L’enfer des zombies – Zombi 2 : la critique du film (1980)

Epouvante-Horreur, Film de zombies, Gore | 1h31min
Note de la rédaction :
8/10
8
L'enfer des zombies, l'affiche française du Lucio Fulci

  • Réalisateur : Lucio Fulci
  • Acteurs : Al Cliver, Tisa Farrow, Ian McCulloch, Richard Johnson, Auretta Gay, Olga Karlatos, Alberto Dell’Acqua, Stefania D’Amario
  • Date de sortie: 13 Fév 1980
  • Nationalité : Italien
  • Titre original : Zombi 2
  • Scénario : Elisa Briganti et Dardano Sacchetti (non crédité)
  • Directeur de la photographie : Sergio Salvati
  • Musique : Giorgio Cascio (crédité : Giorgio Tucci) et Fabio Frizzi
  • Distributeur : UGC Distribution
  • Editeur vidéo (VHS) : South Pacific Vidéo (première édition), Carrère Vidéo Distribution (Lumières)
  • Editeur vidéo (Mediabook) : Artus Films
  • Sortie vidéo (Mediabook) : Le 2 mai 2018
  • Box-office France / Paris-périphérie : 290 648 entrées / 76 357 entrées
  • Classification : Interdit aux moins de 16 ans
Note des spectateurs :

Premier vrai film gore de Lucio Fulci, L’enfer des zombies est une œuvre majeure du cinéma horrifique italien par son ambiance crépusculaire, ses moments de pure terreur et ses excès graphiques inégalés. Un must.

Synopsis : Un navire accoste au port de New York sans âme qui vive, à l’exception d’un zombie qui attaque deux des Gardes côtes. La fille du propriétaire du bateau, Anne Bowles, interroge les policiers présents sur la scène du crime afin d’obtenir des informations sur son père, qui se trouvait aux Antilles. Avec l’aide du journaliste Peter West, ils décident d’aller enquêter sur place. Ils se rendent sur l’île de Matu avec Brian Hull et Susan Barrett. Ils y rencontrent le docteur David Menard, qui tente d’inventer un remède contre une maladie qui ramène les morts à la vie, les changeant en zombies cannibales.

Premiers pas dans l’horreur pure pour Lucio Fulci

Critique : Lorsque le scénariste Dardano Sacchetti signe le script de L’enfer des zombies (1979) – pour lequel il n’est pas crédité selon sa volonté – il s’inspire essentiellement des films d’aventures et d’angoisse des années 40 et notamment du travail de Jacques Tourneur. Il mélange donc adroitement des éléments issus de Vaudou (Tourneur, 1943) et de L’île du docteur Moreau (Erle C. Kenton, 1932) qui vient d’ailleurs de faire l’objet d’un remake éponyme par Don Taylor en 1977.

Afin de mettre en boîte ce long-métrage horrifique, les producteurs pensent d’abord à Enzo G. Castellari, mais celui-ci n’apprécie guère le genre et propose le nom de Lucio Fulci. Ce dernier a déjà tourné quelques thrillers dont l’ambiance se rapproche du film d’horreur, avec une prédilection pour les détails macabres (Le venin de la peur, La longue nuit de l’exorcisme ou encore L’emmurée vivante). Il semble donc un choix logique et L’enfer des zombies fera l’effet d’une véritable épiphanie artistique pour Fulci qui deviendra dès lors le roi incontesté du macabre.

L'enfer des zombies, l'affiche italienne

© 1979 Variety Film. Tous droits réservés.

Aux origines du vaudou

Toutefois, alors qu’une grande partie du film est déjà en boîte, le Zombie de George A. Romero sort sur les écrans du monde entier et bouleverse à la fois le cinéma de genre par ses excès graphiques, mais aussi par son succès au box-office. Il n’en fallait pas moins pour que les producteurs – toujours à l’affût d’un bon coup, même malhonnête – décident de tourner des scènes additionnelles à New York (le prologue et la fin) et de titrer le film Zombi 2, alors qu’il ne s’agit aucunement de la suite de l’œuvre de Romero. Tout ceci se faisant sans l’accord de l’intéressé, ni même celui de Lucio Fulci. Pourtant, ce subterfuge a permis au film d’exister et de faire connaître la patte authentiquement démente du réalisateur.

Loin de n’être qu’une imitation de bas étage, L’enfer des zombies a tout d’abord le grand mérite de revenir aux origines vaudou du zombi. Certes, de grandes libertés sont prises vis-à-vis de ce mythe puisque les auteurs ont intégrés ici des éléments inventés par Romero, comme le fait que le zombi se nourrit de chair humaine et que l’on doit lui tirer dans la tête pour qu’il soit stoppé définitivement. Pour autant, les goules de Fulci sont davantage des cadavres en décomposition qui semblent vraiment sortir de terre, avec des détails croustillants comme la présence de vers et de fluides putrides qui dégoulinent de leurs membres décatis.

De l’angoisse et des tripes

Les monstres provoquent à la fois l’effroi et le dégoût du spectateur. Car la marque de fabrique de Fulci est de parvenir à faire peur grâce à une ambiance stressante et cauchemardesque, tout en montrant un maximum de tripes et de gore à l’écran. On note également une tendance au sadisme, comme avec l’énucléation de la femme du docteur, un moment d’anthologie qui tient à la fois du suspense, du voyeurisme et de l’horreur graphique.

Avec fort peu de moyens, le cinéaste parvient à donner l’impression que le monde entier est en train de sombrer, ce qui est renforcé par la superbe partition musicale des Goblin, tutoyant sans cesse le crépusculaire. D’une noirceur implacable, L’enfer des zombies n’est toutefois pas toujours exempt de facilités qui le rattachent au cinéma d’exploitation. Ainsi, le casting féminin est systématiquement dénudé sans raison narrative valable, ensuite les acteurs ne sont pas toujours convaincants (Ian McCulloch n’est pas particulièrement expressif, de même qu’Auretta Gay), et certaines séquences fleurent bon le cinéma bis comme cette incroyable lutte sous-marine entre un mort-vivant et un requin. Si le concept de cette scène est passablement absurde, cela donne aussi un parfum original à cette œuvre qui a lancé la mode du cinéma gore en Italie, pour le plus grand plaisir des fans du genre.

Lucio Fulci lui-même continua à œuvrer dans cette catégorie avec des films aussi culte que Frayeurs (1980) ou L’au-delà (1981). Zombi 2 constitue donc une date dans l’histoire du cinéma transalpin, et du cinéma mondial tout court.

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Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 13 février 1980

L'enfer des zombies, l'affiche française du Lucio Fulci

© 1979 Variety Film / Illustrateur : Landi. Tous droits réservés.

Le test blu-ray

La sortie du collector de {L’enfer des zombies} en blu-ray en France est un événement. Le peu d’éditeurs spécialisés dans le cinéma de genre, et surtout le peu d’éditeurs hexagonaux à livrer des éditions de qualité sont rares.

On ne reviendra pas sur l’excellence des digipacks du Chat qui Fume, leader absolu en matière de collectors, ni sur les autres ? qui alignent des copies douteuses à des prix élevés. Aujourd’hui il est temps d’évoquer le cas d’Artus, éditeur sur devant l’Eternel de DVD de tous petits films, d’Eurociné, d’œuvres gothiques issues du répertoire britannique, mais qui aujourd’hui évoluent vers des éditions de plus en plus solides.

Test blu-ray de l'enfer des zombies de Lucio Fulci

© 1979 Variety Film. Tous droits réservés. © Artus Films

Artus dans la cour des grands

En 2018, l’éditeur Artus a fait fort, avec l’édition de deux fleurons en HD du cinéma d’épouvante gore italien, Frayeurs et L’Enfer des zombies. Contrairement à nos amis britanniques ou allemands, le répertoire de Fulci a rarement été exploité dans l’Hexagone. Au-delà des VHS cultes des années 80, il faut noter les éditions digipack importantes en leur temps de l’éditeur Neo Publishing, qui a eu l’audace dans les années 2000, d’exploiter le cinéma rital hardcore (des films de cannibales, des gialli…), avant de disparaître alors que le piratage et Youtube rendaient leurs efforts obsolètes.

L’enfer des zombies est à ce titre une étape essentielle pour Artus qui s’attaque au plus gros succès commercial du maître du cinéma bis italien, à savoir un savoureux ersatz de Dawn of the Dead de Romero. Les producteurs italiens, racoleurs au possible, eurent même l’audace de renommer le film Zombi 2, alors que les deux œuvres n’avaient absolument rien en commun. On pourra même découvrir plus tard, dans les années 80, un Zombi 3, co-réalisé par Bruno Mattei, Fulci étant malade, et un Zombi 4 flashy en DTV, avec en star principale, Jeff Stryker, acteur de porno gay connu pour son membre de 25cm !

Collection personnelle de Lucio Fulci

Collection Lucio Fulci

Quintessence du film d’exploitation

L’enfer des Zombies ne s’appelle pas Zombie Flesh eaters pour rien, au Royaume-Uni. Le film y sortit tardivement sous ce titre après avoir été interdit d’exploitation et rangé parmi les Video Nasties, ces parias de la VHS qui connurent une exploitation chaotique, dans des versions ultra-cut, sous le règne ultra-conservateur de Margaret Thatcher.

L’enfer vaudou proposé par Fulci, œuvre anthropophage, surfait sur tous les malaises de son temps. Ouverture dans un New York brumeux, celui crasseux de son époque, jouant sur l’exotisme vaudou qui n’aurait pas été de mauvais goût dans un mondo, le film exploitait la terreur sous-marine avec une jeune femme mi-nue, mi-basanée, attaquée par un zombie aquatique, lui-même dévoré par un squale, lors d’un combat au corps à corps entre le requin et le Bizom. Les plans dégueulasses, dus au génie du maquilleur local, Gianetto de Rossi, s’inspirait du cinéma anthropophage en jungle profonde, dont le cinéma italien pullulait déjà au-début des années 70, bien avant Cannibal Holocaust. Fulci, en quête d’un deuxième souffle dans sa carrière, après une série de thrillers psychédéliques, n’avait aucun mal à insérer le plus outrancier du gore (énucléations…), mais toujours en greffant à l’intrigue son atmosphère du macabre qui contre-balançait le manque de discours social.

Putride et morbide, l’atmosphère avant le sous-texte

Le roi du cinéma putride, pourtant issu de la comédie, avait toujours su imposer un goût certain pour le morbide y compris dans ces films hors genres. L’atmosphère de L’Enfer des zombies est imparable : susciter l’effroi et, pourquoi pas, une certaine fascination pour la beauté morbide, dans un décor exotique, de plage et de sable. Pour une œuvre d’épouvante, l’audace va à l’encontre des clichés, le gros du film se déroulant sous un soleil écrasant…

Suite au succès tonitruant de cette invasion de macchabées, Fulci réalisa une trilogie remarquable autour des portes de l’enfer, avec L’au-delà, Frayeurs, et La Maison près du cimetière, trois réussites qui mériteraient autant d’égards en blu-ray, en France, que L’Enfer des zombies sur cette présente édition. Beaucoup de nanars seront réalisés par la suite exploitant goulument la porte de l’enfer ouverte par Fulci revigoré, la cinquantaine passée, notamment le très proche La Terreur des Zombies, mais aussi Le Manoir de la terreur, et aussi les marrants Killing Birds, aka L’attaque des morts vivants et Virus Cannibales, sans oublier L’avion de l’apocalypse. Une grande ère pour le nanar rital dont on se repaît toujours avec le même plaisir, alors que les éditions blu-ray se multiplient aux USA et dans les grands marchés européens, mais toujours absents chez nous.

L'enfer des Zombies jaquette Artus

© 1979 Variety Film. Tous droits réservés. © Artus Films

Quid de l’édition blu-ray d’Artus ?

On reprend point par point tous les éléments, afin de rendre compte ou non de la nécessité d’achat…

Design : 5 / 5

Superbe édition mediabook, épaisse de 1.5cm, qui invite à la collection et à l’achat compulsif. Couverture cartonnée, au touché luxueux, avec un design original qui ne reprend à notre connaissance aucune affiche existante. Le ton jaune et rouge donne une approche nouvelle au film. C’est l’écrin parfait pour les collectionneurs.

Compléments : 4 / 5

Couverture dédicacée par Lucio Fulci d'un numéro de The Dark Side

Numéro du magazine The Dark Side dédicacé par Lucio Fulci – Copyrights : Frédéric Mignard

Deux types de bonus, l’essentiel, un livre, un vrai sur le maître Fulci, 80 pages entièrement en couleur, avec des illustrations d’affiches de films d’épouvante italien à quasiment chaque page. On ne parle pas de livret, mais d’un ouvrage essentiel pour tout collectionneur, fan du cinéaste, et surtout pour la nouvelle génération qui n’a que peu connu les œuvres de maître Fulci sur un corps dépecé.

La partie audiovisuelle des suppléments a le mérite de privilégier les documents produits par Artus. Rien n’appartient à des ayant-droits étrangers, tout est inédit. Au vu du prix des documents vidéo, on ne pourra jamais dire qu’il s’agit d’une édition ultime en matière de bonus, puisque la quantité est sûrement moindre que sur certains blu-rays étrangers. L’interview du spécialiste français de Fulci, Lionel Vannier, est un peu statique et manque de rythme (18mn) ; Alain Petit qui revient sur la diffusion exceptionnelle du film dans l’émission de Canal +, Quartier Interdit, manque parfois de précision et fait de Jean-Pierre Donnet, présentateur et producteur, un néophyte dans le domaine de l’horreur, tant il semblait ignorant de ce qu’il diffusait vraiment sur la chaîne payante… On préfèrera les deux interviews, celles de Maurizio Trani (maquilleur) et de Dardani Saccheti (scénariste), les plus à-mêmes d’évoquer le film et le cinéaste.

Deux bandes-annonces d’époque, en VO et VF achèvent la section suppléments. Le tout est assez canonique.

On aurait peut-être préféré un document sur les zombies chez Fulci, sur L’enfer des Zombies et les coupes subies, la censure en France et au Royaume-Uni, sur l’exploitation du film au cinéma, la chronologie des différentes sorties du métrage au fil des supports, le box-office, les lieux cultes qui ont diffusé ce monument… Rien sur le marketing d’époque, comment le film a été distribué par une major (UGC)… Il manque un authentique retour à l’exploitation française du film qui, finalement, est assez méconnue. Mais cette remarque tient peut-être du fantasme personnel, on n’en tiendra donc pas vraiment rigueur à Artus qui a fait un beau boulot pour remplir sa galette.

L’image : 4 /5

La copie restaurée n’est pas parfaite et pour cause, la copie originelle du film, avec ses surexpositions et ses caprices de pellicule ne l’était pas non plus. En revanche, le master retravaillé est beau, offrant la plupart du temps texture et profondeur, là où toutes les éditions précédentes en France ne vendaient que de l’approximation et du sombre. Le rendu visuel est l’une des nombreuses réussites de cette édition, car même si perfectible, il permet d’appréhender le chef-d’œuvre de Fulci de la façon la plus juste, sublimant l’esthétique et l’atmosphère d’une œuvre graphiquement puissante. On retrouve évidemment le format original en 2.35.

Le son : 4 / 5

Deux pistes audio sont proposées en DTS 2.0. Une façon de réparer l’absurdité des édition britannique Arrows, coupables d’avoir transformé du mono en 7.1 sur Frayeurs ou en 5.1 DTS HD Master sur L’Au-delà. Au final, les pistes sont quelque peu équivalentes. Le doublage d’époque est loin d’être médiocre et la piste italienne originale (mais non internationale, le film étant une production multi-langues, incluant principalement de l’anglais) assez juste également. La puissance n’est pas poussée au paroxysme et l’on peut trouver le son parfois un peu diffus. Rien de rédhibitoire au royaume des cadavres eighties remis sur pieds par la haute définition.

Test blu-ray : Frédéric Mignard

Les films de zombies au cinéma

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L'enfer des zombies, l'affiche française du Lucio Fulci

Bande-annonce de L'Enfer des zombies

Epouvante-Horreur, Film de zombies, Gore

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