Thor : Ragnarok est une comédie fantaisiste au script léger dont on peut relever le goût coloré d’une esthétique kitsch qui lui octroie une place à part dans la constellation Marvel.
Synopsis : Privé de son puissant marteau, Thor est retenu prisonnier sur une lointaine planète aux confins de l’univers. Pour sauver Asgard, il va devoir lutter contre le temps afin d’empêcher l’impitoyable Hela d’accomplir le Ragnarok – la destruction de son monde et la fin de la civilisation asgardienne. Mais pour y parvenir, il va d’abord devoir mener un combat titanesque de gladiateurs contre celui qui était autrefois son allié au sein des Avengers : l’incroyable Hulk…
Un script périmé dans un univers de science-fiction kitsch
Critique : La succession des produits Marvel, à raison de deux ou trois par an, ne laisse que peu de place à l’originalité. A l’image des feuilletons télévisés, increvables et inlassablement identiques, les Avengers tissent leur toile avec le désir de satisfaire les spectateurs peu adeptes des tumultes du changement. Aussi, l’on se rend à la troisième aventure solo de Thor persuadé que le script sera forcément peu ou prou similaire aux précédents. Et il en sera ainsi. Extinction des civilisations, problématique familiale qui inclut désormais une déesse maléfique, références mythologiques transposées dans l’espace… tout ce qui est raconté dans Thor : Ragnarok a déjà été évoqué dans les autres films Marvel ou DC avec plus ou moins de bonheur.
Peu importe, on savoure le retour à la science-fiction du super-héros au marteau, qui était devenu un balourd terrestre dans des décors urbains tout juste bons à souffler du building. Ici point de centre-ville à démolir, le décor d’heroic fantasy spatial, aux proportions loin d’être épiques mais toujours savoureusement cinégéniques, compense le manque de bonheur du script.
Thor : Ragnarok, le Flash Gordon des années 2010
Le cinéaste Taika Waititi a une vision globalement enthousiasmante, qui l’emporte sur l’esthétique générique des Marvel, à savoir insuffler une identité visuelle, notamment dans le choix douteux, quoique référentiel (Flash Gordon, le naveton eighties, vous remettez ?), d’une esthétique kitsch qui surprend, mais aussi ravit. Dans ce spectacle pétaradant au goût prononcé pour les couleurs criardes, l’empreinte de Thor : Ragnarok à la décennie flash se retrouve aussi dans l’appareillage musical, comme la bande-annonce le laissait entendre. On retrouve bien là l’univers de Waititi qui provient du documenteur hilarant, Vampires en toute intimité, trouvant matière à étancher sa passion pour la grosse déconne qui tache. Le Néo-Zélandais parvient à imposer une dose de délire atypique dans ses excès, mais qui compense avec saveur les rebondissements narratifs ronflants.
Prévu comme étant les retrouvailles avec le personnage de Hulk, que l’on avait perdu de vue dans les derniers Avengers, ce nouveau chapitre de l’univers cinématique Marvel a beau insérer une séquence avec Doctor Strange et mentionner l’action des super-héros sur Terre, Thor : Ragnarok s’offre en priorité aux vrais fans de la divinité blonde, quand Captain America : Civil War apparaissait comme une extension évidente des deux Avengers. Thor : Ragnarok est donc un vrai film du terroir, du cru d’Asgard ou plutôt en mode prisonnier sur une planète extra-terrestre.
Des guest stars qui cachetonnent
Par conséquent, on retrouve un Thor humoriste, toujours prêt à foudroyer l’audience de son tonnerre comique, plutôt déplacé par moment, car Waititi n’est pas là pour émousser les propos et lisser l’incorrection virile. La comédie va bien au frère de Loki, notamment dans le binôme inattendu qu’il incarne avec The Hulk/Bruce Banner. Si ce dernier, baudruche pas toujours au point dans les FX, ne nous passionne toujours pas après des tonnes d’apparitions ratées au cinéma, dans le cadre d’un buddy movie extra-terrestre, on peut lui reconnaître être à l’origine de quelques moments salvateurs, bien plus en tout cas que ce qu’apporte l’affluence de guest stars luxueuses. De nombreux grands noms sont venus se greffer au programme pour un bon chèque : Idris Elba, inutile et mal grimé évoquant les rastas de Battlefield Earth, Cate Blanchett en grande méchante qui ne rentrera pas dans le Panthéon hanté par Nicholson et Heath Ledger, Anthony Hopkins hors de son élément grandiose, Karl Urban cabotin, et Jeff Goldblum badin, mais qui a prouvé depuis des décennies ses limites en tant que comédien. Euphémisme.
Accroché à son humour, Thor : Ragnarok égaie l’écran avec une parenté recherchée du côté des Gardiens de la Galaxie plutôt que des sempiternels Avengers. Pour son refus du sérieux et son traitement avéré contre la morosité, on ne le déconseillera pas. On n’en fera pas non plus un impératif de consommation. En creusant bien, il y a toujours bien mieux à voir.