrights : Tactics (agence) – Yves Prince (affichiste) – Claude Serre (dessinateur)

Box-office :

Véritable déception pour son distributeur A.A.A., Zig Zag Story devait être l’un des succès de l’année 1983. Le distributeur y croyait, malgré un casting sans stars si ce n’est la présence du jeune Luchini qui, entre deux films de Rohmer, était surtout capable de se fourvoyer volontiers dans l’érotisme (Emmanuelle 4… va toujours plus loin) et cette comédie érotomane.

Zig Zag Story est probablement l’une des meilleures productions burlesques issue du cinéma franchouillard des années 80. Sa réalisation inventive et son nombre de gags à la seconde l’imposent comme l’une des grosses sorties de mai 1983. Le dispositif promo est conséquent : affiches 4X3, concours, avant-premières…

Pour sa première semaine, le film sort dans 16 salles sur Paris intra-muros. Une combinaison de blockbuster, avec un complément formidable de 28 écrans en banlieue, soit 44 écrans. Cette semaine-là, il y a bien Liliana Cavani et son sulfureux Derrière les portes, le Duras Dialogue de Rome, L’éventreur de New York de Lucio Fulci (total de 15 salles sur P.P.), Ornella Muti et Ben Gazzara dans La fille de Trieste (22 cinémas), le polar noir J’aurai ta peau (21 salles) et même la sublime Laura Gemser dans Les 7 salopards (exposé dans seulement trois cinémas, il est vrai).

En entrant en 3e place parisienne, Zig Zag Story renverse 49 155 spectateurs, mais ne déloge pas 48 heures du haut du podium (2e semaine), ni même Gandhi, toujours 2e en 7e semaine. C’est au Montparnasse Pathé qu’il connaît la plus forte affluence (3 672), tandis qu’au  Victor Hugo Pathé, il se met les pieds dans le plat, avec 590 curieux.

En 2e semaine, Patrick Schulmann perd 18 écrans ! Il faut faire de la place pour L’été meurtrier, Les aventuriers du bout du monde avec Tom Selleck, et Le jeune marié avec Richard Berry. Zig Zag Story reste pourtant stable sur la capitale, avec à peine 6 000 entrées perdues en 2e semaine, et un total P.P. de 38 603 spectateurs. Toujours en deçà des 100 000 amateurs de burlesque, la bizarrerie cinématographique passe à 21 écrans en 3e semaine  et 23 967 spectateurs. Semaine cannoise avec l’apparition de La lune dans le caniveau (Beineix, Kinski et Depardieu), L’histoire de Pierra (Ferreri, Huppert, Mastroianni, Schygulla), le magnifique Le mur du regretté  Yilmaz Güney, le Zombie de Romero, La valse des pantins de Scorsese et L’argent de Bresson précipitent bien des films vers la porte de sortie, mais Zig Zag Story parvient à s’accrocher, en raison d’un joli petit bouche-à-oreille.

Promotion de Et la tendresse bordel 2 de Patrick Schulmann

© Les Archives de CinéDweller

En 4e semaine, la comédie débridée demeure dans 12 cinémas, avec quelques beaux chiffres sur Paris intra-muros, mais le total de 12 544 entrées démontre qu’il va falloir passer à autre chose pour les exploitants qui ont besoin de grosses sorties. L’homme blessé de Chéreau, Piège mortel de Sidney Lumet, et les désastreux Rock & Torah avec Christian Clavier et En cas de guerre mondiale, je file à l’étranger, sont les grosses sorties de la semaine.

Pour son 5e tour, Zig Zag Story n’a plus que 5 cinémas en intra-muros à sa disposition. La périphérie est passée à autre chose. En cas de guerre mondiale… est déjà retiré de l’affiche ; Rock & Torah réalise 3 000 entrées sur 7 salles. C’est sûr, en comparaison, les 5 401 entrées de Schulmann sont providentielles. Le film flirte d’ailleurs avec les 130 000 spectateurs. La stabilité demeure en 6e semaine, avec 4 316 entrées dans 4 salles.

Avec 3 060 spectateurs hilares dans deux cinémas (les Marignan et Montparnasse Pathé) en 7e semaine, Zig Zag Story achève sa carrière parisienne en 8e semaine à l’Elysées Lincoln, avec 624 passants. Le cinéma n’est pas le plus fréquenté de Paris.

137 670 entrées… Zig Zag Story aura donc doublé son score original et laisse un goût amer à son distributeur qui ne retrouve pas là le potentiel du film qui est présenté par ailleurs au marché du film cannois. Un tel divertissement sur les étagères par le réalisateur de Et la tendresse?… bordel! incite les producteurs et le distributeur à envisager une reprise sous un nouveau titre un an plus tard. En mai 1984, la comédie devient Et la tendresse?… bordel! n°2 ? au Marché du film et ressort dans l’indifférence en juillet 1984. Sa présence dans 13 cinémas démontre la confiance des exploitants, mais le piège ne fonctionne pas. L’été lui sera meurtrier.

Cette péripétie supplémentaire donnera un caractère maudit au film dont la sortie en VHS se fera discrètement sur le tard, longtemps après sa date de sortie originale, chez Fil à Film, à l’occasion de la réédition du premier Et la tendresse?… Bordel!.

Frédéric Mignard

Voir en VOD

Un dossier exclusif CinéDweller

Trailers & Vidéos

trailers
x
Zig Zag Story (Et la tendresse?... Bordel! 2)? - Affiche

Bande-annonce vidéo de Zig Zag Story

Comédie, Burlesque

x