Provincia violenta est un poliziottesco de bas étage, souffrant d’un script léger, d’une production au rabais et d’un acteur principal sans aucun charisme dont ce fut le chant du cygne sur grand écran. Dispensable.
Synopsis : Réprimandé pour ses méthodes trop violentes, le capitaine des carabiniers Franco Sereni, décide de démissionner après que son supérieur l’a incité à prendre un congé prolongé. Contacté peu après par son amie Nadia, celle-ci le conduit à l’Hôtel Bellavista, centre d’un réseau de chantage, de prostitution et d’un trafic de drogue mené par Flavia. Décidé à démanteler l’organisation, Serini croise bientôt les pas du commissaire Righi et d’un tueur, bien décidés à contrecarrer son enquête.
Provincia violenta, un sous-Maurizio Merli
Critique : Au milieu des années 70, alors que sévissent les « années de plomb », le genre du poliziottesco connaît une popularité qui constitue un nouveau filon à exploiter pour les producteurs italiens, d’autant qu’ils constatent l’essoufflement parallèle du western spaghetti et du giallo. Après avoir lui-même contribué à exploiter ces filons, le cinéaste Mario Bianchi se lance finalement dans le poliziottesco avec La banda Vallanzasca (1977), immédiatement suivi par Provincia violenta (1978).
Les amateurs de poliziottesco noteront que les producteurs sans scrupule utilisent ici une formule qui a connu le succès avec des titres comme Rome violente, Napoli violenta (Opération casseurs), Milano violenta (Commando terreur) et Torino violenta (Le justicier défie la ville), la plupart interprétés par Maurizio Merli entre 1976 et 1977. Avec Provincia violenta, il s’agissait donc de profiter de la mode d’un titre, tout en offrant le rôle principal à un autre moustachu, cette fois-ci Calogero Caruana.
Un acteur principal à la peine au cœur d’une histoire inutilement alambiquée
Toute l’entreprise repose donc sur une supercherie savamment orchestrée puisque le long métrage est quasiment intégralement situé à Rome (on repassera donc pour son aspect provincial), tandis que le second couteau Calogero Caruana (ici crédité Lino Caruana) n’a aucunement les épaules pour porter à lui seul un film d’action. Effectivement, son jeu est encore plus limité que celui de Maurizio Merli et son physique quelque peu chétif correspond davantage à des emplois de Mexicains dans les westerns, et non à celui d’un policier calqué sur l’inspecteur Harry ou sur les vigilantes incarnés par Charles Bronson.
Ainsi, dès le départ, Provincia violenta part avec un sérieux handicap puisque le héros n’est aucunement crédible. Ensuite, le scénario écrit par Mario Bianchi s’avère inutilement compliqué pour se résumer à une simple histoire de chantage et de prostitution gravitant autour d’un hôtel qui sert de plaque tournante. Tout ceci est éventé dès les premières minutes du film et le but du script est de multiplier les morts violentes envers ceux qui empêchent le trafic de se dérouler sans encombre. Au milieu, le policier qui a été mis sur la touche à cause de ses tendances psychotiques – il tire avant de discuter – semble quelque peu dépassé par les événements et comprend tout ce qui se passe un bon quart d’heure après le spectateur.
De l’action, mais réalisée de manière poussive
Certes, Mario Bianchi a tenu à donner au spectateur ce qu’il est venu chercher en multipliant les scènes d’action, mais la plupart des combats sont mal réglés et le cinéaste a trop souvent recours à l’accélération artificielle du défilement des images pour donner une allure trépidante à ses poursuites. Malheureusement, cela occasionne plutôt quelques fous rires tant la méthode se rapproche de la série comique Benny Hill. En fait, malgré un montage très resserré, le spectateur s’ennuie par la faute d’un script mal charpenté et d’une réalisation peu inspirée.
Pour la défense de Mario Bianchi, on peut signaler que Provincia violenta n’a pas dû coûter bien cher si l’on en juge par ses décors d’une pauvreté affligeante, avec des tentures sur les murs pour camoufler la misère. Mais à aucun moment le cinéaste ne parvient à dissimuler le statut de série B, voire Z, du produit en question. Dans ce désert visuel, le bisseux pourra toujours trouver intéressante la prestation d’Al Cliver (L’enfer des zombies, L’au-delà de Lucio Fulci) en exécuteur qui prend un malin plaisir à maltraiter les femmes. Enfin, Richard Harrison vient cachetonner le temps de quelques scènes où il n’a pas à forcer son talent en grand méchant de service.
Seule la musique parvient à sauver les meubles
Finalement, le seul véritable point positif de Provincia violenta vient de sa partition musicale de Stelvio Cipriani qui permet de sublimer à chaque instant la pauvreté des images composées par Mario Bianchi et son chef opérateur Umberto Galeassi. Comme souvent dans le bis transalpin, la musique viendra compenser les énormes faiblesses d’un produit bas de gamme qui a d’ailleurs enterré la carrière de l’acteur Calogero Caruana. En ce qui concerne Mario Bianchi, celui-ci a glissé progressivement vers la pornographie, devenant un pourvoyeur particulièrement généreux de films X avec notamment la star Rocco Siffredi.
Gros échec commercial et artistique, Provincia violenta est sorti en Italie en janvier 1978, mais ne s’est pas vendu en France où le métrage est demeuré inédit jusqu’à l’exhumation effectuée par Le Chat qui Fume dans un blu-ray correct sorti en décembre 2024. Le long métrage, lui, n’a guère à offrir si ce n’est de contenter les complétistes en matière de cinéma bis européen.
Critique de Virgile Dumez
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Al Cliver, Richard Harrison, Claudio Fragasso, Mario Bianchi, Calogero Caruana, Antonella Dogan, Alicia Leoni
Mots clés
Cinéma bis italien, Poliziottesco, La prostitution au cinéma, Le chantage au cinéma, Vigilante Movies