Après deux ans de post-production, en 2017 Geostorm ne dérogea pas à la règle des films catastrophes moribonds de l’époque. Gonflé d’inepties et surtout bouffi de bêtises, l’accident industriel a eu l’audace de mélanger le thriller politique à une imagerie de catastrophes naturelles. Le tout avec un sens de la caractérisation balourde, on en reste encore pantois.
Synopsis : Grâce à une coopération sans précédent entre États, un réseau de satellites contrôle désormais le climat et protège les populations. Jusqu’à ce que le dispositif se dérègle… S’agit-il d’un complot ou d’une faille dans le système ? S’engage alors une véritable course contre la montre…
Le cadeau de Warner au producteur d’Independence Day
Critique : Si la genèse de Geostorm remonte en 2011, son accomplissement fut complexe. Il s’agit pour Warner d’accorder à Dean Devlin, producteur et scénariste des plus gros succès de Roland Emmerich, dont Independence Day, de passer à la réalisation. Malheureusement pour Warner Bros Entertainment et Skydance Media, les premiers résultats à la sortie du tournage, au tout début de l’année 2015, sont exécrables. Le premier montage est irregardable selon les sources de Deadline.
Alors que Dean Devlin, démarre une seconde réalisation, à petit budget (Bad Samaritan), Warner demande du renfort extérieur pour limiter la casse, notamment au nabab Jerry Bruckheimer (Top Gun, Pïrates des Caraïbes). Le film, onéreux, qui devait récompenser l’attachement d’un homme pour le cinéma catastrophe, devient la catastrophe tant redoutée, quand Warner traverse déjà l’orage de Black Storm (2014).
Deux années de post-productions pour corriger un accident industriel
A l’arrivée, s’il en porte encore le nom de Devlin à la réalisation, Geostorm dans sa version définitive, ne sera plus vraiment le film de son auteur qui acceptera de le laisser aux mains d’autres scénaristes et d’un autre réalisateur, en l’occurrence Danny Cannon (Judge Dredd, Souviens-toi… l’été dernier 2) pour essayer de sauver une entreprise de l’inévitable fiasco. Après tout, World War Z avec Brad Pitt, avant de devenir un énorme succès mondial en 2013, avait traversé des turbulences identiques, et avait été sauvé par 40 minutes de reshooting et deux passages au montage, après un premier essai foireux.
Désastres climatiques et rejet du film catastrophe au box-office
Pour Geostorm, ce jeu coûteux va prendre près de trois ans, et rendre le budget hors de contrôle. Trois années pendant lesquelles le climat s’affole sur la planète et propose son lot d’authentiques catastrophes qui agitent les consciences et ringardisent un peu plus un genre cinématographique dépassé par la réalité : le Texas, la Floride, et Puerto Rico en 2017, ont donné des sueurs froides supplémentaires au studio Warner qui n’avait pas besoin de cela à un mois de la sortie définitive du Geostorm.
En conséquence, le distributeur limite la promo, le marketing et sort la chose informe sans même la montrer à la presse, aux USA comme en France, et à raison. Le résultat artistique est nul et l’Amérique sanctionne lourdement la bévue au box-office, le film de 120M$ (au minimum !) dépassera à peine les 30M$ en fin de carrière sur le sol étasunien.
Peut-on sauver ce qui n’a pas vocation à l’être ?
Que comprendre du montage proposé aujourd’hui? Que l’on ne peut pas toujours sauver ce qui n’a pas vocation à l’être. Le film catastrophe où l’homme détient le pouvoir de faire et défaire la météo via le dispositif Dutch Boy, à savoir des satellites surpuissants, développés par les grandes démocraties mondiales préfigurait-il la capacité de nuisance du gourou Elon Musk? Pourquoi pas, mais hors de toute crédibilité, Geostorm est un cumulard de tout ce qui consterne dans pareille production à grand spectacle. A commencer son scénario.
Un nanar obsolète dans l’œil du cyclone
Les sempiternelles scènes de destructions massives, trop ponctuelles, tournées à renfort de CGI voyants, s’attardent souvent sur un témoin qui va tenter de s’échapper au milieu du chaos apocalyptique, sans aucune compassion et aucun regard pour les vies ôtées autour. A cette trame simpliste, les scénaristes ont greffé une histoire de sabotage politique abracadabrante, qui va donner l’impression d’un thriller poussif, hors sujet, qui détourne un peu plus l’œuvre de son objectif, à savoir en mettre les plein les mirettes.
Des personnages effarants dans un chaos constant
Et que dire des inserts de purs moments de comédie pour relâcher la tension par l’humour, si ce n’est qu’ils sont inopportuns et déplacés ? Ils nous accablent. Le ton obsolète du nanar catastrophe des années 90 (Volcano, Le Pic de Dante) s’accompagne d’une caractérisation effarante de personnages joués mollement par des acteurs sidérés eux-mêmes par les clichés qu’on leur demande d’incarner… De Gerard Butler, Jim Sturgess, à Abbie Cornish, en passant par Ed Harris, en quelque sorte des seconds couteaux incapables de porter une œuvre d’action sur leurs épaules, la dépression n’est pas que météorologique. Le personnage de Butler, en scientifique déchu que l’on va cueillir aux fins fonds de sa cambrousse, dans sa caravane, pour sauver la planète, relève de la caractérisation du siècle dernier que l’on n’espérait ne plus retrouver un jour en salle.
Un aperçu de ce qui allait attendre Moonfall d’Emmerich en 2022
Noyé dans un jargon spécialisé pour prétendre à la complexité, Geostorm s’abîme surtout dans les tourments d’un script téléphoné, à l’image du notoire Fusion (The Core en VO) dont on retrouve à peu près le niveau historiquement nul. Tout corrobore la réalité du réchauffement climatique qui laissera en 2022 Roland Emmerich et son Moonfall sur la paille. Quand la mauvaise météo s’abat sur un film, rien ne peut sauver l’entreprise commerciale et opportuniste qui a voulu jouer avec le feu.
RIP. Le genre catastrophe est bel et bien mort. On ne versera pas de larmes sur ses ruines. Les sueurs et la torpeur à l’écoute des informations climatiques des chaînes d’information en continu ont succédé à la fiction. On laissera Geostorm éventuellement irriter les spectateurs de TF1 lors d’un prime. C’est tout ce qu’il vaut cinq ans après son bide.
Les sorties de la semaine du 1er novembre 2017
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Gerard Butler, Jim Sturgess, Abbie Cornish, Abigail Breslin,Talitha Bateman, Eugenio Derbez, Zazie Beetz, Ed Harris, Andy Garcia