Réalisateur, scénariste, monteur et critique français naturalisé suisse, Jean-Luc Godard est né dans une famille bourgeoise protestante. Très jeune, Jean-Luc Godard déménage avec ses parents en Suisse, avant de revenir faire ses études à Paris et notamment à la Sorbonne où il étudie l’ethnologie.
Le cinéphile, critique des Cahiers du cinéma
Toutefois, Godard passe plus de temps à fréquenter la Cinémathèque française. Il y rencontre François Truffaut, Jacques Rivette et Eric Rohmer. Godard commence à signer quelques critiques de films au début des années 50, mais il devient surtout un collaborateur régulier des Cahiers du cinéma à partir de 1956. Dès le milieu des années 50, il commence à réaliser des courts-métrages dont un qu’il signe avec Truffaut (Une histoire d’eau, 1958).
À bout de souffle où la révolution esthétique en marche!
Porté par le succès rencontré par les premiers films de Truffaut et Chabrol, il parvient à monter son premier long-métrage intitulé A bout de souffle (1960). Il y rend certes hommage au thriller américain, mais il s’évertue surtout à casser les codes rigides d’un certain cinéma français. Il utilise de manière volontaire des faux raccords et des ruptures brutales de montage et initie ainsi un cinéma de la liberté stylistique. Son film divise, mais s’avère une excellente affaire avec plus de 2 millions de spectateurs dans les salles, faisant de l’acteur Jean-Paul Belmondo une star instantanée. C’est le lancement définitif du mouvement de la Nouvelle Vague qui va tout balayer sur son passage.
Le temps des chefs-d’œuvre
Il enchaîne avec Le petit soldat (1960) qui évoque la guerre d’Algérie et subit les foudres de la censure en restant interdit de projection durant trois longues années. Godard rencontre alors l’actrice Anna Karina qu’il épouse et qui devient sa muse sur plusieurs longs-métrages. C’est le temps des grands films comme Une femme est une femme (1961), Vivre sa vie (1962), Les carabiniers (1963) et surtout Le mépris (1963) où il met en scène Brigitte Bardot et Michel Piccoli dans ce qui reste comme son chef-d’œuvre absolu.
Si Bande à part (1964) et Une femme mariée (1964) sont plus intimistes, on peut leur préférer les deux œuvres marquantes tournées en 1965 : l’étonnant Alphaville (1965) qui plonge le personnage populaire de Lemmy Caution interprété par Eddie Constantine dans un univers décalé, et bien entendu le chef-d’œuvre iconoclaste Pierrot le fou (1965) où Godard retrouve Belmondo.
Ses films sont de plus en plus dingues sur le plan formel, tandis que Godard s’ouvre à la sociologie avec des œuvres plus conceptuelles et théoriques, mais aussi plus arides, comme Masculin-féminin (1966), Made in USA (1967) et Deux ou trois choses que je sais d’elle (1967).
La période maoïste et collectiviste
A partir de La Chinoise (1967), Godard opère une mutation personnelle en adoptant une posture politique d’extrême gauche. Il en profite pour épouser la jeune actrice Anne Wiazemsky. Si Week-end (1967) est encore regardable, Godard va encore radicaliser son cinéma – et son discours politique intransigeant – à partir de mai 68 où il adopte les positions idéologiques maoïstes. Il signe encore Le gai savoir (1968) et One + One (1969) avant d’intégrer un groupe de cinéastes collectivistes nommé Dziga Vertov.
Il tourne des films comme Vent d’Est (1969), Pravda (1969) ou encore Vladimir et Rosa (1970). En perdition, le cinéaste est alors victime d’un accident de moto qui l’éloigne des plateaux durant quelques années.
Il opte alors pour un nouveau travail sur la vidéo. Il travaille à cette époque avec Anne-Marie Miéville et décide de s’installer en Suisse où il développe une œuvre étrange et hermétiques comme Numéro deux (1975). Godard tourne aussi de nombreuses émissions destinées à la télévision.
Retour au cinéma pur dans les années 80
Il revient au cinéma traditionnel avec Sauve qui peut (la vie) (1979). Comme le public est au rendez-vous, il enchaîne avec Passion (1982) qui réunit Hanna Schygulla, Michel Piccoli et Isabelle Huppert pour un succès moindre. Il obtient le Lion d’or à Venise avec Prénom Carmen dont l’affiche marque par la nudité frontale de l’actrice principale Maruschka Detmers.
En 1985, Jean-Luc Godard est doublement d’actualité avec Je vous salue Marie qui fait scandale auprès des franges les plus radicales des catholiques. Enfin, Détective agite le Festival de Cannes en associant deux noms a priori antinomiques, à savoir Godard et Johnny Hallyday. Le film repart bredouille, mais fait le buzz et rencontre un succès honorable.
Godard fait le show dans les festivals
Godard se lance ensuite dans la comédie loufoque avec Soigne ta droite (1987) qu’il tourne avec le groupe Rita Mitsouko. Le film est surtout totalement hermétique. Cette même année, Godard tourne une version du King Lear (1987) financée par Menahem Golan pour une somme assez astronomique. C’est un bide sanglant car le producteur ne le diffuse quasiment pas.
Après cette expérience américaine malheureuse, Godard revient sur le devant de la scène en présentant à Cannes Nouvelle vague (1990) où Alain Delon fait son show de star. Malgré la présence de la star, le film est un nouvel échec commercial, de même que Hélas pour moi (1993) qu’il tourne avec Gérard Depardieu. Pendant cette période, Godard signe également sa série Histoire(s) de cinéma et réalise un faux autoportrait intitulé JLG / JLG (1994).
Toujours plus indépendant et hermétique depuis 1995
Finalement, Godard semble abandonner l’idée de faire tourner des stars et revient à des œuvres plus intimistes et à l’économie fragile. On lui doit encore For Ever Mozart (1996), Eloge de l’amour (2001) et Notre musique (2004) qui sont surtout des collages assez opaques, mais pas inintéressants dans leur complexité.
Le cinéaste iconoclaste et secret revient au festival de Cannes en 2010 dans la section Un certain regard avec Film Socialisme. Le long-métrage très étrange ne fédère pas le public. En 2014, Godard obtient le Prix du jury à Cannes pour Adieu au langage. Enfin, en 2018, il reçoit une Palme d’or spéciale pour Le livre d’image (2018). Désormais, plus personne ne juge vraiment les œuvres de celui qui est devenu une légende du cinéma en creusant toujours plus loin l’idée d’un cinéma expérimental sans concession.
Jean-Luc Godard décède le 13 septembre 2022 à l’âge de 91 ans. Selon la famille, il s’est éteint paisiblement à son domicile en Suisse, après avoir eu recours au suicide assisté.