Tirez sur le pianiste : la critique du film et le test blu-ray (1960)

Drame, Thriller | 1h21min
Note de la rédaction :
8/10
8
Tirez sur le pianiste, affiche reprise 2024

  • Réalisateur : François Truffaut
  • Acteurs : Charles Aznavour, Albert Rémy, Michèle Mercier, Marie Dubois, Alice Sapritch, Daniel Boulanger, Nicole Berger
  • Date de sortie: 25 Nov 1960
  • Année de production : 1960
  • Nationalité : Français
  • Titre original : Tirez sur le pianiste
  • Titres alternatifs : Shoot the Piano Player (titre international) / Shoot the Pianist (Royaume-Uni) / Schießen Sie auf den Pianisten (Allemagne) / Skjut på pianisten! (Suède) / Tirad sobre el pianista (Espagne) / Disparem Sobre o Pianista (Portugal) / Strzelajcie do pianisty (Pologne) / Skyt på pianisten (Norvège) / Disparen sobre el pianista (Mexique) / Tirate sul pianista (Italie) / Lőj a zongoristára (Hongrie) / Ampukaa pianistia (Finlande) / Atirem no Pianista (Brésil)
  • Autres acteurs : Serge Davri, Claude Mansard, Richard Kanayan, Jean-Jacques Aslanian, Claude Heymann, Alex Joffé, Boby Lapointe, Catherine Lutz
  • Scénaristes : François Truffaut, Marcel Moussy
  • D'après : le roman de David Goodis, Tirez sur le pianiste !
  • Monteuses : Claudine Bouché, Cécile Decugis
  • Directeur de la photographie : Raoul Coutard
  • Compositeur : Georges Delerue
  • Cheffe maquilleuse : Jacqueline Pipard
  • Chef décorateur : Jacques Mély
  • Directeur artistique : -
  • Producteur : Pierre Braunberger
  • Producteurs exécutifs : -
  • Société de production : Les Films de la Pléiade
  • Distributeur : Cocinor
  • Distributeurs reprises : Nef Diffusion (1982) / Carlotta Films (2024)
  • Dates de sortie reprises : 3 mars 1982 / 7 août 2024
  • Editeurs vidéo : Les Films de ma Vie (VHS, 1996) / Fravidis (VHS, 1999) / MK2 (DVD, 2001 ; 2008) / Carlotta Films (blu-ray, 2015) / Carlotta Films (blu-ray et 4K UHD, 2024)
  • Dates de sortie vidéo : 1996 (VHS) / 1999 (VHS) / 21 août 2001 (DVD) / 1er mars 2008 (DVD) / 4 novembre 2015 (blu-ray) / 15 octobre 2024 (Blu-ray et 4K UHD)
  • Budget : 890 063 Francs
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 962 062 entrées / 356 588 entrées
  • Box-office nord-américain / monde : -
  • Rentabilité :
  • Classification : Interdit aux moins de 18 ans à l'époque (Tous publics de nos jours)
  • Formats : 2.35 : 1 / Noir et Blanc / Son : Mono
  • Festivals : Festival du film de Londres 1960 : avant-première
  • Nominations :
  • Récompenses :
  • Illustrateur/Création graphique : © Guy Jouineau et Guy Bourduge (affiche 1960) ; Catherine Feuillie (affiche années 80) ; Affiches Brutes x Troïka (affiche reprise 2024) ; L'Etoile Graphique (jaquette blu-ray). Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Les Films de la Pléiade. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Attachés de presse : -
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Note des spectateurs :

Faux film noir, mais vrai manifeste de la Nouvelle Vague, Tirez sur le pianiste est une œuvre enthousiasmante par son extrême liberté de ton, passant allègrement du thriller à la comédie, puis au drame intimiste. Un grand Truffaut, assurément.

Synopsis : Charlie Kohler, pianiste dans un petit bar, commence à avoir des ennuis lorsque deux gangsters s’en prennent à son frère qui se réfugie sur son lieu de travail. Dans le même temps, Léna, la serveuse est amoureuse de Charlie alors que ce dernier cache un sombre passé auquel la jeune femme va tenter de le soustraire.

Un deuxième film très différent du premier pour François Truffaut

Critique : Connu pour être un critique virulent au sein de la rédaction des Cahiers du Cinéma, François Truffaut est l’un des fers de lance de ce que l’on appelle la Nouvelle Vague lorsqu’il tourne son premier long métrage de fiction, Les Quatre cents coups (1959). Contre toute attente, le film est un véritable triomphe, réunissant plus de 4 millions de spectateurs et révélant au passage la bouille de Jean-Pierre Léaud.

Pourtant, la peur de la répétition saisit le jeune cinéaste qui entend donc réaliser un second film en opposition au précédent. François Truffaut raconte dans Truffaut par Truffaut (Dominique Rabourdin, Chêne, 1985, pages 67-68) :

Au moment des Quatre Cents Coups et de l’euphorie de Cannes, j’ai dit à Braunberger, il y a un livre que j’ai très envie de faire, que j’ai beaucoup aimé pour l’avoir lu, il y a quelques années, j’ai beaucoup aimé Aznavour d’autre part aussi, si l’on peut réunir les deux choses, faisons-le. Braunberger a acheté les droits et pris un contrat avec Aznavour.

De l’art du pastiche!

Le livre en question est un roman noir américain de David Goodis intitulé Tirez sur le pianiste (Down There en V.O.). Le défi principal venait de la difficile transposition d’un roman américain dans un contexte français. Toutefois, François Truffaut ne s’est pas réellement soucié de crédibilité puisqu’il envisage surtout de tourner un pastiche du cinéma américain qu’il adore, à savoir le film noir. Détestant par-dessus tout la parodie, Truffaut injecte bien quelques passages drôles et ironiques au sein de son œuvre, mais son but était bien de rendre un hommage sincère aux grands maîtres du cinéma noir.

Alors que le cinéaste a ensuite rapidement rejoint les rangs d’un cinéma français plus traditionnel, Tirez sur le pianiste apparaît de nos jours comme un pur manifeste de la Nouvelle Vague. Effectivement, le cinéaste tourne dans la rue, dans des décors naturels, parfois avec un éclairage déficient – notamment lors de la première scène de déambulation dans les rues sombres et mal éclairées. De même, il se soucie assez peu de l’intrigue générale dont on ne comprend les tenants et aboutissants que dans les dix dernières minutes.

Les femmes toujours au centre du cinéma de Truffaut

En lieu et place d’un thriller noir, Truffaut préfère livrer une histoire d’amour malheureuse entre un homme timide qui lui ressemble beaucoup – excellent Charles Aznavour – et trois femmes différentes qui incarnent toutes une facette de l’éternel féminin. Michèle Mercier est rayonnante dans le rôle classique de la prostituée sympathique (emploi qui devait être tenu par Bernadette Lafont, trop occupée sur un tournage de Claude Chabrol) et Nicole Berger fait preuve d’une grande dignité dans celui de l’épouse qui se sacrifie pour que son homme obtienne du succès sur le plan artistique. Pour ce rôle, François Truffaut déclare s’être inspiré du personnage féminin du livre Le mépris de Moravia, qui sera ensuite adapté au cinéma par Jean-Luc Godard.

Tirez sur le pianiste, affiche reprise

© 1960 Les Films de la Pléiade / Affiche : Catherine Feuillie. Tous droits réservés.

Enfin, le troisième personnage féminin incarné par la fraîche Marie Dubois représente à la fois l’innocence et la force de la jeunesse. On notera d’ailleurs que les deux dernières femmes citées incarnent aussi des figures tragiques qui émeuvent profondément, là où le protagoniste central ne fait guère que subir les événements.

Une liberté de ton typique de la Nouvelle Vague

Ce qui étonne encore de nos jours dans Tirez sur le pianiste vient de son extraordinaire liberté de ton. Truffaut n’hésite pas à passer du pur film noir à la drôlerie, voire au burlesque en l’espace d’un seul plan. Il se permet également des audaces stylistiques comme ces plans mal éclairés ou encore un montage où il s’amuse des faux raccords afin d’insuffler au film une énergie folle. Dans ce maelstrom, il insère même une séquence musicale drolatique avec l’inénarrable Boby Lapointe qui n’était pas encore connu du grand public au moment du tournage. Enfin, il constitue un improbable duo de gangsters en réunissant à l’écran Daniel Boulanger et Claude Mansard pour dynamiter le sérieux de l’œuvre.

Ainsi, François Truffaut a pu dire (source identique) :

Il ne faut pas chercher la réalité dans le Pianiste – ni dans cette famille d’Arméniens dans la neige du côté de Grenoble, ni dans ce bar de Levallois-Perret (on ne danse pas dans de tels bars) – mais simplement le plaisir de mélanger les choses pour voir si elles sont mélangeables ou non, et je crois beaucoup à cette idée de mélange qui, je crois, préside à tout.

Une œuvre novatrice qui n’a pas fait l’unanimité à sa sortie

Et de fait, à redécouvrir de nos jours restauré en 4K, c’est bien la notion de plaisir qui vient à l’esprit du cinéphile en visionnant Tirez sur le pianiste. A la fois profond, sensuel, intimiste, mais aussi drôle, amusant et même trépidant, le programme est assurément novateur pour l’époque et parfaitement revigorant encore plus de soixante ans après sa création.

Lors de sa sortie, Tirez sur le pianiste bénéficie de l’aura de Charles Aznavour qui connaît en cette année 1960 un beau succès commercial avec Le passage du Rhin (André Cayatte, 1960), sorti au début du mois de novembre. Présenté en exclusivité dans deux salles parisiennes à partir du vendredi 25 novembre 1960, le deuxième film de Truffaut réunit 25 547 mélomanes pour sa première semaine d’exploitation. La semaine suivante, le métrage conserve ses deux salles et compte encore 20 710 retardataires. Il faut attendre la troisième semaine pour que la distribution du film commence à s’élargir, mais le public commence à faire défaut. En bout de course, le long métrage va entamer une carrière parisienne sur la durée, cumulant in fine 356 588 Franciliens, ce qui en fait une déception par rapport au précédent film du cinéaste.

Une exposition en province au mois de janvier 1961

En ce qui concerne le reste de la France, Tirez sur le pianiste est davantage exploité au cours du mois de janvier 1961, alors que la carrière parisienne du film s’éteint. Les copies peuvent désormais circuler en province et le film noir arrive à la 7ème place du classement national de la semaine du 24 janvier 1961 avec déjà 275 000 spectateurs cumulés. Mais là encore, le film semble réservé à un public de cinéphiles puisqu’il circule de ville en ville, sans jamais bousculer les classements nationaux. Tirez sur le pianiste termine donc sa carrière avec 962 062 musiciens à son bord pour une 107ème place annuelle. On est donc ici très loin des 4 millions d’entrées des Quatre cents coups.

Devenu un classique sur le tard, le métrage a ensuite fait l’objet d’une reprise en salles en 1982 et dernièrement en 2024 grâce à une copie restaurée en 4K.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 23 novembre 1960

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Tirez sur le pianiste, l'affiche

© 1960 Les Films de la Pléiade / Affiche : Guy Bourduge ; Guy Jouineau. Tous droits réservés.

Biographies +

François Truffaut, Charles Aznavour, Albert Rémy, Michèle Mercier, Marie Dubois, Alice Sapritch, Daniel Boulanger, Nicole Berger

Mots clés

Cinéma français, Les classiques du cinéma français, Les films de la Nouvelle Vague, Polar français

 

Le test du blu-ray

Carlotta Films réédite ce film dans une copie restaurée en 4K. A noter l’existence d’une version en 4K UHD qui ne nous a pas été fournie. Test réalisé à partir du blu-ray finalisé.

Compléments & packaging : 4 / 5

Le long-métrage est réédité dans un format classique pour l’éditeur, à savoir un boitier blu-ray traditionnel inséré dans un fourreau très classe. En ce qui concerne les suppléments, l’éditeur a récupéré l’ensemble des bonus déjà présents sur les précédentes éditions MK2 avec une introduction de quatre minutes par Serge Toubiana, excellente pour remettre le film dans son contexte. Ensuite, l’acquéreur pourra découvrir durant trois minutes les essais de Marie Dubois qui fait preuve d’une grande spontanéité et qui dévore la caméra.

Ensuite, on découvrira deux entretiens avec François Truffaut, l’un datant de 1965 (5min) et l’autre datant de 1982 (15min) où le cinéaste revient sur le film et son rapport avec l’œuvre de David Goodis. Enfin, l’éditeur a récupéré deux commentaires audio menés à chaque fois par Serge Toubiana. Dans le premier, le moins intéressant, il est accompagné par Marie Dubois qui n’a visiblement pas grand-chose à dire, tandis que dans le second, le chef opérateur Raoul Coutard est bien plus disert, avec des précisions techniques et des anecdotes de tournage précieuses.

L’image du blu-ray : 4 / 5

Certains passages semblent parfois un peu trop sombres, mais Raoul Coutard nous explique pourquoi dans son commentaire audio. Il ne s’agit donc pas d’une erreur lors de la restauration, mais des conditions réelles liées au tournage. Autrement, la restauration 4K est de tout premier ordre avec un piqué précis, un noir et blanc bien contrasté et une réelle fluidité de l’image – malgré quelques instabilités ponctuelles. Certes, nous n’avons pas pu tester la version UHD 4K, mais le blu-ray est déjà fort bien doté.

Le son du blu-ray : 4 / 5

Là encore la restauration est effective puisque la piste en DTS-HD Master Audio mono est d’une belle clarté. Les voix sont correctement mises en avant, sauf lorsque la prise de son de l’époque n’est pas claire (mais cela respecte la volonté de réalisme des auteurs). Enfin, la jolie musique de Georges Delerue est parfaitement intégrée à l’ensemble sans aucun effet de grésillement ou de saturation.

Test blu-ray : Virgile Dumez

Tirez sur le pianiste, jaquette du blu-ray

© 1960 Les Films de la Pléiade / Design : Affiches Brutes x Troïka. Adaptation par l’Etoile Graphique. Tous droits réservés.

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Tirez sur le pianiste, affiche reprise 2024

Bande-annonce de Tirez sur le pianiste (reprise 2024)

Drame, Thriller

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